# 100-02-66 1:100 ### Dix ans IL Y A DIX ANS, au moment de la fondation d'ITINÉ­RAIRES, quatre personnes, pas une de plus, m'avaient promis leur collaboration régulière : Henri Char­lier, Louis Salleron, Marcel Clément, Henri Pourrat. Quatre autres avaient accepté d'apporter une colla­boration plus ou moins occasionnelle : l'amiral Auphan, Henri Massis, Marcel De Corte, Jean de Fabrègues. \*\*\* Jean de Fabrègues partit le premier, c'est-à-dire aussitôt, en me laissant une lettre que j'ai gardée et un conseil que je me suis appliqué à garder le moins pos­sible : « *Souffrez. Soyez solitaire. *» ([^1]) On peut avec la grâce de Dieu être solitaire autant qu'il le faut, mais on ne fait pas une revue tout seul. Nous étions très peu nombreux en mars 1956. La revue avait à peine 96 pages. Les plus généreux pronostics nous donnaient trois à six mois d'existence. Nous étions numériquement misérables. 2:100 Mais, si misérables que nous fussions dans tous les domaines du compte et du calcul, et que notre existence dût être brève ou longue, il était certain d'avance que nous ne serions jamais une « chapelle », une « secte » un « groupuscule ». Henri Charlier, Louis Salleron, Marcel Clément, Henri Pourrat et Jean Madiran, cela ne peut faire un groupuscule ni une chapelle, car dès l'origine nous étions d'une diversité extrême de tempé­rament, d'âge, de formation, d'expérience. Nous n'avons pas eu les années suivantes à « ouvrir » la revue : elle était au départ aussi « ouverte » qu'on peut l'être, même quand elle était encore peu habitée. Il y manquait seu­lement la présence et le concours de frères éloignés, « protestants » et « orthodoxes », qui sont arrivés par la suite. Le nombre est venu peu à peu : tout naturelle­ment, il est venu à l'image de la diversité initiale. La revue *Itinéraires* compte maintenant une vingtaine de collaborateurs réguliers, auxquels s'ajoutent une quarantaine de collaborateurs plus ou moins occa­sionnels. En ce dixième anniversaire, je pense d'abord à ceux qui, résolument, m'ont apporté d'emblée leur concours, avant même d'avoir vu le premier numéro : Henri Charlier, Louis Salleron, Marcel Clément, Henri Pourrat ; et avec eux l'amiral Auphan, Henri Massis, Marcel De Corte. Ils avaient confiance ? Je n'en sais rien. Ils faisaient confiance, ce n'est pas exactement la même chose et c'est beaucoup plus important. Ils faisaient confiance à l'aventureuse entreprise que nous lancions, et d'abord ils la jugeaient nécessaire. Henri Massis, même aux moments où une partie de ses amis et sans doute un côté de son cœur ne nous approuvaient pas tout à fait, a toujours tenu à figurer nommément au nombre des rédacteurs d'ITINÉRAIRES. 3:100 L'amiral Auphan est devenu le président des COMPAGNONS D'ITINÉRAIRES. Marcel De Corte, avec l'ardeur et l'éclat que l'on sait, est toujours à nos côtés. \*\*\* Le second à nous quitter fut Henri Pourrat. Il est mort en juillet 1959. Jusqu'au dernier moment, il était avec nous, et s'il donnait à la revue ces « contes » mer­veilleux un à un tirés d'un inépuisable « trésor », c'était pour nous aider, à sa manière et dans son registre. D'aucuns iront se demander comment un ancien rédac­teur de *Sept* put devenir un complice d'*Itinéraires*. Mais je crains fort que les amateurs de thèses ne trouvent là matière à étudier aucune « évolution ». Un homme de la catégorie d'Henri Pourrat, et au vrai un homme digne de ce nom, ne peut d'aucune manière ni à aucun degré être défini ou classé d'après les publications auxquelles ; il apporte sa collaboration. Contrairement à ce que tant de demi-savants et tant de demi-imbéciles croient aujourd'hui. \*\*\* Le troisième à nous quitter fut Marcel Clément. En 1962 il est devenu rédacteur en chef de *L'Homme nouveau*. Et plus tard Luc Baresta, venu en 1960 apporter le précieux et puissant renfort de sa collabo­ration régulière à la revue, devra s'éloigner lui aussi pour assumer à partir de 1964 la rédaction en chef de *La France catholique*. 4:100 Ces tâches du journalisme -- très différentes de celles qui incombent à une revue de réflexion et de recherche comme la nôtre -- sont terri­blement absorbantes et décevantes, si l'on compare le temps qu'elles dévorent avec ce qu'il en reste. Mais enfin il faut qu'elles soient tenues, fût-ce comme une mission de sacrifice. Dans le journalisme catholique, Luc Baresta et Marcel Clément occupent actuellement une place hors de pair. Marcel Clément est l'un de ceux qui ont le plus con­tribué à placer la revue sur son orbite. Nous ne pourrons jamais oublier ce que furent pour *Itinéraires*, de 1956 à 1960, son dynamisme et son sens surnaturel. Il avait été le premier peut-être en France, en tous cas le premier parmi nous, à comprendre vraiment l'extraor­dinaire portée de l'enseignement quotidien de Pie XII. Il était au milieu de nous le dispensateur et le commen­tateur de cette immense richesse, donnée à un siècle qui l'a méconnue. Sans Marcel Clément, nous aurions peut-être eu nous aussi la disgrâce de passer à côté de Pie XII. \*\*\* Tous les autres du premier jour sont toujours là. Henri Charlier, à qui la revue doit chaque mois beaucoup plus qu'il n'apparaît. A la fin de l'année 1955 ou au début de l'année 1956, je lui avais dit : -- Je vais fonder une revue qui sera comme ci et comme ça. Vous pourrez y collaborer ou non, comme vous voudrez ; mais ce sera avec vous ou pas du tout. 5:100 Le premier volume de la « Collection Itinéraires » est un livre d'Henri Charlier : *Culture*, *École*, *Métier*. J'ai voulu marquer de cette manière que nous sommes l'humble écolier de sa pensée. Non pour lui faire par­tager la responsabilité de nos déficiences : il n'en a aucune ; il n'y a qu'un directeur de la revue. Mais si la revue *Itinéraires* a pu rendre quelques services à ses lecteurs, c'est à Henri Charlier qu'en revient le mérite premier. A Henri Charlier, la revue doit aussi son frère André Charlier qui, dans le registre qui lui est propre, est un peu comme son fils spirituel. Et ce que nous devons à André Charlier ne peut être mesuré. \*\*\* Louis Salleron lui aussi est toujours là. C'est lui en quelque sorte le plus ancien d'*Itinéraires*, plus ancien que moi, c'est lui le premier. Un an avant la fondation, il avait cru comprendre dans mes propos que je voulais fonder une revue. J'étais bien décidé alors à ne jamais rien faire de semblable. Je parlais de la nécessité d'une revue d'un type nouveau, sans aucune intention de me jeter personnellement à l'eau. Peut-être Salleron voyait-il plus clair en moi que moi-même ? Il a l'esprit aussi prompt que profond. Il était enthousiaste. C'était chez Lipp, la seule, fois je pense que j'y aie déjeuné, avec bien sûr l'abominable choucroute. Il fut désolé que je ne fasse rien, car il en était déjà ; et comme à son ordinaire, plein d'idées et de projets. 6:100 Onze ans plus tard, aujourd'hui, portant le poids commun de tout ce qui est arrivé à la France, à l'Église, à l'Occident, à la Chrétienté, il est toujours sur la brèche, il est notre maître en énergie, en indépendance, en courage. Sa pensée, sa personne sont l'honneur et la force de la revue. Et tous ceux d'entre nous qui le connaissent, avec admiration, avec reconnaissance, l'aiment fraternellement. \*\*\* Marcel De Corte est toujours là. Et l'amiral Auphan. Et Henri Massis. Et puis sont venus, à des époques différentes et par des voies diverses, le Père Calmel, Alexis Curvers, Dominique Daguet, Claude Franchet, Georges Laffly, Eugène Louis, Henri Massault, Thomas Molnar, Jean-Baptiste Morvan, Paul Péraud-Chaillot, Henri Rambaud, Joseph Thérol. Quand Mgr Marcel Lefebvre désire publier quelque chose dans une revue française, c'est à *Itinéraires* qu'il le confie. Quand Jean Ousset trouve quelques instants à dérober aux tâches harassantes et capitales de l'Office international, il vient s'inscrire au sommaire de la revue *Itinéraires.* Je ne puis nommer tout le monde, tous les « nouveaux » par rapport à mars 1956. Et il n'y a pas lieu. Ce dixième anniversaire appartient d'abord à ceux de mars 1956, à Henri Charlier, à Louis Salleron ; à Marcel De Corte, à l'amiral Auphan, à Henri Massis ; aux lecteurs du premier jour ; et à nos morts de ces dix années. 7:100 Que tous ceux qui, au cours de ces dix années, ont peu ou prou apporté leur contribution au contenu intel­lectuel et spirituel de la revue, à son rayonnement, à sa diffusion, trouvent ici le remerciement que je leur adresse de tout cœur. Avoir vécu dix ans, travaillé dix ans, combattu dix ans, dans les circonstances actuelles et dans les conditions qui nous sont faites, ce n'est pas rien. Mais c'est à Dieu que tous ensemble nous devons adresser une action de grâces. *Deus autem fidelis est*. A Dieu et à ceux qui, nous en avons la ferme espérance, sont auprès de Lui nos intercesseurs : Henri Pourrat, Joseph Hours, Georges Dumoulin, Antoine Lestra, Charles De Koninck. \*\*\* La diversité de nos morts est l'image et le résumé de la diversité des vivants, de cette communauté de travail et d'espérance que compose la revue *Itinéraires.* La hauteur de nos morts est un exemple et un appel. A nos lecteurs bienveillants, indulgents, amicaux, nous pouvons dire que nous n'avons eu d'autre pensée que de les servir. Par leur attention, par le cœur, et pour certains d'entre eux par leur dévouement à la diffusion opportune et utile de la revue, ils sont des nôtres. S'ils nous interrogent, en ce dixième anniversaire, sur l'ave­nir de la revue et sur nos intentions, nous n'avons d'autre réponse que celle-ci : Nous continuons d'avancer, à travers la grande nuit du XX^e^ siècle, en essayant d'y faire, pour ceux qui s'en soucient, un peu de lumière ; une lumière qui n'est point nôtre, qui est celle que nous avons reçue ; à la grâce de Dieu ; et avec la présence amicale de nos morts. 8:100 Nous continuerons à tâcher de faire une revue qui soit digne de ce que fut Charles De Koninck ; qui soit digne de ce que fut Antoine Lestra qui soit digne de ce que fut Georges Dumoulin. Qui soit digne de ce que fut Joseph Hours. Qui soit digne de ce que fut Henri Pourrat. 9:100 ### Henri Pourrat *Il fallait empêcher les enfants\ de jeter des bouquets dans l'éternité* LE PLUS GRAND ÉCRIVAIN de langue française qui restait encore vient d'être rappelé à Dieu. Henri Pourrat est mort en la nuit du 16 au 17 juillet, dans sa maison d'Ambert. Il était peu soucieux de gloire mondaine et n'allait jamais à Paris ; aussi parlait-on peu de lui et de son œuvre et jamais aucun reflet de cette gloire équivoque faite de réclame ou de scandale qui alimente généralement la presse n'a terni la pureté de sa vie. \*\*\* On peut souffrir de cette place secondaire faite dans l'opinion à nos plus grands hommes ; on ne saurait s'en étonner : un professeur de la Sorbonne pouvait faire une histoire de la littérature française jusqu'en 1930 sans parler de Maurras, de Claudel, ni de Péguy (mort en 1914). Une maison d'édition catholique éditait l'an passé un livre qui, dit-elle, suffirait à l'étranger qui voudrait connaître l'essentiel de notre littérature. Giraudoux, Gide, Mauriac y ont leur place. Il ne semble pas d'après le compte rendu que le théâtre de Claudel, sa poésie, celle de Péguy aient attiré l'attention de l'auteur, ni bien entendu Henri Pourrat. 10:100 Cette conjonction de la Sorbonne et de l'opinion catholique pour cacher au public nos vrais grands hommes est une des tristes conséquences d'un monopole d'État sur l'enseignement. Car si la jeunesse au moins était in­formée par ses maîtres de nos vraies grandeurs, la presse elle-même, sélection des esprits non créateurs, ne pourrait faire écran entre notre élite et le public. Nous assistons à une véritable décadence intellectuelle de la France à qui ne sert de rien d'avoir eu les meil­leurs penseurs et les meilleurs artistes du siècle qui vient de s'écouler. Il y a certainement en France beau­coup plus de lecteurs vivants de Françoise Sagan, que de Mistral, de Péguy ou de Pourrat. Et il en va de même pour les arts : dès 1900, les meil­leurs ouvrages de Cézanne, de Gauguin, de Van Gogh étaient dans les musées étrangers, non dans les nôtres qui n'ont eu que les restes (ou des dons). La renommée d'Henri Pourrat est universelle alors que cet article apprendra peut-être, hélas, même à quel­ques-uns de nos lecteurs qu'il a écrit des œuvres qui dureront autant que la langue française. \*\*\* Au Canada on nous disait : « Ah si vous pouviez obtenir qu'Henri Pourrat vînt au Canada... » « Si l'Aca­démie française pouvait le déléguer à un de nos con­grès !... » « Pour nous qui aimons la France son « Anne-Marie » de *Gaspard des Montagnes* est le type de la jeune fille et de la femme française. » Nous étions obli­gé de répondre que Pourrat fuyait les congrès et que jamais l'Académie française ne déléguerait quelqu'un qui ne sortît de son sein, qui ne l'avait pas sollicité, un homme inconnu des salons de Paris et qui n'aurait ja­mais le courage de faire quarante visites. Mais, dit Via­latte dans les *Visages de l'Auvergne :* « On trouve son image dans les manuels irlandais, dans les librairies tchèques, dans les tirages de luxe des techniciens alle­mands, de papier pur chiffon. Mais il mérite une place plus haute encore dans les annales de la nature, du cœur et de la poésie... » 11:100 Et puisque la renommée universelle nous a fait avan­cer le nom de *Gaspard des Montagnes* disons tout de suite que cette œuvre restera, comme la Chanson de Roland, la vie de saint Louis, Gargantua, Mireille et les danses de Rameau. Et elle est tellement originale dans notre littérature qu'on ne peut la mettre à son plan qu'en la plaçant à côté d'ouvrages qui ne lui ressemblent pas. \*\*\* *Gaspard des Montagnes* ([^2]) n'est pas un roman bien qu'on y suive de bout en bout l'histoire des deux héros ; c'est un assemblage des contes d'hiver à la veillée, des souvenirs paysans d'anciens crimes, des drôleries de vil­lage arrivées jadis ou inventées, réunis avec un art très complet, très savant, très subtil autour d'une idée de grandeur, sur quelques jeunes gens d'une même géné­ration, hardis, bien vivants, *et honnêtes.* Le personnage qui donne au livre son titre, Gaspard des Montagnes, est un de ces héros populaires vif dans la pensée, hardi dans l'action comme l'a été Ulysse pour les Grecs, comme l'ont été les héros de nos Chansons de Gestes, Roland ou Guillaume d'Orange, seigneurs parfois de trois villages et qui grâce à quelques poètes emplissent l'Histoire. Les bûcherons de l'Argonne chantent toujours sur une admi­rable et antique mélodie : *Ô Regnaud, réveille, réveille* *Ô Regnaud, réveille-toi...* 12:100 C'est le Regnaud du temps de Charlemagne. Et lorsqu'on leur demande si la chanson est ancienne ils disent : « Je crois bien, nos grands-pères la savaient. » Car l'histoire, pour le peuple, c'est cela : ce que ra­content les grands-parents ; au-delà, malgré l'école pri­maire, règne une nuit indéterminée avec ces quelques lueurs indécises qui sont les souvenirs des pères. La composition de *Gaspard des Montagnes* est une réussite unique et c'est pourquoi nous la comparons aux danses de Rameau. Car celui-ci a fait arriver un grand art dans ces danses, notre tradition musicale populaire. Toutes ces bourrées, ces branles, ces tambourins, ces musettes qui depuis le fond des âges ont traduit, non sans mélancolie très souvent, les aspirations populaires à la joie, au bonheur, à l'amour sont devenues chez Ra­meau comme un regret du Paradis perdu et une aspi­ration à l'amour universel, avec toutes les délicatesses mentales du grand art. Cependant le principal personnage de *Gaspard* c'est *Anne-Marie.* Comme Chimène elle est une héroïne de l'amour et la vertu. Mais les nécessités d'art de la tra­gédie en font une crise rapide. Les vertus chrétiennes qui sont au fond de l'honneur de Chimène sont suppo­sées, sous-entendues, comme allant de soi. Dans le déve­loppement de la contée, Anne-Marie a le temps de mon­trer la piété d'Antigone et la simplicité de Benoîte, la bergère du Laus. Comme Péguy à la veille de sa mort elle trouve le temps d'orner de fleurs les statues de la Sainte Vierge et de faire ainsi des bouquets pour l'éter­nité. Elle fait la lessive comme Sœur Thérèse au Carmel, et comme Nausicaa ; elle va faner ses prés. Dieu merci, c'est une simple paysanne de France, une maîtresse de domaine, comme il y en a encore, faisant son devoir d'état avec la croix sur le cœur. Henri Pourrat a eu l'adresse de placer l'histoire d'Anne-Marie assez loin dans le temps pour que les dé­tails matériels ne gênent point la poésie. Comme le dit Racine dans la préface de Bajazet : « Le respect qu'on a pour les héros augmente à mesure qu'ils s'éloignent de nous. » Le temps qui a passé les dépouille de l'accidentel et dégage les souvenirs spirituels. 13:100 Le vieil outil au manche poli par la main du père et du grand-père (nous nous servons nous-même des pierres à affûter et des ou­tils de notre arrière-grand-père) parle de cent ans d'un labeur obscur et obstiné dans l'honneur des tâches bien faites. La vieille cheminée rassemble pour nous les an­cêtres qui s'y chauffaient, le grand-père enfant qui tirait les pommes de terre de sous la cendre. Et ainsi des évé­nements. Ils paraissent pour la nation et les familles comme des aurores, des midis, ou des soirs. L'histoire de Gaspard des Montagnes se passe sous le premier Empire. Pourrat a montré ce qu'il appelle les *grandes mœurs* ce sont les mœurs d'une société chrétienne ; elles sont oubliées, elles sont à réapprendre, elles n'ont jamais été parfaitement appliquées que par les saints ; Anne-Marie s'y essaie au milieu d'épreuves tragiques dans le train des devoirs journaliers. Ce n'est ni Chimène, ni Anti­gone, ni Nausicaa, c'est Anne-Marie Grange, une femme de notre temps, pour notre temps, mais unique comme elles, significative comme elles, que la belle âme d'Henri Pourrat propose à l'imagination de notre jeunesse com­me le modèle de ce qu'on peut et ce qu'on doit pour ra­mener l'Amitié dans le monde. Enfin Anne-Marie Grange est « *l'idéal de la jeune fille et de la femme fran­çaise *» pour les étrangers qui nous aiment. Le charme poétique de *Gaspard des Montagnes* ne tient pas qu'à la beauté et la vérité des caractères ; il tient à un grand amour de la création et de la beauté du monde qu'Henri Pourrat exprime avec une sûreté dans le rythme musical qui l'apparente à Chateaubriand et à Virgile. \*\*\* Cette œuvre maîtresse d'Henri Pourrat n'enlève rien à l'intérêt des autres, qui sont très diverses. *La cité perdue* est un essai provoqué par les controverses au sujet du véritable emplacement de Gergovie, c'est aussi une promenade en Auvergne. 14:100 *L'épopée de Guillaume Douarre* est une biographie d'un évêque Mariste à qui la France doit d'avoir pu civiliser la Nouvelle-Calédo­nie à la suite d'un apostolat héroïque semé de martyrs. C'est la réparation d'une injustice, car au centenaire de l'entrée de la Nouvelle-Calédonie dans la Communauté française, il n'a pas été question de Mgr Douarre. Le dernier ouvrage d'Henri Pourrat est une *Histoire des gens dans les montagnes du Centre.* C'est l'histoire vue par les gens qui l'ont subie et qui l'ont faite, dans l'air du temps. « Au pas-par-pas des bœufs, les araires de bois gris piaulent comme des pipeaux. Chantant puis criant après les bêtes et reprenant le chant, ils labou­rent du lac rouge de Saint-Hilaire à la Montagne de Bar. Les pèlerins retournant de Terre Sainte revoient cela, la contrée tout entière en son arroi de printemps. » En tous ces ouvrages si divers Henri Pourrat garde les mêmes qualités poétiques du style et le sens profond du besoin d'amour de l'homme. \*\*\* Mais nous ne faisons ici qu'un *Memento* et non une étude littéraire. Un grand écrivain vient de retourner à Dieu après avoir dans toute son œuvre chanté la créa­tion et appelé les hommes à l'amitié. Il ne faut pas croire qu'il sera facilement remplacé ; qu'on aura sûre­ment tout de suite d'autres grands écrivains. Il y a des trous dans l'histoire littéraire des peuples. Dieu peut combler ce trou quand il voudra. Mais il peut aussi se lasser de donner des grands hommes à une nation qui les néglige, les laisse inutilisés ou les fait mourir en prison. 15:100 Le gouvernement suédois a jadis commandé à Selma Lagerlôf un écrit destiné aux écoles pour apprendre aux enfants l'histoire, la géographie, les beautés et les gran­deurs de leur pays, quelque chose comme ce *Tour de France de deux enfants* qui servait de livre de lecture dans notre jeunesse (Il fut mis au goût du jour par les générations successives, on y supprima Dieu, l'Église, le Dimanche.) Sur ce programme Selma Lagerlöf a fait un chef-d'œuvre : *Le merveilleux voyage de Nils Hol­gerson* qui je pense est dans les bibliothèques des hom­mes cultivés de France et dans toutes celles des enfants. Un jour au sujet de *Gaspard des Montagnes* Daniel Halévy me dit : « Voilà un livre que le gouvernement devrait acheter pour le mettre dans toutes les biblio­thèques scolaires des écoles et lycées de France. » Mais nos gouvernements étaient bien incapables de penser, sinon de travers. Il fallait aussi empêcher les enfants de jeter des bouquets dans l'éternité. \*\*\* Je suppose -- ne la lisant pas -- que la grande presse a fait petit état de la mort de Pourrat. Mais des milliers de montagnards du Livradois et des Monts du Forez sont descendus à son enterrement, conscients qu'un homme de chez eux avait magnifié et éclairé de la lumière de l'esprit non seulement leur petite patrie, mais les aspi­rations confuses que Dieu a déposées dans l'âme « de tout homme venant en ce monde ». 16:100 ### Joseph Hours « Tout ce à quoi nous croyons, tout ce que nous aimons et qui donne à la vie un sens, tout cela aujourd'hui est en danger. » IL VENAIT D'AILLEURS. D'une autre génération. Et d'autres batailles. Mais il venait de France et il était du Christ. Et il est venu parmi nous si na­turellement que je ne sais plus comment cela se fit. Il était avec nous et nous étions avec lui comme de­puis toujours, Et pourtant ce n'était pas depuis tou­jours, puisque le commencement, c'est qu'il fut un peu accroché à la fin du numéro 10. Il m'écrivit, de­mandant à connaître la revue. Je la lui envoyai. Au bout de quelque temps, il me demanda de cesser, sans hostilité ni critique, mais trouvant *Itinéraires* en dehors de ses préoccupations. C'était en 1957. Et en 1960 il était des nôtres, tout en restant lui-même. Son premier article est dans le numéro sur Massis, en janvier 1961, écartant par un « à quoi bon » sur le­quel il n'est jamais revenu, du moins avec moi, toutes explications personnelles. Je ne sais s'il en a donné ailleurs, s'il en a laissé quelque part. A moi qui ne lui en demandais aucune, il n'en a pas donné. Il était là, il était avec nous, en un coude à coude familier, et définitivement. Il commençait son premier article par ces mots : 17:100 « *Des lecteurs de cette revue qui m'auraient fait l'honneur de retenir mon nom pourront être surpris de le voir figurer au sommaire de la présente livraison. Dois-je avouer que je le suis moi-même ? Des explica­tions ? à quoi bon ? Le fait importe si peu ! Que signi­fient aujourd'hui les questions de personnes et les petits jeux des coteries littéraires, escarmouches, grandes polé­miques, réconciliations ou ruptures ? Toute cette escrime est plus que jamais hors de saison et nous avons d'autres soucis. Tout ce à quoi nous croyons, tout ce que nous aimons et qui donne à la vie un sens, tout cela aujour­d'hui est en danger.* » Il évoquait ainsi d'autres compagnonnages que je n'ai pas connus et sur lesquels je ne l'ai pas interrogé. De lui-même il m'en dit une fois ou l'autre quelques mots, avec l'accent de mélancolie, m'a-t-il semblé, ou de tristesse, que l'on a pour les amitiés que l'on n'a pas dé­nouées, mais qui se sont dénouées. Ce n'est point par lui que j'en ai connu le détail. C'est par les journaux que j'ai appris, ou qu'il m'est revenu en mémoire, qu'il avait collaboré à l'*Aube* et à la *Vie intellectuelle ;* qu'il était du Comité de la *Chronique sociale ;* qu'il avait participé à la fondation du M.R.P. et qu'on le considé­rait alors comme un gaulliste de gauche. Il m'avait seu­lement donné son livre *Œuvre et pensée du peuple fran­çais,* paru en 1945 chez Bloud et Gay, en me disant que j'y verrais moi-même ce qui était fondamental dans sa pensée, et ce qui avait été illusion circonstancielle. Il ne faisait guère de commentaires sur lui-même. Cher Joseph Hours. Il imaginait bien que son nom au sommaire d'*Itinéraires* provoquerait quelques mou­vements. Il n'en avait pas prévu la violence passionnée, la fureur extrême. Aux démarches pressantes faites au­près de lui pour l'en détourner, il ne consentit que de brèves allusions, et là non plus, je ne l'interrogeai pas. Il comprit je crois que ce n'était point par indifférence mais par une volonté, qui s'accordait avec son propre sentiment, de tourner la page sur les misères accessoires. Il avait dit l'important : « Tout ce à quoi nous croyons, tout ce que nous aimons et qui donne à la vie un sens, tout cela aujourd'hui est en danger. » \*\*\* 18:100 Plus de deux ans il a été des nôtres, et jusqu'au der­nier jour. Il nous a donné ses deux dernières années. Il trouvait ici la liberté d'écrire selon sa conscience. Il nous apportait sa pensée et son cœur ; il m'écrivait en jan­vier : « L'épreuve quotidienne que constitue la Revue re­présente un labeur écrasant. Je suppose que vous êtes soumis à la tentation de l'amertume. Je la connais bien et c'est pourquoi je vous propose de lutter ensemble contre elle, priant à cet effet l'un pour l'autre. » Malgré la différence des âges il était simplement fra­ternel, et toujours présent, avec délicatesse, aux soucis et aux peines qu'il devinait. Il m'écrivait beaucoup de lettres et peu d'articles : ses articles dans *Itinéraires* étaient chacun une étude, une prise de position, longue­ment pesée, il m'en parlait des semaines et des mois à l'avance. Il était plein de projets nombreux ; je ne le pressais pas, je croyais que nous avions le temps. Il était attentif, méditatif et scrupuleux. Sensible aussi, in­finiment. Très vite étaient devenues insurmontables les difficultés qui l'empêchaient de parler, dans la presse catholique, du danger de l'Islam avec une exacte précision, et il en fut durablement assombri. Il m'en parlait souvent. Cela, c'est son mot, « l'affli­gea beaucoup » ; il y voyait d'une manière extraor­dinairement aiguë et douloureuse la marque d'une déchéance des consciences. Il aura terminé sa vie dans la souffrance, à laquelle il communiait de plus en plus intensément, du martyre des communautés et des églises d'Algérie ; dans la souffrance aussi de l'anes­thésie où il voyait sombrer l'honneur, la fidélité, la pié­té nationale, la mémoire des morts, le culte du vrai, la charité fraternelle. Il vivait passionnément la passion de la France crucifiée, de l'Église crucifiée ; et son es­pérance-était véritablement l'espérance sur la Croix. 19:100 Je relis ce qu'il m'en écrivait, et ces trois phrases où, du ton égal et doux des âmes qui dominent une indicible douleur, il résumait notre commune conviction : « Au point où nous sommes, le mal paraît très grand à l'intérieur de l'Église et il semble ne rencontrer ni résis­tance ni même simple surveillance. Mais il y a l'assis­tance du Saint-Esprit. Le mal ne prévaudra point. » \*\*\* Oui, il venait d'ailleurs. Un jour, par exception, une de ses lettres parlait un peu en détail de lui-même, et c'était pour conclure : « Je suis au fond un vieux jacobin, disciple de Riche­lieu, obligé de me mettre en garde contre un penchant vers Voltaire et vers Robespierre, ayant horreur de Rousseau, Chateaubriand ou Lamennais. Je suis en un mot l'homme de l'ordre naturel qui reçoit à genoux et tête baissée l'enseignement surnaturel. Je suis fils de mon père. » Angoissé par le trouble intellectuel qui est dans l'Église et par l'abaissement moral qui est sur la France, il n'était jamais las de servir et d'espérer. Ni d'étudier. Il faisait la redécouverte du trésor perdu de la doctrine pontificale, il découvrait la profondeur des messages de Pie XII. S'il y eut changement dans sa pensée, ce changement n'est pas dû seulement au choc de l'événe­ment : mais à la rencontre, dans une âme droite, de l'événement avec la lumière et la grâce propres de l'exac­te doctrine plus studieusement et plus abondamment méditée. Il revenait aux grandes Encycliques. En 1961, en 1962, il étudiait *Pascendi,* et c'était encore une décou­verte, il m'en parlait comme s'il ne l'avait jamais lue auparavant, ou comme s'il l'avait complètement oubliée, il m'en disait la frappante actualité. Je ne sais dans quelle mesure ce cœur chrétien et catholique avait eu autrefois une connaissance directe du corpus doctrinal des grands documents pontificaux de Léon XIII à Pie XII : mais il y venait, ou revenait, avec un regard neuf, une intelligence méthodique, une joie de toute l'âme. Il recevait l'enseignement de l'Église à genoux sans doute, la tête baissée peut-être, mais les yeux et le cœur ouverts. 20:100 Des épreuves plus directement personnelles l'atten­daient, pour le préparer et l'introduire à *l'heure pour laquelle nous sommes venus en ce monde.* Sa femme avait été rappelée à Dieu à la fin du mois de février. « Je suis écrasé, m'écrivait-il, et ma vie ne peut plus être que SERVIR ENCORE. » Il fit ce dernier article, paru le 6 mars dans *La Nation française,* « Le sang d'Alger », où il se tourne vers « ces générations qui grandissent en notre temps », espoir de la patrie, printemps de l'Église de France. Il parle une dernière fois au « désar­roi des consciences » qui s'est abattu sur les jeunes Fran­çais. « Si nous écrivons ces lignes c'est en pensant à eux. » Telles furent, graves et douces, les dernières paroles de Joseph Hours publiées de son vivant. Il était allé jus­qu'au bout, il avait achevé de SERVIR. \*\*\* Il n'aimerait point que l'on parlât trop longuement de sa personne. Nous devons à son affection d'être at­tentifs à sa voix ; de garder mémoire de son témoi­gnage ; de relire ses articles ; et de lire les deux derniers. C'est par un acte qui avait pour lui valeur d'engage­ment ultime qu'il nous a donné ces études longuement et patiemment mises au point, dont chacune est un tout achevé, un examen de conscience et un message : « Mas­sis en notre temps » (numéro 49), « Histoire et marxis­me » (numéro 56), « Nation, État, civilisation » (numé­ro 67), et la série d'articles sur « La conscience chré­tienne devant l'Islam » (numéros 60, 65 et 69). De ses études sur le christianisme face à l'Islam, qu'il avait dessein de continuer, nous formions le projet qu'il fît un livre ; un jour, plus tard, me disait-il. Un jour qui ne viendra plus. Il nous laisse la route à continuer sans lui, -- avec lui pourtant. 21:100 Son affection se partageait entre *Itinéraires* et *La Nation française ;* ou plutôt ne se partageait pas, se si­tuait au point de jonction. « J'aime beaucoup *La Nation française *», me répétait-il. Ses deux derniers articles sont l'un dans *La Nation française,* l'autre dans *Itiné­raires* ([^3])*.* Le dernier article de Joseph Hours qui ait paru de son vivant est « Le sang d'Alger », dans *La Nation fran­çaise* du 6 mars. Le dernier article qu'il m'ait envoyé pour *Itinéraires* n'a point encore paru. A la différence des précédents, c'est une brève recension, des « Notes pour servir à l'histoire du catholicisme en Chine », publiées dans ce numéro. Avec ces « Notes » on retrouvera l'historien, -- dont le souci principal est l'extension du Royaume de Dieu à travers l'histoire des hommes, et qui avait écrit dans cette même perspective : « La conscience chrétienne devant l'Islam ». Dans « Le sang d'Alger », on lira le dernier message d'un cœur français, d'un cœur chrétien qui s'est brisé à ce moment du mystère d'iniquité et du crucifiement. \*\*\* Que Dieu accueille Joseph Hours dans Sa paix. Que cet ami fraternel qui nous est enlevé nous soit rendu comme intercesseur. 22:100 ### Georges Dumoulin GEORGES DUMOULIN est mort le 30 mai, muni des sacrements de l'Église. Depuis la première an­née, depuis 1956, il collaborait à la revue *Iti­néraires*, seuls son grand âge, sa fatigue, la maladie avaient espacé cette collaboration. Georges Dumoulin fut une des grandes figures du mouvement ouvrier en France. Né dans le monde prolé­tarien, mineur du Nord, militant syndical, secrétaire confédéral de la C.G.T., il était ensuite revenu à la foi chrétienne et catholique de son baptême, et il l'avait dit. L'histoire du mouvement ouvrier retiendra que cela ne fit ni chaud ni froid au monde catholique dans son en­semble. D'ailleurs aucune conversion personnelle n'a plus aucune valeur pour la nouvelle théologie mission­naire : « *Dieu ne cherche pas* (*...