# 25-07-58 1:25 *Ce numéro paraît avec quelques jours d'avance et une présentation un peu inhabituelle. Il nous a semblé utile de soumettre à l'attention de nos lecteurs, dès maintenant, un certain nombre de réflexions concernant plusieurs points, trop oubliés, de la doctrine catholique, qui trouvent une application immédiate dans les circonstances présentes.* *Puisse ce numéro apporter ainsi sa contribution à l'unité catholique, à la paix civile, au salut de la France.* 2:25 ### La communauté catholique dans la nation française DEPUIS DOUZE ANNÉES, l'armée de la France était au combat. Pendant douze années, l'appareil du Parti communiste, ouvertement, impunément, propageait et mettait en œuvre, par tous les moyens, le mot d'ordre de « *travailler à la défaite de l'armée française partout où elle se bat* ». Depuis douze années, l'armée de la France supportait en silence cette subversion fondamentale et permanente. Pendant douze années, tous ceux qui étaient tués à l'ennemi étaient, en même temps, trahis par la carence des pouvoirs constitués. Après un martyre de douze années, l'armée de la France, le 13 mai 1958, s'est trouvée dans la situation d'assumer en Algérie des pouvoirs qui, en Métropole, atteignaient le dernier stade de leur décomposition interne. Elle s'est alors, pour la première fois, tournée vers la République, non pour la renverser, ni pour lui demander des comptes concernant le passé, mais un gouvernement pour l'avenir. Ceux qui ont traité de factieux les chefs militaires sont les mêmes qui, pendant douze années, n'avaient point aperçu -- ou avaient secondé -- le libre cours laissé à la trahison du Parti communiste et des factions annexes. 3:25 Les pouvoirs de la République, après avoir sacrifié chaque année une promotion entière de Saint-Cyriens, après avoir maintenu hors de leurs foyers, sur les champs de bataille, pendant plus de dix ans, les soldats de métier et d'innombrables volontaires qui avaient choisi de donner leur vie pour la France, avaient fait appel au contingent. Même après que le contingent eût été engagé dans la bataille, les pouvoirs de la République ont accepté que des factions politiques diffament, déshonorent et combattent les Français auxquels ils réclamaient le sacrifice de la vie. Quand il est établi qu'une telle situation n'est pas occasionnelle, mais que les pouvoirs publics s'y installent et s'y habituent, et quand cette situation se prolonge douze années s-ans aucun signe ni aucune velléité d'y mettre un terme, la défaillance fondamentale qui se manifeste ainsi équivaut à une déchéance. L'armée de la France a pris acte du désordre qui existait dans nos institutions et nos mœurs politiques depuis douze ans. Elle a demandé qu'il cesse. Elle ne s'est pas constituée en gouvernement. Elle a demandé qu'un gouvernement soit enfin constitué par la République, selon les procédures et avec les hommes dont la République pouvait encore disposer. Depuis douze années sans interruption, l'armée de la France est au combat contre un ennemi suscité, armé, excité ou dirigé par le communisme soviétique. Et depuis douze années, le communisme, sur notre propre sol, dans le dos de l'armée, travaille librement à sa diffamation, à son déshonneur, à sa défaite. Douze années, l'épreuve est longue, l'expérience est plus que valable. Aurait-il fallu continuer ainsi et attendre encore douze autres années avant de constater que la France n'était plus gouvernée ? \*\*\* 4:25 CERTES, nous comprenons très bien quelles douloureuses réactions sentimentales peut provoquer une telle constatation, devenue irrécusable, et sanctionnée par l'événement. Des préférences légitimes s'y trouvent profondément chagrinées. L'attachement non pas même à la République, car la République n'est ni abolie ni interrompue, -- mais à une certaine forme parlementaire de gouvernement, -- cet attachement est intimement blessé. Il s'agit pourtant de préférences et non d'absolus. Les tristesses ou les rancœurs, à plus forte raison les passions et les entêtements, ne doivent pas obséder ceux qui les éprouvent. Au-dessus des divergences et préférences concernant la forme du gouvernement, il existe autre chose, qui n'est plus de l'ordre des préférences mais de l'ordre des devoirs : la vérité, la justice, le service du bien commun. N'allons pas confondre ces deux plans, ni donner une priorité indue à celui qui est secondaire ou même accessoire. Quelques éclaircissements paraissent nécessaires. Nous croyons les avoir constamment donnés, autant qu'il est en nous, depuis plus de deux ans que la revue *Itinéraires* poursuit son effort de clarification, de vérité, d'unité. Nous croyons aussi qu'il est opportun d'en rassembler en quelque sorte l'essentiel pour la saison présente. \*\*\* #### Changer de régime dans la paix civile. Depuis 1789, la France a changé de constitution ou de régime, avec ou sans révolution, plus d'une dizaine de fois. 5:25 Est-il au-dessus de nos forces de vivre un changement -- un de plus -- un changement de régime dans la paix des esprits et des cœurs, dans l'union des bonnes volontés, sans en faire un drame, ni une querelle de famille, ni une guerre civile ouverte ou larvée ? Ce n'est point, en tout cas, au-dessus ni en dehors de la vocation du chrétien. Il ne s'agit pas de savoir si les changements récents, présents ou prochains dans le fonctionnement de nos institutions politiques plaisent ou déplaisent à nos préférences permises. Il s'agit de savoir si, quel que soit le régime en vigueur, et sans abdiquer aucun désir de le réformer, de le transformer, ou d'en restaurer un autre, nous serons capables de nous réunir sur des préoccupations beaucoup plus fondamentales. Il s'agit de savoir si, à l'intérieur de la nation, la communauté catholique va enfin tenir son rôle, qui n'est pas de promouvoir un régime politique plutôt qu'un autre, qui n'est pas davantage de se diviser et de se déchirer sur la question du régime, mais qui est beaucoup plus important et décisif. \*\*\* La communauté catholique, dans ses organes d'expression et d'influence, c'est-à-dire avant tout dans sa presse, manque à sa vocation de lumière, d'unité et de paix. Des journaux que nous ne nommerons pas, car il convient de laisser une porte ouverte pour leur ralliement à l'unité catholique, au bien commun et à la patrie, ont travaillé de toutes leurs forces à la guerre civile, par des diffamations systématiques contre des catégories entières de Français, distillant ainsi la haine politique dans les esprits et dans les cœurs. 6:25 Oh ! nous ne reprochons à aucun journal catholique d'avoir des préférences de parti, qui en elles-mêmes sont permises. Ce qui n'était pas permis et ce qui ne l'est à personne, c'est de tout y subordonner ; c'est de donner le pas à de telles préférences sur toutes les autres considérations. Ce qui n'était pas permis et ce qui ne l'est à personne, c'est, travaillant pour des options particulières et même partisanes, de ne point le confesser clairement, mais d'y travailler par l'insinuation sournoise, la diffamation des personnes et la confusion des valeurs. Ce qui n'était pas permis et ce qui ne l'est à personne, c'est de formuler les exigences de l'esprit partisan sous le signe de la croix. \*\*\* Il est vrai que la doctrine catholique réclame l'obéissance aux pouvoirs constitués. A condition, d'ailleurs qu'il y ait des pouvoirs qui soient constitués, et non des impuissances se destituant elles-mêmes. Mais de toutes façons, ce n'est pas, il s'en faut, le seul devoir civique qu'enseigne la doctrine catholique. Ce n'est pas la seule vérité ni le seul principe qui règle la morale politique du chrétien. Selon le Cardinal Saliège, « *l'affirmation d'un principe chrétien n'a jamais impliqué la négation d'un autre principe chrétien* ». Réduire toute la doctrine catholique en matière de morale politique au simple et seul respect des pouvoirs établis, en faire un commandement suprême et inconditionnel, devait conduire à de frénétiques absurdités, laissant dans les cœurs des amertumes et des haines qu'il eût été opportun et charitable de ne pas mettre en mouvement. \*\*\* 7:25 #### Respect -- et non idolâtrie -- des pouvoirs établis. En voilà tout de même assez. Assez que la doctrine de l'Église soit systématiquement mise entre parenthèses par ceux qui abusent du nom chrétien pour donner à la communauté catholique des orientations partisanes. Quand le pouvoir constitué devient incapable de se faire obéir et de remplir sa fonction, quand il ne peut plus éviter la guerre civile mais seulement y provoquer, le rôle d'une presse qui serait catholique et non point partisane est de comprendre et de faire comprendre, au lieu de dresser les Français les uns contre les autres, et d'exciter ses lecteurs, sans même l'écouter, contre le point de vue d'une armée qui se bat depuis douze ans et qui demande que tant de sang versé ne soit plus déshonoré en permanence. Le rôle d'une presse qui serait catholique et non point partisane n'est pas de rechercher la victoire d'une partie des Français et l'écrasement de l'autre partie, mais de travailler à la réunification nationale. Il n'est pas de s'accrocher avec sectarisme au système qui s'effondre, mais de favoriser tout ce qui peut concourir à la fondation d'un gouvernement. Dans une telle situation, la doctrine catholique eût été d'un grand secours. On ne l'a point fait entendre. La voici : « Quelle que soit la forme des pouvoirs civils dans une nation, on ne peut la considérer comme tellement définitive qu'elle doive demeurer immuable, fût-ce l'intention de ceux qui, à l'origine, l'ont déterminée (...). C'est un fait gravé cent fois dans l'histoire, que le temps, ce grand transformateur de tout ici-bas, opère dans les institutions politiques de profonds changements. 8:25 Parfois, il se borne à modifier quelque chose à la forme de gouvernement établie ; d'autres fois, il va jusqu'à substituer aux formes primitives d'autres formes totalement différentes ; sans en excepter le mode de transmission du pouvoir souverain. Ces changements politiques succèdent parfois à des crises violentes, trop souvent sanglantes, au milieu desquelles les gouvernements préexistants disparaissent en fait ; voilà l'anarchie qui domine ; bientôt, l'ordre public est bouleversé jusque dans ses fondements. Dès lors, une nécessité sociale s'impose à la nation ; elle doit sans retard pourvoir à elle-même. Comment n'aurait-elle pas le droit, et plus encore le devoir de se défendre contre un état de choses qui la trouble si profondément, et de rétablir la paix publique dans la tranquillité de l'ordre ? Or cette nécessité sociale justifie la création et l'existence des nouveaux gouvernements, quelque forme qu'ils prennent ; puisque, dans l'hypothèse où nous raisonnons, ces nouveaux gouvernements sont nécessairement requis par l'ordre public, tout ordre public étant impossible sans un gouvernement. » ([^1]) La doctrine catholique, la voici encore : « En politique plus qu'ailleurs surviennent des changements inattendus. Des monarchies colossales s'écroulent (...) : les dynasties supplantent les dynasties (...) : aux formes politiques adoptées, d'autres formes se substituent (...). 9:25 Ces changements sont loin d'être toujours légitimes à l'origine : il est même difficile qu'ils le soient. Pourtant, le critérium suprême du bien commun et de la tranquillité publique impose l'acceptation de ces nouveaux gouvernements établis en fait, à la place des gouvernements antérieurs qui, en fait, ne sont plus. Ainsi se trouvent suspendues les règles ordinaires de la transmission des pouvoirs, et il peut se faire même qu'avec le temps elles se trouvent abolies. » ([^2]) \*\*\* #### La forme du gouvernement. Il est permis aux catholiques de préférer une forme de gouvernement à une autre : il ne leur est pas permis de faire d'une telle préférence le seul principe directeur et déterminant de leur action civique, ni de s'en servir pour tracer comme une ligne de démarcation entre les « bons » et les « mauvais » citoyens, voire entre les « bons » et les « mauvais » catholiques. Il est grave, il est criminel de diviser la communauté catholique en donnant une valeur sacrée à des préférences profanes. Il est grave, il est criminel de confondre le devoir civique de servir le bien commun avec la défense inconditionnelle d'un régime politique plutôt que d'un autre. Il est grave, il est criminel de déserter la défense des valeurs proprement chrétiennes, en la *subordonnant* en fait à une option politique : 10:25 « Les hommes qui subordonneraient tout au triomphe préalable de leur parti respectif, fût-ce sous le prétexte qu'il leur paraît le plus apte à la défense religieuse, seraient dès lors convaincus de faire passer, en fait, par un funeste renversement des idées, « politique qui divise avant la religion qui unit. » ([^3]) « Il y a erreur et danger à inféoder, par principe, le catholicisme à une forme de gouvernement : erreur et danger qui sont d'autant plus grands lorsqu'on synthétise la religion avec un genre de démocratie dont les doctrines sont erronées. » ([^4]) « L'Église catholique admet n'importe quelle forme de gouvernement, pourvu que celle-ci ne soit pas en opposition avec les droits divins et humains. » ([^5]) « Il est évident pour tous que l'Église catholique, sans s'attacher à une forme de gouvernement plutôt qu'à une autre, pourvu que soient sauvegardés et protégés les droits de Dieu et de la conscience chrétienne, ne fait aucune difficulté pour s'accorder avec toutes les institutions civiles, qu'elles aient la forme royale ou républicaine, qu'elles soient sous pouvoir aristocratique ou populaire. » ([^6]) « Des diverses formes de gouvernement, pourvu qu'elles soient en elles-mêmes aptes à procurer le bien des citoyens, l'Église n'en rejette aucune : mais elle veut, et la nature s'accorde avec elle pour l'exiger, que leur institution ne viole le droit de personne et respecte particulièrement les droits de l'Église. » ([^7]) 11:25 Ce que la doctrine catholique enseigne, ce sont les principes, les devoirs, les vertus qui sont *supérieurs, antérieurs et communs* à toutes les formes de gouvernement, à tous les régimes, à tous les partis, et qui doivent s'imposer à tous. Détourner cette doctrine, détourner le nom chrétien au service d'un parti, d'un régime, d'une forme de gouvernement, c'est « *faire passer, en fait, la politique qui divise avant la religion qui unit* » ([^8]). Une communauté catholique vivante et une a pour vocation de limiter les bouleversements, les divisions, les rancœurs qui accompagnent ordinairement les changements de régime. Elle a pour vocation de maintenir les vérités, les valeurs, les réalités qui doivent demeurer intactes à travers les vicissitudes de la politique. Aujourd'hui au contraire, la communauté catholique en France a perdu, dans une trop large mesure, conscience de son unité et de son rôle d'unité. Des clans, des partis, des factions, des journaux mobilisent les valeurs chrétiennes au service de leurs combats politiques. La grave défaillance des leaders temporels du catholicisme français est évidente. \*\*\* #### La démocratie. Non, les chrétiens ne doivent ni ne peuvent être mobilisés pour la défense de la démocratie, ou d'une forme de démocratie. La démocratie n'est *rien de plus qu'une préférence permise.* Prétendre ou insinuer que les « valeurs » démocratiques auraient un lien nécessaire et indissoluble avec les valeurs chrétiennes est un abus et une forfaiture. 12:25 Prétendre ou insinuer que la justice et la liberté sont obligatoirement liées à la démocratie est un autre abus et une autre forfaiture. Le christianisme n'est ni « pour » ni « contre » la démocratie : « L'avènement de la démocratie universelle n'importe pas à l'action de l'Église dans le monde. » ([^9]) « En enseignant que la justice est compatible avec les trois formes de gouvernement que l'on sait ([^10]), Léon XIII enseignait que, sous ce rapport, la démocratie ne jouit pas d'un privilège spécial. \[Ceux qui\] prétendent le contraire, ou bien refusent d'écouter l'Église, ou bien se forment de la justice et de l'égalité un concept qui n'est pas catholique. » ([^11]) « Selon l'enseignement de l'Église, il n'est pas défendu de préférer des gouvernements modérés de forme démocratique, pourvu que reste sauve la doctrine catholique sur l'origine et l'exercice du pouvoir public. » ([^12]) 13:25 Le rôle d'une communauté catholique vivante et une n'est pas de fomenter des luttes civiles pour obtenir que la forme du gouvernement demeure ou devienne plus ou moins démocratique. Il est de sauvegarder sous TOUS LES RÉGIMES les principes et les vertus qui commandent L'ORIGINE ET L'EXERCICE DU POUVOIR PUBLIC. Une communauté catholique vivante et une n'est pas inconditionnellement *attachée* à une forme de gouvernement : chacun des chrétiens qui la composent doit au contraire être surnaturellement *détaché* à l'égard de ses propres préférences politiques. Sans un détachement de cette sorte, l'unité catholique demeure entravée, blessée, déchirée, *et sans unité catholique il n'y aura pas d'action catholique.* Le rôle d'une communauté catholique vivante et une, se trouvant en régime démocratique (ou en n'importe quel autre), n'est pas de défendre à tout prix le régime établi : il est plutôt de *défendre le pays, le pouvoir, la législation, le bien commun contre la corruption du régime quel qu'il soit.* Le régime démocratique n'est pas un absolu. Une certaine forme de démocratie parlementaire ne l'est pas non plus. Elle l'est d'autant moins qu'elle a failli à l'accomplissement de ses devoirs. Ce sont les démocrates eux-mêmes, -- c'est un démocrate aussi convaincu, aussi ardent (et même aussi exclusif) que M. Georges Hourdin qui l'a constaté, plusieurs mois avant le 13 mai : « *Pour être démocrate de tempérament et de conviction, je n'en suis pas pour autant aveugle. Il est sûr qu'une certaine forme de démocratie, la démocratie pluraliste et parlementaire, est en train d'agoniser sous nos yeux.* » ([^13]) C'est un autre démocrate, M. Hubert Beuve-Méry, qui confirme le fait : 14:25 « *Incapable de vivre décemment, la IV^e^ République n'aura pas su mourir en beauté* (...). *La IV^e^ République meurt beaucoup moins des coups qui lui sont portés que de son inaptitude a vivre.* » ([^14]) Sans doute, tout le monde ne s'en était pas aperçu tout de suite. Ce qui apparaissait au regard clairvoyant de M. Georges Hourdin dès le mois de janvier 1958, d'autres ne s'en rendirent pas compte même après le 13 mai. Ainsi s'expliquent peut-être des articles très regrettables, parus dans la presse catholique entre le 14 et le 31 mai, qui furent en fait de véritables excitations à la guerre civile. Puis ceux qui ne comprenaient rien, aveuglés souvent par leur sectarisme politique, commencèrent à comprendre et même comprirent mieux. « *On comprend mieux,* -- note M. Pierre Limagne, lui aussi démocrate résolu, -- *on comprend mieux que le régime n'est vraiment renversé par personne, qu'il finit de se désagréger : c'est à Paris le vide politique complet.