*) *à se rallier le plus grand nombre possible d'hommes. Il ne s'agit pas de se rallier des hommes, il faut mettre le monde en état de conta­gion. *» ([^4]) La nouvelle pastorale, ainsi que le laissent entendre certains de ceux qui ont charge et mandat de l'ensei­gner, ne s'occupe plus de convertir des personnes. Elle veut convertir et baptiser des abstractions : l'opinion publique, les mouvements de masse, le monde moderne, l'évolution, le marxisme, le sens de l'histoire, la construc­tion du socialisme. Et pour les convertir elle commence ordinairement par se convertir elle-même à ces abstrac­tions. 23:100 Ainsi la foi personnelle retourne aux catacombes. Non plus des catacombes matérielles, physiques, loca­lisées : mais des catacombes morales, psychologiques, sociologiques. La presse catholique ([^5]) ignora complè­tement la conversion de Georges Dumoulin, ou plus exactement la connut mais décida de n'y point arrêter son attention. Le seul lieu catholique où il put s'expri­mer fut la revue *Itinéraires.* \*\*\* Pourquoi vint-il à nous ? La sympathie personnelle n'explique pas tout. Je répète qu'il vint ici parce que c'était la seule publication catholique où il pouvait s'ex­primer. La presse catholique est ouverte en permanence aux déclarations des chefs de la C.G.T. qui sont en fonc­tion, qui sont marxistes, qui sont communistes, qui sont athées ; elle est fermée à un chef de la C.G.T. qui re­trouve la foi chrétienne et catholique, qui dit pourquoi et comment : cela ne l'intéresse pas. Georges Dumoulin n'était pas intéressant pour le monde catholique tel qu'il est sociologiquement consti­tué et installé aujourd'hui en France. Il n'avait d'ailleurs pas été un « bon » cégétiste : il ne fut ni de la tendance Jouhaux, ni de la tendance Frachon. « *Toute ma vie s'est passée dans le travail,* écrivait-il ([^6]), *dans la révolte et dans la défense des intérêts des travailleurs. La seule cul­ture expérimentale dont je puisse me réclamer s'est déve­loppée dans le syndicalisme au sein duquel j'ai connu grandeur et servitude. *» Dans le syndicalisme, Georges Dumoulin ne rechercha ni la richesse ni la puissance. Il ne fit pas carrière comme Jouhaux. Il ne se rallia jamais à la puissance politique comme Frachon. Il demeura libre et pauvre. Et, crime irrémissible, que le monde ins­tallé du socialisme et du catholicisme ne lui a jamais pardonné il fut toujours opposé à la colonisation com­muniste du mouvement syndical : il y fut opposé non seulement aux moments où leur opportunisme comman­dait aux dirigeants catholiques et aux dirigeants socia­listes d'être provisoirement anti-communistes, mais il y fut opposé en permanence, pour des motifs fondamentaux, et même aux moments où les dirigeants socialistes et les dirigeants catholiques pratiquaient diverses formes de compromis ou de collaboration avec le communisme. 24:100 Un tel homme est évidemment méprisable pour les sphères sociologiquement installées du catholicisme et du socialisme. Son humble conversion fut entourée du mépris silencieux des dirigeants catholiques, et du mé­pris exprimé des politiciens du syndicalisme socialiste Georges Dumoulin « *a sombré dans la bigoterie *» ([^7])*.* Ce mépris est une grâce, annoncée et promise par l'Évangile : « *Bienheureux serez-vous quand on vous insultera, quand on vous persécutera, quand on vous calomniera de toutes manières à cause de moi. Soyez dans la joie et l'allégresse, car votre récompense sera grande dans les cieux.* » (Mt., V, 11-12.) \*\*\* Sans y avoir eu aucune part, aucune initiative, ni aucun mérite, nous nous sommes trouvés dépositaires de ce qui constitue le testament social, moral et religieux de Georges Dumoulin. Nous nous en sommes trouvés dépositaires principalement parce que dans le monde catholique tel qu'il est constitué et organisé en France, il n'y avait personne d'autre pour le recueillir ; et, véri­fication a posteriori, la publication mois après mois des réflexions si émouvantes et si profondes de Georges Dumoulin -- nourries à la fois par la grâce et par son expérience du monde du travail et du monde syndical -- n'a éveillé aucun écho perceptible parmi ceux qui diri­gent l'organisme social du catholicisme en France et parmi ceux qui fabriquent « l'opinion de masse » des catholiques. \*\*\* 25:100 Avec tous ceux qui ont aimé Georges Dumoulin, avec ceux qui l'ont suivi et ceux qui ne l'ont pas suivi, croyants et incroyants, nous garderons la mémoire de cette haute figure du monde ouvrier et du mouvement ouvrier français, si différent dans sa substance profonde du portrait fabriqué qu'en donnent les bavardages de pres­se et de congrès. Pour nous, catholiques, par delà tous les flonflons du triomphalisme progressiste, c'est une invitation à me­surer notre misère, notre honte, notre déchéance. De 1956 à sa mort, Georges Dumoulin n'a trouvé parmi nous que ces amitiés dispersées, ces amitiés non orga­niques, ces amitiés de catacombes qui survivent à la dé­sintégration intellectuelle du catholicisme. Cette désinté­gration est le mal de l'époque, le catholicisme n'en est sans doute pas responsable. Il n'est responsable que d'ac­cepter de le subir, il n'est responsable que de consentir à se mettre à l'heure et à l'image du monde contemporain. Militant et dirigeant cégétiste, un Georges Dumoulin n'était ni du côté des Jouhaux ni du côté des Frachon. Catholique, un Georges Dumoulin ne pouvait davantage être accueilli à bras ouverts par ceux qui sont en quel­que sorte les Frachon et les Jouhaux du catholicisme. Il apercevait bien dans quel état regrettable se trouve le monde chrétien lui aussi, et il nous avertissait : « Cet état est provoqué par un fléchissement de la probité intellectuelle. » ([^8]) Il voyait très nettement que le monde catholique contemporain, dans ses sphères sociologique­ment installées, est empoisonné par le consentement habituel au mensonge ; et aussi par cette lâcheté intel­lectuelle et morale qui le conduit à calculer quel est le plus fort du moment ou du lendemain, et à s'aligner sur « les nouveaux détenteurs de la force » : « *Ne sommes-nous pas en train de constater que le mensonge est devenu le plus grand mal du siècle. Mentir est aujourd'hui une règle, une vocation, un art, une carrière, une profession, une habitude, une coutume, un sport, une culture. Au mensonge classique de la diplo­matie, de la politique et du journalisme sont venus s'a­jouter tous les mensonges médiocres, subalternes et sordides de la publicité...* 26:100 *Au mensonge banal est venu se joindre le mensonge intellectuel, lequel est le plus dangereux, le plus malfaisant et le plus capable de corrompre les mœurs d'un pays, de pourrir les âmes et de tuer une civilisation. *» ([^9]) « *Ce siècle est celui du fléchissement de la civilisation occidentale. Alors mon retour aux vérités premières conduit vers ce qui s'affaiblit et non pas vers les nou­veaux détenteurs de la force. *» ([^10]) « *Mon propos se situe sans doute plus loin que notre époque, au-delà du marxisme doctrinal et du communis­me expérimental qui ne sont pas durables. Il vise à une réhabilitation, à une rédemption des métiers que les tendances de notre siècle ont frappés d'une sorte de malédiction. *» ([^11]) Aujourd'hui, Giorgio La Pira nous raconte : « Nous entrons dans une nouvelle phase de l'histoire de l'hu­manité : celle de la guerre impossible. » ([^12]) Georges Dumoulin disait plus exactement en 1959 : « *Si les dirigeants des peuples, si les peuples eux-mêmes écoutent la voix de Dieu, si le Christ est entendu, si le Saint Père de Rome est écouté, il n'y aura plus de guerre sur la terre. *» ([^13]) « Si... » \*\*\* A l'heure où le communisme n'est plus seul à dire que la religion est l'opium du peuple, à l'heure où la nouvelle théologie missionnaire nous enseigne elle aussi que *faire miroiter la vie éternelle, c'est donner de l'o­pium* ([^14])*,* Georges Dumoulin est entré dans la vie éternelle à laquelle il a cru. Dans l'Église, par l'Église, quel que soit son état hu­main, et la misère de ses docteurs, continue à passer la grâce de Dieu, qui parle à chaque âme personnelle­ment. 27:100 ### Antoine Lestra NOUS n'avons pas connu personnellement Antoine Lestra. Nous laisserons parler ici ceux qui l'ont connu. Bernard Faÿ, dans *Aspects de la France* du 29 août : « *Son amour pour le passé de la France et celui de cette ville de Lyon, sa petite patrie, était la source intarissable, de ses actes les plus courageux, de ses jugements les plus pers­picaces ; ce sage savait que l'instant où nous vivons n'est qu'un chaînon de la longue chaîne que forme la tradition. Il savait aussi qu'aux heures de danger et de confusion, il faut d'abord maintenir une claire vision, une mémoire fidè­le, et garder intact son sens des valeurs* (*...*) *-- Il ne séparait point la tradition française de la foi chrétienne : il luttait pour l'une et l'autre* (*...*)*.* « *Il n'écrivit rien qui ne fût acte de foi et de patriotisme en même temps. En 1934, il débuta par un ouvrage sur* « *le premier évangéliste des banlieues rouges *» *le Père Chevrier* (*1826-1879*) ; *en ce prêtre si courageux et si humble il admi­re celui qui sut mépriser tout ce qui ne concernait pas* « *la gloire de Dieu et le sort de la Patrie *»*. Plus tard* (*...*) *il consacra deux volumes au Père Coudren. Cette fois, il mon­trait en ce prêtre une vocation héroïque, car cet humble vicaire sut durant de longs mois célébrer le culte dans le Poitou, à la barbe des Jacobins, de leurs polices, de leurs espions et de leurs soldats. Cette biographie révèle aussi le rôle de l'* « *Aa *» *cette association secrète de prêtres ortho­doxes et pieux au XVIII^e^ siècle ; il en ressort que ses mem­bres furent, dans beaucoup de régions, les seuls mainte­neurs du culte sous la terreur et les vrais triomphateurs qui firent reculer la Révolution qui ravageait le pays et ruinait les âmes.* 28:100 « *La dernière fois que je le vis, il me lut un manuscrit qu'il finissait. Il le consacrait à l'action de la* « *Congrégation lyonnaise* » *pendant la Révolution et l'Empire. Il contait l'étonnante résistance de ses membres aux consignes des révolutionnaires fanatiques. On y voyait comment ces laïcs, bien dirigés par des prêtres saints, surent maintenir leur foi intacte et servir même le Saint-Siège au milieu des plus sanglantes proscriptions ; par leurs soins le Pape put tou­jours correspondre avec les évêques et les fidèles de France durant la longue persécution de l'Empire. Le récit, sans effort d'éloquence, revêt une grandeur sublime quand il nous décrit ces laïcs, humbles ouvriers ou bourgeois cossus, accomplissant au péril de leur vie, une tâche difficile, dont ils connaissent l'urgence sans en concevoir la portée. On mesure alors ce que peut donner une discipline pratiquée jusqu'à l'abnégation totale de soi, dans l'union au Christ et l'humilité. Ces pages méritent de voir le jour et rien ne doit être négligé pour qu'il en soit ainsi, car elles forment une sorte de* « *testament spirituel* » *à la vie si noble, si coura­geuse et si chrétienne d'Antoine Lestra.* » \*\*\* Dans le *Bulletin des Lettres de Lyon*, numéro du 15 octobre, Henri Rambaud écrit : « *Je ne suis pas sûr que nous fussions très nombreux à le mettre à son rang et je crains bien surtout qu'il soit difficile de faire concevoir l'homme qu'il était à qui ne l'aura pas connu* (*...*)*.* « *Il était né en 1884 et il ne devait à peu près rien à Maurras. Il l'admirait certes infiniment, ayant trop de goût pour ne pas placer l'écrivain très haut, trop de jugement pour ne pas sentir la force de ses argumentations et, mieux que cela, par tout un côté de sa nature, sympathisait avec la vaillance du lutteur ; et il n'était pas non plus sans rendre justice à l'admirable travail de regroupement des forcés nationales et de redressement des esprits accompli par l'Action française. Mais rien de tout cela ne faisait un disciple* (*...*)*. Il savait gré à Maurras d'avoir infusé un sang nouveau à la doctrine et de combattre la Révolution, il n'était pas sûr que ce sang fût tout à fait pur ni ce combat toujours inspiré des meilleurs motifs. Parce que Maurras n'était pas croyant, et qu'il gênait Lestra de voir le positi­visme enrôlé parmi les troupes du Roi Très Chrétien, quand pour lui les grandes heures de la dynastie capétienne étaient le règne de saint Louis, la remise par Charles VII de son royaume au Roi du Ciel et sa reprise en simple commende, le vœu de Louis XIII^e^*. » 29:100 ### Charles De Koninck *Extrait de l'article publié par Marcel De Corte dans notre numéro spécial consacré à Charles De Koninck* (*numéro 66 de septembre-octobre 1962*)*.* JE CONNAIS Charles De Koninck, de longue date, par ses écrits. Mais j'ai eu la chance de m'entretenir avec lui plus d'une fois, il y a deux ans, au cours d'un séjour de trois mois que je fis, en qualité de professeur en visite, à l'Université Laval de Québec où il enseigne. Malencontreusement, il était lui-même, à cette époque, en visite à l'Université Notre-Dame aux États-Unis. Je ne pus voir Charles De Koninck qu'aux périodes trop rares où il regagnait son foyer. Les quelques heures de parfaite com­munion affective, intellectuelle et spirituelle que j'ai passées avec lui ont scellé entre nous une amitié que ni le temps ni la distance n'affaibliront point. \*\*\* D'origine paysanne tous deux, lui Flamand, moi Wallon, nés dans le même pays, ayant les mêmes racines, réunis sur cette terre canadienne où la race campagnarde française a laissé, j'aime à le croire, son empreinte définitive, que fallait-il de plus pour nous éprouver l'un et l'autre en sym­pathie immédiate ? « La naissance décide en majeure partie », disait Hölderlin. L'expérience de la vie m'a prouvé que ceux qu'on nomme « les intellectuels » se différencient selon leurs origines terriennes ou citadines, sauf exceptions toujours possibles dans l'ordre humain caractérisé par l'*ut in pluribus*. Le solide réalisme que j'avais découvert dans l'œuvre de Charles De Koninck avant de le connaître, j'en reçus l'impression directe au contact de sa personne. 30:100 Torhout et Genappe où nous sommes respectivement nés, pays des chevaux de labour flandriens et brabançons, mêlèrent en ces heures bénies les effluves fraternelles des terres fraî­chement retournées au petit matin, à l'heure où le pre­mier soleil boit l'ardente rosée de la nuit. \*\*\* Il n'est pas étonnant que Charles De Koninck se soit découvert une vocation de philosophe aristotélicien et tho­miste, et même une vocation de théologien, j'entends de théologien enraciné dans la foi en l'Éternel, et non de théologien déraciné, voltigeant au gré des souffles éphé­mères de « l'époque ». Le paysan sait que, s'il contredit les grands rythmes permanents de la nature et s'abandonne au « mouvement de l'Histoire » autrement dit à ses songes intérieurs, il court droit à la ruine. Dès qu'un esprit réaliste approfondit l'expérience sen­sible qui est la seule voie dont nous disposons pour attein­dre le réel, il aperçoit, dans une évidence irrécusable, que l'apparente fluctuation et la multiplicité apparente de ses données sont réglées par des normes éternelles, par des essences invariables. L'univers n'est pas un chaos qui s'or­donnerait selon l'inspiration et la décision humaines. Un paysan subjectif est un rond carré, une entorse au principe de contradiction. Charles De Koninck n'a jamais appro­ché, de près ou de loin, de ces billevesées. Aussi bien, Charles De Koninck est-il également, tradi­tionaliste, un traditionaliste vivant -- ce qui est plutôt rare -- et, j'irai même jusqu'à dire, un traditionaliste « bon vivant » en dépit de la vulgarité de l'expression. Nous avons trop oublié que le rire aussi est le propre de l'homme. La vraie tradition n'a rien de morne : elle est vie et joie, parce que la sève la travaille sans cesse. Dans toute l'œuvre de Charles De Koninck éclate une sorte d'alacrité, de poussée printanière qui *continue* la recherche des grands philosophes du passé qu'il s'est choisis pour maîtres et comme guides. En bon paysan, il est l'homme de ce qui fut, de ce qui est, de ce qui sera, de ce qui *dure,* c'est-à-dire par un paradoxe aussi peu bergsonien que possible, de ce qui *demeure.* Et il l'est parce qu'il sait que la vie se renouvelle continuellement, qu'elle se prolonge comme le bois, vert, avec allégresse, avec une forte assurance qui dissipe toute morosité, et que, dans l'ordre intellectuel et spirituel, elle jaillit des constantes de l'esprit humain, tou­jours identique à lui-même, malgré « l'évolution ». \*\*\* 31:100 C'est en dînant chez Charles De Koninck, au milieu de ses nombreux enfants, aux côtés de sa femme, dans cette grande maison de la rue Sainte-Geneviève à Québec, dont il est le patriarche, que j'ai pu constater qu'il était traditio­naliste à tous les niveaux, aussi bien dans les grands repas de famille où règne ce que La Varende appelle « la gen­tille gaieté des races paysannes » que dans sa philosophie et dans sa théologie. La vie et la joie, c'est dans la tradi­tion que Charles De Koninck les puise. C'est là aussi -- car tout se tient dans la vie et le dévi­talisé est l'homme disloqué -- que Charles De Koninck, se Belge, ce Flamand, s'est révélé à mes yeux un vrai Cana­dien de la province de Québec. Sans effort, parce que ses fortes racines l'y prédisposaient, cet « émigrant » s'est adapté à la terre canadienne au point d'y retrouver sa vraie patrie. Restée en Belgique, il est probable que sa per­sonnalité vigoureuse aurait fait ombre. Au Canada fran­çais, elle s'est au contraire épanouie dans tous les sens. Je crois qu'il faut avoir une belle vitalité pour réussir une telle transplantation. Seuls les forts peuvent parvenir en quelques années à se tailler une place, à se refaire une vraie vie -- et non pas un semblant de vie vernissée par la richesse -- dans un pays d'immigration. Une grande faculté d'amour est requise pour accomplir ce tour de force. Et je ne m'étonne nullement que Charles De Koninck soit uni­versellement considéré, au Canada français et au Canada tout court, comme un Canadien dont les avis et les conseils font autorité même dans les sphères dites politiques où la philosophie n'a guère droit d'entrée. Dans son pays natal, son influence n'aurait pas dépassé un cercle restreint d'amis, tant l'*invidia* y sévit. Comme l'écrivait le cardinal Villeneuve dans sa préface au beau livre de Charles De Koninck sur « La Primauté du Bien Commun contre les personnalistes » cet ouvrage « n'est pas un livre ordinaire : il est de pure sagesse ». 32:100 Oui, il est vrai de dire que Charles De Koninck est un sage. La qualification et moins encore la réalité qu'elle désigne ne courent pas les rues aujour­d'hui. \*\*\* *Notre illustre ami Charles De Koninck est mort subitement à Rome le samedi matin 13 février. Illustre, hélas, cet écrivain de langue française l'était partout dans le monde catholique, sauf en France, où la circulation des idées est interrompue.* « *La France catholique *» *écrit à ce sujet :* « *Dans la tristesse où ce deuil plonge bien des chrétiens, naît le regret de n'avoir pas fait davantage, en France, pour qu'une pensée si riche et si sûre soit plus largement connue. *» \*\*\* *Charles De Koninck était au Concile l'expert en théologie de l'archevêque de Québec, Mgr Maurice Roy* (*récemment créé Cardinal*) ; *il était membre d'une sous-commission conciliaire aux travaux de laquelle il participait au moment de sa mort. La veille, il avait prononcé une conférence devant les étudiants du Collège pontifical canadien. Le lundi suivant, il devait être reçu en audience privée par Paul VI. Il avait 58 ans.* *Sa dépouille mortelle a été ramenée à Québec le 17 février et les funérailles ont eu lieu le 19 février.* \*\*\* *Charles De Koninck était né à Thorout* (*Belgique*)*, le 29 juillet 1906, d'une famille dont les origines sont flamandes, françaises, espagnoles et autrichiennes. Venu dès son enfance, avec sa famille, à Detroit* (*Michigan*)*, il retournait en 1917 faire ses études secondaires au Collège d'Ostende, puis ses études supérieures à l'Université de Louvain, où en 1934 il fut reçu docteur en philosophie. La même année il s'établit à Québec où lui fut attribuée la chaire de philosophie de la nature de l'Uni­versité Laval, chaire qu'il conserva jusqu'à sa mort, c'est-à-dire pendant 31 ans.* *La Faculté de philosophie de l'Université Laval, à Québec, a le rare privilège d'être une Faculté* CANONIQUE *qui est égale­ment reconnue par l'État.* 33:100 *En 1939, Charles De Koninck fut nommé doyen, de la Faculté et il exerça cette charge jusqu'en 1956.* *Il était redevenu doyen de la Faculté de philosophie en juin 1964.* *D'autre part, Charles De Koninck avait été reçu docteur en théologie de l'Université Laval et depuis 1937 il était professeur à la Faculté de théologie de cette Université.* *Ses travaux théologiques ont joué un rôle important dans la préparation de la définition du dogme de l'Assomption. Cette partie de ses travaux est rassemblée dans son ouvrage :* « *La Piété du Fils *»*.* *Le* « *Laval philosophique et théologique *»*, que dirige Mgr Alphonse-Marie Parent, bénéficiait depuis sa fondation en 1945 de la collaboration habituelle de Charles De Koninck.* \*\*\* *L'œuvre écrite de Charles De Koninck, en français, en anglais et en flamand, est considérable. La bibliographie établie par l'abbé Armand Gagné, parue dans notre numéro spécial, s'arrêtait en 1962 et comportait 100 titres* (*livres et articles*)*.* *Ce numéro spécial d'* « *Itinéraires *» *entièrement consacré à Charles De Koninck* (*215 pages*) *est le numéro 66 de septembre-octobre, 1962.* *Le seul ouvrage de Charles De Koninck qui ait été publié et France est* LE SCANDALE DE LA MÉDIATION, *septième volume de la* « *Collection Itinéraires *» (*Nouvelles Éditions Latines*)*, publié en juillet 1962.* \*\*\* *A la famille de Chartes De Koninck, à ses enfants, à son fils Thomas De Koninck, nous exprimons notre très vive sympathie. A notre messe du dernier vendredi du mois, nous ferons dé­sormais mémoire de Charles De Koninck, en compagnie d'Henri Pourrat, de Georges Dumoulin, de Joseph Hours.* 34:100 ### Ce que nous disions... Aux pages suivantes, ce n'est certainement pas un « résumé » des travaux de la revue ITINÉRAIRES depuis dix ans que l'on trouve­ra. Comment pourrait-on résumer près de 16.000 pages, et si diverses ? Ce sont simplement quelques-unes des positions prises au cours de ces dix années que nous rééditons. Nos lecteurs nouveaux les découvriront. Nos lecteurs plus anciens y retrouveront plusieurs des jalons de notre démarche et de notre histoire depuis mars 1956. Et le tout peut servir à « présenter » la revue a ceux qui ne la connaissent pas du tout, ou ne la connaissent que par ouï-dire... 35:100 Ce que nous disions en mars 1956\ dans notre premier numéro ### Notre dessein CETTE REVUE paraît en un moment de trouble profond. Dans notre pays, la confusion est (presque) partout. Depuis une quinzaine d'années au moins, nous entendons dire : « Le difficile aujourd'hui n'est pas de faire son devoir, mais de le connaître. » C'est une boutade, je veux bien, mais elle exprime quelque chose, -- qui est parfois ou souvent le découragement des meilleurs -- et l'absence d'autorités légitimes, ou de confiance en elles. Et l' « aujourd'hui » invoqué se prolonge singulièrement. Rien ne garantit que la confusion et l'obscurité ne vont pas croître encore. Peut-être n'y pouvons-nous rien. Nous pouvons du moins défendre notre esprit et notre âme contre cette confusion qui vient nous chercher, qui nous assaille, et qui nous annexera de gré ou de force, si nous n'y veillons. \*\*\* MOMENT DE TROUBLE PROFOND, temps d'atroce confusion quand un journal vendu dans les églises est interdit dans les casernes. Je ne dis pas que ce fait me scandalise : je dis qu'il EST, et qu'il doit être considéré, car il est caractéristique. Et caractéristique de quelque chose qui n'est certainement pas un bien. 36:100 Temps de terrible confusion quand *Témoignage chrétien,* journal catholique qui se recommande à nous de tant de manières, constate dans son éditorial que le Parti communiste est « l'arbitre de la situation politique française » (13 janvier) : il le constate à tort ou à raison, on peut en discuter, mais l'important, mais le caractéristique est qu'il puisse le constater, le dire, et donc le croire, sans en tirer la conclusion qu'il est urgent d'organiser une méthodique résistance au communisme. Temps de terrible confusion quand *Monde ouvrier,* au lendemain des élections de janvier, crie en lettres énormes : « *Plus que jamais, Front populaire !* ». Qu'est donc *Monde ouvrier ?* Fabrègues le rappelait dans la *France catholique* du 13 janvier. « le premier débouché de ce qui prolongeait la J.O.C., l'arrivée sur le terrain des adultes et du temporel de la première action catholique ouvrière avant la lettre ». Quelle récolte, mon Dieu ! Qu'avait-on donc semé ? Quel arbre porta de tels fruits ? Tout cela n'est peut-être que méprises et malentendus ? Mais des malentendus de cette sorte, des méprises de ce volume (à supposer qu'il n'y ait rien de plus que méprises et malentendus) contribuent au désarroi général. Devant de telles anomalies, on peut admettre bien des commentaires, sauf ceux qui voudraient nous faire prendre ces anomalies pour parfaitement normales. On peut admettre bien des attitudes, sauf celle qui consiste à systématiquement parler d'autre chose. \*\*\* NOUS MARCHONS A TATONS dans le brouillard et dans la nuit. Pèlerins aux terres et aux temps du désordre établi, nous n'avons choisi ni le moment ni la patrie qui nous ont été donnés, auxquels nous avons été donnés, c'est notre lot et nous l'aimons, et il faut bien que nous l'aimions, et si c'est notre croix nous ne pouvons qu'aimer notre croix. 37:100 Dans ce désordre établi, dans cette nuit et ce brouillard, nous n'avons rien d'assuré que ce qui est immédiatement à portée de la main. Mètre par mètre, nous avons un immense champ de confusion morale et mentale à défricher, dont nous n'arriverons peut-être jamais à bout, en tous cas point seuls. Il ne s'agit pas pour nous de faire la leçon à qui que ce soit, il s'agit de nous-mêmes et chacun pour soi, en nous aidant les uns les autres : nous battre contre les équivoques et les mensonges qui nous assaillent de toutes parts, refuser d'en être victimes, refuser d'en être complices ; reconnaître et assurer une à une nos vérités de chaque jour, les arracher une à une aux brouillards artificiels qui, incessamment, les pénètrent jusqu'à l'os, et qui obscurciraient le ciel lui-même. Cela servira bien à quelque chose. Cela servira peut-être à nos prochains les plus proches ou les plus lointains. Peut-être à la France. Peut-être à rien ; à la grâce de Dieu ! Mais nous n'avons pas autre chose à faire, et nous ne pouvons pas faire autrement. 38:100 Ce que nous disions en février 1957 ### Une voix différente Une revue indépendante, sans capital, sans appui commercial, partout plus ou moins sournoisement combattue et diffamée par divers bons apôtres qui « s'efforcent de détruire, sous toute sorte de prétextes, le travail loyal et consciencieux du voisin catholique », une revue vivante et écoutée malgré la formidable hostilité des puissances financières de la presse installée, voilà ce que tous ensemble nous avons fait. Dans le concert d'une presse où les monopoles et les privilèges ont été très jalousement gardés, nous faisons entendre une voix différente. Nous le faisons calmement, sans animosité et sans hausser le ton. Nous avons mécontenté beaucoup de monde : il était impossible de faire autrement. Nous nous sommes appliqués à ne pas mécontenter plus qu'il n'était nécessaire. Cette mesure que nous nous sommes efforcés de garder n'a pas diminué, elle a redoublé la fureur de nos adversaires. Cela aussi est dans l'ordre. Si nous n'avions formulé, comme on nous en accuse parfois, que des « critiques injustes ou excessives », elles n'auraient pas eu grand effet, et l'on ne nous en aurait pas longtemps tenu rigueur. Ce sont nos justes critiques que l'on ne nous pardonne pas. Évidemment. Nous avons pu aussi, d'aventure, mécontenter ici ou là nos amis. Péguy disait : « Une revue n'est vivante que si elle mécontente chaque fois un bon cinquième de ses abonnés. La justice consiste seulement à ce que ce ne soient pas toujours les mêmes qui soient dans le cinquième. Autrement, je veux dire quand on s'applique à ne mécontenter personne, on tombe dans le système de ces énormes revues qui perdent des millions, ou qui en gagnent, pour ne rien dire. Ou plutôt *à* ne rien dire. » 39:100 Précisément, nous disons quelque chose. Et tel est en effet le rôle d'une revue. On ne la lit pas seulement pour y trouver une confirmation de ce que d'avance l'on pensait. On y trouve aussi des faits, des documents, des idées qui contredisent, qui font réfléchir, qui invitent à l'approfondissement, qui conduisent à éprouver, à nuancer, à rectifier (ou à finalement confirmer) les points de vue antérieurs. La plupart de nos lecteurs l'ont compris et admis. D'ailleurs deux esprits ne peuvent jamais penser absolument de la même façon sur tous les points. Le dialogue est d'abord entre nous. \*\*\* On nous représente, parfois ou souvent, comme gens aux « idées arrêtées », sûrs d'eux-mêmes et de « détenir la vérité » ou même d'en avoir le « monopole ». Quelle extravagante incompréhension. Ceux qui nous lisent avec attention savent qu'il n'en est rien. Nous n'avons de certitude absolue que pour les vérités de Foi. Nous sommes sûrs que l'Église de Jésus-Christ possède et enseigne la Vérité. Pour le reste, l'humaine condition est de progresser dans la recherche, le doute, l'épreuve, par approximations et révisions. C'est pourquoi nous sommes préoccupés de peser le pour et le contre, d'évaluer dans chaque question la valeur des arguments en présence, de rechercher objectivement la part de vérité que peuvent contenir, sous un rapport différent, des propos contraire... Et c'est pourquoi nous sommes attentifs et accueillants à toute critique, à toute contradiction honnête et sérieuse, persuadés qu'elle peut nous instruire. Nos adversaires même les plus violents nous ont trouvés occupés à discerner, par delà leurs injures et leurs calomnies, la pensée qui les anime ; à comprendre cette pensée ; à en retenir ce qu'elle peut apporter de positif ; à leur signaler ce qu'elle manifeste de négatif. Cela est le propre, croyons-nous, de l'activité intellectuelle. On peut caricaturer cette démarche en la représentant comme une « polémique » : ceux qui nous lisent sans trop de passion ou de parti pris s'aperçoivent, quelquefois avec une profonde surprise (car on leur en avait tant dit) que nous faisons tout autre chose que de la polémique. \*\*\* 40:100 Le monde moderne, l'Occident, la France sont en péril de mort, à cause de l'apostasie implicite ou explicite à laquelle les ont conduits leurs idées fausses. Pour les détromper, pour les sauver, il faut plus que des idées contraires. Il faut des idées vraies, c'est-à-dire plus que des idées. Il y faut toutes les vérités de la Foi et tous les mystères de Dieu. La réponse à nos énigmes est une Énigme, le mystère s'inscrit au centre de la Création et au cœur de l'homme, et c'est lui qui nous éclaire : « L'ironie des grands tragiques, écrit Chesterton, trouve dans le livre de Job son dénouement mystique ; au mystère, *il ne répond que par le mystère ;* et Job, *consolé par énigmes, se trouve consolé.* Symbole prophétique car, où l'esprit qui doute ne sait que répéter : « Je ne comprends pas », celui qui sait ne peut que répliquer : « Non, tu ne comprends pas » ; et ce reproche éveille toujours au fond du cœur comme un espoir soudain, le sentiment d'un secret qui vaudrait d'être compris. » Les idées fausses du monde moderne sont souvent des mensonges qui n'ont même pas la nouveauté à laquelle ils prétendent. Le grand mensonge soi-disant moral (voire soi-disant chrétien) par lequel on amène la France à lâcher sa mission colonisatrice est une atroce vieillerie. Chesterton encore en témoigne dans un texte de 1925 : « Voyez par exemple ces anciens empires du Mexique et du Pérou, aussi policés que l'Égypte et que la Chine, et qui ne le cèdent qu'en esprit d'entreprise à la civilisation centrale, la nôtre. Les critiques de notre civilisation, en flétrissant comme il se doit ses crimes, ont un curieux penchant à idéaliser outre mesure ses victimes. Avant l'expansion européenne, le monde aurait été, s'il faut les croire, un vrai jardin d'Éden. Swinburne parle de l'Espagne et de ses conquêtes en des termes qui m'ont toujours surpris : « ...Les péchés de ses fils semés à travers des terres sans péché », et qui ont « rendu maudit le nom d'homme et trois fois maudit le nom de Dieu ». Or les Espagnols, j'en conviens, étaient de forts pécheurs : mais où a-t-il pris que les Américains fussent « sans péché » ? Eh quoi, tout un continent peuplé exclusivement d'archanges, de chérubins et de séraphins ? On n'oserait en certifier autant de la paroisse la mieux pensante. 