* » ([^15]) Il est bien évident que le principe catholique de l'obéissance aux pouvoirs établis, -- si souvent rappelé à contresens entre le 14 et le 31 mai, -- ne va pas jusqu'à réclamer respect et fidélité à un « vide politique complet ». Et qu'en conséquence, il est parfaitement illogique, inexact et injuste de maintenir contre l'armée française l'accusation de s'être « insurgée ». Le régime républicain et démocratique tel qu'il était établi en France a lui-même abdiqué, par son impuissance à fonctionner selon ses propres institutions et ses propres mœurs politiques. Il avait ruiné simultanément et *l'autorité nécessaire* et les *libertés légitimes.* 15:25 La doctrine catholique (si on voulait bien la connaître) pourrait expliquer pourquoi et comment. Si le régime établi a échoué, ce n'est pas EN TANT QUE RÉPUBLICAIN (ou que démocratique). C'est dans la mesure où il a tourne le dos AUX PRINCIPES, AUX VALEURS, AUX VERTUS QUI SONT ANTÉRIEURS, SUPÉRIEURS ET COMMUNS A TOUTES LES FORMES DE GOUVERNEMENT. Tel est le point de vue auquel se place un regard catholique, et non partisan, pour comprendre et pour juger les péripéties politiques que traverse la France : « Divers gouvernements politiques se sont succédés en France, et chacun avec sa forme distinctive : empires, monarchies, républiques. En se renfermant dans les abstractions, on arriverait à définir quelle est la meilleure de ces formes, considérées en elles-mêmes : on peut affirmer égaiement, en toute vérité, que chacune d'elles est bonne, pourvu qu'elle sache marcher droit à sa fin, c'est-à-dire le bien commun, pour lequel l'autorité sociale est constituée. » ([^16]) Les régimes politiques ne sont pas des absolus auxquels on devrait demeurer « indéfectiblement attaché », mais des réalités relatives, plus ou moins durables, selon leur capacité à promouvoir le bien commun. C'est par rapport au bien commun, et non par rapport à une idéologie politique, qu'un regard catholique juge les formes de gouvernement. Le régime établi en France avant le 13 mai 1958 ne s'est pas effondré seulement par carence de l'autorité. Celle-ci était sans doute la plus visible et la plus immédiatement sensible. 16:25 Il est bien vrai que la crise permanente et grandissante de l'autorité centrale, son incapacité à se reprendre et à se rétablir, ont constitué l'élément immédiatement décisif de la crise finale. Une « forme de gouvernement » peut être théoriquement admirable et sentimentalement désirée : à partir du moment où, précisément, elle ne gouverne pas, elle accepte de cesser d'exister. « L'État démocratique, qu'il soit monarchique ou républicain, doit, comme n'importe quelle autre forme de gouvernement, être investi du pouvoir de commander avec une autorité vraie et effective. » ([^17]) Le régime établi en France ne manifestait pas seulement une carence de l'autorité centrale. Il manifestait une décadence *corrélative et simultanée* de l'autorité et des libertés. Plus l'État devenait politiquement impuissant, plus il devenait administrativement tyrannique. Sur cette maladie, sur cette corruption de la démocratie au XX^e^ siècle -- qui est esquissée à peu près partout, mais qui en France était poussée très loin la doctrine catholique a porté un clair diagnostic : « Une saine démocratie, fondée sur les principes immuables de la loi naturelle et des vérités révélées, sera résolument contraire à cette corruption qui attribue à la législation de l'État un pouvoir sans frein ni limites et qui, malgré de vaines apparences contraires, fait aussi du régime démocratique un pur et simple système d'absolutisme. 17:25 L'absolutisme d'État consiste dans le principe erroné que l'autorité de l'État est illimitée, et qu'en face d'elle -- même quand elle donne libre cours à ses vues despotiques, en dépassant les frontières du bien et du mal -- on n'admet aucun appel à une loi supérieure qui oblige moralement. » ([^18]) La décadence des libertés fondamentales est, corrélativement avec la carence de l'autorité, et plus encore que la carence de l'autorité, la plus grave corruption de la démocratie : « Le faux réalisme est appliqué aussi à l'actuelle structure démocratique : ses insuffisances seraient dues à de simples défauts des institutions, et ceux-ci, à leur tour, à une connaissance encore défectueuse des processus naturels du fonctionnement complexe de la machine sociale. En fait, l'État lui aussi et sa forme dépendent de la valeur morale des citoyens, et cela plus que jamais à une époque où l'État moderne, pleinement conscient de toutes les possibilités de la technique et de l'organisation, n'a que trop tendance à retirer à l'individu, pour les transférer à des institutions publiques, le souci et la responsabilité de sa propre vie. Une démocratie moderne ainsi constituée devra échouer dans la mesure où elle ne s'adresse plus, où elle ne peut plus s'adresser à la responsabilité morale individuelle des citoyens. » ([^19]) Il est extrêmement difficile, ou peut-être impossible, qu'un peuple puisse vivre normalement et sainement en démocratie, s'il n'est pas animé dans son ensemble par une foi chrétienne vivante. Ceux qui ont voulu fonder la démocratie en France sur le laïcisme poursuivaient souvent un dessein anti-religieux. 18:25 D'autres, qui étaient chrétiens, ont cru consolider l'existence et le fonctionnement de la démocratie politique par d'opportunistes concessions au laïcisme : ils ont fait un faux calcul. Car ce qui rend la démocratie malaisément viable en France, *c'est justement la déchristianisation du pays *: « Une démocratie sans l'union des esprits, au moins quant aux principes fondamentaux de la vie, surtout en ce qui concerne les droits de Dieu et la dignité de la personne humaine, le respect de l'activité honnête et de la liberté personnelle, même dans les choses politiques, -- une telle démocratie serait défectueuse et mal affermie. Quand le peuple : s'éloigne de la foi chrétienne ou ne l'établit pas résolument comme base de la vie civile, la démocratie elle aussi s'altère et se déforme facilement, et avec le temps, elle est exposée à tomber dans le totalitarisme d'un seul parti. » ([^20]) Car la démocratie, ce n'est pas, ce ne peut pas, ce ne doit pas être la souveraineté absolue et inconditionnelle du « peuple », supposée source du pouvoir et arbitre suprême du bien et du mal. La volonté du peuple, comme toute volonté humaine, est soumise à la loi morale naturelle qui est inscrite au cœur de chaque homme ; et elle est appelée à reconnaître la loi révélée par Dieu. La saine démocratie est dans la *désignation* par les suffrages populaires de ceux qui auront la charge et la responsabilité de conduire le pays : elle n'est pas dans l'arbitraire collectif, dans le bon plaisir du souverain, le souverain fût-il, de manière plus ou moins fictive, l'ensemble de la nation : 19:25 « La souveraineté du peuple que, sans tenir aucun compte de Dieu, l'on dit résider de droit naturel dans le peuple, si elle est éminemment propre à flatter et à enflammer une foule de passions, elle ne repose sur aucun fondement solide et ne saurait avoir assez de force pour garantir la sécurité publique et le maintien paisible de l'ordre. » ([^21]) « La souveraineté n'est en soi nécessairement liée à aucune forme politique, elle peut fort bien s'adapter à celle-ci ou à celle-là pourvu qu'elle soit de fait apte au bien commun. Mais, quelle que soit la forme du gouvernement, tous les chefs d'État doivent absolument avoir le regard fixé sur Dieu, souverain modérateur du monde, et dans l'accomplissement de leur mandat le prendre pour modèle et règle. » ([^22]) Sur tous ces points, la doctrine catholique est *unifiante* et *pacifiante.* A condition qu'elle soit connue, comprise et vécue. Sur tout ces points, la doctrine catholique apporte aux nations la paix et l'unité, mais elle ne peut l'apporter que par la *médiation* de la communauté catholique. Et il ne suffit pas que la communauté catholique en France PROFESSE cette doctrine (qu'elle est d'ailleurs assez loin, aujourd'hui, de professer explicitement), il faut qu'elle la VIVE. La paix et l'unité, on ne les donne pas en paroles, fût-ce des paroles doctrinalement justes, on les donne selon son être, dans la mesure où on les a. La communauté catholique est appelée à se réunifier et à se pacifier. Elle est appelée en sens contraire par les tentations de l'esprit partisan, de la division politique, des idéologies profanes : et jusqu'ici, ce sont plusieurs de ses propres journaux qui appellent la communauté catholique non vers sa vocation, mais vers ses tentations. \*\*\* 20:25 #### Les libertés fondamentales. Forfaiture, de la part de plusieurs leaders temporels du catholicisme français, quand ils nous ont appelés à défendre une certaine forme de République au nom de la sauvegarde de nos « libertés fondamentales ». Le rôle de la communauté catholique n'est pas de défendre les libertés *démocratiques,* mais, sous tous les régimes, les libertés *chrétiennes* et les libertés *naturelles.* La défense partisane des soi-disant libertés qu'inventent les idéologies profanes ne peut qu'approfondir les divisions de la communauté catholique. La défense des libertés de droit naturel peut au contraire réunir les catholiques, et avec eux tous les hommes de bonne volonté, en dehors et au-dessus des divisions politiques. Toute une presse a brouillé dans l'opinion française la claire conscience des libertés fondamentales. Celles-ci ne sont pas à défendre, mais en réalité à promouvoir, à retrouver, à restaurer, *car on nous en a fait perdre la pratique, le goût et quelquefois jusqu'au souvenir.