41:100 Mais en l'espèce cette affirmation devient d'un comique particulièrement réjouissant. Nul n'ignore en effet que les impeccables pasteurs de ces peuples d'albes colombes adoraient des dieux immaculés qui ne supportaient dans leur benoît paradis d'autre nectar et d'autre ambroisie que des sacrifices humains continuels, enjolivés d'abominables tortures... Je ne plaide pas la cause de l'Espagne contre le Mexique : je constate qu'elle est analogue, en plus d'un point, à celle de Rome contre Carthage. Dans l'un et l'autre cas, IL NE MANQUE PAS DE GENS POUR PRENDRE PARTI CONTRE LEUR PROPRE CIVILISATION et toujours absoudre de tout péché des sociétés dont les péchés ne crient pas, mais hurlent vers le ciel. Blâmer notre race ou notre religion d'avoir FAILLI A LEUR IDÉAL est fort bien, mais LA SOTTISE EST DE LES METTRE POUR CELA PLUS BAS QUE LES RACES ET LES RELIGIONS QUI SE FONDAIENT SUR L'IDÉAL DIAMÉTRALEMENT opposé. Oui, certes, le chrétien fut, DANS UN CERTAIN SENS, pire que le païen, l'Espagnol que l'Indien, le Romain même que le Carthaginois : mais EN CE SENS TOUT RELATIF que leur raison d'être était de s'avérer meilleurs. » 42:100 Ce que nous disions en février 1958 ### Après deux ans Quand nous nous retournons vers ces deux années, nous y trouvons naturellement une somme d'expérience qui commence tout doucement à prendre un certain volume et qui déjà est instructive. Cette expérience a été plus d'une fois celle de l'incompréhension et du mépris : il nous est arrivé de voir nos intentions bafouées avec des ricanements concertés, nos démarches amicales couvertes de crachats, nos personnes et notre œuvre diffamées avec un génie assez inventif. Qu'une entreprise comme la nôtre, sans aucun rapport avec les agitations partisanes ni les opérations commerciales ou publicitaires qui se situent dans le domaine du pouvoir et de l'argent, qu'une revue mensuelle d'étude et de réflexion, entièrement en dehors du jeu des partis, des coteries, des intérêts, des rivalités temporelles, qu'une telle revue ait été accompagnée d'un cortège aussi passionné, sur sa droite et sur sa gauche, de violences et de haines, publiquement proclamées ou chuchotées de bouche à oreille, c'est peut-être parce que nous disons quelque chose. 43:100 Dire quelque chose, au lieu de s'en tenir à des propos brillants ou harmonieux, éloquents ou érudits, mais fondamentalement insignifiants, nous supposions bien que c'était une entreprise extraordinaire et dangereuse, exposant à toute sorte de représailles. Mais entre le supposer et le subir, il y a toute la différence qui distingue une vue de l'esprit d'une expérience personnellement vécue. Cette expérience, infiniment instructive, en deux années de travail nous avons commencé à l'acquérir, et nous lui devons quelques lumières qui nous manquaient ; quelques lumières qui auront en nous affermi notre dessein, changé plusieurs dispositions particulières, dissous des préjugés, précisé des perspectives. Nous en rendons grâces au Seigneur ; et aussi à ceux qui furent les instruments d'une telle expérience. \*\*\* Nous croyons qu'aucune politique, si elle n'est qu'une politique, n'opposera un obstacle suffisant au commu­nisme. Nous croyons qu'aucune politique, si elle n'est pas d'abord autre chose, ne sauvera la France et l'Occi­dent. Nous croyons que le cheminement d'une telle pensée, qui se sait, se veut, s'affirme une pensée reli­gieuse, renferme toutes nos espérances, y compris par surcroît nos espérances temporelles. 44:100 Ce que nous disions en mars 1959 ### Apporter et recevoir Aux lecteurs qui d'aventure trouvent la revue un peu « austère » ou « difficile », nous voudrions dire que ce qui est ici en question ne se règle par ; avec des amusettes, des bons mots ni des slogans. Nous ne promettons pas à nos lecteurs qu'en lisant ITINÉRAIRES ils pourront « se faire facilement une opinion complète », nous leur promettrions plutôt le contraire : qu'ils se feront autre chose qu'une opinion, que ce n'est pas facile, et qu'une pensée n'est jamais complète et définitive, mais incessamment se révise ou s'enrichit par sa confrontation avec d'autres pensées et avec l'expérience. Ceux qui désirent « se faire facilement une opinion complète » ont à leur disposition tout ce qu'il faut pour cela dans les kiosques à journaux : il existe un grand nombre de feuilles et de magazines illustrés qui donnent suffisamment, à défaut du sens de l'histoire, le sens de la mode, celui des renommées qu'ils forgent de toutes pièces et défont pareillement, et l'illusion de la science infuse. 45:100 Ces journaux, ces magazines se fabriquent et aussi, hélas, nous fabriquent des lecteurs qui ont le sentiment de n'avoir plus rien à apprendre. Certains nous écrivent parfois, très gentiment d'ailleurs, qu'ils se félicitent de l'existence d'ITINÉRAIRES... « pour éclairer ceux qui en ont besoin », c'est-à-dire « les autres ». Eux-mêmes n'ayant donc plus rien à apprendre, ils sont en cela plus savants que les plus savants et les plus éminents de nos collaborateurs. A leur différence, la revue ITINÉRAIRES est rédigée par des hommes qui, tous sans exception, ont beaucoup à apprendre encore, et le savent, et s'efforcent de l'apprendre les uns des autres. Nous ne pouvons évidemment rien apporter à ceux qui se trouvent ou qui se croient dans l'état de n'avoir rien à recevoir. Aux autres, à tous les autres, nous proposons de poursuivre ensemble, pour la quatrième année et pour les suivantes, dans l'effort et la peine, dans la réflexion difficile et dans le travail, la réforme intellectuelle et morale. 46:100 Ce que nous disions en décembre 1961 ### En ce temps de barbarie La revue « Itinéraires » n'est pas écrite et ne doit pas être lue comme on écrit et comme on lit par exemple un hebdomadaire de combat. Il ne nous appartient pas de soutenir une politique, de faire obstacle à une autre, encore moins de favoriser ou d'entraver la prise du pouvoir par certains hommes ou certaines équipes plutôt que d'autres. Une revue mensuelle de culture générale serait, au demeurant, foncièrement inadéquate à des desseins de cette sorte. Mais, cela dit, nous sommes loin d'être absents à cette souffrance de notre pays blessé, même dans ce qu'elle peut avoir de plus immédiatement politique. Seulement, en ce domaine, nous disons les choses à fond, et nous les disons ordinairement une seule fois, nous adressant à la réflexion, nous adressant aux consciences, ce qui est le contraire du mode d'expression qui convient aux propagandes obsessionnelles. Et par exemple, sur l'évolution du régime français depuis 1958 et sur la tragédie algérienne, nous avons plus d'une fois dit ce que le lecteur pouvait trouver plus ou moins équivalemment dans la presse politique... six mois ou dix mois plus tard. Si l'on relit aujourd'hui l'éditorial « Bilan ? » paru dans notre numéro 42, ou à un autre point de vue les « Pages de journal » de notre numéro 50, on constatera que même en ces matières nous n'avons été ni absents, ni en retard. Nous pourrions faire nôtre une formule naguère employée par d'autres, pour vous dire : « Un journal se regarde et se lit, la revue ITINÉRAIRES se relit et se garde. » \*\*\* 47:100 Nous disons les choses sans élever la voix, car notre fonction principale n'est pas de crier. Qu'on nous entende bien : nous ne méprisons pas les cris quand ils sont justes. Une société qui ne supporterait plus les cris de l'indignation serait une société de robots. Nous y allons. Nous portons au cœur la souffrance de notre pays blessé : et nous ne nous en taisons pas. Mais nous ne devons pas non plus en subir la paralysie. Ce serait un irréalisme, ou ce serait une faiblesse, de ne plus pouvoir parler d'autre chose, alors que notre tâche est aussi, et quelquefois d'abord, de parler d'autre chose. Quand en décembre 1959 nous avons publié un numéro spécial sur « La Royauté de Marie et la consécration à son Cœur Immaculé », quelques personnes, pieuses pourtant, et bienveillantes, nous ont demandé si ce n'était pas une diversion ou une dérobade ; si nous ne nous étions pas « réfugiés » là par embarras à nous prononcer sur l'actualité politique. Double et triple malentendu, dont nous voudrions éviter qu'il pût subsister la moindre trace chez aucun lecteur : car des malentendus de cette sorte seraient peut-être les plus propres à frapper de stérilité le travail intellectuel et moral que nous avons entrepris. D'abord, il est ou devrait être évident que nous n'improvisons pas. Un numéro tel que celui-là était en chantier depuis huit mois. La collecte des cent pages de documents pontificaux qu'il comporte, à elle seule, n'est pas l'affaire de quelques heures ni de quelques jours (ni la traduction nouvelle de toute une Encyclique, l'Encyclique « Lætitiæ sanctæ » de Léon XIII, qui y figure à sa place). On peut improviser un numéro d'hebdomadaire. Des lecteurs même bien intentionnés ne se rendent manifestement pas compte du travail de préparation que demande un numéro spécial d' « Itinéraires », et surtout celui-là. D'autre part, nous n'avons promis à personne de nous prononcer à date fixe et avec une régularité fréquente sur ce que l'on appelle l' « actualité politique » notre propos (clairement défini) ne se situe pas à ce niveau. Mais surtout, il est infiniment dommage qu'un numéro comme celui sur « La Royauté de Marie et la consécration à son Cœur Immaculé » ait pu être considéré comme inactuel. 48:100 Pour n'en mentionner qu'un aspect, le recueil de documents pontificaux sur le Rosaire, complété par quelques textes pratiques de saint Grignion de Montfort, était et demeure d'une actualité que confirme la nouvelle insistance de Jean XXIII sur le Rosaire, en octobre dernier. \*\*\* L' « actualité » est d'abord religieuse et quotidienne. Elle est dans la prière et dans le devoir d'état de chaque jour. Là se trouve la base concrète et solide, celle des vertus les plus humbles qui sont aussi les plus nécessaires même aux plus grands desseins et à la vie des civilisations. La principale ambition de la revue est d'apporter au lecteur une contribution utile à son devoir d'état, à sa méditation quotidienne et à sa prière de chaque jour. A sa réforme intellectuelle et morale. A sa « révision de vie ». A sa conversion permanente. Nos « chroniques » sont d' « actualité » principalement et d'abord en ce sens. La revue « Itinéraires » n'est pas un « organe de combat », sauf de combat spirituel, ce « combat spirituel qui est, disait Rimbaud, aussi rude qu'une bataille d'hommes ». Nous sommes, avec la grâce de Dieu, des esprits religieux, des hommes religieux, même quand nous parlons de la pluie et du beau temps, tâchant de mettre en pratique le conseil de saint François de Sales, recommandant d'avoir « une vive et attentive considération de la toute-présence de Dieu, c'est-à-dire que Dieu est en tout et partout, et qu'il n'y a ni lieu ni chose en ce monde ou il ne soit ». Nous ne faisons pas des sermons, mais nous sommes du Christ, et nous nous efforçons de l'être en tout. Nous avons exposé en quoi, pourquoi et comment dans notre « Déclaration fondamentale » (n° 28). Trop austère ? Quelques-uns nous disent parfois que la revue est « trop austère ». Si elle l'est « trop », c'est par comparaison qu'elle peut l'être. Par comparaison avec quoi ? Avec « Paris-Match » ? Avec la télévision du gouvernement ? 49:100 Voudrait-on nous voir faire des chroniques sur Johnny Halliday, le twist chez Régine, les championnats de bridge, la saison de Paris, Marcel Achard et Paul Bacon, les débats parlementaires et la mort de la Malibran ? Il n'y a jamais eu de pensée sans austérité. Il n'y a jamais rien eu sans effort. Si vous voulez des images pieuses et des images profanes, vous en trouverez en vente dans les kiosques à journaux et d'un côté ou de l'autre de la porte des églises. La pensée, dans les magazines illustrés et souvent chez leurs lecteurs, rétrograde à un stade d'infantilisme, ou plutôt d'inanité, maintenant inférieur à ce qu'elle était dix et quinze siècles avant Jésus-Christ. Là nous sommes à contre-courant, eh oui ! nous ne croyons pas que les techniques audio-visuelles puissent remplacer la réflexion morale, et nous demandons au lecteur du travail, de la peine, de la patience, de la mémoire, du sérieux. Et même du courage. Le courage de l'esprit ; le courage de l' « austérité ». Notre patrie traverse une épreuve naturelle et surnaturelle qui est l'une des plus aiguës, des plus profondes, des plus tragiques de notre histoire. Une épreuve qui va jusqu'aux racines de l'âme. Le monde entier, d'ailleurs, est entré en une crise fondamentale. « C'est tout un monde, disait Pie XII, qu'il faut refaire depuis ses fondations, de sauvage, le rendre humain... » Et l'Église elle-même n'a pas l'habitude de réunir un Concile quand tout va parfaitement bien en son sein. Le divertissement, l'inconscience organisée dissimulent à beaucoup que nous vivons des temps atroces, matériellement, moralement, mais surtout spirituellement atroces. La densité du mensonge universel rend l'air irrespirable. Ce n'est pas le moment de faire une revue de chansonniers. La charité. Que Dieu nous donne la charité. Qu'Il nous garde de ses contrefaçons. Qu'Il nous donne une charité d'hommes libres, ni rampante, ni menteuse, ni lâche. « Je n'aime pas, mon jeune camarade -- écrivait Péguy -- je n'aime pas et pour dire le vrai je ne veux rien savoir d'une charité chrétienne qui serait une capitulation perpétuelle devant les puissants de ce monde. Je ne veux rien savoir d'une charité chrétienne qui serait une capitulation constante du spirituel devant les puissances temporelles. Je ne veux rien savoir d'une charité chrétienne qui serait une capitulation constante devant les princes, et les riches, et les puissances d'argent. » 50:100 Tout-puissants, l'imposture et le crime sont habiles, en outre, à se faire rendre les honneurs, au nom de la paix, de la conscience, du bien commun, de la légitimité, du progrès, du sens de l'histoire, des compromis nécessaires, de la doctrine, de la pratique, de la charité, et de n'importe quoi. Nous demeurons rebelles à cet usage trompeur, à cet usage à plat ventre, auquel on s'habitue, à cet usage belphilippien du langage moral. Nous ne nous habituons pas. Nous ne marchons pas. Nous n'acceptons pas d'inscrire le crime et l'imposture, dès qu'il s'agit de l'imposture et du crime des puissants de ce monde, au nombre des « options libres » et des « moyens techniques ». \*\*\* Au milieu de tant de crimes et de tant de deuils, au milieu de tant de cruautés, le boulanger continue à faire son pain, fût-ce la mort dans l'âme, -- ou les poings serrés d'indignation. L'étudiant continue à étudier les protides, les acides aminés, Eschyle et la bataille de Marignan. Face à la barbarie qui menace de tout interrompre, il faut en laisser interrompre le moins possible, il faut continuer. Nous continuons donc une revue de culture générale, -- et de combat spirituel. 51:100 Ce que nous disions en mars 1962 ### Le temps des Balubas A MESURE que se précisent en France les menaces ou les prodromes d'une guerre civile, on voit la délation et la haine faire de considérables progrès dans une certaine presse catholique. Ailleurs aussi. Mais ailleurs le scandale est moins grave, les conséquences moins lourdes. Une communauté chrétienne vivante peut rendre, par surcroît mais directement, un service majeur à un pays où tout se décompose, y compris son unité : elle peut maintenir une zone fraternelle de concorde et de paix. Elle peut, par sa seule présence, par sa vitalité interne, par son poids d'existence et sa densité d'amour, désamorcer la guerre civile. Mais du sein même de notre communauté chrétienne partent des cris de haine, des appels à la violence, tout un système psycho-sociologique d'accélération, du pire ; et de dégradation des consciences ; et de mobilisation fratricide. Il n'y aura pas de paix civile en France si la communauté, chrétienne est la première à donner le spectacle, répandre la contagion et approfondir le vertige de la guerre à mort. Toute une presse catholique désigne ouvertement aux coups des assassins et aux arrestations de la police des catégories entières de catholiques. Et quelles catégories ? Précisément celles qui sont le plus éloignées de vouloir et de pouvoir contribuer à une guerre civile. Précisément celles qui, par principe, par méthode, par vocation, s'emploient à autre chose que les combats politiques. 52:100 Précisément celles à qui les mêmes inquisiteurs et délateurs avaient coutume de reprocher, au contraire, de ne point « s'engager » suffisamment dans le détail et dans le dédale de leurs luttes civiles. Précisément celles dont la seule arme est la parole, écrite ou orale, et de préférence une parole abstraite, ce qui ne veut pas dire une parole sans cœur. Toute une presse catholique cherche actuellement à régler les comptes de ses rancunes et de ses haines par voie de dénonciation calomnieuse à une police que les dispositions administratives en vigueur autorisent à arrêter et à garder en détention n'importe qui sans motif ni justification. Non seulement contre toute justice et contre toute vérité, mais encore contre toute vraisemblance, cette presse catholique désigne publiquement aux policiers officiels et aux tueurs clandestins, comme « activistes », comploteurs et subversifs, des catholiques dont l'activité s'exprime par des cercles d'études doctrinales, par des instituts sociaux, par le travail intellectuel, par l'approfondissement spirituel, par la recherche de confrontations pacifiques et d'accords dans la vérité. Règlement expéditif d'une vieille controverse qui était toujours pendante : ceux qui croient à la civilisation chrétienne et en étudient le patrimoine moral et religieux, ceux qui croient aux enseignements pontificaux et passent toute leur vie civique à les diffuser, à les faire connaître, à les mettre en application, on ne leur dit plus : « Vous avez tort ». On ne leur dit plus : « Vous êtes périmés, dépassés, inefficaces ». On ne leur dit plus : « Vous ne comprenez rien ». Ou plutôt, on n'arrête pas de le leur dire aussi, de le leur dire encore, par habitude. Mais surtout, on travaille à se débarrasser d'eux en les envoyant, par délation systématique, à la prison ou à la mort. Si l'on y met tant de passion et tant de soin, c'est donc qu'on ne les tient en vérité ni pour inefficaces ni pour dépassés. \*\*\* Avec la grâce de Dieu, ces grandes manœuvres de la délation, ce déploiement de menaces précises, ce déchaînement surhumain ne nous feront pas bouger d'un pouce. Il arrivera ce qui arrivera. Avec la grâce de Dieu nous n'ouvrirons pas notre cœur à la haine. Avec la grâce de Dieu, nous ne rêverons pas de chercher à rendre coup pour coup et œil pour œil. 53:100 Dans la guerre entre nations, il y a la Croix-Rouge internationale, et il arrive qu'elle soit mitraillée. Dans les guerres civiles, il y a quelquefois un « tiers parti », préparant la réconciliation, et il arrive qu'il soit massacré. Dans le grand malheur qui frappe la communauté chrétienne en France, où l'on voit des chrétiens, et même des clercs, littéralement hurler à la mort contre d'autres chrétiens, nous tâcherons, chacun à notre place, d'être un peu l'équivalent on l'analogue d'un tiers parti ou d'une Croix-Rouge. Les mains nues, sans autre arme humaine que la parole, nous continuerons à nommer crime le crime, à désarmer là vengeance par la persuasion, et à offrir au Seigneur même nos échecs. La violence emporte tout : nous pouvons veiller au moins chacun à ne pas y laisser emporter son cœur et son âme. A ne pas hurler avec les loups. A ne pas hurler à la mort comme eux ou contre eux. Naturellement, et *pour cette raison,* ils continueront à nous désigner comme violents, comme criminels et comme subversifs. \*\*\* La France glisse vers le fond du malheur. Les hommes politiques s'en occupent à leur façon. Ils nous procureront le moindre mal ou ils nous procureront le pire ; ou ils ne nous procureront rien du tout, les événements échappant à leur volonté et à leur contrôle. Même s'ils s'entourent de tueurs à gages, ils n'en obtiendront ni notre cœur ni notre foi. S'il y a parmi eux des hommes de bonne volonté, et il y en a sûrement, qu'ils fassent de leur mieux, ce n'est pas nous qui mettrons des embûches sur leur chemin, -- le voudrions-nous, nous n'en aurions pas les moyens. Pour le moindre mal ou pour le meilleur, nous les aidons à notre manière, qui est différente, en luttant et en témoignant contre l'imposture *la plus profonde* parmi toutes les impostures qui ont tout empoisonné et tout désintégré ; en luttant et en témoignant contre l'imposture *spirituelle* qui asphyxie la France et toute la société moderne. 54:100 C'est le sel qui s'est affadi. S'étant affadi il a commencé à pourrir. Ayant pourri, il a tout pourri autour de lui. Aucune politique jamais ne fera rien contre cela. Aucune politique jamais n'y suffira. \*\*\* En plusieurs articles de *La Nation française* ([^15])*,* Philippe Ariès a fait l'analyse d'une situation dite « légale », d'une « légalité » où « l'abus de pouvoir compromet notre sécurité à tous » et où « personne ne peut plus dormir tranquille dans sa maison ». Nos frères chrétiens et musulmans l'ont vécu en Algérie pendant sept années, jusqu'au paroxysme actuel. Ce qu'ils ont souffert et ce qu'ils souffrent vient, de la même manière ou d'une autre, s'abattre sur les Français de la métropole. On arrête les suspects. Selon les déclarations privées de personnages gouvernementaux attestées par Pierre Boutang et rappelées par Philippe Ariès, les autorités policières « évaluent à 40.000 le nombre des suspects » qui, en France métropolitaine, peuvent à tout moment être administrativement internés. Quarante mille, c'était du moins l'évaluation de janvier dernier. Quand on jongle avec les chiffres aveugles de la suspicion systématique, on va vite. Le vertige ou la dynamique propres au mécanisme des camps d'internement arbitraire a toujours conduit, l'histoire contemporaine le démontre, à passer de 4.000 à 40.000, de 40.000 à 400.000, de 400.000 à 4 millions, avec la facilité délirante de la rêverie administrative et bureaucratique. Et quand on en est au chiffre de 40.000 suspects, ou peut-être déjà à celui de 400.000, il suffit qu'une presse de délation, surtout si elle se prétend honorable et se présente comme chrétienne et catholique, désigne et dénonce n'importe qui pour que le bras séculier se déclenche aveuglément au service de la haine insatiable. La *suspicion* est un état d'esprit. Une certaine presse dite « d'opinion » entretient la suspicion, la développe, et l'oriente ; et l'utilise. La *dégradation de tout à la fois,* qui s'accélère, lui laisse le champ libre. « Pendant ces derniers mois, écrit Philippe Ariès, j'ai connu des foyers frappés : les femmes inquiètes, les enfants trop sages, en l'absence du père -- femmes, enfants de mes amis. Qui peut alors se défendre de penser aux misères adverses qui ont précédé celles-ci et les ont rendues possibles ? Comprendrons-nous la leçon ? Plus se creuse l'abîme des décisions, plus nous devons veiller au maintien de la morale et du droit traditionnel, sans céder aux tentations de l'efficacité immédiate. » \*\*\* 55:100 Gabriel Marcel, vétéran de la protestation contre l'injustice, a élevé la voix ([^16]) : « Rien, absolument rien ne justifie le fait que le motif de leur arrestation ne soit pas communiqué aux intéressés, et qu'ils soient même maintenus pendant des semaines dans une ignorance absolue à ce sujet. En sorte qu'ils peuvent se demander s'ils ne sont pas simplement les victimes d'une dénonciation arbitraire et peut-être anonyme. Ici, nous sommes dans l'arbitraire le plus odieux qui se puisse concevoir. L'atonie de l'opinion publique devant des procédés semblables est plus qu'affligeante : elle est le signe d'un désordre moral grave (...). Des pratiques comme celles qui sont dénoncées ici introduisent dans le corps d'un pays un principe d'infection, et la septicémie peut s'ensuivre à bref délai. » Telle est la « légalité » du moment. Quelqu'un sait-il et pourrait-il expliquer ce que c'est exactement que respecter la légalité, quand la loi en vigueur est que toutes les garanties légales sont suspendues ? Mais enfin, dira-t-on, pourquoi maintenir dans un « internement administratif » indéfini non seulement de simples *suspects,* ce qui est déjà inadmissible, mais encore des gens qui ne *sont même pas suspects,* dont tout le monde atteste l'innocence certaine, et dont les adversaires politiques eux-mêmes se portent garants et réclament la libération ? Pourquoi, sinon pour faire impression, pour intimider, pour terroriser ? il n'y a pas d'autre explication. C'est pour gagner les cœurs, voilà ; c'est un système pour gagner les cœurs. Car il n'y a que deux manières d'agir sur les cœurs et de les avoir pour soi. Il y a l'amour : qui a été le premier suspect, le premier exclu, frappé d'interdiction de séjour sur toute l'étendue du territoire de la politique. Et il y a la crainte. 56:100 Si l'on emprisonne de simples suspects et même des non-suspects, si l'on se déclare officiellement très fier de ce système et très décidé à l'employer de plus en plus, c'est pour frapper de crainte les citoyens qui demeurent provisoirement en liberté. C'est l'autre manière de forcer l'adhésion. Vous avez compris ? Eh ! bien, maintenant, tous ensemble, allons-y : « Vive Monsieur le Sous-Préfet ! ». Crions « Vive Monsieur l'Adjudant de gendarmerie ! ». Tous en chœur « Vive Monsieur l'Attaché de cabinet ! ». Et encore : « Vive Monsieur le Chargé de Mission spéciale ! » Redoublons : « Vive Monsieur le Directeur-Chef de la maison d'arrêt ! ». Acclamons les autorités. Vive le directeur, vive le fondé de pouvoir, vive le chef ! C'est bien simple, n'est-ce pas ? Mais on s'est trompé. Nous ne crions rien de tout cela. Nous ne crions rien du tout. De moins, en moins. Dans l'universelle dégradation de tout à la fois, il n'y a plus de confiance possible qu'en Dieu. \*\*\* Nous sommes d'une trop ancienne tradition chrétienne pour nous laisser prendre aux rhétoriques pompeuses qui recouvrent sans la camoufler la désintégration de la vie nationale. Une sorte d'instinct de l'âme nous met en garde, et c'est pourquoi certaines paroles qui résonnent bien résonnent pourtant dans le vide. Cet instinct, ce sens spirituel est juste. Il a raison de demeurer dans la réserve en face d'un programme dont chaque élément ou presque est verbalement admissible et quelquefois excellent, mais dont la totalité ne tient pas ensemble parce qu'il y manque le lien de justice et le lien d'amour. Relisons le programme. Que la France soit une grande puissance industrielle ; et agricole ; et militaire ; que l'on construise, que l'on produise, que l'on instruise d'une manière quantitativement croissante ; que les chiffres statistiques de la prospérité soient en hausse, et patati et patata ; que le plan économique de quatre ans soit susceptible d'accroître notre puissance, et patata et patati ; tout cela est bon en soi, ou le serait, si ne se posait la question : quel peut être un bien de la France qui n'est pas le bien de tous les Français ? 57:100 Le bien commun n'est pas un bien qui serait propre à l'État, à ses comptables enregistreurs, et qui ne serait pas commun à tous. L' « intérêt général » ne peut être celui d'une entité à laquelle sacrifier, avec les intérêts particuliers, la justice, les droits, la dignité des personnes. Une nation dont les citoyens vivent dans l'insécurité, dans l'injustice, dans les larmes, au milieu des cruautés arbitraires et du déchaînement de toutes les violences, n'est pas une nation où le bien commun soit assuré. Tout ce que l'on peut produire, construire, instruire et même détruire ne sera jamais une consolation ni une compensation en regard de la perte de ce que le bien commun comporte de plus nécessaire et de plus précieux. Non, le bien commun n'est pas la gloriole statistique de l'État, il n'est pas la puissance matérielle de l'État, il n'est pas la grandeur de l'État au prix de l'abaissement des citoyens. Le bien commun est « le but suprême qui donne son origine à la société humaine » ([^17]). « Le bien commun d'ordre temporel consiste dans la paix et la sécurité dont les familles et les citoyens jouissent dans l'exercice de leurs droits » ([^18]). Il « dépasse singulièrement la simple prospérité économique » ([^19]). Il « ne peut trouver sa loi primordiale dans la prospérité matérielle de la société, mais bien plutôt dans le développement harmonieux et dans la perfection naturelle de l'homme, à quoi le Créateur a destiné la société en tant que moyen » ([^20]). C'est « une condition de vie digne, assurée et pacifique pour toutes les classes du peuple » ([^21]) ; c'est « l'établissement de conditions publiques normales et stables, telles qu'aux individus aussi bien qu'aux familles il ne soit pas difficile de mener une vie digne, régulière, heureuse selon la loi de Dieu » ([^22]). Le bien commun est « le véritable bien de tous » ([^23]), et non une puissance et une grandeur de l'État juchées sur la crainte, l'angoisse, le malheur de chacun. Le bien commun, c'est de « garantir absolument les valeurs qui assurent à la famille l'ordre, la dignité humaine, la santé, le bonheur : ces valeurs-là, qui sont des éléments mêmes du bien commun, il n'est jamais permis de les sacrifier à ce qui pourrait apparemment être un bien commun » ([^24])*.* « *Ce qu'il y a de plus précieux dans le bien commun* »*,* ce sont « *les droits primordiaux de l'homme* » ([^25])*.* 58:100 Le bien commun n'est pas le bien *de* l'État. Il est le bien *au service duquel* se trouve placé l'État. Il est le bien du peuple tout entier. Il est d'abord un bien moral : c'est-à-dire la concorde, la justice, l'amitié sociale, le respect du droit. Le bien commun de la France est dans l'amitié française avant d'être dans la grandeur française. Non que l'amitié exclue la grandeur : mais quelle affreuse grandeur celle qui se passe de l'amitié nationale ou qui s'installe sur les décombres de l'amitié entre Français. Quelle inacceptable grandeur, et d'abord quelle grandeur fictive et illusoire, celle qui trace sa voie dans le désordre, dans la haine, dans la désolation, dans la violence. La grandeur la plus grande, la seule vraie, elle est dans l'amitié, par l'amitié et pour l'amitié, on sait cela depuis Aristote, et il faudrait l'oublier aujourd'hui ? Le bien commun de la France, il est d'abord de faire vivre les Français dans la concorde, dans la justice, dans le respect, dans l'amitié. Si l'on est impuissant à cela, quelle puissance croit-on garder, de quelle puissance se réclame-t-on ? Mais il est bien impossible de faire vivre les Français dans l'amitié si l'on ne commence pas par aimer les Français ; si, au lieu d'aimer les Français, on s'épuise à faire une caricature d'amour solitaire avec une certaine idée de l'État. L'État n'a pas pour fonction de mépriser, d'écraser, de faire, aveugle et sourd, un saccage général des droits et de la dignité des personnes. La charge de commander a été instituée par Dieu pour servir et pour *aimer.* Dieu jugera. Il juge déjà, non sur la puissance, mais sur l'amour, et sur le service. \*\*\* 59:100 Nous avons sous les yeux une note d'information syndicale chrétienne ([^26]). On y parle de la « constitution éventuelle de réseaux » et des dispositions à prendre en vue de la « protection *ou* destruction de certaines installations », selon le précédent d'un sabre fameux. Il s'agit de « résistance au fascisme ». Bien. En voici le paragraphe final : « *Il se crée dans certaines communes, à l'initiative de la S.F.I.O., des comités anti-fascistes où prédominent F.O. et la F.E.N. et qui refusent évidemment, par principe, toute unité d'action présente ou future avec la C.G.T. et le Parti communiste. De tels comités sont beaucoup plus préoccupés d'anticommunisme que de lutte anti-O.A.S., et dans une période trouble, il est à craindre qu'ils soient vite amenés à soutenir des formules telles qu'un gouvernement dit d'Union nationale qui pourrait servir de paravent à l'installation d'un pouvoir fasciste. Les Unions locales C.F.T.C. n'ont évidemment rien à faire dans une telle entreprise.* » Voilà donc ce qu'écrivent et diffusent certains dirigeants syndicaux, honnêtes et chrétiens, sous le sigle de la C.F.T.C. ([^27]). Pour eux le « péril fasciste » commence à la S.F.I.O. ([^28]), à F.O. ([^29]), à la F.E.N. ([^30]). On voit ainsi quelle est l'étendue géographique de la zone qui est celle de la suspicion chrétienne. Elle va de la droite à la S.F.I.O., en passant par la F.E.N. et par F.O. : il ne s'agit donc plus de 40.000 suspects, et même le chiffre de 400.000 est très largement dépassé. La « suspicion » de « fascisme » atteint les socialistes eux-mêmes. Dans le langage de la propagande communiste ? Certes, et depuis longtemps. Mais aussi dans la propagande syndicaliste « chrétienne ». Même si vous êtes inscrit au parti socialiste, vous trouverez de bons chrétiens pour vous dénoncer comme coupable de fascisme éventuel, d'activisme virtuel et de future subversion. 60:100 Vous serez automatiquement au nombre des suspects que l'on désigne aux coups de la violence, aux coups de la répression, aux coups de l'arbitraire. Ainsi va l'hystérie politique. Faut-il aller avec elle, marcher à son pas ? Faut-il se laisser transformer en bêtes sauvages ? Faut-il subir ce conditionnement assassin ? Non : nous refusons ce comportement de Balubas. \*\*\* La mise en condition des chrétiens est en route. Si elle réussit, elle détruira tout : *corruptio optimi pessima.* La Fédération C.F.T.C. des produits chimiques a publié un communiqué ([^31]) protestant contre un certain « essai de regroupement politique » qui s'est efforcé de réunir plus ou moins les socialistes et les modérés, de Pinay à Mollet. Les chimistes chrétiens ont comme tout le monde le droit d'avoir là-dessus leur sentiment et de se prononcer contre. Ils ont peut-être le droit, ça les regarde, de mobiliser et d'utiliser leur action « syndicale » au service de leurs opinions politiques. Ils n'ont le droit, ni en qualité de chimistes, ni en tant que chrétiens, et pas même au titre syndical, d'enrager l'opinion publique par des mensonges. Car leur communiqué raconte que cet essai de regroupement «* a pour ciment un anti-communisme exacerbé *» et qu'il ouvre «* la voie au fascisme *». On peut penser ce que l'on veut d'une éventuelle conjonction Mollet-Pinay, on peut en penser beaucoup de mal ou la considérer avec beaucoup de scepticisme, c'est une autre histoire, mais l'accuser d' « anticommunisme exacerbé » et la dénoncer comme désireuse ou susceptible d' « ouvrir la voie au fascisme », c'est tout simplement de l'hystérie. De l'hystérie qui est peut-être chimique, syndicale, voire chrétienne, mais qui contribue à opérer une mise en condition meurtrière. Si l'anti-communisme des Pinay et des Mollet est dénoncé comme « exacerbé », comment qualifiera-t-on l'anti-communisme de l'Encyclique *Divini Redemptoris*, qui est autrement vigoureux et total ? Et si des Mollet et des Pinay sont dénoncés comme « ouvrant la voie au fascisme », que restera-t-il pour éviter de tomber sous le coup d'une telle accusation et d'en subir les conséquences, sinon d'adhérer au Parti Communiste ? 61:100 Cette fureur délatrice est une fureur aveugle et assassine. En climat de campagne électorale, elle fait peut-être partie de l'arsenal ordinaire des mensonges hyperboliques. En climat de guerre civile, elle prépare les massacres. \*\*\* Peut-être réussiront-ils. Peut-être le crime et l'imposture réussiront-ils pour un temps leurs parades mortelles, calculées sur l'excitation et l'exploitation de la *haine du prochain.* Mais il est une chose qu'ils ne réussiront pas : à extirper des cœurs la foi certaine que Dieu, à son heure et à sa manière, vérifie la parole de ses saints. A sa manière et à son heure, et par Marie, Dieu vérifiera la parole de saint Pie X sur la France, et c'est seulement ainsi que la France restera ou redeviendra la France : « *Le peuple qui a fait alliance avec Dieu aux fonts baptismaux de Reims se repentira et retournera à sa première vocation. Les mérites de tant de ses fils, qui prêchent la vérité de l'Évangile dans le monde presque entier, et dont beaucoup l'ont scellé de leur sang ; les prières de tant de saints qui désirent ardemment avoir pour compagnons dans la gloire céleste les frères bien-aimés de leur patrie ; la piété généreuse de tant de ses fils qui, sans s'arrêter à aucun sacrifice, pourvoient à la dignité et à la splendeur du culte catholique... appelleront certainement sur cette nation les miséricordes divines. Les fautes ne resteront pas impunies, mais elle ne périra pas, la fille de tant de mérites, de tant de soupirs et de tant de larmes.* *Un jour viendra, et Nous espérons qu'il n'est pas très éloigné, où la France, comme Saül sur le chemin de Damas, sera enveloppée d'une lumière céleste et entendra une voix qui lui répétera :* « *Ma fille, pourquoi me persécutes-tu ?* »*. Et sur la réponse :* « *Qui es-tu, Seigneur ?* »*, la voix répliquer :* « *Je suis Jésus que tu persécutes. Il t'est dur de regimber contre l'aiguillon, parce que, dans ton obstination, tu te ruines toi-même.* » *Et elle, tremblante et étonnée, dira :* « *Seigneur, que voulez-vous que je fasse ?* »*. Et lui :* « *Lève-toi, lave tes souillures qui t'ont défigurée, réveille dans ton sein tes sentiments assoupis et le pacte de notre alliance, et va, Fille aînée de l'Église, nation prédestinée, vase d'élection, va porter, comme par le passé, mon nom devant tous les peuples et tous les rois de la terre.* » 62:100 Pour que cette parole s'accomplisse, il faudra encore combien de souffrances et combien de sacrifices, combien de larmes et combien de martyres, nous ne le savons pas. Tout sera peut-être brisé. Mais une chose ne se brisera pas. Nous croyons à la parole de Vie. Nous redisons avec Péguy : *Dans des cœurs charnels, dans des cœurs précaires,* *Dans des cœurs viagers,* *Dans des cœurs qui se brisent,* *Une Parole est conservée, est nourrie,* *Qui ne se brisera éternellement pas.* 63:100 Ce que nous disions en mai 1962 ### La politique **I. -- ***Ouverture à gauche...* Expression proprement catholique. Elle s'adresse à qui n'est point de gauche et n'était pas, ou pas assez, ouvert à gauche. L'ouverture à gauche est le mot d'ordre fabriqué par le cléricalisme révolutionnaire pour les peuples chrétiens d'Occident. En Italie, d'où vient l'expression, l' « ouverture à gauche » consiste à faire entrer comme force d'appoint dans la majorité gouvernementale, plutôt que la droite, les socialistes nenniens qui sont « marxistes », anti-atlantiques, neutralistes, et qui ont des liens plus ou moins étroits avec le Parti communiste. En France, le parti socialiste est anticommuniste, européen et atlantique, et son marxisme théorique est en pratique fort atténué. L'équivalent moral des socialistes nenniens se trouverait plutôt dans le groupuscule du P.S.U. ([^32]), d'idéologie activement marxisante, d'attitude pratiquement favorable au Parti communiste, et où militent, c'est une originalité de la France par rapport à l'Italie, des cadres de l'Action catholique. 64:100 C'est le Parti communiste lui-même qu'en France les théoriciens de l' « ouverture à gauche » méditent d'associer plus ou moins directement à la conduite des affaires politiques, économiques et sociales. On habitue l'opinion, de préférence l'opinion catholique, à trouver normale une telle éventualité. Une revue ecclésiastique rappelle et approuve le « tripartisme » de 1945, présenté comme un exemple du cas où *le gouvernement du pays ne serait pas possible sans une présence communiste*. Car si un tel cas venait à se reproduire, on veut qu'il soit bien entendu que *la nécessité impérieuse de ne pas bloquer les institutions obligerait alors à tolérer une telle présence*, -- une présence communiste au gouvernement : *lorsque par exemple en 1945-1947 trois partis* (*M.R.P., S.F.I.O. et P.C.*) *se partagent les sièges, qu'aucun ne peut gouverner seul, il n'y a vraiment pas d'autre issue qu'un tripartisme qui associe le Parti communiste aux responsabilités du pouvoir...* L'exemple de 1945 est excellent, il est opportun, il est pleinement actuel. Il invoque en somme le cas de force majeure, et la force majeure est un argument de poids : c'est une nécessité indépendante de la volonté. Or le cas de 1945 est un cas TRUQUÉ de force majeure. Le truquage consiste en ce que les hommes qui invoquent la force majeure sont ceux qui ont volontairement créé une situation telle que la collaboration communiste y soit « inévitable ». Ils ne sont plus excusés par la force majeure, mais gravement responsables et coupables de l'avoir fabriquée. Puisque certains esprits, certains actes et certains événements se conjuguent pour nous ramener à une situation analogue, il n'est pas inutile de l'examiner. En 1945 il était devenu impossible de gouverner sans le concours des communistes *parce que* l'on avait au préalable politiquement disqualifié une moitié de la nation : on l'avait épurée, décimée, emprisonnée, déshonorée, systématiquement amalgamée avec le nazisme vaincu et criminel. Malgré des promesses solennelles tissées dans une étoffe que nous connaissons bien, et qui annonçaient le châtiment de la seule « poignée de traîtres », on avait étendu les représailles et la terreur à la moitié du pays ou du moins, ce qui revient au même, à ses cadres sociaux et politiques. Et religieux. Le gouvernement était allé jusqu'à demander la tête de vingt évêques : devant la fermeté de Pie XII il lui fallut se contenter de la « démission » de deux ou trois, mais le coup était porté. La terreur réelle et la terreur psychologique se conjuguaient pour mettre hors la loi ou paralyser, emprisonner ou priver de moyens d'action, épurer ou disqualifier la partie « droite » du pays. 65:100 Il est bien évident, en 1945 comme en 1962, que dans l'état actuel du rapport des forces politiques, qui se composent en gros d'une moitié gauche et d'une moitié droite sensiblement du même poids, toutes les fois que l'on met la moitié droite virtuellement ou réellement hors la loi, on se met du même coup dans l'impossibilité de se passer des communistes. Seulement, ce n'est pas un cas de force majeure. C'est une situation que l'on a soi-même créée. Deux voies s'ouvraient en 1945 (comme, analogiquement, deux voies peuvent s'ouvrir en 1962). La réconciliation nationale, d'une part : et le Parti communiste était par le fait même exclu de toute participation au pouvoir. D'autre part, la continuation de la guerre civile, larvée mais effective, et souvent atroce : et le Parti communiste était alors nécessaire au fonctionnement du système. Vérification : dès que, en 1947, la guerre civile et les représailles commencent à se ralentir, dès qu'un apaisement s'esquisse, si imparfait soit-il, le Parti communiste est chassé du gouvernement et de la majorité gouvernementale. Chaque fois que le régime politique exclut de la vie publique, physiquement ou virtuellement, les cadres intellectuels, politiques et sociaux de la moitié droite du pays, l'autre moitié du pays est incapable de faire quoi que ce soit, immédiatement ou à la longue, sans l'accord et la participation du Parti communiste. Aussi longtemps que l'électorat, l'opinion, les cadres sociaux en France seront répartis comme ils le sont depuis 1945, la gauche non-communiste sera placée devant l'alternative : ou bien cohabiter avec la droite, ou bien collaborer avec le communisme. Ils l'ont fort bien compris, les hommes politiques et les hommes d'Église qui proclament ou prêchent que l'on ne doit pas tenir le Parti communiste pour « l'adversaire numéro un ». Ils l'énoncent parfois avec une bonhomie parfaitement anodine de ton. Ils savent que la conséquence inévitable en est, premièrement, qu'il y aura un autre adversaire numéro un, et secondement, que contre cet autre adversaire la collaboration communiste deviendra pratiquement indispensable. 66:100 **II. -- **La technique publicitaire est analogue en 1945 et en 1962 : on joue avec le crime. On dépense autant d'efforts pour dissimuler ou absoudre toute une série de crimes que pour en mettre une autre en relief. On excuse et même on honore les responsables réels de crimes que l'on tait ; on étend d'autre part à des innocents, ni coupables ni complices, la responsabilité des crimes autour desquels on mène un tapage unilatéral. Au procès de Nuremberg, les criminels de guerre du nazisme avaient parmi leurs juges les criminels de guerre du communisme, La propagande était à cette image, et les forces morales mobilisées au service de ce système. Le nazisme était disqualifié à cause de ses crimes dans le temps même, et par les mêmes, où le communisme était qualifié malgré ses crimes. Pendant l'hiver 1961-1962, la « conscience chrétienne », quand elle était « confrontée » à un tueur pourchassé, venu frapper à sa porte, que devait-elle faire ? Eh ! bien, cela dépendait. Si le tueur était F.L.N. l'abriter et le faire passer en Espagne. S'il était O.A.S. le livrer à la police. Cette attitude intermittente de la conscience, il semble bien, mais c'était peut-être un faux-semblant, qu'elle était recommandée ou approuvée d'assez haut. Il y avait l'opportunité politique, bien sûr. L'opportunité politique, cela existe : mais quand cela empiète sur la morale, et se la soumet, au lieu de l'inverse, il n'y a plus de morale ni de droit ; ni rien que la raison du plus fort. A quoi s'ajoute l'extension systématique de ces discriminations à ceux qui, à aucun degré, n'étaient des tueurs ni des criminels, ni en intention ni en fait, ni même en apparence. En 1945, la condamnation universelle du seul nazisme, prononcée en accord avec le communisme, « s'est arrangée pour » englober des catégories entières de Français qui de près ni de loin n'avaient rien à voir avec le nazisme. En 1962, la condamnation universelle du terrorisme O.A.S., prononcée en accord avec le terrorisme F.L.N., cherche à « s'arranger pour » englober des catégories entières de citoyens qui de près ni de loin n'ont rien à voir avec la moindre activité clandestine ou terroriste. 67:100 Quand un pays subit deux fois ce système moral en moins de vingt ans, il peut en basculer tout entier dans une complète aliénation. **III. -- **Mais la *décolonisation ?* Justement : elle tient en 1962 la place et joue le rôle de la *libération* en 1945. C'est l'objectif noble, l'objectif désiré, en soi bon et souhaitable, qui sert de pavillon, -- le pavillon couvrant la marchandise. \*\*\* Les pays d'Europe ont été *libérés* en 1945 : mais point tous de la même libération. Il y en eut deux sortes principales. La première, la seule dont on parlait, mobilisant les peuples et les forces morales, était la fin de la domination étrangère. La seconde, fort différente, fut celle de la Pologne et de la Tchéco-Slovaquie, livrées à l'Armée rouge et au totalitarisme soviétique. Semblablement, il existe aujourd'hui *deux sortes de* « *décolonisation* »*.* **1.** Celle qui est LE BUT de la colonisation, et son couronnement, et son résultat : l'ancien colonisé, mis en état de se gouverner lui-même, conserve et prolonge l'œuvre de l'ancien colonisateur, en union avec lui. C'est la décolonisation conforme à la doctrine catholique, rappelée par Pie XII notamment dans l'Encyclique *Fidei donum :* « Qu'une liberté juste et progressive ne soit pas refusée à ces peuples et que l'on n'y mette pas obstacle, disions-Nous aux uns ; et Nous avertissions les autres de reconnaître à l'Europe le mérite de leur avancement ; sans son influence étendue à tous les domaines, ils pourraient être entraînés par un nationalisme aveugle à se jeter dans le chaos ou dans l'esclavage. 68:100 **2.** Celle qui est UNE REVANCHE contre la colonisation, réputée injuste, infâme et criminelle, et dont l'œuvre doit être effacée par une révolution radicale. C'est la décolonisation conforme aux vues de Lénine et à la stratégie soviétique. \*\*\* Au nom de la première sorte de décolonisation, diverses autorités dites morales, politiques ou que sais-je, ont assumé de concert l'immense responsabilité devant Dieu et devant l'histoire de faire accepter, honorer, embrasser par le peuple français les horreurs et les crimes de la seconde sorte de décolonisation ; décolonisation sauvage, décolonisation caricaturale, qui au lieu d'établir « une liberté juste et progressive », installe un totalitarisme absolutiste, un nationalisme aveugle, condamné à sombrer « dans le chaos ou dans l'esclavage ». Comme la libération de 1945, la décolonisation de 1962 est en outre étroitement liée à autre chose, utilisée pour autre chose. Pour les acteurs de la décolonisation de 1962 comme pour les acteurs de la libération de 1945, libération et décolonisation ne sont que des fins intermédiaires, et peut-être même seulement des fins instrumentales. Dans les deux cas, *la fin véritable est un projet concernant l'État français et la société française*, -- s'inspirant d'une CONCEPTION DE LA VIE SOCIALE qui n'aurait pas été spontanément admise ni plébiscitée par le peuple français sans l'artifice de la fin instrumentale. **IV. -- **Tels qui se sont toujours fait une incertaine idée de la France poursuivent le dessein de liquider ceux qui en France ont une idée certaine de la civilisation chrétienne. Il y fallait indispensablement le concours d'une partie des catholiques et du clergé, enrôlée dans cette opération révolutionnaire. 69:100 Depuis un demi-siècle, jamais l'Église de France ne s'était aussi ostensiblement située à l'écart de la politique, jamais elle n'en avait été aussi « dégagée » : et cependant jamais elle n'y a eu autant de poids. De 1910 à 1939, les divers gouvernements de la III^e^ République, leurs actions, leurs inactions, leur succession, s'analysent fort bien abstraction faite des catholiques en tant que tels. Mettez l'Église entre parenthèses, cela ne change à peu près rien aux fortunes et infortunes politiques de Poincaré, d'André. Tardieu, de Pierre Laval, de Léon Blum, de Paul Reynaud. Depuis 1945 au contraire, toute la politique intérieure française devient inanalysable, incompréhensible, illisible si l'on fait abstraction du catholicisme. Il y a un parti catholique, il y a le parti catholique. Il n'est qu'officieusement officiel, à moins qu'il ne soit officiellement officieux, par une ambiguïté aussi obscure qu'électoralement rentable. Il a été constamment au pouvoir depuis 1945 : quand il ne le dirigeait pas, il y participait, et encore aujourd'hui. Soutenu par l'unique quotidien catholique, il bénéficie dans l'organisation ecclésiastique d'appuis directs ou indirects dont la discrétion relative ne nuit pas à l'efficacité. Ce parti catholique présente une autre originalité : il est le seul parti français dont la direction et l'action soient plus à gauche que l'électorat. Les autres partis politiques, de la S.F.I.O. aux Indépendants, mettent l'accent sur la partie gauche de leur programme, et au-delà, pendant les campagnes électorales, et mettent en œuvre la partie droite de leur programme, et au-delà, une fois l'élection acquise. Cette sorte de duperie est bien connue, et quasiment annulée par son évidence. Elle est inversée dans le seul cas du M.R.P., qui ne serait rien, ou qui serait d'une taille comparable à celle du P.S.U., sans un électorat catholique rameuté autour de lui par le mot d'ordre de « voter utile » et de « barrer la route aux pires ». En schématisant à peine, le M.R.P. pourrait se définir comme un *électorat* de centre-droit, une action *politique* de centre-gauche et dans ses sphères dirigeantes une idéologie *intellectuelle* manipulée par les théologiens révolutionnaires. Il prend ses électeurs à droite, il prend sa conception du monde à gauche, et fait passer sa politique entre les deux, selon les variations de la mauvaise conscience que lui crée sa situation équivoque. 70:100 Dirigeants et penseurs du M.R.P. sont extrêmement sensibles aux courants d'idées révolutionnaires qui traversent l'Église de France. Ils revendiquent d'ailleurs hautement leur filiation sillonniste, avec la caution discrète ou indiscrète de théologiens qui leur garantissent que les erreurs du Sillon, ainsi notées par saint Pie X, sont reconnues comme vérité, ou sur le point de l'être, par l'Église d'aujourd'hui. Au moment même où, au pouvoir, par ses ministres, le M.R.P. assumait les responsabilités de la guerre d'Indochine contre le communisme, l' « intelligentsia » du parti était déjà conquise par les théoriciens ecclésiastiques de la décolonisation-revanche et de la victoire de la révolution. Responsable du ministère de la Justice pendant l'épuration de 1945, le M.R.P. est en permanence candidat aux mêmes fonctions pour la prochaine révolution par la loi » (par la loi d'exception). Dans les pensées et dans les actes de sa direction se reflètent à la fois la confusion idéologique du catholicisme français et la prépotence intellectuelle de la caste théologienne sociologiquement installée. C'est pourquoi il est si important de faire basculer une partie de l'intelligence catholique du côté de la révolution, de la collaboration avec le communisme, de la décolonisation-revanche et du totalitarisme économique. Avant la guerre, cela n'aurait guère eu de conséquences en dehors des cercles intellectuels et ecclésiastiques. Depuis 1945, le militantisme révolutionnaire de plusieurs publications sacerdotales retentit directement sur un parti catholique établi au centre de nos structures politiques, freiné sans doute par la nécessité de ne pas perdre son électorat de droite, mais ouvert à l'influence des théologies para-marxistes du sens de l'histoire. Simultanément, la tentation permanente du M.R.P. est de prêter main forte à toute opération visant à disqualifier ou liquider les cadres intellectuels, politiques et sociaux de la droite française, de manière à s'en approprier totalement et définitivement l'électorat : ce qui, sans qu'il l'ait consciemment voulu, ne peut que contribuer à créer une situation où la participation des communistes au pouvoir apparaîtra inévitable. 71:100 **V. -- **Cette liquidation des cadres intellectuels, politiques et sociaux d'une moitié du pays est fort exactement exprimée, dans son principe et dans sa couverture morale, par la formule qui demande que soient « *isolés comme des lépreux au sein de la nation* » non seulement ceux qui ont commis des crimes, -- une seule catégorie de crimes, d'un seul terrorisme, l'autre étant absous, honoré, consacré, -- mais encore tous ceux que l'on pourrait présenter comme suspects de les avoir « *supportés* » ou même simplement « *négligés* » ([^33]). C'est le contraire de la réconciliation nationale, c'est l'extension sans limite de l'apartheid. ISOLER COMME DES LÉPREUX AU SEIN DE LA NATION non pas seulement les coupables et les complices de certains crimes sélectionnés, mais tout autant ceux que l'on accusera de « négligence ». C'est le même arbitraire qui permit de présenter le Cardinal Suhard, interdit de séjour dans sa cathédrale, et le général Weygand, arrêté dès son retour de déportation, comme complices du nazisme, ou comme suspects d'avoir « supporté ». \*\*\* On y ajoutera le lavage de cerveaux et la contrainte. C'est le projet publiquement mis en avant par les théori­ciens et porte-parole du clergé révolutionnaire. Suite de la décolonisation-revanche, de la destruction radicale de l'œuvre coloniale, les réfugiés qu'il faut bien recueillir en France, on en profitera pour les contraindre en outre à *abandonner leur univers mental.* Il n'aura pas suffi qu'ils aient tout perdu, il faudra encore leur prendre leur âme, et la manipuler. Voici comment cela s'énonce, sacerdotale­ment : « La solidarité humaine nous impose de ne pas abandonner les « pieds noirs » et, si nous devons admettre que bon nombre d'entre eux les enfants surtout, et les adolescents -- récoltent les fruits empoisonnés d'une moisson qu'ils n'ont pas semée, certains adultes ont tout de même des années durant profité d'un état de choses injuste. Veiller à leur réinstallation en France est d'une stricte obligation morale, mais il est tout aussi nécessaire moralement de faire en sorte que ces populations éprouvées abandonnent l'univers mental du colonisateur. 72:100 La décolonisation impose non seulement \[*sic*\] une reconversion des mentalités. Tant qu'un « pieds-noirs » \[*resic*\] estimera que tous les musulmans sont des êtres paresseux, voleurs, menteurs, à qui des salaires de famine doivent suffire, nous ne pourrons l'aider en vérité. La décolonisation n'est pas qu'un fait matériel, c'est un retournement psychologique. Loin de nous, par conséquent, l'idée d'abandonner les « pieds noirs », mais nous tenons tellement à eux que, notre solidarité à leur égard va jusqu'à prétendre travailler avec eux au sauvetage de leur esprit ravagé par les méfaits du colonialisme. L'œuvre sera longue et dure et l'on peut redouter qu'il lui faille parfois s'accompagner de quelques contraintes. » Le bon apôtre ! Ces lignes d'un ton écœurant et d'un contenu atroce ont paru dans la revue *Signes du temps*, numéro d'avril 1962, page 16. Ces « pieds noirs » ont pendant sept années vécu sous la terreur quotidienne. Ils sont ceux qui ont survécu. Ils ont vu autour d'eux les enfants coupés en morceaux, les femmes violées et éventrées, les hommes mutilés ; yeux crevés, gorge tranchée d'une oreille à l'autre, ils ont combien de parents, d'amis, de voisins, de compagnons que les héros consacrés du F.L.N. ont fait périr dans les tortures. Ils ont survécu aussi à d'autres massacres, aux mitrailleuses tirant à bout portant et sans sommation sur la foule désarmée, achevant à terre les blessés et fauchant jusqu'aux médecins qui leur portaient secours. Des victimes ? Allons donc ! Il faut qu'ils sachent bien qu'au regard sacerdotal du clergé révolutionnaire ils sont et demeurent des coupables, que leur pensée même est criminelle et qu'une « œuvre longue et dure » s'occupera de les mettre en condition. Ils se réfugient en France les mains vides, sans rien d'autre que le souvenir de leurs morts et leur expérience vécue du mensonge sanglant de la révolution. C'est cette expérience que les prêtres qui militent au service de la révolution ne leur pardonneront jamais ; c'est de cette expérience que ces prêtres veulent à tout prix anéantir d'une manière ou d'une autre le souvenir. Il s'agit bien, pour ces prêtres, de « *tous* les Musulmans » ! Ils se moquent des milliers et des milliers de Musulmans massacrés par le F.L.N., -- sans quoi ils se seraient aperçus que ce qui menace « tous les Musulmans », ce n'est pas le jugement prétendument porté par les pieds noirs, mais c'est le totalitarisme qui étend son ombre de mort. 73:100 Les réfugiés français n'ont plus rien que leur témoignage : le F.L.N. est un terrorisme installé et consacré en sa qualité de terrorisme triomphant, de terrorisme vainqueur, de terrorisme justifié. Les réfugiés français n'ont plus que leur âme, et c'est elle maintenant que veut leur arracher la haine inlassable du cléricalisme révolutionnaire, déjà prête à parfois *s'accompagner de quelques contraintes.* \*\*\* Le lavage de cerveaux, il faudra y contraindre en premier lieu, à coup sûr, l'Évêque d'Oran, qui a déclaré à la presse internationale ([^34]) : « Il est douloureux d'être le père de la communauté chrétienne d'Oran, qui est déchirée par la situation actuelle. Je ne vois aucun inconvénient à ce que la communauté musulmane ait l'indépendance, mais si la communauté chrétienne ne l'a pas aussi, je vois mal notre avenir ici. Si je pouvais dire aux communautés : « Restez tranquilles, vous pourrez continuer votre vie religieuse comme auparavant », je le leur dirais. Mais je ne sais pas ce qui se passera et je ne peux pas le leur dire. L'avenir est un point d'interrogation. L'avenir et le pain des Européens. » Pour une telle déclaration, l'Évêque d'Oran a été rappelé à l'ordre par *Témoignage chrétien*, organe autorisé et gardien vigilant de l'orthodoxie catholique révolutionnaire. Mgr Lacaste avait pourtant l'excuse de n'avoir probablement pas encore lu l'article de *Signes du temps* l'avertissant qu'il lui faut « abandonner l'univers mental du colonisateur », se persuader qu'il a « des années durant profité d'un état de choses injuste » et que « son esprit est ravagé par les méfaits du colonialisme ». On lui enseignera quelle est la nouvelle orthodoxie, et qu'il convient, avec le même article de *Signes du temps,* d'adopter désormais la position que voici : « *Quand les communistes se fixent comme objectif la réconciliation de l'homme avec l'homme et avec la nature par l'abolition de toutes les contradictions, pourquoi ne pas admettre que cet idéal est respectable et bon.* » 74:100 Évidemment, quand le charitable lavage de cerveau sacerdotalement préconisé par le clergé révolutionnaire aura réussi à persuader l'Évêque d'Oran que l'idéal communiste est respectable et bon, il n'énoncera plus le blasphème selon lequel il pourrait y avoir quelque chose de «* douloureux *» pour un cœur chrétien dans l'installation du totalitarisme en Algérie. **VI**. -- Des éléments influents du clergé français prennent délibérément le parti de la violence révolutionnaire. Élé­ments peu nombreux, mais importants par leur installation sociologique dans les structures du catholicisme. Je ne révèle absolument rien de secret : je lis leurs publications, comme chacun peut les lire. Et si leur puissance a des res­sorts et des desseins secrets ou discrets, ce qui n'est pas invraisemblable, c'est une autre question. Plus d'un se rassure en remarquant que le F.L.N. n'est pas communiste et qu'il s'efforce de tenir à distance le Parti communiste algérien : cela est vrai, mais il n'y a pas seulement cela qui soit vrai. La décolonisation conçue comme une revanche implacable sur le colonisateur et comme une destruction radicale de l'œuvre coloniale, c'est la décolonisation selon Lénine et absolument point la décolonisation selon la doctrine chrétienne. C'est la décolonisation qui au Maroc a expulsé jusqu'à la statue de Lyautey. D'autre part, ceux qui accueillent, approuvent, honorent cette décolonisation révolutionnaire sont ceux-là mêmes qui admettent et demandent d'admettre que « l'idéal communiste est respectable et bon ». Les deux choses, même dans les cas où elles ne sont pas organiquement et politiquement liées, sont liées mentalement. Le clergé révolutionnaire nous ramène au point où il faut à nouveau expliquer que ce qui *paraît* bon et respectable dans le communisme est *machiné* précisément pour tromper le P. Gardey et ses semblables ([^35]). C'est là une vérité certaine qui ressort des témoignages les plus qualifiés et qui est hautement affirmée par l'enseignement de l'Église. 75:100 Parmi les témoignages, n'invoquons que le plus récent, du moins en français : on vient de traduire le célèbre ouvrage de l'ancien dirigeant communiste Douglas Hyde, converti au catholicisme ([^36]). Il avertit le P. Gardey : « *La propagande publique* (du communisme) *n'offre jamais aucun point commun avec les buts réels... Le communisme est devenu en fait une gigantesque mystification, une trom­perie délibérée et totale du public.* » ([^37]) Douglas Hyde expose, avec des exemples concrets, comment le Parti s'arrangeait pour qu'*aucun adhèrent ne soit leurré par la propagande communiste* ([^38]) ; *comment la campagne pour des revendications est calculée pour être inefficace à l'extrême* car elle vise un autre but ([^39]) ; comment « *des mois d'entraînement idéologique avaient préparé les militants à mettre sur pied ce subterfuge à grande échelle sans être trompés eux-mêmes par la propagande officielle du Parti* » ([^40])*,* etc., etc. 76:100 Tous les anciens DIRIGEANTS qui ont quitté le Parti communiste -- et surtout ceux qui, convertis au catholicisme, sont à même de repenser et de juger leur expérience à la lumière de la foi chrétienne -- ont sous une forme ou sous une autre apporté le même témoignage. Cela fera-t-il un jour réfléchir ces prêtres révolutionnaires qui refusent d'en croire l'enseignement de l'Église ? Car il y a un quart de siècle que l'Église l'enseigne et l'explique en détail. Les communistes, énonce cet enseignement solennel, veulent « *gagner les foules par toute sorte de tromperies qui dissimulent leur dessein sous des idées en elles-mêmes justes et séduisantes* » et même « *ils avancent des projets en tous points conformes à l'esprit chrétien et à la doctrine de l'Église* » ([^41])*.* L'Église n'en conclut nullement qu'il y aurait donc là « un idéal respectable et bon ». Elle conclut au contraire, *à ce propos,* qu'il faut « *apporter la plus rigoureuse attention à ce que les fidèles se défient de ces pièges* » ([^42]). Oui, DE CES PIÈGES qui consistent à mettre en avant LES APPARENCES D'UN IDÉAL RESPECTABLE ET BON. Mais au lieu d'indiquer aux fidèles que c'est un piège, des prêtres les y poussent, en leur disant : -- *Pourquoi ne pas admettre que cet idéal est respectable et bon ?* Disant cela, faisant cela, ils créent à l'intérieur de la communauté chrétienne une tension dramatique entre, d'une part, la vérité connue comme certaine et garantie par l'Église, et, d'autre part, leur propre fonction, sacerdotale pesant de toute son autorité morale en faveur de la contrevérité. C'est peut-être la crise la plus terrible que l'Église ait traversée au cours de son histoire, d'autant plus terrible qu'elle se développe dans une immense anesthésie des consciences. Le sens commun, le simple bon sens aurait suffi. Il avait devancé l'enseignement de l'Église : quatre années avant *Divini Redemptoris,* Mauriac écrivait que dans le communisme « il ne peut rien y avoir de bon, puisque ce qui en paraît bon sert à tromper et à perdre les âmes ». Mais, par une aliénation de l'âme, quelques prêtres et quelques intellectuels fortement organisés travaillent à pénétrer l'esprit chrétien de l' « idéal respectable et bon » de la Révolution. 