* On leur a SUBSTITUÉ, dans les esprits, dans les mœurs et dans les institutions, une liberté fictive. La liberté n'est pas de *faire n'importe quoi,* la liberté est pour l'homme *le pouvoir d'atteindre, sous sa responsabilité, la fin pour laquelle il est créé.* 21:25 Nos libertés fondamentales, ce ne sont point celles que l'on voit inscrites (car elles y sont inscrites) dans la Constitution soviétique. Ce ne sont point non plus celles de la licence et de l'anarchie, qui provoquent et appellent la tyrannie. Nos libertés *fondamentales,* enfin, ce ne sont justement pas nos libertés *accessoires.* CE NE SONT PAS toutes ces libertés dites d'opinion, de presse, de vote, qui peuvent être bonnes et opportunes, qui ne sont certes pas à dédaigner, *mais au profit desquelles on nous fait prendre l'accessoire pour l'essentiel.* Et ces libertés accessoires ne constituent nullement un droit naturel imprescriptible. Elles constituent souvent, bien plutôt, une mise en scène derrière laquelle se cache la suppression des libertés qui sont réellement fondamentales, CELLES DE LA PERSONNE, CELLES DE LA FAMILLE, CELLES DU MÉTIER. En voilà assez des confusions systématiques par lesquelles on prétend mobiliser les chrétiens en faveur de *fausses* libertés fondamentales : « Il n'est aucunement permis de demander, de défendre ou d'accorder sans discernement la liberté de la pensée, de la presse, de l'enseignement, des religions, comme autant de droits que la nature a conférés à l'homme. Si vraiment la nature les avait conférés, on aurait le droit de se soustraire à la souveraineté de Dieu (...). Ces diverses sortes de libertés peuvent, pour de justes causes, être tolérées, pourvu qu'un juste tempérament les empêche de dégénérer jusqu'à la licence et au désordre. Là enfin où les usages ont mis ces libertés en vigueur, les citoyens doivent s'en servir pour faire le bien et avoir à leur égard les sentiments qu'en a l'Église. Car une liberté ne doit être réputée légitime qu'en tant qu'elle accroît notre faculté pour le bien ; hors de là, jamais. » ([^23]) 22:25 « La liberté de penser et de publier ses pensées, soustraite à toute règle, n'est pas de soi un bien dont la société ait à se féliciter : mais c'est plutôt la source et l'origine de beaucoup de maux. La liberté, cet élément de perfection, doit s'appliquer à ce qui est vrai et à ce qui est bon. » ([^24]) On a fait croire à beaucoup de catholiques que des *tolérances* opportunes, approuvées comme telles par l'Église, étaient en réalité des CONCESSIONS SUR LES PRINCIPES et devaient désormais être tenues pour autant de DROITS IMPRESCRIPTIBLES s'imposant à la conscience chrétienne. Et beaucoup de catholiques abandonnent sans même s'en douter les véritables libertés fondamentales, pour ne plus défendre, comme obligatoires, que des tolérances occasionnelles auxquelles les attachent des passions politiques suscitées ou entretenues par la forfaiture doctrinale de leurs leaders temporels. Plusieurs des « libertés démocratiques » qu'ils réclament en croyant sincèrement qu'il s'agit d'autant de droits naturels ne sont, au regard de la doctrine chrétienne, que des tolérances de fait dont ils n'ont compris ni la nature ni la raison : « L'Église tient compte du poids accablant de l'infirmité humaine, et elle n'ignore pas le mouvement qui entraîne à notre époque les esprits et les choses. Pour ces motifs, tout en n'accordant de droits qu'à ce qui est vrai et honnête, elle *ne* s'oppose pas à la tolérance dont la puissance publique croit pouvoir user à l'égard de certaines choses contraires à la vérité et à la justice, en vue d'un mal plus grand à éviter ou d'un bien plus grand à obtenir ou à conserver. » ([^25]) 23:25 « Premièrement : ce qui ne répond pas à la vérité et à la loi morale n'a objectivement aucun droit à l'existence, ni à la propagande, ni à l'action. Secondement : le fait de ne pas l'empêcher par le moyen de lois d'État et de dispositions coercitives peut néanmoins se justifier dans l'intérêt d'un bien supérieur et plus vaste. » ([^26]) Nous ne demandons pas comment et par qui une grande partie de la communauté catholique en France a été détournée de la doctrine chrétienne au profit d'idéologies partisanes souvent erronées, explicitement et fréquemment condamnées par la Hiérarchie apostolique. Nous ne le demandons point, d'abord parce que nous le savons très bien, nous ne le savons que trop ; et ensuite, parce que ce n'est point là notre propos. L'important est de retrouver l'unité dans la vérité, en éclairant avec patience les esprits et les cœurs de bonne volonté, qui ont été détournés de leur vocation chrétienne. La liberté n'est pas liée à un régime politique. Il existe des démocraties libérales. Il en existe de totalitaires. Il en est même qui sont, en même temps et sous un rapport différent, à la fois totalitaires et libérales. La liberté politique ne se confond nullement avec les prérogatives de l'immunité parlementaire ni avec les privilèges, les licences ou les irresponsabilités d'une classe politicienne et journalistique : « La liberté \[dans les relations humaines\] ... est l'ensemble des droits et des devoirs des individus et de la famille, -- certains de ces droits sont imprescriptibles, même lorsqu'un bien commun apparent peut les réclamer, -- des droits et des devoirs d'une nation ou d'un État et de la famille des nations et des États. 24:25 Ces droits et devoirs sont soigneusement mesurés et équilibrés par les exigences de la dignité de la personne humaine et de la famille, d'une part, et du bien commun, de l'autre. » ([^27]) L'empiètement le plus réel et le plus grave sur nos libertés fondamentales provient de l'extension continuelle des pouvoirs de l'administration d'État, qui réduit peu à peu les personnes, les familles et les métiers à une sorte d'esclavage, celle qui est propre au XX^e^ siècle. La forme républicaine du gouvernement ne comporte, de soi, aucune garantie contre un tel esclavage. En fait, le système gouvernemental que nous avons connu jusqu'au 13 mai 1958 a été très propice à cette extension du totalitarisme administratif et a très activement travaillé à la réduction ou à la suppression de nos libertés fondamentales. La communauté catholique n'a été que très insuffisamment avertie de ce péril par ses journaux. Il est même arrivé qu'on lui présente cette perte progressive des libertés fondamentales comme une évolution nécessaire et souhaitable. Ceux qui portent la responsabilité d'avoir organisé la désertion des catholiques quant à la défense des libertés fondamentales sont mal venus, aujourd'hui, à nous enrôler, sous prétexte de liberté, au service d'une forme de gouvernement qui a été tout à fait défaillante, précisément, au chapitre de la protection des libertés. C'est l'Église depuis deux mille ans qui protège les libertés fondamentales de la personne, de la famille, du travail. C'est elle qui les définit, les fonde, les défend, les anime. Aujourd'hui, contre l'emprise croissante des administrations étatiques sur le travail, la famille et la personne, 25:25 c'est encore l'Église qui a élevé la voix, montré le péril, appelé ses fidèles au combat pour la liberté. Mais le message de l'Église n'est pas toujours parvenu à l'ensemble de la communauté catholique en France, distraite, divertie, détournée par les publications et les publicistes qui auraient dû l'informer. Voici où se situe aujourd'hui la défense des libertés fondamentales : « Ni l'individu ni la famille ne doivent être absorbés par l'État. Chacun garde et doit garder sa liberté de mouvement dans la mesure où elle ne risque pas de porter préjudice au bien commun. En outre, il y a certains droits et libertés des individus -- de chaque individu -- ou de la famille, que l'État doit toujours protéger et qu'il ne peut violer ou sacrifier à un prétendu bien commun. Nous visons, pour ne citer que quelques exemples, le droit à l'honneur et à la bonne réputation, le droit à la liberté de vénérer le vrai Dieu, le droit originaire des parents sur les enfants et sur leur éducation. » ([^28]) « Il faut empêcher la personne et la famille de se laisser entraîner dans l'abîme où tend à les jeter la socialisation de toutes choses, socialisation au terme de laquelle la terrible image du Léviathan deviendrait une horrible réalité. C'est avec la dernière énergie que l'Église livrera cette bataille où sont en jeu des valeurs suprêmes : dignité de l'homme et salut éternel des âmes. » ([^29]) La liberté dans le travail, la liberté des métiers est l'une des libertés les plus fondamentales, mais aussi les plus oubliées : 26:25 « La vie économique, vie sociale, est une vie d'hommes, et par conséquent elle ne peut se concevoir sans liberté. Mais cette liberté ne peut être la fascinante mais trompeuse formule vieille de cent ans ([^30]), c'est-à-dire une liberté purement négative, niant la volonté régulatrice de l'État. Ce n'est pas non plus la pseudo-liberté de nos jours, qui consiste à se soumettre au commandement de gigantesques organisations. La vraie et saine liberté ne peut être que la liberté d'hommes qui, se sentant solidairement liés en vue du but objectif de l'économie sociale, sont en droit d'exiger que l'ordre social de l'économie, loin de porter la moindre atteinte à leur liberté dans le choix des moyens adaptés à ce but, la garantisse et la protège. Ceci vaut également pour tout genre de travail, indépendant ou dépendant, car, en regard de la fin de l'économie sociale, tout