77:100 **VII. -- **La véritable alternative du monde contemporain est entre le christianisme et le communisme : la conversion ou la révolution. Où se situe la France d'aujourd'hui ? Son régime politique, ses administrateurs, ses technocrates n'ont partie liée ni avec le communisme, même quand ils subissent sa présence ou supputent l'éventualité de sa col­laboration, ni avec le christianisme, même quand ils le saluent en passant ou lui font une place dans le retrait de la vie privée : c'est-à-dire que la direction du pays est en dehors de l'essentiel ; en dehors du sens profond de l'histoire, même quand elle s'applique à en épouser les mouve­ments, car elle n'en aperçoit que les mouvements les plus superficiels et les plus passagers, ou les grimaces. Le mon­de moderne est maintenant au point où il doit aller jus­qu'au bout de lui-même ou se convertir. Il s'agit de toute la civilisation, -- de toute la « civilisation de la technique », c'est-à-dire l'action pour civiliser le monde nouveau de la technique. Le monde moderne ira en reculant jusqu'au bout de lui-même, c'est le communisme soviétique et le néant, ou bien il se convertira à Jésus-Christ et retrouvera les finalités perdues : il n'y a pas de troisième voie, il n'y a que des retards et aussi des masques. A cette alternative, le régime actuel est entièrement étranger, il ne croit pas plus à la réalité dialectique du communisme qu'il ne croit à la réalité sociale du christianisme, tout cela lui paraît sans importance. Il est neutre, c'est-à-dire inexistant à ce niveau. La neutralité est une illusion, d'ailleurs médiocre, ou bien elle est un mensonge, également médiocre. Face à l'interrogation essentielle du monde moderne, qui est au point de commencer à refaire une société chrétienne ou d'achever de sombrer dans le despotisme totalitaire, la politique du moment s'agite dans des diversions : qui réjouissent la haine de quelques-uns, provoquent l'horreur de quelques autres, laissent indifférents la plupart, mais si tragiques soient-elles ces diversions ont en outre ce surcroît de tragique d'être radicalement en marge de l'histoire. 78:100 Si d'aventure elles *engagent* l'avenir, comme en Algérie, c'est en voulant et en croyant *se dégager,* et en considérant régulièrement comme le plus important ce qui n'est pas l'essentiel. Il est remarquable qu'au moment où tout l'avenir du monde se joue au niveau du cœur des hommes, et de la conversion des cœurs, la France officielle soit comme neutralisée sur ce terrain, absolument étrangère à l'univers du cœur humain et de sa conversion. Du mal, Dieu fait à la fois deux choses : il le laisse aller jusqu'au bout de ses conséquences, sans quoi la liberté humaine serait illusoire, et simultanément il en tire par des voies imprévisibles un bien inconnu. Contrairement au mot de Talleyrand, qui n'est médiocrement vrai qu'à un niveau médiocre, et selon lequel « les choses ne vont jamais ni si bien ni si mal qu'on l'avait imaginé », un regard plus attentif découvre que l'histoire des sociétés humaines va toujours, et à la fois, beaucoup plus mal et beaucoup mieux qu'on n'aurait pu le croire. Mystère de la Croix. Mystère de la souffrance. Mystère de l'espérance. 79:100 Ce que nous disions en mai 1963 ### La crise doctrinale Si elle l'est trop souvent en fait, de soi la doctrine n'est pas une formulation extrinsèque que l'on apprend et que l'on respecte dans la mesure ou l'on ne peut s'en dispenser, comme l'on fait du code de la route ou du règlement général des impôts. La doctrine est parole divine, et premièrement de vie intérieure. Chaque homme, dans la mesure propre à la particularité de son esprit, à l'étendue de son savoir, à la spécificité de ses talents, vit selon ce qu'il pense, ou bien finit par penser comme il a vécu. Et la pensée elle-même, de la plus simple à la plus savante, est d'abord une vie -- la vie de la pensée -- ou n'est que caricature et faux-semblant. \*\*\* Assurément il y a problème, et d'une urgence irrécu­sable, quand on constate que la doctrine n'est plus com­prise : soit parce que son langage traditionnel est deve­nu comme ésotérique, soit parce qu'une sclérose de la pensée prive son expression ordinaire d'accents con­vaincants et entraînants, soit pour tout autre raison. Une telle situation n'appelle pas la fausse solution qui consisterait à remplacer la doctrine par une sous-doctrine supposée directement assimilable, sans peine ni effort, par les esprits sous-développés. Il convient plu­tôt de rechercher les causes et les remèdes d'un tel sous développement, et les moyens d'un développement nor­mal. A partir des talents intellectuels extrêmement di­vers, en qualité et en quantité, qui ont été départis à chaque âme, un développement intellectuel est néces­saire, qui réclame travail, et patience, et courage. 80:100 Dans plusieurs cas, éventuellement nombreux, la doc­trine a pu devenir inaccessible en fait par inadaptation des méthodes d'enseignement et d'exposition. Ainsi se sont créés des obstacles gratuits, des difficultés artificielles. Mais dans tous les cas et à tous les niveaux, la doctrine restera toujours d'un accès difficile, à cause de la peine, de l'effort, de l'ascèse intellectuelle et morale qui y sont indispensables. La difficulté principale est celle du travail personnel et prolongé. \*\*\* Le critère pratique, en matière doctrinale, est bien connu de tous les éducateurs. Il est que les connaissances religieuses de chacun soient portées au niveau de ses connaissances profanes. Au niveau, formule assez générale, un peu vague sans doute, et qui laisse une grande (et nécessaire) marge d'interprétation selon les cas particuliers. Mais formule juste et riche. Elle signifie qu'il y a lieu d'inviter chacun à un effort doctrinal compa­rable, en étendue, en qualité, à l'effort dont il a été capable pour acquérir les connaissances profanes qui sont les siennes. Il n'est jamais « facile » d'acquérir les connaissances qui sont celles, à chaque niveau, à chaque âge, de l'ouvrier spécialisé, de l'ingénieur, du magistrat. Il ne leur est pas plus « facile » intellectuellement, et il peut leur être fort difficile moralement, d'acquérir des connaissances religieuses qui soient proportionnées à leur compétence professionnelle et à leur culture pro­fane. \*\*\* Il nous semble que l'un des points climatériques de l' « aggiornamento », au stade actuel de l'humanité, sera d'exprimer en termes clairs, convaincants, exigeants, *la primauté de la contemplation sur l'action*. La primauté de la contemplation sur l'action est une vérité universelle. C'est une vérité inébranlable de la tradition philosophique naturelle, de la civilisation pro­fane. C'est une vérité de la tradition religieuse surna­turelle. Et c'est, de toute la tradition naturelle et surna­turelle de l'humanité, la vérité la plus hétérogène, du moins en apparence, au monde où nous vivons aujour­d'hui. Elle est pourtant au centre des valeurs absolues, et il n'y aura plus moyen de parler de valeurs absolues si l'on abandonne cette valeur-là. 81:100 Elle commande la vie intérieure naturelle et surnaturelle, elle commande la vie active, elle commande l'apostolat. Elle est insépara­ble de la nature, de la destinée, de la dignité de l'homme. Nous y consacrerons bientôt un numéro spécial, qui sera probablement notre numéro 76. Cette primauté de la contemplation sur l'action s'est exprimée avec équilibre et santé surtout en Occident, elle est souvent visée parmi ces valeurs dites « occiden­tales », en réalité universelles, que l'on rejette impru­demment. Cette primauté a fait ses preuves dans l'his­toire, même pour le regard le plus pragmatique : car si l'Occident l'a souvent emporté dans l'ordre pratique -- par l'intensité et la justesse de l'action -- c'est dans la mesure où l'action était inspirée, guidée, nourrie par la contemplation. Les hommes de science, dans leur do­maine, n'ignorent pas que les découvertes scientifiques les plus riches en applications techniques sont habituel­lement issues d'une recherche « spéculative », désin­téressée : contemplative. La contemplation est la forme la plus élevée et la plus féconde de l'action, et elle est la lumière de la vie active : dans l'ordre naturel et dans l'ordre surnaturel. Cette très ancienne, cette très constante « thèse » philo­sophique et théologique a sans doute besoin d'être ré­veillée, ranimée, rendue vivante. On va peut-être inven­ter d'autres manières de la formuler et de l'illustrer. On ne changera certainement pas la manière dont elle est formulée et illustrée par l'Évangile. Mais si on la laissait dormir, et si l'on abandonnait l'humanité dans l'ignorance ou dans le mépris de cette exigence fonda­mentale du monde naturel et du monde surnaturel, l'âge nouveau de l'histoire des hommes serait un nouvel âge de ténèbres, comme il y en eut déjà, et comme il peut y en avoir. \*\*\* L'opposition la plus totale, la plus décisivement in­surmontable entre ce que l'on appelle la « civilisation marxiste » et n'importe quelle forme existante, conce­vable ou possible de civilisation chrétienne, est une op­position qui se situe à ce niveau. 82:100 Un tel langage paraît incompréhensible ou dérisoire à beaucoup d'esprits, et même éventuellement à des es­prits « formés » par la lecture de la presse ou par la fréquentation studieuse de certains instituts. Il est dans l'immédiat hors de notre pouvoir qu'il en soit autrement. Car si, simplement avec un peu de bonne volonté, de souplesse dans le vocabulaire et d'adaptation opportu­ne, il était en notre pouvoir de dire ces choses d'une manière qui soit universellement intelligible aux hom­mes de notre temps, alors, « on n'aurait pas eu besoin de réunir un Concile » ayant précisément pour but l' « aggiornamento » des méthodes d'exposition par les quelles on pourra annoncer et enseigner les vérités fondamentales. \*\*\* L' « aggiornamento » n'est pas l'affaire d'une com­munauté catholique supposée parfaitement instruite et unie en sa doctrine, et seulement impuissante jusqu'ici à trouver un langage qui puisse, au-delà d'elle-même, at­teindre les incroyants dans leur ensemble. L' « aggior­namento » est tout autant à usage interne, car c'est d'a­bord la communauté catholique qui souvent ne s'entend pas elle-même, incertaine de sa doctrine, divisée sur ses principes, peu assurée de ce qui est vérité universelle et de ce qui ne l'est pas. Le « point de vue doctrinal » n'est pas une question réglée, mais une question de plus en plus souvent maltraitée, méconnue ou négligée. Les catholiques ne sont pas des hommes de nulle part et d'aucun temps, ils participent plus ou moins, et quel­quefois beaucoup, à cette inconsistance doctrinale, à cette désintégration de la pensée contemplative, qui est un trait majeur de notre époque. Inconsciemment, sub­consciemment, sans le savoir, sans imaginer même que la question puisse se poser, et se résoudre autrement, beaucoup de catholiques vivent mentalement et mora­lement une primauté de l'action sur la contemplation qui est une déchéance profonde et qui, dans cette me­sure, fait de la « dignité humaine » si fréquemment in­voquée une formule creuse. Qu'un aussi complet contre­sens naturel et surnaturel soit vécu sincèrement, qu'il soit vécu généreusement, cela n'atténue en rien cette inversion des consciences, mais alourdit encore la tâche de ceux qui, par état, par vocation, par fonction, ont la charge de réformer une aussi mortelle inversion. 83:100 Ce que nous disions en juillet 1963 ### Jean XXIII le Pape de l'Agonie LE PAPE JEAN XXIII avait décidé le jour de l'Ascension d'entrer en retraite jusqu'au jour de la Pentecôte. Et il a entraîné le monde entier avec lui dans cette retraite spirituelle, où l'univers s'est trouvé convoqué au­tour de sa mort, appelé à une longue méditation de la mort. Ce fut, selon le mot du Cardinal Siri, archevêque de Gênes, « *une sorte d'exercice spirituel pour le genre humain tout entier* »*.* La confidence la plus émouvante, la plus impressionnan­te de ce Pape dont on en rapporte beaucoup, ce fut pour nous celle qu'il livra à tout le monde, et qui a déjà été relevée ici. Extraordinaire confidence, et frappante : et pourtant ni pendant sa vie, ni pendant sa mort, ni après, elle ne paraît nulle part avoir retenu l'attention. Mais nous savons qu'elle avait du moins retenu l'attention des âmes silencieuses, des âmes de prière. L'année qui précéda sa maladie, il avait le 29 septembre 1961 publié une Lettre apostolique sur la récitation et la méditation du Rosaire, et y avait joint en « complément » un « petit essai de pieuses pensées pour chaque dizaine du Rosaire ». Le mystère qu'il avait choisi pour demander que l'in­tention de prière s'élevât vers le Pape était le premier des mystères douloureux, le mystère de l'Agonie. Ce mystère, écrivait-il, est source de réconfort pour « *toutes les âmes qui endurent les peines les plus aiguës et les plus mystérieuses* »*,* et il ajoutait : « *L'intention de prière s'élève vers le Pape* » ; vers le Pape qui «* demande force et conso­lation pour ceux qui souffrent avec lui, ceux qui sont dans la tribulation et l'affliction *». 84:100 Cette communion se réalisa universellement dans les jours de la Pentecôte, dans les jours de l'agonie physique du Pape Jean XXIII, où les pensées et les prières vinrent de toutes les parties du monde l'accompagner dans sa souf­france et dans sa mort visibles. Ce qu'avaient pu être l'agonie quotidienne de son règne, sa mort de chaque jour, ces « peines les plus aiguës et les plus mystérieuses », et la « tribulation », et l' « affliction » qu'il avait demandé aux âmes de « souffrir avec lui », cela reste en grande partie son secret. On écoutait peu ses paro­les les plus graves, qui étaient aussi les plus discrètes, et l'on ne voulait voir que sa bonté, et son sourire. Pour sourire ainsi, il faut d'ordinaire avoir beaucoup souffert, en communion avec l'Agonie du Christ. \*\*\* Le Pape Jean XXIII donnait l'exemple simple et sponta­né de la vertu la plus oubliée par le monde moderne, la piété. Il manifestait une grande piété naturelle envers ses parents, le village de son enfance, le diocèse de sa jeunesse, ses maîtres et ses supérieurs d'autrefois. Il manifestait une grande piété surnaturelle s'exprimant par les prières et les dévotions les plus traditionnelles. Le langage usé d'un monde vieilli n'emploie plus guère les mots de « piété » et de « bonté » qu'avec un accent péjoratif ou ironique. Le Pape Jean XXIII leur a rendu une vie nouvelle. Le monde contemporain n'a probablement pas bien compris ce que disait et ce que voulait ce Pape, mais le monde entier sentit qu'il était un Pape pieux et bon, et c'est pourquoi Jean XXIII fit une impression si grande sur ceux qui le virent prier et sur ceux qui le virent sourire. Beaucoup disaient : -- Si le Pape sourit, c'est qu'il est content, et que tout va bien, et de mieux en mieux. 85:100 Aux heures les plus dramatiques du Concile, quand on pouvait s'inquiéter de voir un si puissant courant, un si puissant effort non point pour perfectionner mais pour démolir tout le travail de préparation des Commissions pré­conciliaires, on trouvait commode de se rassurer par la pensée qu'une telle démolition allait au devant des désirs du Pape, puisqu'il se montrait en somme satisfait, dans ses déclarations publiques, de la marche du Concile. Seulement on oubliait, si même on y avait jamais prêté attention, qu'il s'était antérieurement déclaré satisfait du travail accompli -- sous sa direction et selon son orien­tation -- par les Commissions pré-conciliaires. On ne prêtait pas non plus beaucoup d'attention à cette réception de quelques évêques, pendant le Concile, où le Pape Jean XXIII leur racontait d'après la Bible l'histoire de Jacob qui voyait ses fils se disputer : « *Et Jacob considérait ces choses en silence.* » \*\*\* Ce qu'il a semé dans la souffrance, d'autres le moisson­neront dans la joie (mais nous ne savons ni le jour ni l'heure). La plus grande grâce peut-être dont il ait été l'instrument, c'est cette « détente », cette bienveillance, ce sentiment fraternel qui se sont établis dans les relations avec les chrétiens éloignés et avec diverses catégories d'incroyants de bonne volonté. Une grâce dont l'existence est presque démontrable historiquement. Car la pensée de Jean XXIII à l'égard de tous les frères éloignés est identi­quement la même que celle qui avait été exprimée par Pie IX, par Léon XIII et par leurs successeurs. A cette pensée identique, Dieu semble avoir ajouté un supplément de grâce, et touché les cœurs. On ne sait pas davantage quand et comment les anciennes désunités majeures seront surmontées : mais on espère en commun y parvenir un jour, dans une prière commune qui s'en remet à la volonté divine. La semence tombe en toute sorte de terrains qui embarrassent ou hypothèquent diversement sa croissance. L'espérance œcuménique est devenue ici ou là un « *œcumé­nisme* » organisé en système impérieux, -- en un système trop humain, trop malin, trop psychologique, calculateur en diable, susceptible et dominateur, stratégique et agité, quasiment une nouvelle église dans l'Église, avec ses dog­mes particuliers, son inquisition propre, ses anathèmes et ses excommunications. « *Et Jacob considérait ces choses en silence.* » \*\*\* 86:100 Comment, pourquoi ce pontificat de bonté, de charité, d'unité, vit-il à partir de 1960, et plus encore à partir de 1962, s'aggraver les déchirements internes du catholicisme ? Nous n'avons pas de réponse à cette question douloureuse, qui sans doute aura compté pour beaucoup parmi « les peines les plus aiguës et les plus mystérieuses » que le Pape Jean XXIII demandait aux âmes de prière de « souf­frir avec lui » en communion dans l'Agonie du Christ. C'est ordinairement à propos ou autour des questions sociales que les catholiques se divisent le plus : soit parce que ce domaine est celui où jouent le plus directement les passions ; soit parce que sur ce terrain se traduisent con­crètement, et de manière mieux visible, des divergences qui ont une origine et des causes plus profondes. Pourtant il y eut un bref moment, au lendemain de *Mater et Magistra*, où les divergences les plus manifestes qui opposent les catholiques dans le domaine social paru­rent en voie d'être atténuées et surmontées. L'Encyclique réalisait un équilibre des tendances et des pensées, en accep­tant à la fois, d'une part, la propriété et la subsidiarité, d'autre part la socialisation : elle les définissait de manière à les articuler ensemble dans une synthèse unique. Elle intégrait la socialisation dans une vue de l'activité écono­mique affirmant fondamentalement : « Qu'il soit entendu avant tout que le monde économique résulte de l'initiative personnelle des particuliers, agissant soit isolément soit associés de diverses manières à la poursuite d'intérêts com­muns » (§ 51). Défendant la nécessité absolue d'une pro­priété privée des biens de production, l'Encyclique faisait remarquer en substance que cette propriété privée peut être individuelle ou collective. Elle insistait sur le projet d'une diffusion effective de la propriété privée dans toutes les classes de la société. Elle réunissait les défenseurs de la propriété privée et les revendicateurs de la co-gestion, en ouvrant les voies à une co-gestion passant par la co­propriété. Idées qui n'étaient pas neuves, mais inconnues méconnues, oubliées, auxquelles l'Encyclique donnait un relief exceptionnel en leur affectant un coefficient de prio­rité et d'urgence. 87:100 Des protestants et des catholiques, des syndicalistes ouvriers et des représentants patronaux s'ac­cordaient pour étudier ensemble les perspectives ainsi ou­vertes ([^43]). Mais ce fut le catholicisme en tant que corps sociologiquement constitué qui ne suivit pas, qui déserta ces rencontres constructives, et qui enterra tout. La plupart de ceux qui dirigent les forces sociologiques et publicitaires du catholicisme ne voulurent retenir de *Mater et Magistra* que la socialisation. Au lieu de prendre la socialisation comme elle était dans l'Encyclique, c'est-à-dire intégrée à un ensemble et partie d'un équilibre, ils l'isolèrent, en firent un slogan privilégié, méconnurent la synthèse équilibrée et travaillèrent ainsi à accroître le désé­quilibre des esprits, des tendances, des mouvements. Ils virent dans le concept de socialisation, ou plutôt dans le mot lui-même, l'idée neuve et hardie de l'Encyclique : sans s'apercevoir qu'il n'y avait, en soi, rien de hardi ni de neuf a parler de socialisation au moment où tout le monde socialiste et technocratique en parle. Le neuf, le hardi, C'était d'intégrer la socialisation à un projet social ayant pour but une diffusion effective et universelle de la pro­priété privée. Mais celle-ci a été mise entre parenthèses puis transférée aux oubliettes, en compagnie du principe de sub­sidiarité. Ainsi l'Encyclique *Mater et Magistra* devint pratique­ment, pour l'opinion de masse, même catholique, « l'Ency­clique qui avait accepté la socialisation », -- au lieu de demeurer ce qu'elle était, l'Encyclique qui avait intégré la socialisation dans la doctrine chrétienne. De simple FAIT bon ou mauvais selon les cas, à juger et orienter en fonc­tion de certains PRINCIPES, la socialisation devint elle-même une sorte de principe, voire de principe unique, s'intégrant tout le reste au lieu d'y être intégrée ; elle devint pour plusieurs « la solution chrétienne du problème social ». Dans l'Encyclique, la socialisation était un fait à juger et orienter en fonction du principe de subsidiarité : on prit la socia­lisation *sans* le principe de subsidiarité. On mit le principe de subsidiarité entièrement sous le boisseau ; dans certains pays on n'en parla aucunement, on n'en dit même pas un mot, malgré l'insistance de *Mater et Magistra* à son sujet (insistance réitérée dans *Pacem in terris*)*.* 88:100 Et le mot « socia­lisation », ce mot qui ne figure d'ailleurs pas dans le texte authentique de l'Encyclique, mais seulement dans les tra­ductions, ce mot isolé de tout le contexte doctrinal où il était placé dans *Mater et Magistra*, devint en pratique l'é­quivalent vague et mou de « marche au socialisme », de « construction du socialisme ». Cela s'est passé sous nos yeux, avec la tolérance et quelquefois l'approbation et l'ap­pui de tant de notabilités du catholicisme, qu'il fut impos­sible d'empêcher un tel détournement. Un moment l'Encyclique *Mater et Magistra* avait donc procuré aux chrétiens et aux hommes de bonne volonté l'idée et les moyens de marcher, dans l'unité, ailleurs que sur les rails préfabriqués et totalitaires de la « construction du socialisme » : mais très vite on retomba dans l'ornière du totalitarisme économique, et cette retombée fut l'œuvre d'organisations catholiques. L'unité entrevue, l'unité es­quissée n'y résista point : car l'on peut concevoir sans doute une sorte d'unité pour faire avancer une socialisation totalitaire, ce n'est plus l'unité dans la vérité, dans la jus­tice, dans la charité. \*\*\* L'année 1962 balaya les virtualités, les perspectives, les possibilités d'unité qui avaient pris naissance en 1961 avec *Mater et Magistra*. Au moment où le Pape Jean XXIII faisait avancer l'espérance de l'unité retrouvée avec les chrétiens séparés, l'unité de la communauté catholique était éprouvée par de violentes tempêtes internes. L'année 1962 est celle où, d'un coup, le teilhardisme doubla ou tripla de volume et d'agressivité, cherchant non plus à se concilier avec la théologie traditionnelle, mais à la renverser de fond en comble, et à en anathématiser tous les représentants. 89:100 L'année 1962 est celle où, simultanément, fut lancé dans deux ou trois continents, avec d'énormes moyens de presse et de radio, le mot d'ordre fratricide de guerre dans l'Église : « Les intégristes sont les pires ennemis de l'Église, plus dangereux que les communistes » ; et l'on définissait les « intégristes » de manière à y englober la moitié au moins des catholiques, tous ceux qui ne considèrent pas comme un devoir sacré de collaborer « sans méfiance » avec le communisme, avec le socialisme, avec le laïcisme. L'année 1962 est celle où une aile du catholicisme rompt brutalement toute esquisse de dialogue avec les autres ca­tholiques et se mobilise en vue de la bataille et de l'assaut à lancer au mois d'octobre, date de convocation du Concile. Cette aile du catholicisme déclenche ouvertement la guerre dans l'Église, s'appuyant d'un bout à l'autre du monde sur toute la presse anti-catholique et spécialement sur la presse directement ou indirectement d'obédience communiste. C'est alors un débordement de passions furieuses, c'est un dé­chaînement de fausses informations, d'un volume matériel considérable, et qui n'a pas faibli depuis lors, créant un *climat psychologique artificiel* où toutes les paroles de Jean XXIII sont déformées, annexées ou annulées aussitôt qu'elles y pénètrent. Si bien que lorsque paraît *Pacem in terris,* en avril der­nier, ce n'est pas en quelques mois comme pour *Mater et Magistra,* c'est immédiatement que l'Encyclique est passée au conformateur, mutilée sur le lit de Procuste publicitaire. En ce qui concerne *Mater et Magistra*, il avait fallu des semaines et des mois pour arriver à ce que l'opinion publi­que n'en retînt quasiment qu'un mot, celui de « socialisa­tion » qui n'est pas dans le texte. Pour *Pacem in terris*, c'est instantanément que l'opinion publique fut mobilisée à n'en retenir qu'un seul point, la collaboration avec le communisme, qui n'est, elle, ni dans le texte, ni dans les traductions, ni dans l'esprit, ni dans la logique interne de l'Encyclique. \*\*\* Dès que le Concile eût été ouvert, en octobre 1962, l'aile catholique qui avait déchaîné la guerre psychologique dans l'Église favorisa une ingérence systématique et continue des pouvoirs temporels dans les affaires religieuses, parce qu'elle trouvait en une telle ingérence sa principale force. Cette ingérence semble ne pas avoir été beaucoup remar­quée en tant que telle, car elle n'était point de type classi­que, ce n'était pas directement une ingérence des États et des chefs d'État, comme cela s'était produit souvent pour les Conciles et les Conclaves du passé. C'est l'ingérence de nouveaux pouvoirs temporels, ceux de la presse, ceux de la radio, qui fabriquent l'opinion de masse, et qui au demeu­rant ne sont nullement indépendants des puissances d'ar­gent et des puissances politiques. 90:100 A la fin du mois de mai 1963, avant même la mort de Jean XXIII, ces nouvelles puissances temporelles ont en direction du futur Conclave lancé leur veto, comme le faisaient autrefois les Princes ; et, comme faisaient les Princes parfois, elles ont lancé ce veto en l'appuyant d'une menace de schisme : « *L'élection d'un Pape conservateur risquerait de provoquer un schis­me. *» Nous avons tous lu cet ultimatum ; et beaucoup l'ont trouvé normal. Mais il en a toujours été ainsi : au temps où les Princes prétendaient jouir d'un droit de veto sur les choix des Conclaves et sur les décisions des Conciles, beau­coup trouvaient normale, ou tolérable, ou inévitable une telle prétention, C'est aujourd'hui seulement -- aujourd'hui où elle n'est plus revendiquée par les Princes -- que cette prétention est universellement tenue pour scandaleuse : et simultanément elle n'est pas tenue pour scandaleuse sous la forme nouvelle qu'elle revêt, au niveau de ceux qui -- dans la dépendance des puissances d'argent et des puissan­ces politiques -- fabriquent l'opinion de masse. En 1962, en 1963, cette nouvelle forme d'ingérence des puissances temporelles a progressé à pas de géant, et elle n'a guère été *reconnue* pour ce qu'elle est. Elle est systé­matiquement appelée et favorisée par une faction dans l'Église. Mais plusieurs n'y ont vu, qu' « intérêt renaissant de l'opinion pour les questions religieuses », ou qu' « ex­pression des aspirations populaires », plusieurs y ont vu un progrès des consciences et un progrès de l'Église... Toute l'histoire montre que ce qu'il y a de plus grave dans les abus de toute sorte, et notamment dans les abus de cette sorte-là, c'est qu'ils puissent paraître normaux, admissibles ou tolérables, pendant un temps parfois très long, à l'opinion commune et au jugement de plusieurs de ceux qui seraient en mesure de les réformer. Quelle a été la pensée véritable du Saint-Siège en face de ces abus ? Nous ne la connaissons pas. Les historiens sauront à coup sûr beaucoup de choses que nous ne savons pas encore. Nous voyons seulement qu'il n'y a pas eu de réaction perceptible ou décisive contre ces nouvelles formes d'ingérence temporelle ; ni contre la guerre psychologique déchaînée à l'intérieur de l'Église ; ni contre la déforma­tion, l'utilisation, l'annexion de *Mater et Magistra* et de *Pacem in terris.* Mais nous pensons que tout cela aussi dut emplir et faire déborder la coupe d'amertume et de souf­frances réservée au Pape Jean XXIII. \*\*\* 91:100 Quant à l'existence, que tant de monde affirme, d'une nouvelle attitude à l'égard du communisme, elle consiste surtout en ceci : les journaux et les radios ont créé un fait psychologique parfaitement constatable, mais qui n'a pas grand'chose de commun avec l'enseignement religieux et moral de l'Église. Et même, ce qui caractérise le mieux ce fait psychologique, c'est qu'en cette matière l'enseignement religieux et moral de l'Église est passé en quelque sorte au second plan, ou au dernier plan, pour l'opinion publique. Il y a peu de chances de rencontrer réellement l'Église quand on la cherche ou quand on l'attend ailleurs que dans la perspective de son enseignement moral et religieux. Pour l'opinion publique, il n'est plus question d'une conversion des communistes ; il est question d'une conver­sion de l'Église au monde contemporain. Dans cette immen­se rumeur organisée, c'est l'Église qui doit se transformer, ce n'est pas le monde ; c'est l'Église qui doit changer pour se conformer à l'évolution du monde ; ce n'est plus le mon­de qui doit se convertir. C'est le monde qui est porteur de valeurs et qui a les promesses de l'avenir ; c'est l'Église qui doit se mettre à son école. Et la religion du monde, comme toujours quand un monde est en train de finir tout en se croyant désormais éternel, est une religion de Pan­théon, de fourre-tout, d'accueil universel de tous les faux dieux dans le même temple, et du vrai Dieu ensemble avec les faux s'il se trouve qu'il y ait un vrai Dieu... L'idée s'estompe que si l'Église de siècle en siècle se modifie, ce n'est pas pour se rendre conforme à l'évolution du monde, ce n'est pas pour entrer dans le Panthéon du monde, c'est pour se rendre davantage conforme à elle-même, et plus apte à conformer le monde au Christ. Les encycliques demeurent pourtant, et demeureront pour l'his­toire, les huit encycliques de Jean XXIII, mais qui sont présentement recouvertes et sollicitées par la mise en cir­culation, publicitairement orchestrée, d'un nombre incroya­ble d'anecdotes invérifiables et de boutades que nul ne peut authentifier. 92:100 Voici que « l'information de masse » -- qui a remplacé ou annexé pour le plus grand nombre l'éduca­tion des consciences, et qui pourtant n'est rien d'autre que le commerce des magazines illustrés -- a créé un univers flou et irréel, où les mots perdent leur sens, où les décisions officielles perdent leur valeur, où les textes promulgués perdent leur consistance, où toute doctrine perd toute exis­tence, où le oui et le non se confondent. Même parmi l'élite des séminaristes s'est répandue l'idée que ce n'est plus la peine d'étudier la théologie « du passé » puisque nous som­mes à l'aube d'une théologie nouvelle. La confusion des esprits a gagné tous les domaines, il s'est partout répandu comme une eau trouble : à vues humaines, y jeter un peu d'eau claire ne la rend pas moins trouble. Comment affron­ter le communisme avec une opinion publique aussi déso­rientée ? Les progrès du communisme sont d'ailleurs la conséquence, et comme le baromètre, de l'affaiblissement du christianisme : or en 1962, en 1963, le communisme, malgré ses grandes difficultés internes, a repris ses progrès partout dans le monde. Ces progrès auront compté beau­coup au nombre des « peines les plus aiguës et les plus mystérieuses », des « tribulations » et des « afflictions » que les âmes de prière et de silence auront vécues, avec le Pape, en communion dans l'Agonie du Christ. \*\*\* Le désarroi des âmes ne s'inscrit pas dans les statisti­ques des journaux. Mais la vie profonde du christianisme n'apparaît pas non plus sur les écrans de télévision. Dans la lumière obscure de la foi nous vivons le mystère de l'Église. Par l'Agonie passe le chemin de la Résurrection. 