membre producteur est sujet et non pas objet de l'économie sociale. » ([^31]) \*\*\* #### La « valeur directive » du « principe de subsidiarité ». Au chapitre des libertés fondamentales, de celles qui sont le plus menacées, de celles qui sont supprimées jour après jour, il faut en effet inscrire non seulement celles de la famille, auxquelles les chrétiens de France sont fort heureusement attentifs, mais encore celles qui relèvent du « principe de subsidiarité », auxquelles la communauté catholique ne paraît guère porter d'attention. Principe de subsidiarité ? Cette dénomination des sociologues désigne quelque chose de très simple, mais de très « grave » : 27:25 « On ne saurait changer ni ébranler ce principe si grave de philosophie sociale : de même que l'on ne peut enlever aux particuliers, pour les transférer à la communauté, les attributions dont ils sont capables de s'acquitter de leur seule initiative et par leurs propres moyens, ainsi ce serait commettre une injustice, en même temps que troubler d'une manière très dommageable l'ordre social, que de retirer aux groupements d'ordre inférieur, pour les conférer à une collectivité plus vaste et d'un rang plus élevé, les fonctions qu'ils sont en mesure de remplir eux-mêmes. » ([^32]) Ce point « *si grave* » de la doctrine catholique n'est pas une considération annexe, facultative ou gratuite, mais un point véritablement capital. Pie XII l'a rappelé tout spécialement aux catholiques français : « Si l'on ne peut dénier aujourd'hui à l'État un droit que lui refusait le libéralisme, il n'en reste pas moins vrai que sa tâche n'est pas, en principe, d'assumer directement les fonctions économiques, culturelles et sociales, qui relèvent d'autres compétences : elle est bien plutôt d'assurer la réelle indépendance de son autorité, en sorte de pouvoir accorder à tout ce qui représente une puissance effective valable dans le pays une juste part de responsabilité, sans péril pour Sa propre mission de coordonner et d'orienter tous les efforts vers une fin commune supérieure. » ([^33]) C'est encore à l'adresse des catholiques français que Pie XII écrivait : 28:25 « Il est indispensable, précisément aujourd'hui où l'ancienne tendance du « laissez faire, laissez passer » est sérieusement battue en brèche, de prendre garde à ne point tomber dans l'extrême opposé : il faut, dans l'organisation de la production, assurer TOUTE SA VALEUR DIRECTIVE A CE PRINCIPE, toujours défendu par l'enseignement social de l'Église : que les activités et les services de la société doivent avoir un caractère « SUBSIDIAIRE » seulement, AIDER OU COMPLÉTER L'ACTIVITÉ DE L'INDIVIDU, DE LA FAMILLE, DE LA PROFESSION. » Il est de fait que la communauté catholique en France est mal informée de l'existence, dans la doctrine chrétienne, du principe de subsidiarité, et peu avertie de la nécessité urgente d'ASSURER TOUTE SA VALEUR DIRECTIVE A CE PRINCIPE. Parce que ce principe a été privé de sa « *valeur directive* », nous subissons depuis des années, dans notre vie sociale, une annexion de nos libertés fondamentales par les administrations de l'État ([^34]). C'est sur ce terrain que se situe aujourd'hui la plus nécessaire DÉFENSE DES LIBERTÉS, de *nos* libertés, -- et non pas des privilèges parlementaires et journalistiques, des privilèges quasiment féodaux d'une classe politicienne liée au fonctionnement du régime établi avant le 13 mai 1958. Sans doute, la question de l'immunité parlementaire de M. Jacques Duclos et celle de la liberté du journal de M. Claude Bourdet ont leur importance et méritent un examen attentif, sérieux et serein. Elles ne méritent pas une mobilisation en leur faveur de la communauté chrétienne. Elles ne sont pas des droits naturels imprescriptibles. *Elles n'ont rien à voir avec nos libertés fondamentales.* 29:25 Ne laissons pas détourner et fourvoyer la communauté catholique par des journaux qui s'inspirent sur ce chapitre d'une idéologie politique *et non* de la doctrine chrétienne. Voici assez longtemps que trop de catholiques, mobilisés autour de libertés ou de tolérances secondaires ou accessoires, sont ainsi entraînés à DÉSERTER LA DÉFENSE DES LIBERTÉS FONDAMENTALES DE LA PERSONNE, DE LA FAMILLE ET DE LA PROFESSION. Plus exactement connue, mieux comprise, davantage vécue, la doctrine catholique apporte à la communauté des fidèles les voies et moyens de sa réunification, de sa pacification, de sa véritable mobilisation pour les tâches réelles qui l'attendent dans la nation. \*\*\* Peut-être comprendra-t-on mieux, après ces éclaircissements, que le problème politique actuel n'est pas de *renforcer l'autorité au détriment des libertés,* ni non plus de *défendre les libertés contre l'autorité.* Les idéologies partisanes qui posent la question en ces termes sont aussi des idéologies effroyablement simplistes. Et entièrement erronées. C'est une fausse autorité, celle qui se renforce aux dépens des libertés. Ce sont de fausses libertés, celles qui se défendent aux dépens de l'autorité. Le renforcement de l'autorité véritable n'empiète pas sur les libertés légitimes. La défense des libertés fondamentales ne diminue pas l'autorité nécessaire. *Au contraire.* La doctrine catholique enseigne -- et spécialement en s'adressant aux catholiques français -- que l'autorité et les libertés sont solidaires, organiquement liées, interdépendantes : 30:25 « L'État ne saurait violer les justes libertés de la personne humaine sans ébranler sa propre autorité, et inversement c'est pour l'individu ruiner sa propre dignité que d'abuser de sa liberté personnelle au mépris de sa responsabilité vis-à-vis du bien général. » ([^35]) Le régime établi en France avant le 13 mai 1958 en apporte un exemple irrécusable. Il avait amenuisé, corrompu, détruit *simultanément* l'autorité et les libertés. Il avait renforcé une fausse autorité, -- l'autorité envahissante et tyrannique des administrations d'État sur la personne, sur la famille et sur la profession. Il avait développé de fausses libertés, -- la liberté de travailler à la défaite de l'armée française sous couvert de l'immunité parlementaire et de la liberté d'opinion. Non, personne n'a le droit de nous convier, au nom du christianisme, à défendre les fausses libertés et la tyrannie administrative qui résumaient de manière tangible la décadence française. \*\*\* #### Une autre Constitution. La France a connu depuis 1789, si notre compte est exact, seize Constitutions, dont plusieurs n'ont même pas été appliquées. L'importance des lois constitutionnelles est réelle mais non exclusive ; elle doit être exactement située : 31:25 « Ce que le principe vital est au corps vivant, la Constitution l'est à l'organisme social dont le développement, non seulement économique mais encore moral, est étroitement conditionné par elle. Si donc il y a quelqu'un qui doive tenir le regard fixé sur les règles établies par Dieu, si quelqu'un a jamais été obligé d'avoir constamment sous les yeux le vrai bien de tous, ce sont certainement ceux auxquels est confiée la grande œuvre de rédiger la Constitution. D'autre part, à quoi servent les meilleures lois si elles doivent rester lettre morte ? Leur efficacité dépend en grande partie de ceux qui doivent les appliquer. Dans les mains d'hommes qui n'en ont pas l'esprit, qui peut-être sont intérieurement en désaccord avec ce qu'elle dispose, qui, spirituellement et moralement, ne sont pas capables de la réaliser dans les actes, même l'œuvre législative la plus parfaite perd beaucoup de sa valeur. Une bonne Constitution est sans nul doute une chose d'un haut prix. Cependant, ce dont l'État a un besoin absolu, c'est d'hommes compétents et experts en matière politique et administrative, entièrement dévoués au plus grand bien de la nation et guidés par de clairs et sains principes. » ([^36]) La doctrine catholique nous met en garde contre le positivisme juridique et sociologique qui voit dans le fonctionnement des institutions une sorte de mécanisme physique, indépendant en lui-même des mœurs, des coutumes et de l'ordre moral : « Que la réflexion sur les institutions et la recherche de remèdes au niveau des structures politiques ne fasse jamais perdre de vue les racines morales de toute crise du civisme. Trop longtemps, le sens juridique fut vicié par la pratique d'un utilitarisme partisan au service des intérêts particuliers d'individus, de classes, de groupes ou de mouvements. Il faut que l'ordre juridique se sente de nouveau lié à l'ordre moral. » ([^37]) 32:25 L'avertissement qui précède, et celui qui suit, ont été spécialement adressé par Pie XII aux catholiques français : « Si on déplore une crise civique, que l'on s'interroge D'ABORD sur la fidélité des uns et des autres aux exigences essentielles de la MORALE POLITIQUE. Quand bien même certaines circonstances rendraient de nos jours plus difficile l'exercice du pouvoir, qu'on ne craigne pas de dénoncer cette CARENCE SPIRITUELLE ET MORALE. Dans une large mesure, une crise du pouvoir est une crise du civisme, c'est-à-dire en fin de compte une crise de l'homme. » ([^38]) Ce n'est pas seulement un problème constitutionnel, un problème de régime politique qui est posé à la France. C'est un problème d'ensemble, « c'est par bien des points le problème même du XX^e^ siècle, -- c'est une « crise de civilisation », c'est-à-dire une crise morale et spirituelle qu'il faut résoudre D'ABORD. Ce qui ne signifie point *avant,* mais *dans* l'accomplissement quotidien des tâches immédiates qui nous requièrent. On ne demande évidemment pas aux