93:100 Ce que nous disions en octobre 1963 ### Le grand déficit du monde moderne CE NUMÉRO n'est évidemment pas un traité de la vie contemplative. Mais peut-être contribuera-t-il à persuader le lecteur que toute vie hu­maine doit faire une place plus ou moins grande à la vie contemplative, et que cette place nécessaire est la première en dignité. Nous n'entendons rien d'autre en parlant d'une « primauté de la con­templation » ; nous n'entendons point, en particulier, que la contemplation de­vrait partout et toujours passer la pre­mière, ni que la vie active serait méprisable. Nous entendons que la vie active, quelles que soient son urgence et sa va­leur, n'est pourtant ni la plus digne, ni la plus méritoire, ni la plus nécessaire, et qu'il importe aux vocations actives de le savoir assez nettement. D'ailleurs la plupart des auteurs qui ont collaboré au présent numéro sont eux-mêmes par état plongés dans la vie active. \*\*\* De quoi s'agit-il au fond ? De la chose dont notre siècle parle plus qu'aucun autre, au point d'en faire l'article le plus constant, le plus solennel, même des discours poli­tiques et des programmes syndicaux. Il s'agit de la dignité de la personne. De l'éminente dignité de la personne hu­maine. On l'affirme d'autant plus qu'in­consciemment l'on craint d'en avoir tout à fait perdu le sens. 94:100 La dignité de la per­sonne humaine n'est qu'une formule vide de contenu si l'on ne discerne pas en quoi elle consiste. Or ce qu'il y a de plus digne dans l'homme est aussi ce que notre temps méconnaît le plus : l'apti­tude à la contemplation. La dignité de l'homme vient de ce qu'il a été créé à l'image de Dieu : mais c'est dans la con­templation (et dans l'action inspirée par la contemplation) que cette ressem­blance est la moins lointaine. Respecter la dignité de l'homme, c'est respecter, éduquer, aider son aptitude à la con­templation. Ce souci est étranger à ce que l'on appelle le monde moderne, la civilisation moderne, la culture mo­derne. \*\*\* Nous n'allons point nier que la civilisation moderne ait été spécialement sensible à certains aspects de la dignité humaine un peu trop négligés par les siècles antérieurs : à des aspects matériels, qui sont à la fois précieux et mineurs. Ne nions pas qu'ils sont précieux. Mais voyons bien qu'ils sont mineurs. Le vieil adage selon lequel un minimum de biens matériels est né­cessaire à la pratique de la vertu n'a ja­mais été oublié par la tradition chré­tienne : mais il a pu arriver que ce mi­nimum soit considéré trop distraite­ment, ou évalué trop bas. Il est arrivé surtout que jamais comme aujourd'hui le développement des sciences et des techniques n'avait permis d'envisager une diffusion universelle des biens ma­tériels, et un soulagement plus ou moins prochain de quantité de misères que d'autres siècles considéraient comme sans remède. Cela est bon en soi. Il est bon aussi que certaines formes prati­ques, sociales ou juridiques de la liber­té aient été découvertes, explorées, dé­fendues : ce sont en général des formes mineures de liberté, mais utiles, hon­nêtes, importantes. Elles ne deviennent dangereuses que dans la mesure où elles s'exercent au détriment des libertés véri­tablement fondamentales de la per­sonne. 95:100 La conscience commune, l'opinion pu­blique, dans le domaine de la liberté comme dans les autres, en sont venues à s'attacher davantage au secondaire qu'à l'essentiel. Dans notre pays, la conscience commune serait profondé­ment choquée, si toutes les entreprises de presse devenaient la propriété de l'État et si tous les directeurs de jour­naux et tous les journalistes étaient des fonctionnaires nommés et déplacés par le ministre : dans le même temps la conscience commune n'est aucunement choquée que cette dépendance, que l'on trouverait intolérable pour la presse, soit à peu près celle des Universités. Or si la liberté légitime de la presse est assu­rément une liberté précieuse, la liberté légitime des Universités est une liberté plus précieuse encore, plus fondamen­tale, mais dont le sentiment et le désir se sont estompés chez la plupart des uni­versitaires eux-mêmes. C'est là un trait de mœurs intellectuelles et morales par­faitement moderne : et entièrement con­testable. Il arrive souvent que la civilisation moderne excelle dans le mineur et dans le secondaire : nous n'avons aucune in­tention de méconnaître cette excellence, aucun dessein de priver qui que ce soit d'en recueillir les fruits. Mais la civili­sation moderne se développe dans une privation radicale de l'essentiel, dans une ignorance prolongée de la véritable hiérarchie des valeurs. Il ne s'agit pas seulement de lui apporter une sorte de complément, fût-ce un « supplément d'âme » : mais de changer son esprit ; il s'agit de conversion plus que de complé­ment. Faute de quoi même les connais­sances, les techniques et les progrès de la civilisation moderne tourneront à l'évanouissement. \*\*\* Une telle pensée, il n'est pas aisé de la proposer au monde mo­derne, parce que le climat intel­lectuel a été empoisonné par tout un système d'accusations délirantes. Au nom du dialogue avec le monde, de l'ou­verture sur l'avenir et de l'adaptation aux temps nouveaux, des réquisitoires furibonds et sans mesure ont établi le règne d'une sorte de « loi des suspects » jusque dans le domaine de la vie spiri­tuelle, de la recherche philosophique, de la pensée. Particulièrement à l'intérieur de l'Église, une polémique ininterrompue répute pécheurs publics et criminels de l'esprit, ou « suspects » de l'être, ceux dont la réflexion cherche à s'alimenter aux sources de la tradition religieuse et de la civilisation chrétienne. On les accuse de mépriser le monde, de mécon­naître leur temps, de vouloir entraîner l'Église dans un dessein de domination sur le temporel : 96:100 mais on les accuse, au nom de l'ouverture et du dialogue, sans jamais « dialoguer » avec leurs raisons ni s, « ouvrir » à leur pensée. On ne veut que les frapper publiquement de suspici­on, de discrédit, de déshonneur intel­lectuel. On les tient pour irrémédiablement coupables d'un refus de se conver­tir au monde moderne. Il faut sortir de ce climat empoisonné où des clercs fanatiques substituent en permanence la suspicion des personnes à l'examen des idées. Ceux qui s'avouent mal satisfaits de la civilisation moderne, on a pris l'habitude de les représenter en substance comme des imbéciles, des ma­lotrus, des ignorants ou des malfaiteurs. Ce procédé, efficace dans l'immédiat, est à la longue impuissant contre une pen­sée. Quelle pensée ? En l'occurrence, celle-ci : la culture moderne ne nous apporte pas l'essentiel de la culture de l'esprit, la civilisation moderne ne nous donne pas le sens essentiel de la vie. Que cette civilisation et cette culture nous procurent quantité de choses qui, sans être l'essentiel, sont bonnes, aimables, profitables ou du moins le seront vrai­ment quand elles auront été rapportées à l'essentiel, et ainsi mises à leur place réel-le dans l'échelle des valeurs -- nous en sommes pleinement convaincus et n'avons attendu personne pour nous en apercevoir. Nous sommes de notre temps. Nous sommes davantage de notre temps que ceux qui l'idolâtrent ; nous sommes de notre temps plus EXACTEMENT qu'ils ne le sont. Car, sans rien mépriser de notre temps, nous en vivons consciemment la carence essentielle, au lieu de vivre dans les nuages d'une phraséo­logie moderniste qui se réduit finale­ment à ce que Péguy appelait la plus vieille erreur de l'humanité : croire qu'il n'a jamais existé dans le passé un type d'homme aussi épatant que soi-même. \*\*\* Si Bernanos se trouve cité en tête de ces pages, c'est parce qu'au milieu de vues parfois désor­données, il a du moins profondément senti et exprimé ce qui est à la racine de la querelle que nous faisons à la culture moderne, à la civilisation moderne, il a été véritablement hanté par cette tra­gique asphyxie des âmes, asphyxie pro­gressive et sous anesthésie générale : « On ne comprend absolument rien à la civilisation moderne si l'on n'admet pas d'abord qu'elle est une conspiration uni­verselle contre toute espèce de vie inté­rieure ». 97:100 Mais il est inexact de parler en­core de querelle. Il y eut querelle, au sens le plus grave et le plus légitime, querelle faite au monde moderne, chez Léon Bloy, chez Péguy, chez Bernanos : et nous demeurons attentifs à leur pen­sée qui sur ce chapitre fut quasiment prophétique. Pourtant le stade d'abord nécessaire de la querelle est dépassé, car le monde moderne n'est plus aussi sûr de lui qu'il aime à le proclamer, il sent grandir sa blessure secrète, son angoisse, son doute. Et aujourd'hui il nous sem­ble qu'approche l'heure où la conver­sion du monde moderne peut devenir possible, -- la conversion qui seule est susceptible de répondre aux aspirations confuses et ardentes de notre temps. \*\*\* La civilisation moderne est absolu­ment nouvelle par rapport à toutes les grandes civilisations qui l'ont précédée. Elle est nouvelle absolu­ment par les pouvoirs matériels, sans commune mesure avec les époques an­térieures, que l'homme est en train de conquérir. Mais elle est absolument nou­velle, simultanément, par une primauté de l'action matérielle, de l'efficacité ma­tériellement mesurable, du résultat im­médiat et tangible : nous disons que cette primauté (à partir du moment où elle n'est plus seulement vécue par acci­dent, comme il a pu arriver à toutes les époques, mais où en outre elle est con­sentie, voulue, professée, aimée, impo­sée) est certainement contraire à la di­gnité de l'homme. Cette primauté est la racine de la subversion, de la décadence, du despotisme totalitaire et de tous les autres phénomènes analogues dont on peut faire isolément l'analyse descrip­tive et superficielle. Cette primauté est un recul de plus de vingt-cinq siècles dans l'histoire de l'humanité. Elle nous place en deçà de. Platon et en deçà d'Es­chyle dans l'échelle des progrès toujours fragiles et menacés de l'espèce humaine. Cette primauté de l'action immédiate­ment et matériellement mesurable trou­ve sa plus parfaite incarnation dans le communisme soviétique : et c'est là peut-être que s'éclaire le plus profondé­ment la parole du Pape de Rome annon­çant aux nations que le communisme « entraîne les peuples dans une bar­barie certainement plus épouvantable que celle où se trouvaient la plupart des nations avant la venue du Rédemp­teur ». 98:100 La primauté de l'action nous ra­mène en effet non pas seulement en deçà du christianisme, mais en deçà des civilisations antérieures au Christ, qui avaient déjà confusément entrevu où se situe la dignité de l'homme. Bien sur, quand Aristote, ordonnant et récapitu­lant au plan philosophique tout le mou­vement de la pensée grecque, déclarait que l'homme trouve son achèvement dans la contemplation de Dieu, il de­meurait séparé par un abîme de ce qui serait plus tard la contemplation chré­tienne, celle qui dit : « Notre Père ». Mais Aristote était droitement en che­min, et il n'est pas seulement remarquable ou caractéristique, il est singulière­ment émouvant de constater que saint Thomas, lorsqu'il formule ses huit rai­sons de la primauté de la vie contempla­tive, les tire toutes littéralement d'Aris­tote. Il manquait aux philosophes grecs de connaître distinctement l'objet de la contemplation, : mais ils ne doutaient pas que l'activité contemplative soit la plus haute, la plus digne, l'honneur et la grandeur de l'homme. Le monde mo­derne en est venu non point seulement à contempler autre chose que Dieu, ou autre chose que le vrai Dieu, mais à fon­der toute une civilisation sur l'absence de contemplation et sur la primauté de l'action. La connaissance du sens de l'histoire, si elle était attentive et non pas rêvée, devrait nous faire apercevoir de quels reculs formidables l'humanité est parfois capable. 99:100 Ce que nous disions en novembre 1963 ### Le Concile et l'opinion publique QUELQUES JOURS avant l'ouverture de la seconde session du Concile, M. l'abbé Haubtmann, directeur du Secrétariat de l'information religieuse en France, tenait une conférence de presse où il annonçait qu'à Rome, sous sa direction, allait fonctionner un Centre français d'information. Selon *Témoignage chrétien* du 19 septembre, M. l'abbé Haubtmann déclara qu'il s'efforcerait de « donner une information exacte et complète pour que le jeu de l'opinion publique puisse s'exercer norma­lement ». Il a donc dû apparaître, et en tous cas il apparaît à nos yeux, que « le jeu de l'opinion publique », depuis l'ouverture du Concile en octobre 1962, s'était exercé d'une manière tout à fait anormale. Nous voudrions essayer de dire comment et pourquoi, principalement à partir de la situation française. \*\*\* Depuis le mois d'octobre 1962, le « jeu de l'opinion publi­que » s'est traduit en fait par une pression unilatérale. Quand on parle du « jeu de l'opinion publique », on entend -- du moins nous le supposons -- l'examen des diverses positions en présence. L'opinion publique implique liberté et diversité. 100:100 Dans les régimes de parti unique, l'idéologie officielle ayant le monopole des moyens d'expression, on ne parle pas d'opinion publique, sinon par imposture on par dérision. Si l'on se reporte au discours de Pie XII dit « sur l'opinion publi­que » ([^44]), on y voit dénoncer l'abus des propagandes et organi­sations de masse qui « étouffent toute spontanéité de l'opinion publique et la réduisent à un conformisme aveugle et docile des pensées et des jugements ». Nous avons vécu et nous vivons sous la pression d'un tel conformisme. L'information sur le Concile a été dominée par trois correspondants romains : le P. Wenger dans *La Croix*, M. Henri Fesquet dans *Le Monde,* le P. Rouquette dans les *Études.* Une publicité sans contre-partie (assurée d'abord par eux-mêmes, mais aussi par d'autres) les a imposés à l'attention d'une ma­nière quasiment exclusive. Chacun d'eux a explicitement recom­mandé les deux autres comme étant, en dehors de lui-même, les meilleurs « informateurs ». Or, quels que soient leurs talents et leurs mérites, et quelles que soient les nuances de pensée qui les distinguent, cela fait en définitive non point trois voix, mais une seule. Ils ont développé en substance les mêmes arguments au profit des mêmes tendances élogieusement présentées, taisant ou caricaturant les arguments des autres tendances qui se sont ma­nifestées au Concile. Ils ont soutenu les mêmes projets et sont tombés d'accord pour les présenter à l'opinion comme pratique­ment adoptés, bien que le Concile n'eût encore pris aucune déci­sion et que la discussion continuât. Ils ont tous trois une position réellement convergente par rapport au projet fondamental -- l'une des clés de notre temps -- qui consiste à « teilhardiser » l'Église : le P. Rouquette et M. Henri Fesquet sont ouvertement « pour », le P. Wenger évite soigneusement de rien écrire qui puisse aller « contre ». Tous trois font croire à l'opinion que l'*irréversible* s'est déjà produit et qu'il va *dans leur sens,* gros­sièrement présenté comme étant celui, tout à la fois, des évêques français, de l'aile marchante, de l'avenir, du progrès, de la vie, de l'histoire. On a eu plusieurs fois l'occasion, dans cette revue, de montrer sur pièces à quelle sorte de « forcing » a été sou­mise l'opinion publique. 101:100 Cela a-t-il été « jeu normal *de* l'opinion publique », ou au contraire pression unilatérale et abusive *sur* l'opinion publique ? Nous pensons que l'on peut, au moins, poser la question. \*\*\* Certes, il y avait à Rome d'autres correspondants de presse. Pour nous en tenir aux journaux catholiques les plus connus, il y avait ceux de *La France catholique* et ceux de *L'Homme nouveau* qui apportaient d'autres informations et d'autres points de vue, dont bénéficièrent leurs lecteurs. Mais, pour l'opinion publique dans son ensemble, ils étaient comme n'existant pas. Il y avait les « trois grands » plus haut cités, flanqués et soutenus par ceux des *Informations catholiques in­ternationales* et ceux de *Témoignage chrétien* poussant à la même roue dans le même sens. Et en outre il y eut une alliance de fait (on veut supposer qu'elle est seulement de fait) entre ces publications catholiques et la quasi-totalité des publications profanes, neutres on anti-catholiques. La présentation des points de vue étaient substantiellement les mêmes ; et aussi les pas­sions, car tout cela est très passionné. L'accent a été mis unilatéralement sur le rejet du traditionalisme et sur l'ouverture au monde moderne, cette ouverture étant elle-même sélective et unilatérale. Nous avons déjà eu l'occasion de faire remarquer que le « monde moderne » comporte beaucoup de choses que les plus bruyants partisans de l' « ouverture au monde » rejettent expressément, d'emblée, et avant tout examen. Ils rejettent pêle-mêle le capitalisme, le nationalisme et la civilisa­tion occidentale. Alors notre question demeure, et prend de plus en plus d'actualité : le *monde moderne* auquel vous voulez vous « ouvrir », ce n'est pas le monde moderne tel qu'il est. C'est un monde moderne dont vous excluez préalablement le capitalisme moderne, les nationalismes modernes, la civilisation occidentale moderne. Un monde moderne sans civilisation occidentale (celle qui pour le meilleur ou plus souvent pour le pire est en train, de s'étendre au monde entier), un monde moderne sans nationalisme, un monde moderne sans capitalisme, qu'est-ce donc ? et que reste-t-il à embrasser ? Le socialisme ? Le communisme ? 102:100 Les « trois grands » de l'information religieuse, et les *Infor­mations catholiques internationales,* et *Témoignage chrétien,* et avec eux quasiment toute la presse profane, neutre ou anti-catho­lique, ont conditionné l'opinion publique à croire que le Concile était tout d'ouverture avec un monde moderne dont on aurait simultanément exclu le capitalisme, les nationalismes et la civi­lisation occidentale. Ils ont conditionné l'opinion publique à attendre du Concile l'ouverture à gauche, le dialogue amical avec le communisme, la socialisation et la teilhardisation. Les voix divergentes n'ont pas été admises dans le concert, ou le « jeu », de l'opinion publique. Elles ont été insultées, dis­créditées, mises en quarantaine, -- disqualifiées comme « inté­gristes ». Dès l'ouverture du Concile en octobre 1962, on a publi­quement dressé des listes nominatives de cardinaux et d'évêques notés d'infamie une fois pour toutes d'avance suspects, d'avance écrasés, d'avance *à ne pas écouter* et d'ailleurs l' « informa­tion » ne rapportait pas leurs propos, sinon tronqués et défor­més, et pour s'en gausser ou pour les livrer à l'indignation publi­que. Quand des cardinaux, au retour de la première session du Concile, donnaient des articles à *Témoignage chrétien*, c'était un événement décisif, partout répercuté comme tel. Quand d'autres cardinaux confiaient des propos différents à *La France catholique*, c'était un événement négligeable, passé sous silence, ou présenté comme suspect. A suivre les brillantes chroniques de M. Henri Fesquet, on pourrait croire -- et d'ailleurs beaucoup de ses lecteurs finissent par le croire -- qu'il y a d'un côté la haute pensée des « réformistes », exempts de toute « manœuvre », et d'un autre côté les manœuvres des « intégristes », incapables de la moindre pensée. Pour les uns, c'est leur théologie, leurs pro­fondes conceptions, leur œcuménisme généreux, et cetera ; pour les autres, ce n'est que « pamphlet (sic) anonyme (sic) », qui « n'impressionne guère », car « les intégristes agissent dans l'ombre, répandent de faux bruits, agitent l'épouvantail » ([^45]). Le vocabulaire est littéralement le même chez le P. Rouquette, et substantiellement (et plus finement parfois) le même chez le P. Wenger. 103:100 A notre avis, il n'y a plus de « jeu normal de l'opinion publi­que » dans un tel climat et quand de telles forces publicitaires s'emploient à systématiquement discréditer les personnes plu­tôt que d'examiner les idées. Une pression aussi puissante, aussi passionnée, aussi rigoureusement unilatérale, exercée sur les consciences par le moyen de la presse, crée un conditionne­ment et abolit la liberté. Seuls les esprits les plus solides, et déjà personnellement informés des questions en cause, peuvent sauver leur liberté d'appréciation. \*\*\* Ils le peuvent dans une certaine mesure ; ils n'y arrivent pas toujours. Ils ne sont pas insensibles eux-mêmes à la pression formidable qui s'exerce sur eux. On en a eu la preuve quand *L'Osservatore romano* consacra un article à l'attitude de la presse française devant le Concile, le 15 novembre 1962. On y parlait de *La Croix.* On y mention­nait, sans aucune réserve formulée, *Le Monde* et, sans plus de réserve, *Témoignage chrétien*. On y nommait *L'Écho-Liberté* et *L'Essor* de Lyon, et le *Courrier français* de Bordeaux ; et enfin *La Vie catholique illustrée, Le Pèlerin*, *La Croix-Dimanche et* la *Documentation catholique*. Et c'est tout. Ni *L'Homme nouveau,* ni *La France catholique* n'étaient cités : comme s'ils n'avaient aucune existence. Et de fait, tout se passait au niveau de l'opinion publique comme s'ils n'exis­taient pas. *L'Osservatore romano,* dont la prudence, l'objecti­vité et la courtoisie sont bien connues, enregistrait là en quel­que manière, un fait objectif -- mais un fait artificiellement machiné. Devant l'opinion s'était constitué une sorte de mono­pole implicite qui rejetait les réfractaires et les non-confor­mistes dans le ténébreux néant de l' « intégrisme ». Pour sur­prenante que fût à certains égards la discrimination acceptée par *L'Osservatore romano,* à d'autres égards elle était expli­cable. Il y avait d'un côté ceux qui faisaient un vacarme toni­truant, avec toutes les ressources du capitalisme de presse et tous les moyens de la publicité commerciale, lançant en substance à tous les échos : -- *C'est nous qui donnons une information sûre. C'est nous qui représentons l'opinion publique. C'est nous qui sommes modernes. C'est nous l'avenir. Abonnez-vous à notre journal pour la durée du Concile, vous saurez tout. Nous marchons à la victoire de nos idées,* et cetera. 104:100 Il y avait d'un autre côté ceux qui, comme *La France catholique* et *L'Homme nouveau*, parlaient posément, discrètement, sans élever la voix, sans chiqué ni publicité obsessionnelle, essayant seulement d'être exacts dans leur information et raisonnables dans leurs com­mentaires : au milieu du vacarme, on ne les entendait pas. Même à *L'Osservatore romano --* dont on ne peut supposer qu'y soit ignorée jusqu'à l'existence de *L'Homme nouveau* et de *La France catholique* -- on oubliait qu'ils existaient. Le bruit recouvrait tout. Si vous entrez dans une salle où tout le mondé crie à tue-tête en lançant confettis et serpentins dans toutes les directions, vous n'entendrez pas la voix de ceux qui, assis à leur place, parlent sur le ton de la conversation. Seulement, un tel vacarme unilatéral est incompatible avec le « jeu normal de l'opinion publique ». L'opinion est assaillie, prise d'assaut et violentée. \*\*\* Un autre exemple, qui nous concerne plus directement, peut contribuer à manifester quelle sorte de gauchisse­ment est infligée à l'opinion publique. Le P. Wenger a publié un gros ouvrage sur la première session du Concile. Au prestige et au renom de l'auteur, rédacteur en chef de *La Croix,* est venu s'ajouter le fait que son livre a été partout recommandé comme le meilleur, le plus complet, le plus sûr, le mieux infor­mé : un ouvrage du P. Wenger sur le Concile, c'est presque une communication officielle de la Hiérarchie, si vous ne lisez qu'un livre sur le Concile, c'est celui-là qu'il faut lire, et cetera. Dans cet ouvrage, le P. Wenger prend vivement à partie une seule publication catholique au monde, et c'est la revue *Itinéraires*. Dans l'ordre personnel, nous n'avons aucune raison de nous plaindre d'une aussi flatteuse attention, d'un privilège aussi écla­tant. C'est un hommage (d'ailleurs fort excessif) rendu à notre importance intellectuelle jugée sans pareille par le P. Wenger. De tous les organes catholiques qui, à travers le monde, ont exprimé à propos du Concile un point de vue différent du sien, seule la revue *Itinéraires* a paru gênante au P. Wenger, seule la revue *Itinéraires* lui a paru devoir appeler une contradiction, une réplique, nous dirions même une contre-attaque (car il s'en prend à nous avec une énergie remarquable). Au demeurant la contradiction ne nous chagrine pas ; cet hommage un peu vif, nous l'avons reçu tel qu'il est. 105:100 Mais ce n'est aucunement cet aspect personnel qui appelle la réflexion. Admettons par hypothèse de raisonnement que le P. Wenger ait entièrement raison contre nous et que nous ayons entièrement tort : même dans ce cas, sa polémique contre la seule revue *Itinéraires* comporte de déplorables conséquences pratiques. En effet, depuis le mois d'octobre 1962, et à propos du Concile, toute sorte de journaux, même catholiques, ont avancé toute sorte d'idées et de jugements qui portent objec­tivement atteinte à la foi et à l'Église. Ils ont traîné dans la boue la mémoire et la doctrine de plusieurs Papes, ils ont calomnié les Conciles antérieure, ouvertement attaqué des dogmes définis par l'Église (notamment les « dogmes mariaux »), discrédité la théologie spéculative, caricaturé, les Ordres religieux voués à la contemplation, proposé des réformes et changements concer­nant non pas seulement les lois positives de l'Église, mais la doctrine chrétienne elle-même ; ils ont un peu partout prêché plusieurs de ces *erreurs graves,* et contraires à la foi, dont, au jugement de l'Église, *fourmillent* les écrits de Teilhard de Char­din. Contre tout cela, le P. Wenger n'a pas estimé utile de faire front par une contradiction explicite et nominale. C'est donc, pensera logiquement le lecteur de son livre, que tout cela est beaucoup moins dangereux que les erreurs, réelles ou supposées, relevées à l'encontre de la revue *Itinéraires,* seule désignée à la désapprobation du public. Si l'Église en état de Concile connaît quelque danger méri­tant d'être appelé par son nom et d'être explicitement contredit, c'est uniquement du fait que la revue *Itinéraires* : 1. -- a osé remarquer que le Patriarcat de Moscou est la seule institution soviétique ayant échappé à toute « déstalini­sation » ; 2. -- a préféré lire un discours de Jean XXIII dans son texte latin authentique, et effectivement prononcé, plutôt que dans une traduction vaticane qu'avait reproduite *La Croix*, -- tra­duction, dont l'exactitude nous paraissait contestable. Tels sont les deux chefs d'accusation qui, à propos du Concile, dans un livre exclusivement consacré au Concile, et qui est l'ouvrage le plus recommandé et le plus diffusé à ce sujet, nous valent d'être les seuls à subir un procès public en règle de la part du P. Wenger. 106:100 Même si nous avons tort sur les deux points en question, on supposerait que l'Église et le Concile connaissent tout de même des dangers plus graves que celui-là. Mais non : on ne le suppo­sera pas ; on ne le saura, pas. Il est *a priori* évident que le P. Wenger porte sa plus forte attaque (son unique contre-atta­que) contre l'adversaire principal, contre le danger primordial, ou unique. La vigilance la plus rigoureuse est contre nous : ou plutôt la seule vigilance explicite. De périls venant d'ailleurs, l'opinion publique n'entend point parler, elle peut en toute con­fiance continuer à somnoler, au son des berceuses teilhardiennes. \*\*\* Ainsi se déplacent le *centre de gravité et l'orientation* de l'opinion catholique. Ils ne se déplacent pas tout seuls : on les déplace ; des puissances temporelles les déplacent. Le P. Rouquette a pu parler des « *maîtres de la pensée collec­tive* » ([^46]) : il ne les désignait pas davantage, mais le contexte montre qu'il ne faisait aucunement allusion à des « maîtres à penser », des philosophes, des professeurs, des Socrate ou des Gandhi, qui persuaderaient l'opinion par voie d'influente in­tellectuelle et morale. Le P. Rouquette faisait clairement allu­sion à ceux qui ont le pouvoir matériel de prédéterminer l'opi­nion publique, du jour au lendemain, dans un sens ou un autre. La valeur et l'importance d'une telle allusion sous la plume du P. Rouquette proviennent du fait que ces « maîtres de la pensée collective » ont, au moins à propos du Concile (et d'une inter­prétation tendancieuse de *Pacem in terris*)*,* dirigé l'opinion dans les mêmes perspectives que le P. Rouquette lui-même. Ce n'est donc point de sa part une allusion polémique ou malveil­lante, mais plutôt un témoignage sur un fait qu'il a des raisons de bien, connaître et qui lui a été fortement favorable. Nous ajouterons seulement à ce sujet que la plus grande partie de la presse contemporaine, même catholique, est à peu près le dernier secteur économique qui soit encore organisé selon un authentique et pur CAPITALISME LIBÉRAL, au sens précis où le capitalisme libéral a été condamné par *Rerum novarum* et *Qua­dragesimo anno.* Bien entendu, cette presse économiquement organisée selon les normes immorales du capitalisme libéral est pleine de proclamations anti-capitalistes, et elle pourchasse partout -- sauf chez elle-même -- les dernières survivances du libéralisme économique. 107:100 Dans quelle mesure le capitalisme de presse parvient-il à fausser ou empêcher le « jeu normal de l'opi­nion publique », c'est encore une question qu'il est au moins implicite, croyons-nous, de poser. \*\*\* Autrefois les Princes (plus ou moins chrétiens) faisaient pression sur les Conciles. Aujourd'hui les nouveaux Princes (chrétiens ou non) exercent leur pression par d'autres voies. Par le moyen de l'opinion publique, les « maîtres de la pensée collective » s'efforcent actuellement d'exercer sur le Concile une influence indue. Car enfin, quoi qu'il en soit par ailleurs de la promotion du laïcat et du progrès des lumières c'est toujours *une pression de pouvoirs temporels sur le magistère spirituel.* Cette pression ne semble pas avoir encore été reconnue et identifiée EN TANT QUE TELLE. Elle ne manque d'ailleurs pas de « bonnes raisons ». Mais les Princes chrétiens du passé avaient eux aussi leurs « bonnes raisons », et leurs légistes, et leurs théologiens. Et leurs vues politiques étaient parfois -- à leur place -- licites et hon­nêtes. Tout cela renaît sous une autre forme, et sera dangereux aussi longtemps qu'on n'aura pas aperçu que, par des voies différentes, c'est essentiellement un abus de même nature. \*\*\* Le déplacement artificiel, par des puissances temporelles, du centre de gravité de l'opinion catholique, peut être situé en termes grossiers. Il est lui-même sommaire et sim­pliste, travaillant surtout au niveau de l' « opinion de masse » ; si bien que des termes fondamentalement impropres pour dé­crire la vie de l'Église deviennent assez adéquats pour marquer dans quel sens on conditionne l'opinion de masse -- il s'agit d' « ouverture à gauche », de « pas d'ennemis à gauche », de « combat contre la droite », de « construire », au nom du pro­grès, -- « le socialisme ». Ces expressions ne veulent RIEN dire, ne désignent RIEN, si on les rapporte à la vie spirituelle, à la structure divine de l'Église ou aux grands thèmes de la pensée théologique. 