catholiques de suspendre toute activité civique et sociale pendant trois ou quatre années, le temps de mener à bien cette étude approfondie de la doctrine catholique qui fait si visiblement défaut à certains des plus bruyants d'entre eux. 33:25 On leur demande de mettre en œuvre cette préoccupation prioritaire, cette réforme intérieure, *tout en faisant face,* selon leur état, aux urgences qui les appellent : et progressivement leur action, leurs mœurs, leur être même en seront réformés, avec la grâce de Dieu. Car, selon les paroles en quelque sorte prophétiques d'un grand cardinal français du XIX^e^ siècle, *le problème n'est pas de l'homme à l'homme, il est de l'homme à Dieu : et si le moment n'est pas encore venu pour Dieu de régner, alors le moment n'est pas encore venu pour les gouvernements de durer *: « La première tâche d'un enseignement catholique est de dissiper les erreurs -- celles, en particulier, du positivisme juridique -- qui, en dégageant le pouvoir de son essentielle dépendance à l'égard de Dieu, tendent à briser le lien éminemment moral qui l'attache à la vie individuelle et sociale. » ([^39]) Il est compréhensible que des catholiques restent encore attachés, avec une priorité exclusive, à des idéologies politiques qui ont pris dans leur pensée (et dans leur cœur) la place laissée vide par leur ignorance de la philosophie chrétienne et de la doctrine catholique. Il est compréhensible qu'ils tiennent leurs points de vue partisans pour la pensée même de l'Église. La manière dont la communauté catholique a été informée et instruite, depuis des années, par la presse et l'édition, la manière dont elle a été colonisée par certaines publicités idéologiques, tout cela, bien sûr, explique et même excuse beaucoup de confusions. 34:25 Mais, plus ou moins obscurément, et déjà parfois très nettement, se manifeste le désir d'un grand retour des esprits à la doctrine dans sa réalité authentique, à la vie chrétienne dans toute sa dimension, à un ordre social et politique, -- un ordre catholique ([^40]). Un symptôme très sûr de l'existence d'un tel désir est dans le comportement d'éditeurs connus surtout pour leur flair commercial et leur sens du succès, qui entreprennent fébrilement aujourd'hui la publication de recueils de discours pontificaux. Ils le font plus ou moins bien, ce n'est pas la question : ils ont perçu l'attente et la demande du public. Un public qui veut enfin *non plus une idéologie de droite ou de gauche, mais la doctrine catholique *: ce public qui a fait au Rapport doctrinal de l'Épiscopat français un accueil très attentif, dont il serait impossible de se douter si l'on s'en tenait à la manière dont presque toute la presse catholique, après un salut (plus ou moins) courtois, lui a silencieusement tourné le dos, l'ayant enterré dans ses oubliettes. « Nous tenons à vous exhorter, vous et tous les catholiques, à suivre fidèlement la ligne nette de la doctrine sociale catholique, SANS DÉVIER NI A DROITE NI A GAUCHE. Une déviation de quelques degrés seulement au début pourrait sembler sans portée. A la longue, cette dérivation entraînerait un écartement dangereux du droit chemin, et des suites graves. » ([^41]) « Tout ce qui se trouve de bon et de juste dans les autres systèmes, est renfermé déjà dans la doctrine sociale catholiques. » ([^42]) \*\*\* 35:25 #### Le retour à Dieu. Ce qui a été donné à la France le 13 mai 1958, ce n'est pas le salut tout cuit. C'est un coup d'arrêt dans la décomposition. C'est un répit. C'est l'occasion et le moyen de travailler. De travailler à sa renaissance. Que l'occasion soit manquée, il est vraisemblable qu'un Front populaire aurait alors toutes chances de s'emparer du pouvoir, de nous conduire sur le chemin de. Prague, de nous préparer de terribles châtiments. Éventualité difficilement évitable si la France ne retrouve pas la voie de sa nature et de sa vocation. « Le retour à Dieu, qui est l'essentiel du message de Lourdes, s'impose comme le remède nécessaire au mal profond de notre société. » ([^43]) La France est et demeure chrétienne par vocation. Beaucoup de Français ne sont plus chrétiens. Le retour à Dieu n'est-il pas le chemin le plus long, et actuellement le moins praticable ? Mais les autres ne mènent nulle part. Le retour à Dieu est le chemin nécessaire, celui de la vérité. « On peut tout faire avec du mensonge, écrit André Frossard, excepté une vérité. Or la France a besoin de vérité pour vivre, comme d'autres peuples ont besoin de musique (...). Le désarroi d'un certain nombre de catholiques détaches du surnaturel ne change rien à cette évidence première que la France, née chrétienne, sera demain comme hier chrétienne, ou ne sera pas. 36:25 « Si la France doit beaucoup aux peuples \[romain et grec, etc.\] qui lui ont fait une civilisation, elle doit d'être elle-même au christianisme, qui lui a fait une âme. Elle savait, hier encore, que la mesure de toute humanité nous a été donnée une fois pour toutes, il y a deux mille ans, sous la forme d'une Croix. Même quand elle lui tournait le dos, elle avait la sagesse de ne point s'en écarter (...). « Le chemin de Notre-Dame est le plus sûr des chemins, quand on l'emprunte avec espérance et contrition. Il n'existe aucun moyen de refaire, dans les courts délais d'une expérience politique, ce qui avait été l'œuvre de cinquante générations animées d'une force morale prodigieuse, et que deux terribles guerres au terme d'une lente déperdition de grâce ont détruit, trahi ou laissé perdre. Ce n'est pas un parti, ce n'est pas un homme qui nous rendront la vie, mais le plus modeste, le plus bref et même le plus distrait des actes de foi, qui pour un coup ne se tromperait pas d'adresse. « Nous avons perdu la France avec la Vérité. Nous la retrouverons en même temps qu'Elle. » ([^44]) Il ne s'agit évidemment pas d'imposer par voie gouvernementale la religion chrétienne : « C'est la coutume de l'Église de veiller avec le plus grand soin à ce que personne ne soit forcé d'embrasser la foi catholique contre son gré, car, ainsi que l'observe sagement saint Augustin, l'homme ne peut croire que de son plein gré. » ([^45]) 37:25 Le retour de la France à Dieu ne pourra s'effectuer qu'à partir de la communauté catholique existante. Et dans la mesure où elle existera. C'est de son *être* que tout dépend. De la présence en elle de Jésus-Christ. De *l'unité* qui est le fruit, le signe, la réalité de cette présence : et qui est LA SEULE CONDITION pour que le monde croie : « Que tous soient un : comme toi, Père, tu es en moi et moi en toi, qu'eux aussi soient un en nous AFIN QUE LE MONDE CROIE QUE TU M'AS ENVOYÉ. » ([^46]) Une communauté catholique vivante et une est la seule chose fondamentale qui manque à la France, et cette absence est la seule cause profonde des malheurs de la patrie -- Que la communauté catholique soit en France vivante et une, et Dieu se charge du reste, par sa Providence et par ses saints. \*\*\* PRIONS Dieu qu'il fasse prévaloir, au moment où nous écrivons ces lignes et au moment où vous les lirez, les solutions les moins mauvaises ou les plus heureuses parmi celles qui sont immédiatement possibles. Prions la Très Sainte Vierge, patronne et protectrice de la France, de sauver la Patrie menacée de perdre son unité. En ces jours qui suivent la Pentecôte, nous l'invoquons particulièrement au titre de *Mater boni consilii,* pour qu'elle éclaire tous ceux qui portent une responsabilité, qu'elle soit décisive ou modeste, car tout compte, tous comptent, quand les destins sont en balance. 38:25 Qu'elle nous donne à tous l'Esprit Saint, et spécialement le don de conseil, par lequel « l'intelligence pratique voit et juge, dans les cas particuliers, ce qu'il faut faire et quels moyens employer ». Dans l'hypothèse espérée où, par la grâce de Dieu et la sagesse des hommes, le pire sera évité, l'unité nationale maintenue, et un gouvernement enfin fondé en vue du bien commun, ce sera une porte ouverte, une chance donnée. Un commencement et non pas une conclusion. Car il manque à la France l'essentiel. Et l'essentiel lui manquera aussi longtemps que ceux à qui il appartient de le donner ne seront pas en état de le donner. La communauté catholique n'a ni unité ni doctrine -- elle n'a pu, elle ne peut donner ce qu'elle n'a pas. Je veux dire qu'elle n'a ni doctrine ni unité pour tout ce par quoi la France est menacée de dislocation. L'état de la communauté catholique l'empêche de tenir le rôle pacificateur et restaurateur, *tout restaurer dans le Christ,* le rôle auquel elle est appelée par vocation. Ce n'est certes point la Hiérarchie apostolique qui est en cause ici. Ceux qui le croient se trompent. Ceux qui l'accusent ne feront rien que détruire l'Église dans les cœurs, augmenter la confusion intellectuelle et l'anarchie morale ([^47]). La Hiérarchie apostolique a la charge du gouvernement spirituel de la communauté catholique et de l'enseignement de la doctrine. C'est à la communauté des fidèles qu'il appartient, en catholiques et en tant que citoyens, d'apporter à la France le secours décisif de son unité dans la mise en œuvre de la doctrine enseignée. Et c'est un tel secours qui présentement fait défaut. Depuis longtemps. 