108:100 Mais ces expressions correspondent à ce que l'on s'efforce de faire croire à l'opinion. La formule la plus exacte demeure d'ailleurs celle qui a été lancée par le P. Liégé, dont la première partie est apparemment religieuse, mais la seconde partie très réellement et très explicitement politique : « *Les inté­gristes sont les pires ennemis de l'Église, plus dangereux que les communistes*. » C'est en invoquant un souci apostolique que l'on combat les intégristes ; mais c'est pour atteindre un but politique : réintroduire le communisme dans le circuit (puis­qu'il n'est décidément pas le pire ennemi). De fait, les informa­tions et commentaires sur le Concile ont manifesté une cons­tante polémique contre l'intégrisme et une aussi constante absence de polémique contre le communisme. A l'égard du com­munisme, on ne veut entendre parler que d'ouverture et de dialogue ; et l'on ne veut entendre parler d'aucun dialogue ni d'aucune ouverture en direction de l'intégrisme. Krouchtchev a toutes les excuses et le Cardinal Ottaviani n'en a aucune. Le Cardinal Ottaviani est l'homme à abattre tandis que Kroucht­chev n'est même plus à combattre. La pression multiforme unilatéralement exercée en ce sens détruit toute possibilité d'un « jeu normal de l'opinion publique ». Le rajeunissement de l'Église consiste à débarrasser plus ou moins l'Église d'une bonne moitié de ses fidèles, de ses prêtres et de ses docteurs, représentés comme des « intégristes » qu'il faut purement et simplement réduire au silence et mettre hors d'état de nuire ; et à emprunter au dehors de l'Église les nouveaux secrets de jeu­nesse. Certes, les catholiques, et surtout le peuple chrétien, ne le croient pas vraiment : mais comme ils entendent la plupart des organes d'opinion parler, implicitement ou explicitement, toujours dans ce sens, ils demeurent en quelque sorte médu­sés, désorientés, et finalement silencieux. \*\*\* D'autres encore se sentent contraints au silence, estimant que la liberté d'expression et de jugement n'existe *mo­ralement*, n'existe *psychologiquement* plus dans un tel climat et un tel déferlement. Des hommes compétents, voire éminents renoncent à exposer devant l'opinion, même sans polémique simplement ce qu'ils croient être la vraie doctrine concernant l'Écriture, la Tradition, l'Église, le Magistère, la Foi. 109:100 Mesurant le degré d'orientation unilatérale et de passion exacerbée atteint par le conditionnement actuel de l'opinion publique, ils jugent que même un exposé serein et impersonnel est présentement inopportun, n'aurait aucune chance d'être compris, ne ferait qu'exciter les passions encore davantage. Ils ont tort ou ils ont raison, mais enfin telle est leur appréciation, telle est la situa­tion. Nous n'en parlons pas seulement par ouï-dire : nous avons eu entre les mains tels ou tels de ces exposés, destinés à paraî­tre dans la revue *Itinéraires,* et qui n'ont finalement paru ni ici ni ailleurs. Leurs auteurs s'étant ravisés et jusqu'à nouvel ordre enfermés dans le silence et la prière. Ce silence unilatéral con­tribue lui aussi, à accentuer le déséquilibre, le déplacement du centre de gravité de l'opinion catholique. Mais cet état de fait a été voulu, machiné, organisé par les « maîtres de la pensée collective » : ils ont créé un conditionnement de l'opinion tel que plusieurs des « intégristes » les plus éminents et les plus consciencieux en arrivent à estimer, inopportun, et psychologi­quement impossible, de s'exprimer publiquement. Une telle situa­tion, morale est essentiellement *subversive,* et elle est aux anti­podes des conditions d'un « jeu normal de l'opinion publique ». Nous en parlons discrètement et modérément, le lecteur le comprendra : nous en disons beaucoup moins que nous ne pourrions en dire sur ce chapitre. Nous pour­rions multiplier les précisions publiques ou moins publiques, connues ou moins connues. Nous avons, quoi qu'en aient dit certains, observé cette discrétion durant la première session du Concile, et nous l'observerons plus encore. Nous ne promettons pas à nos lecteurs : -- *Vous allez tout savoir, nous allons tout vous dire*. D'abord parce que nous ne prétendons pas savoir tout ce qui se passe au Concile. Ensuite parce que nous ne croyons pas utile -- ni même licite -- de dire à tout moment tout ce que nous savons. Enfin parce que notre tâche propre est beaucoup plus modeste et en tout cas différente. Notre tâche se situe au niveau de la réflexion personnelle et de la vie intérieure. Nous voulons aider notre lecteur à trouver en lui-même les moyens de n'être pas esclave de l' « informa­tion » qui lui est plus ou moins donnée par la presse -- que cette « information » soit bonne ou détestable. Il ne peut y avoir un « jeu normal de l'opinion publique » que s'il y a formation du jugement personnel : 110:100 c'est-à-dire, selon les termes du dis­cours de Pie XII sur l'opinion publique déjà cité, s'il y a des hommes « marqués du sceau d'une vraie personnalité », et qui « à la lumière des principes centraux de la vie, à la lumière de leurs fortes convictions, savent contempler Dieu, le monde et tous les événements ». De tels hommes deviennent « chaque jour de plus en plus rares », disait Pie XII, tandis que se multiplient les êtres « sans consistance ni caractère, aisément manœuvrés par quelques maîtres du jeu », -- les êtres sans défense inté­rieure contre « la propagande astucieuse qui s'arroge le privi­lège de façonner (l'opinion) à son gré ». Quel étonnant discours, quelle profondeur du trait, et quelle actualité... Pie XII y disait : « L'homme moderne affecte volontiers des attitudes indépen­dantes et désinvoltes. Elles ne sont le plus souvent qu'une façade derrière laquelle s'abritent de pauvres êtres vides, flasques, sans force d'esprit pour démasquer le mensonge, sans force d'âme pour résister à la violence de ceux qui sont habiles à mettre en mouvement tous les ressorts de la technique moderne, tout l'art raffiné de la persuasion, pour les dépouiller de leur liberté de pensée et les rendre pareils aux frêles roseaux agités par le vent. » Les moyens de résistance aux conditionnements de l'opinion publique se trouvent aux sources de la vie intérieure et de la réflexion personnelle. C'est à cela que nous travaillons, et non à changer le rapport des forces dans le domaine du capitalisme, de presse qui tôt ou tard achèvera de pourrir sur pied, entraî­nant alors dans son, effondrement des pans entiers de faux-sem­blants et des contingents complets de puissants du jour, qui sont les impuissants du lendemain. L'actuel climat de l'opinion pu­blique est empoisonné, eh ! bien, chacun à sa place, il faut prier et travailler, *ora et labora*, « à la lumière des principes centraux de la vie ». 111:100 Ce que nous disions en décembre 1963 ### Notre décision : sans nous Un dimanche d'automne 1963, dans une très grande parois­se d'une très grande ville de France, le curé monte en chaire et déclare aux fidèles : -- Mes frères, priez pour le Concile plutôt que de lire les journaux. Les journaux, mêmes catholiques, racontent sur le Concile des choses scandaleusement inexactes. Des Pères du Concile m'ont dit : « C'est très curieux : nous apprenons en lisant la presse française quelles sont les décisions que nous devons prendre... » \*\*\* Bien sûr. Nous avons déjà donné là-dessus notre sentiment ([^47]). Mais nous ne pouvons pas ignorer non plus que d'autres Pères conciliaires jugent excellente la manière dont parlent du Concile MM. Fesquet, Rouquette, etc. : ils y trouvent le reflet de leur pensée, ils n'en font pas mystère et le déclarent volontiers. Les avis sont très partagés sur le rôle joué par la presse. Parfois, c'est un rôle à double tranchant. Dans *Le Monde*, qui est sous d'autres rapports le plus sé­rieux des quotidiens parisiens, M. Henri Fesquet emploie son talent brillamment unilatéral et agréablement romanesque à soutenir l'ardent combat qui s'efforce de détruire tout ce que nous aimons et d'écraser tous nos amis : au nom, bien entendu, de la charité, du dialogue, de l'ouverture. 112:100 Dans *Le Monde* du 15 octobre, M. Fesquet raconte qu'au Premier Concile du Vatican, on imposa aux évêques, et ils y consentirent, de « *mettre au point un système qui par ricochet devait nuire à leur autonomie, à leur liberté, à leur prestige* ». M. Henri Fesquet est terrible. Il ruine ainsi d'un coup la pro­testation de certains -- à commencer par lui-même -- qui déclarent ne vouloir porter aucune atteinte à la primauté du Pape. Ils le déclarent, oui, mais simultanément ils qualifient cette pri­mauté de « système » nuisant à l'autonomie, à la liberté, et même au « prestige » (quel langage « triomphaliste » !) des évêques. Ils ne disent pas : *La primauté du Pape nuit à l'auto­nomie, à la liberté, etc*. Ils disent au contraire : -- *Nous ne mettons pas en cause la primauté*. Ayant dit qu'ils ne mettent pas en cause la primauté (et nous leur donnons acte qu'ils ont *dit* ne pas vouloir la mettre en cause), aussitôt ils l'attaquent de plusieurs manières, et notamment de celle-là : ils attaquent ce qu'ils appellent un « système », « mis au point par Vatican I »... Quel est donc ce système ? Ce n'est rien d'autre, en fait, que la définition de la primauté. La veille, dans le même sens, M. Fesquet citait le propos d'un « conseiller théologique » -- « *Ne remettons pas en cause l'intuition de Vatican I, mais l'expression de cette intuition* ». Ré­duire un dogme à n'être plus qu'une intuition à expression variable, ce n'est pas mal imaginé non plus. Et quand M. Fesquet rapporte (22 octobre) la formule non moins habile : « *Considérer toute autorité comme un service* ET NON *comme un pouvoir* », nous ne savons dans quelle mesure il en aperçoit la conséquence immédiate mais, aperçue ou non, la conséquence s'impose : la conséquence est de dépouiller de tout pouvoir clairement défini l'autorité religieuse. Si l'on di­sait. « Considérer l'autorité *et son pouvoir* comme un servi­ce », la formule serait irréprochable. Mais « considérer l'autorité comme un service et non comme un pouvoir », c'est tout autre chose. \*\*\* 113:100 Selon le même auteur (15 octobre), le Concile jusqu'ici, « moyennant l'appui de deux Papes », a « *brisé moralement le carcan de la Curie* ». Que la Curie ait été un car­can, et qu'on ait fait en sorte, avec l'appui du Pape, de la briser moralement, cela ne ressortait point du discours de Paul VI à la Curie romaine ([^48]). Mais si c'est ainsi que certains Pères du Concile veulent l'entendre, et c'est ce qu'accrédite une presse à leur dévotion. « On ne le redira jamais assez, car cela est fondamen­tal, proclame M. Fesquet le 30 octobre : *le Concile est dirigé contre la suprématie de la Curie*. » Il existe donc un parti agres­sif, qui poursuit son assaut. La « suprématie » de la Curie n'existe pas, ou n'est que celle du Pape. La Curie est un ins­trument d'information et d'exécution par lequel le Pape exerce pratiquement sa primauté : « briser » la Curie pourrait théoriquement laisser intacte la primauté du Souverain Pontife, mais lui retirerait le moyen concret dont il dispose pour l'exercer. \*\*\* Ces choses se déroulent très au-dessus de notre tête. Nous sommes de simples chroniqueurs, simples chrétiens du dernier rang. Peut-être nous faut-il supporter en silence les déchaînements passionnés auxquels nous assistons. Du moins pouvons-nous prendre la liberté de dire que notre sentiment est celui d'une grande, d'une croissante partie du peuple chrétien et du clergé catholique : nous sommes tout à fait mal contents du spectacle qui nous est donné. Tel qu'il est réfracté par les journaux, ce spectacle accomplit jour après jour une éducation à rebours. Heureusement, et pour notre conso­lation, on nous assure que les débats du Concile, à la différence de ce qui en est mis en scène dans les journaux, sont empreints de dignité, de justice et de charité. On nous l'assure et nous le croyons. Mais nous n'y sommes pas, et nous trouvons très lamentable l'image qu'en donnent la plupart des « correspon­dants romains ». \*\*\* 114:100 Pour notre part, nous avons provisoirement suspendu notre *correspondance romaine.* Nous étudions comment nous pourrions la reprendre ; actuellement nous estimons préfé­rable de ne la reprendre point. Responsables, du moins pour une part, de la santé morale de nos lecteurs, nous croyons devoir limiter la place consentie dans nos colonnes à tout ce remue-ménage publicitaire et à toutes ces manigances de presse. Nous n'omettons point d'en parler quand nous pensons pouvoir le faire utilement. Nous n'omettons pas de défendre, quand cela est en notre pouvoir, les vérités et les personnes qui sont publiquement bafouées. Mais s'il y a des moments où il faut prendre à la gorge la rumeur infâme, il y a aussi des moments où il faut lui tourner le dos. La suppression provisoire de notre *correspondance romaine* a valeur de protestation contre le faux Concile tenu dans la presse en dérision du vrai. \*\*\* Ce faux concile tenu dans la presse en dérision du vrai, il serait injuste d'en faire porter l'entière et seule responsa­bilité à la presse elle-même. Il est simplement objectif de prendre acte du fait qu'il existe des Pères conciliaires (sans parler des « experts en vue ») pour cautionner, encourager, orienter, relancer ce faux Concile. Quelques exemples parmi beaucoup d'autres. Il y a eu un Père du Concile pour déclarer dans une confé­rence de presse (rapportée par *Le Monde* du 24 octobre) que « *ce sont les journalistes qui renseignent non seulement les fidè­les mais les évêques eux-mêmes sur ce qui se passe au Concile* »*,* et c'est pourquoi lui-même « *choisit la presse plutôt que la tri­bune du Concile pour communiquer ses idées* »*.* Il y a eu un autre Père du Concile, dans une autre confé­rence de presse (rapportée par *Le Monde* du 26 octobre) pour lancer contre la Papauté, en termes virulents et grossiers, l'at­taque que voici : « *Dans l'opinion catholique moderne, il y a comme une obsession morbide du primat du Pape. Il faudrait presque réciter une prière d'exorcisme. Dire que le Pape est Dieu sur la terre est un blasphème. On entoure le Souverain Pontife d'un respect obséquieux qui n'a rien d'évangélique.* » 115:100 Ce Concile fallacieux et dérisoire, mis en scène DANS les journaux, mais trop souvent PAR d'autres que des journalistes, nous lui opposons un refus radical, et c'est très précisément contre lui que, en supprimant provisoirement notre « corres­*pondance romaine* »*,* nous déclarons élever une protestation catégorique et absolue. \*\*\* C'est entendu : Pie XII avait tort sur toute la ligne ; saint Pie X ne comprit rien à rien ; la page du *Syllabus* est tournée et désavouée ; la théologie jusqu'ici enseignée par l'Église est un rudiment scolaire et enfantin ; la Curie romaine (sauf la Secrétairerie d'État, on se demande pourquoi ?) est une bureaucratie bornée d'autocrates imbéciles ; la chrétienté tout entière doit, par Vatican II, se mettre à l'école du P. Chenu, « l'expert le plus en vue du Concile » ; l'Église est restée jus­qu'en 1963 prisonnière de routines, de fausses traditions, de blocages sociologiques et de superstitions pré-logiques, on va enfin y mettre bon ordre ; et désormais la révélation teilhardienne, le progrès des sciences et la construction du socialisme tiendront lieu de tout. Parfait. Compris. C'est une propagande obsessionnelle, c'est une mise en scène, et une mise en condition, c'est une machinerie qui mobilise tous les moyens de pression sociale. Ils en font tant que maintenant l'on connaît le refrain par cœur, et que l'on peut réciter leurs articles et déclarations avant de les avoir lus, c'est toujours la même chose. \*\*\* En face de cet assaut, les réflexes vitaux s'enracinent à une profondeur où n'atteint pas le discours. A une profondeur qui est celle où prennent naissance l'acte de foi et la prière. C'est à cette profondeur-là qu'une partie grandissante du peuple chrétien est troublée, indignée, désorientée ou révoltée par le spectacle que ses journaux lui donnent fallacieusement du Concile. 116:100 Ce que nous disions en février 1964 ### Le monde du mensonge contre Pie XII LA FRANCE est le pays catholique, ou supposé tel, dans lequel les réactions officielles en face de l'in­famie du Vicaire ont été les plus ternes : quasi­ment inexistantes. A cela, il y a des raisons. Et d'abord une raison mineure mais réelle, concernant les catho­liques eux-mêmes. L'hostilité à la personne, à la doc­trine, à la mémoire de Pie XII est très vive chez certains catholiques qui exercent une prépotence de fait dans les organisations confessionnelles et les organes d'opi­nion. Nous savons par Georges Suffert qu'à l'époque où il était rédacteur en chef de *Témoignage chrétien*, la résistance clandestine à Pie XII était unanime autour de lui : « *A partir de celle date* (l'Encyclique *Humani generis* de 1950), *tous les articles parus en France se li­sent dans une perspective de résistance à Rome. La vé­rité n'a pas grand'chose à voir avec ce qui est écrit.* » ([^49]) Les clercs et les laïcs sur lesquels Georges Suffert porte ce témoignage, il n'est que de voir à quels postes diri­geants ils sont aujourd'hui installés dans le catholicisme français. 117:100 Ils veulent par tous les moyens prendre leur revanche sur Pie XII, et ils la prennent effectivement par tous les moyens. Ils approuvent la mise en circula­tion des accusations les plus infâmes ; ils ne les repren­nent pas toujours à leur compte, mais ils les laissent courir, ils incitent tout le monde à ne rien faire et à s'en laver les mains. Comme ils sont les plus puissants, voire quasiment les seuls écoutés dans les organismes socio­logiques et auprès de la hiérarchie de l'Église de France, on n'a pas vu en France, comme en d'autres pays, l'Église se dresser avec dignité et fermeté face aux accu­sations mensongères lancées contre Pie XII. \*\*\* Mais la raison, majeure (d'ailleurs connexe à la pré­cédente) est que la France est peut-être le pays le plus radicalement prisonnier de l'imposture contemporaine, de la fausse histoire que l'on a faite de la seconde guerre mondiale, des mythes qui cernent le monde clos du mensonge. Pie XII est accusé d'être resté indifférent, inactif et même craintif en face de la persécution des Juifs par Hitler ; indifférent, inactif et craintif en face du « *plus grand péché de l'histoire* »*.* En face du plus grand pé­ché de l'histoire, le Pape Pie XII, c'est « historique », a « *réagi en politique et non en témoin du Christ* » ([^50])*.* Est-ce vrai ? Ceux qui reprochent simplement au *Vicaire* la « lé­gèreté de la caricature » s'abstiennent de répondre à la question : *vrai ou faux*, -- et ainsi laissent entendre, ou du moins laissent croire, que l'accusation est vraie. 118:100 D'autres abordent la question an fond et la posent en ces termes : « *Pie XII a-t-il laissé Hitler massacrer les Juifs sans protester ?* » ([^51]) C'est la question telle que la pose l'auteur du *Vi­caire :* le Pape n'avait « *pas le droit de garder le silence en face du massacre des Juifs par les nazis* » ([^52])*.* Mais c'est la question elle-même qui est un mensonge. \*\*\* La question ainsi posée falsifie la situation histori­que à laquelle Pie XII avait à faire face. Définir cette situation comme étant « le massacre des Juifs par Hitler », c'est un double truquage -- : 1. -- Parce que les Juifs n'étaient pas *seuls* dans les camps de concentration hitlériens. 2. -- Parce que le nazisme n'était pas *seul* à persécuter les Juifs. Et c'est pourquoi le P. Michel Riquet a pu schémati­ser ainsi l'imposture du *Vicaire* ([^53]) : « La conclusion qui s'impose au spectateur bon public, c'est qu'en toute cette affaire il n'y eut d'innocents que les Juifs, d'efficaces que les Soviétiques. » On ne ment pas seulement sur Pie XII. On ment aus­si, et d'abord, sur l'histoire. On ment sur « toute cette affaire ». \*\*\* 119:100 Le plus grand péché de l'histoire ? Si le plus grand péché de l'histoire n'est plus la cruci­fixion du Fils de Dieu fait homme, ou s'il faut entend­re qu'on veut seulement parler du plus grand péché de l'histoire *contemporaine*, on ne voit pas pourquoi ce plus grand péché serait celui des camps de concentra­tion hitlériens. Plutôt que des camps de concentration soviétiques, qui existaient avant, qui existaient pendant, qui exis­tèrent après. On ne voit pas -- ou on voit trop bien -- pourquoi les camps de concentration hitlériens seraient le plus grand péché, tandis que les camps de concentration soviétiques seraient un péché relativement véniel. A supposer même que la persécution contre les Juifs, par une étonnante discrimination raciale ou religieuse, soit tenue pour automatiquement un plus grand péché que la persécution contre d'autres peuples ou d'autres religions, on ne voit pas -- ou l'on voit trop bien -- pourquoi on en fait à l'hitlérisme un plus grand crime qu'au stalinisme. Le communisme soviétique, qui a persécuté les Juifs sous Staline, a continué après Staline à les persécuter ; cela est d'hier et d'avant-hier, et cela est d'aujourd'hui et de maintenant. Mais *le plus grand péché* de l'histoire contemporaine, il faut à toute force que *ce ne soit pas* le totalitarisme soviétique. Ce système du mensonge, Pie XII n'y est pas entré, Pie XII ne l'a pas accepté, Pie XII ne l'a pas favorisé. C'est pourquoi ce système du mensonge se retourne contre Pie XII. \*\*\* 120:100 L'accusation portée contre Pie XII est fausse en son essence parce que Pie XII ne s'est pas trouvé en face d'un crime unique, ou d'un crime privilégié : Hitler massacrant les Juifs. Hitler n'a pas massacré SEULEMENT des Juifs, Hitler n'a pas été LE SEUL à massacrer des Juifs. Le mensonge est inhérent d'abord à cette pers­pective en trompe-l'œil. La seconde guerre mondiale, *ce ne fut pas* (*seulement*) *cela*. La seconde guerre mon­diale fut un complexe de crimes de toute sorte, se mêlant, s'enchaînant, se répondant. Et Pie XII s'est dressé dès l'origine et en permanence contre ce déchaî­nement de crimes. Mais il ne l'a pas fait à la manière du tribunal de Nuremberg où le vainqueur avait automati­quement la dignité du juge et où le vaincu avait auto­matiquement l'indignité du coupable, il ne l'a pas fait à la manière du tribunal de Nuremberg, où les criminels nazis étaient seuls au banc des accusés et où les crimi­nels de guerre soviétiques siégeaient seulement parmi les juges. Pie XII n'a pas lancé contre les crimes du na­zisme une condamnation unilatérale calculée de maniè­re à comporter pratiquement une absolution implicite des crimes du communisme soviétique. On dit aujourd'hui : -- Que fit donc la plus haute autorité morale qui soit dans le monde ? -- La plus haute autorité morale qui soit dans le monde a été fidèle à sa vocation néces­saire, elle ne s'est pas associée à l'imposture du temps présent. S'il s'agissait pour les autorités morales -- com­me le croient apparemment certaines autorités morales -- de simplement confirmer, au nom de la justice et de la loi de Dieu invoquées, l'imposture du temps présent quand elle est tenue par presque tout le monde pour vé­rité et pour justice, alors nous n'aurions aucun besoin d'autorités morales, nous n'aurions que faire de ces au­torités morales-là, dérivant comme chiens crevés au fil du plus fort courant du plus fort mensonge du moment. Mais, naturellement, ce sont les machinateurs, les profi­teurs -- et les dupes -- de l'imposture du temps présent qui mettent Pie XII en accusation. 121:100 Ce qu'en cette affaire l'on reproche véritablement, substantiellement, finalement à Pie XII, c'est de *n'avoir pas mis en évidence un seul crime en taisant les autres :* « Hitler massacrant les Juifs ». Ce que l'on reproche fi­nalement à Pie XII, c'est de n'avoir pas désigné explici­tement ce seul crime, avec une accentuation discrimina­toire et privilégiée qui aurait comporté l'absolution pra­tique d'autres crimes, -- les crimes soviétiques. Pie XII s'est dressé contre tout un monde d'imposture, de men­songe, de crime : et dans ce monde, Staline partageait la première place avec Hitler pour ce qui est de l'hor­reur ; pour ce qui est de l'étendue et de la durée, il par­venait à la lui arracher. \*\*\* « S'ouvrir au monde », « ne pas se couper du mon­de » sont les jolies formules de la pastorale nouvelle et de la théologie futuriste. Mais quand c'est le monde de l'imposture ? quand c'est le monde clos du mensonge ? Faut-il donc ne pas se couper du monde de l'imposture, faut-il s'ouvrir au monde du mensonge, ou faut-il au contraire, comme le fit Pie XII, lancer l'avertissement historique : « *C'est tout un monde qu'il faut refaire de­puis les fondations : de sauvage, le rendre humain...* » Le monde clos du mensonge, c'est le monde qui con­sidère comme un progrès d'avoir libéré de l'hitlérisme des nations chrétiennes et des communautés juives pour les livrer au communisme. La seconde guerre mondiale, entreprise pour défendre la Pologne contre la domina­tion nazie, s'est terminée en livrant la Pologne et d'au­tres peuples à la domination soviétique. 122:100 Le « plus grand péché » de l'histoire contemporaine, il faut à tout prix que ce soit le nazisme tout seul, si l'on veut estomper les crimes du communisme et en même temps absoudre la bassesse de ceux qui en furent et en demeurent les complices, les auxiliaires ou les bouffons. \*\*\* L'éminent théologien amateur Poirot-Delpech, celui qui a jugé et condamné Pie XII en décidant que, « de­vant le plus grand péché de l'histoire », il avait « réagi en politique et non en témoin du Christ », prétend aussi définir et circonscrire les droits laissés aux catholiques : « Tout en méprisant comme il convient les demi-soldes de l'intégrisme et leurs boules puantes, *on peut concevoir que des catholiques regrettent en secret ce rappel historique.* » ([^54]) On peut concevoir, mais oui, après tout, que des ca­tholiques regrettent ce (prétendu) rappel historique, à condition qu'ils le regrettent *en secret.* Tels sont les droits civiques qu'à la rigueur on peut encore leur con­céder. L'Action catholique générale des hommes (A.C.G.H.) a brillé par son absence dans toute l'affaire du *Vicaire ;* elle s'est conformée aux impératifs moraux de l'éminent théologien amateur Poirot-Delpech ; elle a « regretté en secret ». Ne lui en faisons nul reproche : l'A.C.G.H. n'est décidément pas faite pour répondre à de telles situa­tions, son abstention le confirme avec éclat et définitive­ment. 123:100 Ce qui nous manque aujourd'hui, c'est ce que n'est pas, ne peut ni ne veut être l'A.C.G.H., ce qui nous manque c'est l'organisation populaire et représentative capable de faire face à une situation semblable, ce qui nous manque c'est l'analogue ou l'équivalent de ce que fut avant la guerre la Fédération nationale catholique du général de Castelnau. On touche ici du doigt que l'erreur n'a évidemment pas été de créer une A.C.G.H., mais qu'elle a été de créer une A.C.G.H. en y annexant, absorbant et détruisant la Fédération nationale catho­lique. Il appartiendra à la promotion des laïcs de cor­riger une erreur aussi dommageable et de constituer au plan civique, dans l'action et sur le tas, les possibilités et les moyens d'une libre organisation des catholiques, capable d'agir sous sa seule responsabilité. \*\*\* Devant la quasi-inexistence des réactions officielles catholiques, en France, aux accusations mensongères lancées contre Pie XII, *La Nation française* du 18 dé­cembre exprimait, « l'espoir que, du moins, les associations juives les plus responsables, se souvenant de la protection de Pie XII, fassent elles-mêmes justice du *Vicaire* »*.* Les associations juives les moins responsables sont, en France, quelquefois pénétrées ou noyautées par le communisme, de la même façon que des organisations catholiques, socialistes ou autres. 124:100 Mais en revanche, des associations juives les plus responsables, on peut attendre une autre attitude. Elles n'ont aucune raison de soutenir ni même de permettre une falsification qui, selon les termes du P. Riquet, pré­tend faire croire « qu'il n'y eut d'innocents que les Juifs, d'efficaces que les Soviétiques ». Elles n'ont aucune rai­son de ne pas combattre un système d'imposture qui comporte une absolution implicitement donnée à la per­sécution des Juifs par le communisme soviétique. Selon certaines informations parues dans *Le Monde* ([^55])*,* le *B'naï Brith* aurait efficacement pris position contre le *Vicaire.* Il s'agit assurément d'une association juive tout à fait responsable, et qui a le plus grand poids moral. On sait d'autre part qu'elle a été en contact avec le Car­dinal Béa en vue de l'apaisement des querelles entre le judaïsme et le christianisme. Si le *B'naï Brith* décide vraiment de faire justice de l'imposture du *Vicaire,* alors le mal et l'infamie auront été l'occasion d'un plus grand bien. 125:100 Ce que nous disions en mai 1964 ### Vers une crise totale LES DOCUMENTS, les témoignages s'accumulent, : depuis les clercs qui organisent contre leur évêque la grève de la quête jusqu'aux journaux catholiques qui attaquent per­sonnellement le Pape Paul VI. Quelques-uns de ces événements sont évoqués ou analysés dans diverses rubriques du présent nu­méro. Leur multiplication, qui s'accélère de manière foudroyante depuis le début de l'année 1964, en vient à dépasser les possi­bilités de l'examen critique méthodique. Tout craque, des brè­ches s'ouvrent partout, c'est une inondation. AVEC LA CAUTION APPARENTE, peut-être usurpée ou sollicitée, d'autorités morales et même à l'occasion, juridiques, on engage le catholicisme français dans un désaveu total de lui-même. On rejette la philosophie chrétienne. On rejette la théologie traditionnelle. On crache sur toute notion de civilisa­tion chrétienne et de chrétienté. On prêche la collaboration avec le marxisme, la construction du socialisme, le dialogue avec le communisme. Ceux qui le font se prétendent mandatés pour le faire et n'ont pas -- jusqu'à présent -- été démentis. La presse catholique qui les soutient est celle qui est la plus recommandée, voire la seule recommandée. 126:100 Des prêtres de bonne foi croient et disent que les « Informa­tions catholiques internationales » expriment « L'esprit de l'Église de France » tel qu'il est « suscité par le Saint-Esprit » et « approuvé par la Hiérarchie ». Avec une telle conviction répan­due dans les Séminaires, dans l'Action catholique, dans le clergé, dans les paroisses, on va loin. CRISE TOTALE : en actes, elle se résout dans cette orientation vers le marxisme, dans cette déliquescence fascinée de­vant le communisme ; son origine, elle la prend dans une subversion généralisée des valeurs doctrinales. Nous avons publié dans la « Collection Itinéraires » la traduction, par Louis Sal­leron, du livre de l'évêque anglican Robinson : « Honest to God » (« Dieu sans Dieu »). Dans l'Église d'Angleterre, ce livre a rencontré les oppositions qu'il appelle. En France et parmi les docteurs catholiques, il est reçu et approuvé pour l'essentiel. C'est un fait ; c'est un test. Qu'on lise ce livre, et l'on compren­dra. La substance même de la foi est en question. L'esprit théolo­gique, déboussolé par le teilhardisme, est prêt maintenant à accepter n'importe quoi, pourvu que ce soit une fuite loin des dogmes définis et des vérités révélées. « La plupart des critiques catholiques qui ont rendu compte du livre de Robinson n'y dé­cèlent rien de révolutionnaire et prétendent y retrouver des po­sitions très traditionnelles » : voilà où ils en sont, c'est la cons­tatation faîte par les « Études » et c'est aussi, à peu de chose près, leur avis. C'est en substance l'avis de « Parole et Mission » des Dominicains de Paris, et celui de « Lumière et Vie » des Dominicains de Lyon. Le niveau, l'état mental des docteurs du catholicisme français se manifeste ainsi en pleine évidence. 127:100 LE PEUPLE CHRÉTIEN de France -- celui qui n'est pas enca­dré dans des organisations de masse et ne lit pas trop la presse de masse -- n'est pas encore atteint, ou ne l'est que partiellement. Mais il n'est plus, pour le quart d'heure, défendu contre les débordements inouïs qui, du teilhardisme jus­qu'à la collaboration active avec le communisme, s'efforcent de l'entraîner à une complète désintégration, intellectuelle et morale. Le scandale est partout en même temps. Et contre les enseignements de Paul VI, on commence à organiser ouvertement le com­bat que l'on s'honore d'avoir mené, au sein de l'Église de France, contre Pie XII. Ces manigances insensées provoquent des réac­tions qui prennent la forme d'incidents. Comment s'en étonner ? On approche de la minute, de vérité, Elle sera sévère, et peut-être tragique. On tient en tous cas les deux bouts de la chaîne : Teilhard et Robinson (et dix autres analogues) pour l'idéologie religieuse, la collaboration avec le communisme pour le comportement pra­tique ; et toute une presse, toujours la même, pour pousser à la roue dans ce sens-là, par tous les moyens, y compris les plus délirants. 128:100 IL NE S'AGIT PAS de défaillances isolées, toujours possibles. Il s'agit d'un ensemble finalement très cohérent avec lui-même, et qui a tout envahi, ou qui menace d'envahir tout. Il ne s'agit pas non plus d'une nouveauté brusquement apparue au début de 1964 par génération spontanée, mais des résultats convergents d'un travail patient, souvent clandestin, ou semi ca­mouflé, poursuivi depuis une vingtaine d'années et davantage dans les structures intellectuelles et sociologiques du catholicis­me français. 129:100 On fait du teilhardisme. On fait du marxisme. On se reconnaît dans le livre de Robinson. On pousse les catholiques dans les bras du Parti communiste. Mais alors vient un moment où tout se détraque à la fois : nous y sommes. Ce que nous disions en juillet 1965 ### Schismatiques ? NOUS AVONS REFUSÉ et nous continuons à refuser ce qui, dans le Concile, n'est pas le Concile. Nous avons refusé et nous refusons une certaine concep­tion de la collégialité : celle que le Concile a refusée, mais que l'on continue à prôner, en jouant sur les mots, ou en se référant à un certain Concile, *au Concile entendu par dis­tinction d'avec le Pape,* ce qui précisément N'EST PAS le Concile. Au témoignage du Père dominicain Schillebeeckx, qui est l'une des lumières de ce que l'on a appelé et de ce qu'il a nommé lui-même la « majorité » de l'assemblée conci­liaire, *évêques et théologiens de la majorité parlaient trop souvent de la collégialité en un sens qui n'est exprimé nulle part dans le schéma*. Certains d'entre eux avaient le dessein, par une ruse abominable, *de tirer après le Concile les consé­quences implicites* ([^56])*.* La Note explicative a fermé cette porte : elle l'a fermée, du moins en théorie. La même ma­chination, dont la « déloyauté » dit-il, avait indigné le P. Schillebeeckx, continue sporadiquement sous nos yeux ; et pas toujours sporadiquement. On veut encore insinuer la notion et la pratique d'une « collégialité » qui « n'est exprimée nulle part » dans la Constitution conciliaire et qui est explicitement récusée par la Note explicative. 130:100 Qui donc est schismatique en l'affaire ? Personne, espérons-le. En tout cas point nous. Nous sommes « pour » la Constitution conciliaire sur l'Église, et sur le chapitre de la collégialité, pour l'expliquer à nos lec­teurs, nous avons choisi de publier un texte magistral du Père dominicain M.