39:25 Que la communauté catholique redevienne elle-même. Le reste sera donné par surcroît (ce qui n'a jamais voulu dire : en se croisant les bras), et Dieu réalisera les paroles de saint Pie X : « Le peuple qui a fait alliance avec Dieu au fonts baptismaux de Reims se repentira et retournera à sa première vocation. Les mérites de tant de ses fils, qui prêchent la vérité de l'évangile dans le monde presque entier, et dont beaucoup l'ont scellée de leur sang ; les prières de tant de saints qui désirent ardemment avoir pour compagnons, dans la gloire céleste, les frères bien-aimés de leur patrie ; la piété généreuse de tant de ses fils qui sans s'arrêter à aucun sacrifice, pourvoient à la dignité du clergé et à la splendeur du culte catholique... appelleront certainement sur cette nation les miséricordes divines. Les fautes ne resteront pas impunies, mais elle ne périra pas, la fille de tant de mérites, de tant de soupirs et de tant de larmes. Un jour viendra, et Nous espérons qu'il n'est pas très éloigné, où la France, comme Saül sur le chemin de Damas, sera enveloppée d'une lumière céleste et entendra une voix qui lui répétera : « Ma fille, pourquoi me persécutes-tu ? » Et sur sa réponse : « Qui es-tu, Seigneur ? » la voix répliquera. « Je suis Jésus, que tu persécutes. Il t'est dur de regimber contre l'aiguillon, parce que, dans ton obstination, tu te ruines toi-même. » Et elle, tremblante et étonnée, dira : « Seigneur, que voulez-vous que je fasse ? » Et Lui : « Lève-toi, lave-toi des souillures qui t'ont défigurée, réveille dans ton sein tes sentiments assoupis et le pacte de notre alliance, et va, Fille aînée de l'Église, nation prédestinée, vase d'élection, va porter, comme par le passé mon nom devant tous les peuples et tous les rois de la terre. » ([^48]) 40:25 Commentant ces paroles, Henri Charlier écrivait ([^49]) : « Que manque-t-il pour que ces choses s'accomplissent ? Des saints, c'est tout. Le peuple de France est, ne l'oublions pas, un peuple trompé par de mauvais bergers, et peut-être moins coupable qu'il n'y paraît. Ceux qui le connaissent tel qu'il est, que ce soit la femme de charge lavant le sol des cliniques, ou le lampiste Leguignon, savent qu'il ne croit plus à aucun des idéaux politiques ou sociaux qu'on lui propose depuis cent ans. Maintenant il se sait trompé. « Mais il est impossible à l'homme d'arracher de son âme l'amour de ses enfants et l'aspiration au bonheur que Dieu y a placés comme le germe de l'intelligence du surnaturel ; le peuple de France suivra les saints, quand Dieu jugera le moment propice. « Chacun de nous s'aperçoit trop tard dans sa vie qu'il lui eût fallu faire un saint. Trop tard, certes, pour agir en saint, mais assez tôt cependant pour mourir saintement. C'est en quoi consiste l'épreuve de la vie, étrange et mystérieuse alliance d'événements fortuits en apparence et de la grâce de Dieu. Prions-Le qu'Il nous envoie des saints jeunes qui puissent répondre à l'obscure attente du peuple français, et lui apprendre, en prenant le joug et le fardeau du Christ, à trouver le repos de son âme. » Jean MADIRAN. 41:25 ### Le principe de subsidiarité LORSQUE L'ON CONSTRUIT UNE MAISON, on ne commence pas par le toit. On procède d'abord à l'établissement des fondations. Pour réaliser un ordre social sain, il faut, toutes proportions gardées, s'inspirer du même principe. C'est là l'un des thèmes les plus souvent développés dans les documents relatifs à la doctrine sociale de l'Église, et, dans les heures tragiques que nous vivons, où c'est la conception même de la société politique qui est en jeu, il est fort opportun d'évoquer ce principe de base que l'on a accoutumé de nommer : le principe de subsidiarité. Il y a, dans l'ordre physique, une exigence qui résulte immédiatement de la loi naturelle de la pesanteur. Ce qui est en haut doit s'appuyer sur ce qui est en bas. On retrouve dans l'ordre moral, une loi sociologique qui résulte elle aussi immédiatement de la loi morale naturelle. Cette loi, en première approximation, peut se formuler de la manière suivante : *l'ordre social et la prospérité économique dépendent directement du dynamisme des personnes, des sociétés privées et de leur valeur morale.* C'est en effet, sur les personnes, sur la vitalité de leurs initiatives et sur la régulation intérieure qu'elles sont capables de se donner, que doit s'appuyer l'organisation sociale elle-même : « *Sans doute, par suite de l'évolution des conditions sociales, bien des choses que l'on demandait jadis à des associations de moindre envergure, ne peuvent plus désormais être accomplies que par de puissantes collectivités.* 42:25 *Il n'en reste pas moins indiscutable qu'on ne saurait ni changer, ni ébranler ce principe si grave de philosophie sociale : de même qu'on ne peut enlever aux particuliers pour les transférer à la communauté, les attributions dont ils sont capables de s'acquitter de leur seule initiative et par leurs propres moyens, ainsi ce serait commettre une injustice, en même temps que troubler d'une manière très dommageable l'ordre social que de retirer aux groupements d'ordre inférieur, pour les confier à une collectivité plus vaste et d'un rang plus élevé, les fonctions qu'ils sont en mesure de remplir eux-mêmes. L'objet naturel de toute intervention en matière sociale est d'aider les membres du corps social et non pas de les détruire ni les absorber... Plus parfaitement sera réalisé l'ordre hiérarchique des divers groupements selon ce principe de la fonction supplétive de toute collectivité, plus grandes seront l'autorité et la puissance sociale, plus heureuses et plus prospères l'état des affaires publiques.* » ([^50]) Méditons quelques-uns des points de ce texte. **a)** Pie XI affirme ici que ce serait commettre une *injustice* que de retirer à des groupements tels que les familles, les municipalités, pour les confier par exemple à l'État, des fonctions qu'elles sont capables de remplir par elles-mêmes. C'est donc ici une exigence de la loi morale que formule le Souverain Pontife. Confier par exemple à l'État, la réglementation de l'enseignement d'une manière qui pratiquement prive les parents du libre usage de leurs droits en cette matière, est contraire à la dignité et aux autres droits que le Créateur a donnés à la personne et à la famille. 43:25 Nous sommes donc ici, précisons-le soigneusement, au niveau de la *loi morale* telle que l'enseigne le Magistère de l'Église. **b)** Mais Pie XI indique immédiatement la *loi sociologique* qui résulte nécessairement de la transgression de la loi morale naturelle. Il affirme que retirer à des groupements inférieurs les fonctions qui leur reviennent et qu'ils peuvent assumer, pour les confier à des collectivités d'un rang plus élevé, cela conduit à « *troubler d'une manière très dommageable l'ordre social* ». Autrement dit, il ne porte plus ici simplement un jugement sur la justice ou l'injustice d'une telle mesure. Il indique une relation de fait entre la négation pratique du principe de subsidiarité et sa conséquence nécessaire, le désordre social. Il affirme : si l'on confie à l'État les responsabilités qui, en droit naturel, reviennent aux familles, aux groupements locaux, aux professions, non seulement on commet une injustice, mais encore on détermine des conséquences dommageables pour l'ordre social. On provoque une crise. On a parfois prétendu qu'il n'existe pas de sociologie chrétienne. Il nous semble sur l'exemple qui précède, que cette opinion peut être victorieusement réfutée. C'est bien en effet, une véritable loi scientifique que Pie XI formule ici : le mépris du principe de subsidiarité détermine le désordre social ; le respect de ce principe établit ou rétablit l'ordre social. Si l'on veut obtenir le conséquent, il faut réaliser l'antécédent. **c)** Mais cette loi sociologique est une loi de nature morale. Ce n'est pas une nécessité physique qui fait que d'arracher aux personnes l'usage de leurs droits légitimes provoque des désordres et des souffrances dans la vie sociale. C'EST UNE NÉCESSITÉ MORALE. 44:25 C'est l'ordre immanent que le Créateur a établi dans la structure intime des actes humains et de leurs inter-relations qui fait que l'on ne peut pas transgresser les lois du juste et de l'injuste sans *qu'en plus de* l'atteinte portée à la loi divine, il en résulte une conséquence sociale *externe,* conséquence distincte de l'acte injuste lui-même ; -- encore que cette conséquence soit elle-même souvent une injustice. Ainsi, c'est en soi une injustice que d'empêcher les parents de choisir gratuitement l'école de leurs enfants puisqu'ils en ont le droit. Mais la conséquence sociale distincte de cette première injustice est que l'État qui agit ainsi enseigne une vision du monde nécessairement faussée, puisqu'elle exclut le vrai sens des droits personnels et familiaux. Les enfants sont donc méthodiquement trompés et déformés : et cette conséquence, qui est une injustice à leur égard, et à l'égard du bien commun, est distincte de l'injustice commise à l'égard des parents. Mais elle en est la conséquence inévitable. Ces exemples et ces remarques aideront peut-être à comprendre les motifs de la critique que nous avons faite naguère de la notion de physique sociale. Imprégnée de positivisme, elle a emprunté à Auguste Comte son nom, mais aussi son erreur. Cette erreur devient manifeste quand elle consiste à établir systématiquement des constantes entre les formes institutionnelles (considérées comme causes essentielles de l'ordre politique) et les heurs ou malheurs des Français. On méconnaît ainsi la nature morale des lois sociologiques et, par le fait même, la causalité fondamentale de l'acte humain dans le développement de la vie sociale. ([^51]) 45:25 **d)** La réflexion sur le principe de subsidiarité éclaire en outre beaucoup la question des rapports entre la réforme des mœurs et la réforme des institutions. Elle rend manifeste le lien organique qui existe entre l'une et l'autre. Pourquoi, en effet, ne peut-on enlever aux particuliers pour les transférer à la communauté, les attributions dont ils sont capables de s'acquitter de leur seule initiative et par leurs propres moyens ? C'est évidemment à cause de la nature de la personne et de sa dignité. Le Créateur a fait de l'homme un sujet de droit, c'est-à-dire qu'il a voulu qu'il soit capable de se diriger lui-même en vue de sa fin de choisir des moyens propres à la lui faire atteindre. Il a voulu en outre, que la société soit organisée de telle sorte que chaque personne soit respectée dans son activité de sujet de droit. C'est donc une injustice que d'édifier des structures sociales, Scolaires, ou médicales, ou politiques, ou économiques, qui reviennent pratiquement à priver l'homme des droits qu'il a reçus. Tel est le fondement du principe de subsidiarité. **e)** Mais aussi une nécessité de faire que dans la vie sociale, chaque personne ait une formation intellectuelle et morale suffisante pour se servir de façon raisonnable des droits naturels que le Créateur lui a conférés. Il ne suffit pas de respecter le *droit* des parents à élever leurs enfants : il faut qu'ils en soient *capables.* Il ne suffit pas de respecter la liberté légitime, des membres du corps médical : il faut que les médecins aient non seulement la compétence, mais une haute idée de leur responsabilité morale. Il ne suffit pas de respecter les libertés légitimes des municipalités, des provinces ou des professions, il faut aussi qu'il y ait dans ces sociétés intermédiaires des hommes suffisamment cultivés, 46:25 dynamiques et dévoués au bien commun pour qu'une véritable activité et qu'un réel progrès social et économique s'épanouissent aux divers niveaux de l'organisme social. Donc, c'est une loi sociologique, de nature morale, *que le principe de subsidiarité ne peut être appliqué de façon générale et profonde que dans une société où le développement culturel et l'équilibre moral des citoyens atteint une suffisante maturité.* Au contraire, plus les membres d'une société politique ont le sentiment de leur incapacité, résultant elle-même de l'effondrement moral (alcoolisme, paresse, individualisme, désordres familiaux, malhonnêteté généralisée, etc.) plus ils aspirent à ce que ce soient les institutions, les étages supérieurs des collectivités ou l'État lui-même qui prennent en charge leurs propres responsabilités. Ce qui fait que l'on peut exprimer cette loi d'une autre manière en disant que le développement d'une mentalité socialiste dans un peuple résulte de l'effondrement des mœurs. **f)** Il n'est donc possible de travailler à la véritable réforme des institutions, c'est-à-dire à la restauration du principe de subsidiarité dans le cadre de l'organisation professionnelle qu'à la condition que l'apostolat des laïcs suscite dans les différents milieux : familiaux, professionnels, artistiques, politiques, etc., un renouveau de vie chrétienne déterminant lui-même une réforme des mœurs. C'est en ce sens que la réforme des institutions n'est pas aussi urgente que celle des mœurs. C'est sur une base morale saine que l'institution du principe de subsidiarité peut être établie. 47:25 Cette relation sociologique entre l'état des mœurs et les possibilités d'application dans les institutions du principe de subsidiarité, le Saint-Père l'évoquait lorsqu'il affirmait : « *Une démocratie moderne ainsi constituée devra échouer dans la mesure où elle ne s'adresse plus, où elle ne peut plus s'adresser, à la responsabilité morale individuelle des citoyens. Mais, même si elle voulait le faire, elle ne pourrait plus y réussir parce qu'elle ne trouverait plus chez eux d'écho, dans la mesure du moins où le sens de la véritable réalité de l'homme, la conscience de la dignité de la nature humaine et de ses limites, ont cessé d'être sentis dans le peuple.* » ([^52]) Marcel CLÉMENT. 48:25 ### Note de gérance NOUS DEMANDONS à tous nos amis d'assurer très rapidement la plus large diffusion possible de ce numéro 25. Il est en vente au prix de 100 francs seulement. On s'en procurera les quantités que l'on voudra non point à nos bureaux, mais en les *commandant* chez *tout dépositaire des Messageries de presse parisienne* (N.M.P.P.). \*\*\* CE NUMÉRO 25 paru avec quelques jours d'avance est notre numéro de juillet-août. Comme chaque année en effet, pendant la période d'été dite de vacances, nous publions un numéro de juillet-août et, le 1^er^ septembre, un numéro de septembre-octobre, reprenant à partir du 1^er^ novembre notre parution mensuelle. Mais cette année, durant cette même période, il risque d'apparaître souhaitable ou nécessaire, en raison des événements, d'être en mesure d'agir sur l'opinion, et de pouvoir publier à cet effet, sans attendre le 1^er^ septembre, quelque numéro spécial ou quelque supplément. Cette possibilité dépend non point de nous, mais de l'ensemble de nos amis : par la souscription d'abonnements de soutien, il leur appartient de nous donner des moyens matériels qui, pour une telle éventualité, nous font totalement défaut en ce moment. ============== fin du numéro 25. [^1]:  -- (1). Léon XIII, Encyclique *Au milieu des sollicitudes*. Ce n'est point une fantaisie d'érudition ou d'archéologie qui nous fait rouvrir et reproduire ces pages de Léon XIII : C'est la recommandation ACTUELLE de Pie XII, adressée tout spécialement AUX CATHOLIQUES FRANÇAIS. Dans sa lettre du 14 juillet 1954 aux Semaines Sociales de France, le Saint-Père a rappelé qu'il existe une doctrine chrétienne concernant le pouvoir civil. Il demandait aux catholiques français d'affermir leur pensée sur les principes chrétiens concernant le pouvoir civil, si souvent réaffirmés par les Pontifes romains, Surtout DEPUIS LÉON XIII ». Il précisait qu'il s'agit bien des problèmes politiques modernes : « Quiconque en effet n'en possède pas (de ces principes) une claire notion risquerait de se laisser abuser par une présentation toute spécieuse des problèmes nouveaux posés à l'État moderne. [^2]:  -- (1). Léon XIII, *Notre consolation*. [^3]:  -- (1). Léon XIII, *Notre consolation*. [^4]:  -- (2). Pie X, *Notre charge apostolique*. [^5]:  -- (3). Pie XII, 14 février 1949. [^6]:  -- (4). Pie XI, *Dilectissima Nobis*. [^7]:  -- (5). Léon XIII, *Libertas*. [^8]:  -- (1). Léon XIII, *Notre consolation*. [^9]:  -- (1). Pie X, *Notre charge apostolique*. [^10]:  -- (2). Ces trois formes classiques sont traditionnellement dénommées : « monarchie », « aristocratie ». « démocratie ». Elles peuvent se combiner sous diverses formes dans ce que l'on appelle les « régimes mixtes », c'est-à-dire comportant dans leur structure des éléments « démocratiques », des éléments « aristocratiques » et des éléments « monarchiques ». Voir sur ce point *Itinéraires*, n° 24, pp. 53-54. [^11]:  -- (3). Pie X, *Notre charge apostolique*. [^12]:  -- (4). Pie XII, 24 décembre 1944, citant Léon XIII, *Libertas*. [^13]:  -- (1). *Le Monde*, 15 janvier 1958. [^14]:  -- (1). *Le Monde*, 29 mai 1958. [^15]:  -- (2). *La Croix*, 1^er^ juin 1958. [^16]:  -- (1). Léon XIII, Au milieu des sollicitudes. [^17]:  -- (1). Pie XII, 24 décembre 1944. [^18]:  -- (1). Pie XII, 24 décembre 1944. [^19]:  -- (2). Pie XII, 23 décembre 1956. [^20]:  -- (1). Pie XII, 2 octobre 1945. [^21]:  -- (1). Léon XIII, *Immortale Dei*. [^22]:  -- (2). Léon XIII, *ibidem*. [^23]:  -- (1). Léon XIII, *Libertas*. [^24]:  -- (1). Léon XIII, *Immortale Dei*. [^25]:  -- (2). Léon XIII, *Libertas*. [^26]:  -- (1). Pie XII, 6 décembre 1953. [^27]:  -- (1). Pie XII, 23 juin 1951. [^28]:  -- (1). Pie XII, 5 août 1950. [^29]:  -- (2). Pie XII, 14 septembre 1952. [^30]:  -- (1). Allusion au « libéralisme économique ». [^31]:  -- (2). Pie XII, 7 mars 194-8. [^32]:  -- (1). Pie XI, *Quadragesimo anno*. Ce « PRINCIPE SI GRAVE DE PHILOSOPHIE SOCIALE » est analysé et commenté infra. dans l'article de Marcel Clément. [^33]:  -- (2). Pie XII, Lettre aux Semaines sociales de France, 14 juillet 1954. [^34]:  -- (2). Annexion concrètement étudiée par Henri Charlier dans sa série d'articles : « Se réformer ou périr », *Itinéraires*, numéros 2, 3, 4, 6 et 24. [^35]:  -- (1). Pie XII, Lettre aux Semaines sociales de France, 14 juillet 1954. [^36]:  -- (1). Pie XII, 8 janvier 1947. [^37]:  -- (1). Pie XII, Lettre aux Semaines sociales de France, 14 juillet 1944. [^38]:  -- (2). Pie XII, *ibidem*. [^39]:  -- (1). Pie XII, *ibidem*. [^40]:  -- (1). On peut relire aujourd'hui avec profit le livre d'Etienne Gilson qui s'intitule précisément : *Pour un ordre catholique*. Édité en 1934 par Desclée de Brouwer, cet ouvrage n'est pas épuisé. [^41]:  -- (2). Pie XII, 14 septembre 1952. [^42]:  -- (3). Pie XII, 11 mars 1951. [^43]:  -- (1). Déclaration de l'Assemblée des Cardinaux et Archevêques, 7 mars 1958. [^44]:  -- (1). *Histoire para. de la IV^e^ République* (Grasset éditeur) [^45]:  -- (2). Léon XIII, *Immortale Dei*. Cf. saint Augustin, In Joan., tract. 28, n° 2. [^46]:  -- (1). Jean, XVII, 21. [^47]:  -- (1). Voir l'éditorial de notre numéro 24. [^48]:  -- (1). Saint Pie X, 29 novembre 1911. Sur les circonstances de ce discours, voir le livre de l'*Enquête sur le nationalisme* (Nouvelles Éditions Latines, 1957), pages 113-114. [^49]:  -- (1). *Enquête sur le nationalisme*, page 114. [^50]:  -- (1). Pie XI, *Quadragesimo anno*, n°. 86-88. [^51]:  -- (1). Cf. *Enquête sur le nationalisme*, page 238. [^52]:  -- (1). Pie XII, Message de Noël 1956.