-R. Gagnebet, que l'on n'a pas encore réussi à faire passer pour « schismatique ». La *décision* conciliaire a *refusé* une certaine conception de la collégialité que nous avons combattue et que nous com­battrons. Les inventeurs de cette conception-là, et aussi plu­sieurs qui s'étaient ouvertement engagés et imprudemment mis en avant, sur l'avis ou la pression de leurs conseillers et sans trop savoir ce qu'ils faisaient, crient vengeance, nous accusent, nous diffament, nous traitent de « schisma­tiques ». Et alors ? Ils peuvent nous persécuter. Nous serons en cela persécutés pour la foi, ce qui est une béatitude, et le début du Ciel sur la terre. \*\*\* Le Décret *Inter Mirifica* sur les moyens de communi­cation sociale est une autre DÉCISION CONCILIAIRE. On a craché dessus. Le Père jésuite Rouquette, dans les *Études,* l'a déclaré « insignifiant ». Bon. C'est une opinion. Nous, nous étions au Congrès de Lausanne, actifs participants aux travaux qui ont abouti à déclarer solennellement *faire leur charte* de cette décision conciliaire. Schismatiques ? Oui à l'égard du Magistère clandestin fonctionnant secrètement dans l'Église, et qui s'arroge le droit de ba­fouer ou d'annuler une décision conciliaire. Schismatiques à l'égard de la nouvelle Église que l'on prétend « faire sortir de sa chrysalide » et qui *n'est pas l'*Église du Christ. \*\*\* 131:100 La Constitution sur la liturgie : nous ne demandons, nous n'espérons, en la matière, que son application réelle. Schismatiques en cela ? Oui, à l'égard de ceux qui en sabotent consciemment la mise en œuvre, et qui frappent de nullité, notamment, ses stipulations concernant le latin et le grégorien. \*\*\* Le Décret *unitatis redintegratio* sur l'œcuménisme : nous y plaçons notre espérance et notre cœur, nous en fai­sons la règle de nos rapports avec les frères séparés (et no­tamment, soit dit par parenthèse, avec les frères séparés qui apportent leur collaboration à cette revue). Schismatiques donc ? Sans doute, à l'égard de l'œcuménisme-sic qui se conçoit lui-même comme une complicité inter-confessionnelle pour l'abaissement du Siège romain et pour la mutilation des dogmes de la foi. \*\*\* Mais le reste ? Les travaux ? les discours ? Tout ce que racontent les journaux ? Toute la littérature para-conci­liaire ? Et le Concile considéré comme *point de départ ?* Le reste n'est rien. 132:100 Rien du point de vue « schisme » ou « pas schisme ». Ce sont les décisions promulguées qui nous lient. Le reste est matière à discussions, si l'on veut, ou promis à l'oubli, voire au manteau de Noé, si l'on préfère. Quant à la conception du Concile comme « *point de dé­part *» elle s'est révélée, en fait, contenir une redoutable ambiguïté. Les décisions conciliaires sont le « point de départ » de toute une mise en œuvre : une mise en œuvre des décisions promulguées, conformément aux décisions promulguées. On ne l'entend pas toujours ainsi ; ou pas seulement ainsi. On l'entend comme *un point de départ vers ce que le Concile n'a pas* (*encore*) *décidé*, en ajoutant quelquefois que Vatican III y viendra un jour. Or les décisions négatives du Concile sont elles aussi des décisions. Prendre les décisions conciliaires comme un « point de départ » vers ce que le Concile a décidé de ne pas décider, c'est au moins facultatif. Dans certains cas, c'est une imposture. Le dogme de la Sainte Trinité n'est pas un point de départ en ce sens-là. Il n'est pas un point de départ vers un « enrichissement » ultérieur qui nous donnerait un Dieu en quatre, en cinq, en six personnes. Le chapitre conciliaire sur la collégialité n'est pas un point de départ vers une forme de collégialité que précisé­ment il exclut. Et le schéma XIII ne pourra en aucune manière être un point de départ vers une nouvelle doctrine sociale, subs­tantiellement différente de celle qu'enseigne le Saint-Siège. \*\*\* 133:100 La guerre dans l'Église est une guerre de religion. De manière souvent implicite, mais toujours contraire aux authentiques décisions conciliaires, *une autre religion* cherche à s'insinuer au sein de l'Église, *in sinu gremioque Ecclesiæ*. C'EST UNE RELIGION QUI PARLE DE CHARITÉ, MAIS QUI EST PERSÉCUTRICE DES CATHOLIQUES ROMAINS : toujours vous la reconnaîtrez à ses fruits. Elle persécute les catho­liques romains par les moyens modernes de l'information-diffamation, de la prépotence sociologique, de la puissance financière, de la complicité concertée avec les ennemis du dehors, et de la pratique systématique du mensonge, qu'elle tient du Père du Mensonge. Elle persécute la foi. Elle persécute la vérité. Elle persécute l'honneur des chrétiens fidèles, présentés d'avance et dénoncés comme les schismatiques de demain. Avec la grâce de Dieu nous tiendrons ferme dans la foi. Nous tiendrons ferme pour et dans l'Église des Papes et des Conciles, l'Église des Saints, l'Église de la Tradition, l'Église d'hier et de demain et de toujours, l'Église de Jésus-Christ, la seule Église. \*\*\* Ici non plus, nous n'inventons rien. Ici encore, nous avons un texte (et même plusieurs). L'abbé Laurentin, dans l'article même du jour de l'Ascension où, en première et en dix-huitième page du *Figaro*, il dénonçait longuement et tentait d'écraser sous le poids de ses calomnies « le groupe français qui joue le rôle pilote », l'abbé Laurentin lui-même, au même endroit, par inadvertance, ou par l'effet de quelque connivence promise et de quelque assurance d'im­punité, a tout avoué. Il sait très bien, pour sa part, que les « intégristes » ne font et ne feront aucun schisme. Il sait très bien, et il écrit, que ce schisme-là est un « mythe ». *Non, il n'y aura pas de schisme*, assure-t-il. Il ne compte pas sur un schisme. Il sait très bien qu'on ne réussira pas a amputer l'Église de son « aile droite » simplement en attendant que cette « aile droite » fasse dissidence. Il écarte l'idée de ce schisme spontané, qui induirait à une regrettable passivité les chirurgiens de l'amputation. 134:100 Et sur sa lancée, il en vient à cet aveu inouï : « Ils (le groupe restreint, le groupe pilote, etc.) sont apparentés aux « judaïsants » du premier siècle : ces chrétiens zélés pour qui l'abandon de certaines observances juives était scandale et trahison vis-à-vis de la tra­dition, édulcoration du don de Dieu au profit du paganisme. Le Christ n'avait-il pas procla­mé : « Pas un iota, pas un accent de la loi ne sera supprimé jusqu'à ce que tout soit accompli. » Comme l'afflux des païens convertis était encombrant pour ces hommes-là ! Com­me il était inquiétant, comme il changeait du petit troupeau de prosélytes dûment circoncis, qui gravitaient à leur humble place au­tour des synagogues ! Les judaïsants assis­tèrent à l'évangélisation du monde païen comme à une catastrophe. Ils mirent saint Paul en difficulté, à maintes reprises, et furent cause de son arrestation ; mais ces « tradi­tionnels » ne firent pas et ne pouvaient pas faire schisme d'avec l'Église. C'est l'Église qui dut quitter la synagogue. » On voit aussitôt l'immense portée de la comparaison qu'a choisie l'abbé Laurentin. Il compare les « intégristes » aux « judaïsants » les traditions chrétiennes d'aujourd'hui aux traditions de la synagogue, *comme si* nous pouvions avoir aujourd'hui une Révélation nouvelle et un nouveau saint Paul. C'est tout le problème et c'est toute la question. Si l'on se souvient que l'abbé Laurentin est celui-là même qui prétend qu'aujourd'hui seulement l'Église sort de sa chrysalide pour devenir enfin l'Église vivante que le Christ veut susciter, alors tout devient clair. On a représenté le Concile comme l'équivalent d'une nouvelle Révélation et comme le point de départ d'une nouvelle Église. On a voulu par le Concile rompre avec deux mille ans de tradition chrétienne, comme l'Église naissante a rompu avec la syna­gogue. 135:100 On accuse d'être « anti-Concile » ceux qui, selon le mot de Gustave Thibon, *ne marchent pas :* ceux qui ne marchent pas dans cette *religion nouvelle*. Il n'y a pas et il n'y aura jamais plus de religion nouvelle qui soit la vraie religion du *Dieu* vivant. Teilhard n'est pas saint Paul. Et il est bien vrai, il est visible, par exemple, que le teilhar­disme nous demande à présent une démarche analogue à celle que demandait saint Paul. Mais la démarche que demandait saint Paul à l'égard de la synagogue, le teilhardisme nous la demande à l'égard de l'Église de Jésus-Christ. On garde simplement le nom du Christ ; on insinue, et dans le cas de l'abbé Laurentin on dit même très carrément, que *l'Église que le Christ veut susciter* n'existe pas encore mais va enfin exister, par « le Concile ». C'est le faux et chimérique Concile opposé au vrai. C'est l'imposture cardi­nale sur le Concile. Et je dis bien : l'imposture. Car après tout l'abbé Laurentin peut bien, en son nom propre, penser et raconter ce qu'il veut sur l'Église. Mais à partir du moment où il prétend nous imposer ses vues au nom du Concile, et où il ose réputer « anti-Concile » ceux qui précisément s'en tiennent aux DÉCISIONS conciliaires d'au­jourd'hui et de toujours, alors nous sommes manifestement en présence d'une intolérable imposture. Aucun enseignement authentique, aucune décision pro­mulguée d'aucun Pape et d'aucun Concile n'a jamais dit et ne dira jamais que « l'Église que le Christ veut susciter » n'existe pas encore. L'Église *est.* A tout moment, mystérieu­sement, invisiblement (hélas, trop invisiblement parfois, et sous des apparences humaines bien désolantes), l'Église *est* une, sainte, catholique, apostolique. Nous le savons par la foi. Nous l'affirmons par la foi. Nous le confessons dans la foi. C'est la foi qui est en cause. 136:100 Si pécheurs et indignes que nous soyons, c'est à cause de la foi que l'abbé Laurentin nous diffame et nous calom­nie : notre foi n'est pas la même que celle qu'il exprime dans les textes que nous avons cités. Et l'abbé Laurentin poursuit la comparaison : ce ne sont pas les « judaïsants » qui firent schisme, *c'est l'Église qui dut quitter la synagogue*. Aujourd'hui les « intégristes » ne font aucun schisme, c'est la chimérique Église nouvelle qui est en situation de *quitter*, de s'en aller. Mais ce n'est plus la synagogue qu'aujourd'hui l'on quitte. Oui, si indignes et si pécheurs que nous soyons, c'est à cause de la foi que l'abbé Laurentin, et tant d'ecclésiastiques de ses pareils ou de ses supérieurs, nous calomnient et nous persécutent. Amis lecteurs, peut-être inquiets, peut-être désorientés, il vous est dur de subir la calomnie et la persécution. Mais relevez la tête. *Sursum corda.* C'est pour la foi, et c'est Dieu, il l'a promis, qui rétribuera. 137:100 ## TABLES ET INDEX 1956 -- 1966 Aux pages suivantes on trouvera les tables et index permettant la consultation de tous les numéros parus à ce jour. Il était impossible de constituer un « index analytique des matières ». Une revue mensuelle, même dans ses études les plus didactiques, n'est pas un traité. Le savoir, fût-il le plus scientifique, s'exprime ici à l'occasion de l'actualité. C'est ce que nous voulons dire en intitulant « chroniques » même les études de théologie, de philosophie ou de spiritualité. En outre, à supposer qu'il eût été possible d'établir avec suffisamment de rigueur un « index analytique », il aurait donné une apparence systématique à ce qui ne l'est nullement : une apparence en quelque sorte horizontale, simultanée, statique, à ce qui a été cheminement. Nous n'avons pas non plus composé cette fois un « index alphabétique des noms de personnes et de publications » citées. Cet index existe pour les 57 premiers numéros de la revue, il a paru dans notre numéro 58 de décembre 1961, le numéro des « tables et index 1956-1961 » : ce n'était pas une simple nomenclature mais l'équivalent d'une table des matières. Nous avons renoncé, devant l'énormité du travail. 138:100 La revue « Itinéraires » a publié 1.296 pages la première année ; 1.344 pages la seconde ; 1.160 la troisième ; 1.172 la quatrième ; 1.366 la cinquième ; 1.312 la sixième ; 2.044 la septième ; 1.956 la huitième ; 2.068 la neuvième ; 2.208 la dixième. Soit près de 16.000 pages en dix ans. On trouvera ci-après : 1. -- Une table des articles classés par noms d'auteur, et pour chaque auteur par ordre chronologique ; 2. -- Un index chronologique des documents pontificaux publiés dans la revue ; 3. -- Une table des numéros spéciaux ; 4. -- Une table des suppléments et tirés à part ; 5. -- Une table des volumes publiés dans la « Collection Itinéraires ». 139:100 ### Table des articles classés par noms d'auteur Le chiffre suivant chaque titre d'article est celui du numéro où il a paru. Les numéros se terminant par 1 sont du mois de mars ; les numéros se terminant par 2 sont du mois d'avril ; les numéros se terminant par 3 sont de mai ; les numéros se terminant par 4 sont de juin ; les numéros se terminant par 5 sont de juillet-août ; les numéros se terminant par 6 sont de septembre-octobre ; les numéros se terminant par 7 sont de novembre ; les numéros se terminant par 8 sont de décembre ; les numéros se terminant par 9 sont de janvier ; les numéros se terminant par zéro sont de février. Les numéros dont le chiffre des dizaines est un zéro sont de la première année de la revue (de mars 1956 à février 1957 inclus) ; les numéros dont le chiffre des dizaines est 1 sont de la seconde année de la revue (de mars 1957 à février 1958) ; les numéros dont le chiffre des dizaines est 2 sont de la troisième année de la revue ; et ainsi de suite. ALFAGÈME (Braulio) - Réponse à l'enquête sur la corporation : 16. ANDRÉ-DELASTRE (Louise) - Saint Bernard, patron des chiens : 92. 140:100 ANDREU (Pierre) - A propos des Étendards du Roi : 7. - Lettre sur les 50 meilleurs livres catholiques : 13. - Réponse à l'enquête sur la corporation : 17. - Esprit, 1932-1940 : 33. - Le patriotisme du P. de Foucauld : 40. - Brèves réflexions sur le journalisme catholique : 47. - D'Agathon à Massis : 49. - A propos de la Hongrie catholique : 50. ANGERS (François-Albert) - Le corporatisme au Canada français : 18. ARNOULT (Alphonse) - A saint Pie X pour le cinquantième anniversaire de sa mort : évocation-prière : 87. - Le souvenir de Pie XII : 92. AUBOURG (Gaston, O.S.B.) - Écriture et Tradition : la mémoire de l'Église : 70. - Le Tabernacle : aux sources sacramentelles de la con­templation et de l'action : 76. - La première, l'unique, l'éternelle Messe : 84. AUPHAN (Paul, amiral) - Réflexions sur le drame colonial : 3. - Euratom et Eurafrique : 6. - Les corporations de la Marine : 14. 141:100 - A propos de bombes : 22. - « L'Islam » de l'abbé Moubarac : 72. - Un précédent plein d'espérance : 76. - Un pèlerinage à Jérusalem : 81. - Souvenirs et réflexions stratégiques : 85. - Chaud et froid à Chypre : 92. - Weygand chrétien : 93. - Vingt-cinq ans de guerre en Indochine : 98. AUVRAY (D.-P., O.P.) - Mystères douloureux du Rosaire : 97. BARBÉ (Henri) - Qu'avez-vous fait des communistes convertis : 36 et 37. - Mgr Béran, héros de la Résistance : 41. BARESTA (Luc) - L'Occident face au chantage : 47. - Mesure et démesure des « centurions » : 48. - Défense de l'Occident, défense d'une jeunesse : 49. - Chronique de la rumeur : 50. - Ni repli ni blocage : 51. - La rédemption du désert : pèlerinage pascal au Hoggar : 52. - Moments et images du Portugal : géographie mariale de notre destin : 53. - Babel et le cosmonaute : 54. - La question de l'État : 55. - La Semaine sociale de Reims : 56. - La société des États : 57. - La Semaine des intellectuels catholiques : catholicisme un et divers : 59. 142:100 - Histoires convergentes ou la punaise dans la dialec­tique : 61. - Carême et sociologie : 62. - Le poids des morts : 63. - La paix et les bombes : 64. - La révolution algérienne : 65. - L'Algérie marche à reculons : 69. - Interview de Jean Piveteau : 96. - Les Hollandais seulement : 98. BARDÈCHE (Maurice) - Réponse à l'enquête sur le nationalisme : 6. BERTHAULT (Philippe, abbé) - Une lecture de Balzac : 95. BERTO (V.-A., abbé) - La théologie non-euclidienne et le peuple orphelin : 82. - Lettre au directeur du Monde : 86. - Un incident conciliaire : 91. - Sur un incident conciliaire : 94. BERTUEL (Joseph, abbé) - Qui était Hanna Zakarias ? Le vrai visage du P. Théry, o.p. : 83. - Regards sur l'Islam : 97. 143:100 - Massis et l'Allemagne : 49. BOUNOURE (Louis) - Recherches et conceptions paléontologiques de Teilhard de Chardin : 96. BOUTANG (Pierre) - La grande pitié : 54. - Pour nous, saint Louis : 70. - L'atome d'abord, l'Évangile ensuite : 72. - Le chrétien otage et le communiste innocent : 75. - Détruisez ce temple : 76. - Aggiornamento : 78. - Le livre de Carlo Falconi : 91. BRASILLACH (Robert) - Domremy : 61. BRÉSARD (Marcel) - Le mythe de la conscience collective : 68. CALMEL (Roger-Thomas, O.P.) - Politique et vie intérieure : 26, 27, 28, 29 et 30. 144:100 - Deux déviations des chrétiens : 32. - Au sujet du mariage : 33. - Lecture du livre de Massis : 34. - Le sacerdoce et la mission ouvrière : 36. - Vrai et faux messianisme : 37. - Le Cœur de Marie et la paix du monde : 38. - Note doctrinale sur le messianisme : 39. - Propositions sur la lutte de Satan contre l'Église : 41. - L'enseignement pontifical dans la pensée et la vie des chrétiens : 42. - L'Église et l'ordre temporel : 43. - Apport et limite de l'Apocalypse dans une théologie de l'histoire du salut : 44. - Note doctrinale sur l'Enfer : 45. - Ni le jour ni l'heure : 46. - L'espérance chrétienne et les espérances humaines : 47. - Pour la fête de l'Immaculée-Conception : 48. - L'Ève de Péguy : 51. - Le pluralisme en matière d'éducation : 53. - Par Moïse vers Jésus-Christ : 55. - Note doctrinale sur le mystère du Christ-Roi : 56. - Le judaïsme du Coran : 57. - Le christianisme du Cardinal d'Espagne de Montherlant : 59 (notes critiques). - L'Église de Jésus-Christ et l'ordre temporel : 60 (voir aussi : tirés à part). - Littérature à l'emporte-pièce : 60 (notes critiques). - Première approche du teilhardisme : la distinction des trois ordres : 61 (notes critiques). - Dignité du Rosaire : 62. - Homme racheté ou phénomène extra-humain : examen critique des chapitres 1 et 5 de Construire la terre du P. Teilhard : 62 (notes critiques). - Note sur les rapports entre les clercs et les laïcs : 63. - Études sur Georges Bernanos : 63 (notes critiques). - Du véritable abandon : 64. - Note sur la morale évangélique : 65. - Les clercs et la civilisation chrétienne : 67. - La messe pour la revue : 68. - Note sur le progrès et sur l'histoire : 68. - Réflexions sur le malheur : 69. 145:100 - Une France de chrétienté : 70. - Réponse au teilhardisme : 71 (voir aussi : tirés à part). - Note sur la prière pour les ennemis : 71. - Racine et le sens de l'histoire : 72. - Révélation divine sur l'histoire humaine : 73. - Le culte du Saint-Sacrement : 73 (notes critiques). - Un livre sur Mgr Ghika : 74 (notes critiques). - Le langage mou : 75. - La contemplation des saints : 76. - Marie nouvelle Ève : 77. - Lumière du dogme : 78. - Petit lexique du nouveau langage religieux : 79 (notes critiques). - Les origines juives de l'Islam : 80. - A propos d'un livre de Journet : le sens du surnaturel en théologie : 80 (notes critiques). - De certaines situations tragiques : 81. - L'immuable nature humaine : 82. - Théologie de l'histoire : 83. - Maternité spirituelle de Marie et réalisme de notre combat : 86. - Résumé aide-mémoire d'un christianisme sans la foi : 87. - Évangélisme ambigu : 89 et 92. - Simples remarques sur la pastorale : 90. - Détournement de l'Écriture sainte : 93. - L'ordre surnaturel : 94. - Le mépris du monde : 95. - Le sophisme du sens de l'histoire : 95 (notes critiques). - La contemplation en régime chrétien : 97. - Pange lingua : 98. CHARLIER (André) - Jeanne d'Arc : 26 (documents). - Invention à deux voix : 32 (reproduit dans le numéro 54). - Lettre à Paul Claudel sur Péguy et la Sainte Vierge : 35. 146:100 - Que faut-il réformer : 37. - La musique grégorienne : 44 et 45. - L'éducation chrétienne en face du marxisme : 46. - En écoutant Clio : 67. - Lettre à Jean Madiran sur la civilisation chrétienne : 75. - Confession vespérale : 76. - Le juste vit de la foi (à propos de saint Pie X) : 87. - Aux moines de saint Benoît : 91. - Grégorien et spiritualité : 97 et 99. CHARLIER (Henri) - Voir : Présentation d'Henri Charlier (n° 16). - Le beau est une valeur morale indispensable à la société : 1. - La confusion du gouvernement et de l'administration : 2. - L'administration de l'enseignement : 3. - La barbarie autrefois et aujourd'hui : 4. - La patrie : 5. - Despotisme de l'administration : 6. - La réforme de l'enseignement : 7 et 8. - Conversation sur l'illustration des Missels : 9. - Naissance d'une nouvelle administration d'État : 11. - Les quatre causes (la raison de l'impuissance des intellectuels) : 12 et 15 (étude reprise dans son ouvrage : Culture, École, Métier, premier volume de la « Collection Itinéraires »). - Contre l'omnipotence des administrations d'État : 14. - Conversation sur plusieurs sujets diversement actuels : 17 et 18. - Naissance d'une corporation : 20. - Se réformer ou périr : 24. - Le fond de la question : le vote par ordre : 26. - L'Afrique et la France : 32. - Réponses à l'enquête sur la corporation : 32. - Quelques vues sur la réforme de l'enseignement supérieur : 34. - Vivante Afrique : 36. - Il fallait empêcher les enfants de jeter des bouquets dans l'éternité (sur l'œuvre d'Henri Pourrat) : 37. 147:100 - Réflexions de Claudel sur le problème social : 40. - Casse-cou : 42. - Du régime temporel : comment on supprime les ci­toyens : 46. - L'avenir de l'Algérie : non l'industrialisation, mais la réforme agraire : 47. - Les danses de Rameau : 48. - Ce que n'a pas dit le Rapport Armand-Rueff : 50. - Le Socrate d'Erik Satie : 53. - Hauts faits technocratiques : 62. - L'origine de la Querelle des Anciens et des Modernes : 64. - Naissance de la civilisation chrétienne : 67. - Aux jeunes Français : 74. - Nature de l'art et mission de l'art chrétien : 84. - L'œuvre de Notre-Dame au Mesnil-Saint-Loup : 85. - L'année Rameau : 87. - Recherche d'une doctrine de vie de Louis Bounoure : 92 (notes critiques). - L'homme et l'invisible de Jean Servier : 94. - Louis Bounoure : 98. CHESTERTON (G.-K.) - L'Occident, c'est la Chevalerie : 68. CLÉMENT (André) - Charles De Koninck : 66. CLÉMENT (Marcel) - Communisme et droit naturel : 1. - Déguisements et réalités de la science économique : 2. 148:100 Pie XII et le nationalisme : 3. - Le programme social de l'Église : 4. - La fête chrétienne du travail : 5. - Étapes vers le progressisme : 6. Pie XII et la vocation de la France : 7. - Les sciences sociales sont-elles des sciences morales : 8. - Les conditions de l'unité des catholiques de France : 9. - Conclusions de l'enquête sur le nationalisme : 10 (ces conclusions ont été largement développées et complétées dans l'ouvrage de Marcel Clément : Enquête sur le nationalisme, préface de Jean Madiran, Nouvelles Éditions Latines 1957). - Méditation sur l'unité : 11. Pie XII et le droit : 12. - Note sur le « faux réalisme » : 13. - Les sciences sociales sont des sciences morales : 14. Pie XII et le sens de l'histoire : 15. - Conception chrétienne de l'entreprise : 16. - Réforme des institutions et réforme des mœurs : 17, 18, 20, 21 et 22. - Les lois sociologiques et la loi naturelle : 23 et 24. - Le principe de subsidiarité : 25. - Quelques fausses lois sociologiques : 26. - Doctrine et prudence : 27. Pie XII : 29. - Prudence politique et prudence civique : 30. - Lénine et la stratégie révolutionnaire : 31. - A-t-on le droit de conditionner les masses : 32. - L'Église et la communauté des peuples : 34. - Emmanuel Mounier : 35 et 36. - L'analyse marxiste de l'économie : 37. - La consécration, acte social : 38. - La tentation des castes : paysans et citadins : 40. - Pour qui sonne le glas : 41. - Défense et illustration de l'exploitation paysanne : 42. - Le monde moderne est un monde qui a faim : 43. - Ce que l'on attend de la presse : 44. - Henri Massis ou la bienveillance : 49. - Réflexions sur la structure de Mater et Magistra : 57. - L'avenir de la civilisation : Mater et Magistra et le principe de subsidiarité : 64. - Charles De Koninck et les sciences sociales : 66. - L'avenir de la civilisation chrétienne : 67. - Un laïc attend du Concile : 69. 149:100 CLOUARD (Henri) - Qu'il est émouvant ce Massis : 49. COMES (Philippe de) - Un cinéma selon l'esprit : 85. - Où en est le cinéma : 99. CURVERS (Alexis) - Pie XII, le Pape outragé : 88. - Le lépreux de la frontière : 90. - Une prophétie de Jean XXIII : 92. - Jean XXIII avait dénoncé le complot contre Pie XII : 93. - Pie XII et la Passion : 95. - Pie XII et les faux témoins : 97, 98 et 99. - Lettre ouverte à M. Marc Oraison : 99 (éditorial). DAGUET (Dominique) - Images d'Algérie : 72, 73 et 74. - L'aile patiente de la mort : 78. - Nous avions seize ans et c'était Dien-Bien-Phu : 79. - Demain, Saint-Exupéry : 80. - Notes sur la science : 82. - Une politique de protection de la nature : 84. - Jeanne et notre France : 85. - Claudel ou la note la plus élevée : 87. - Le Centre culturel de Cluny : 93. DARK (Raymond a) - Réponse à l'enquête sur Teilhard et la science : 96. 150:100 DAUPHIN-MEUNIER (Achille) - L'Église et l'organisation professionnelle : 31. - La planification et Mater et Magistra : 68. - Le livre de Marcel Clément sur Le Travail : 72. - L'Église et l'intervention de l'État : 78. DEBIDOUR (V.-H.) - Le patriotisme et la paix : 5. DEBRAY (Pierre) - Réponse à l'enquête sur la corporation : 12. DE CORTE (Marcel) - De l'influence de la civilisation actuelle sur le catholi­cisme : 3. - Grandeur de la contemplation : 5. - L'ordre corporatif et les obstacles qu'il rencontre : 11. - A propos du Jésus de Jean Guitton : 13. - Note sur l'anti-cléricalisme des catholiques : 34. - Réflexions sur l'œuvre morale et politique de Charles De Koninck : 66. - La crise des élites : 71. - Philosophie du bonheur : 76. - Sens commun, métaphysique et théologie : 86. - Considérations très actuelles sur la vie, le caractère et la pensée de saint Pie X : 87. - La religion teilhardienne : 91. - Diagnostic du progressisme : 99. 151:100 DE KONINCK (Charles) - Voir le numéro spécial sur Charles De Koninck (numéro 66). - Lourdes et la foi catholique : 27. - Le scandale de la médiation : 29. - La noblesse de l'amitié divine envers le genre humain : 30. - Un mot pour nos frères éloignés : 35. - L'être principal de l'homme est de penser : 66. - Le cosmos comme tendance vers la pensée : 66. - Sur la tolérance : la bénignité du chrétien : 66. - Liberté de conscience et droit naturel : 66. Charles De Koninck est mort le 15 février 1965. DEJAIFVE (Georges, S.J.) - Au sujet du dialogue : 63. DELSOL (Michel) - L'évolution biologique : 96. DINFREVILLE (Jacques) - Candie, le siège le plus long de l'histoire : 88. - Le général Weygand : 93. - La révolution dans un village normand : 98 et 99. DRAGUN (Théodore, OP.) - Vie et mort du Cardinal Stepinac : 42. 152:100 DUBREUIL (Hyacinthe) - Évolution du syndicalisme : 6. - L'imposture paie : 7. - Pour le dossier du corporatisme : 15. - Le témoignage des deux frères : 20. - La question sociale n'est pas économique : 35. - Une croisade de vérité : 37. - Sur l'indifférence : 48. - L' « ouvrier », cet inconnu : 60. - La pendule à Salomon : 62. DUC (Daniel) - L'eau de Paris : 98. DUFOUR (Jean-Marc) - Ce que l'on entend au Mexique : 88. - Ce que l'on entend en Colombie : 89. - Images d'Amérique du sud : 91. - Images du Venezuela : 93. DUMOULIN (Georges) - Retour aux vérités premières : 6, 7, 9, 10 et 11. - Lumières sur l'autre monde : 13. - En présence du monde actuel : 14. - L'exemple doit venir d'en haut : 22. - Réponse à l'enquête sur la corporation : 23 et 24. - La scission de 1921 et l'avenir du syndicalisme : 27. - Les métiers lourds : 34. - Une croisade de vérité : 37. - L'âge de la sagesse : 42. 153:100 - Paul Faure : 50. - Réflexions sur la C.F.T.C. : 60. Georges Dumoulin est mort le 30 mai 1963. DUPONT (Fabricius) - Ce bon vieux nationalisme : 6. EGRET (Antoine) - Hommage à la Hongrie : 9. - Massis serviteur et maître : 49. FABRÈGUES (Jean de) - Lettre à Jean Madiran : 3. - Massis ou l'amour de la vérité : 49. FARGUE (Max de la) - Mon dernier tête-à-tête avec le P. de Foucauld : 52. FOUCAULD (Charles de) - Lettre inédite : 40. FOUSSET (René) - La maison familiale : 98. 154:100 FRANCHET (Claude) - Chronique sociale d'un temps passé : 51. - La fille du maître d'école : 61, 63, 65, 68, 70, 73, 77, 78 et 79. - Tourneloup et Grisloup, conte champenois : 84. FRÉNAUD (Georges, O.S.B.) - La doctrine mariale du P. Garrigou-Lagrange : 86. FROSSARD (André) - Le nationalisme intégral : 5. - Pour le Musée de l'Homme : 52. GAGNEBET (Marie-Rosaire, O.P.) - La collégialité de l'épiscopat d'après la Constitution dogmatique Lumen Gentium : 92. GARRIGOU-LAGRANGE (P.-Réginald, O.P.) - Où va la nouvelle théologie : 82. - Réflexions sur l'Action catholique : 82. Le P. Garrigou-Lagrange est mort le 15 février 1964. Bibliographie complète de son œuvre dans notre numéro 86. 155:100 GASNIER (O.P.) - Un officier français : le capitaine de Cathelineau (1921-1957) : 47. GAYLORD SIMPSON (George) - Réponse à l'enquête sur Teilhard et la science : 96. GILLOUIN (René) - Lettre à Jean Madiran : 8. GOUSSEAU (François) - Saint Pie X et la Séparation : 87. HOLSTEIN (Henri, S.J.) - Lettre à Jean Madiran : 51. HOURS (Joseph) - Massis en notre temps : 49. - Histoire et marxisme : 56. - La conscience chrétienne devant l'Islam : 60 et 65 (voir aussi : tirés à part). - Nation, État, civilisation : 67. - Christianisme et Islam : 69. 156:100 - Le sang d'Alger : 73. - Note pour servir à l'histoire du catholicisme en Chine : 73. Joseph Hours est mort le 17 mars 1963. JEAN DE LA CROIX (saint) - Trois poèmes : 76. JOINVILLE (Jean de, sénéchal de Champagne) - Histoire de saint Louis : 70, 71, 73, 74, 75, 77, 78 et 80. JUGNET (Louis) - Face au modernisme : 86. - Comment combattre une hérésie : 87. JUIN (Alphonse, maréchal, de l'Académie française) - Ce qui m'a toujours plu chez Henri Massis : 49. LABRIE (Robert) - La primauté du bien commun et le personnalisme chez Charles De Koninck : 66. 157:100 LAFFLY (Georges) - L'économie de l'Algérie depuis Evian : 94. - Pieds-Noirs sans l'Algérie : 95. - Comme des dieux : 99. LAURENT (Claude) - Livres pour enfants : 98 et 99. LAVAUD (M.-Benoît, O.P.) - Le Père Garrigou-Lagrange : 86. LAZITCH (Branko) - La nouvelle Histoire du P.C.U.S. : 55. - Mao se prend pour Lénine : 71. - Les changements dans la société soviétique : 72. LEFEBVRE (Marcel, Mgr) - Lettre à Jean Ousset : 62 (documents). - Faisons le point sur le Concile : 81. - Saint Pie X et la « mise à jour » : 87. - Perspectives conciliaires : 95. LEJONNE (Benjamin). - Réponse à l'enquête sur le nationalisme : 7. - Saint Joseph artisan : 42. 158:100 LESTRA (Antoine) - Le P. Chevrier et les prêtres du Prado : 51. - La thèse du P. Maton sur Blanc de Saint-Bonnet : 55. - La vie et le message de Mme Royer : 60 (notes critiques). - Alger 1830-1962 : 65. - Antoine Lestra est mort en 1963. LIZOTTE (Aline) - Charles De Koninck et la méthodologie scientifique : 66. LOISEAU (Jean) - Prêtres perdus d'Algérie : 91. LOUAN (Pierre) - Saint Pie X et la musique sacrée : 87. LOUIS (Eugène) - Pacem in terris, Teilhard et l'évolution des principes : 79. - Ma grâce te suffit : 80. - De la pêche à la ligne à la pêche au filet : 82. - La régulation des naissances : 86. - Calomnie et médisance : 94. 159:100 LOYER (Pierre) - La division des catholiques français devant les enseignements pontificaux en matière sociale : 9. MADIRAN (Jean) - Contre le désordre établi, pour un anti-communisme méthodique : 1. - Dieu censuré : 2. - Le P. Bigo et le progressisme : 2. - Le « positif » et le « négatif » : 4. - Déclaration de paix : 5. - Le communisme sous la toise : 6. - Un peuple martyr témoigne contre le mensonge des docteurs : 8. - Lettre à Jean de Fabrègues sur la division des catholiques : 9. - Entre le Pape et les Français, un amas de papier : 12. - Un pamphlet signé Dansette : 13 et 15. - Un sed contra pour Marcel Clément : 14. - Réponse à l'enquête sur la corporation : 17. - La France blessée par ses fils : 21. - Le triple refus qui est à droite : 22 et 23. - Parenthèse sur l'imposture syndicale : 22. - La communauté catholique dans la nation française : 25. - La démocratie chrétienne en mouvement : 26. - Conditionnement à la non-résistance : 33. - Les libertés de l'enseignement : 34. - Lecture des 18 premiers paragraphes de l'Encyclique Divini Redemptoris : 35, 44 et 45. - La Royauté de Marie et la consécration à son Cœur Immaculé : 38. - L'Encyclique Divini Redemptoris : Pourquoi et comment : 41. - Lettre à Jean Ousset : 42 (voir aussi : tirés à part). - Le progressisme installé et le monde qui vient : 43. 160:100 - Un témoignage chrétien : le philosophe Gilson et la théologie : 44. - Pages de journal (4 novembre 1960-8 janvier 1961) : 50. - En ce même jour ils devinrent amis : 54. - Actualités : 55. - Dissocier le spirituel du totalitaire : 56. - Note sémantique sur la socialisation et sur quelques autres vocables de Mater et Magistra : 59 (voir aussi : tirés à part). - De licentia edendi : 60. - La Cité catholique aujourd'hui : 61 (sur le même sujet voir aussi : tirés à part). - Réflexions impolitiques : 63. - La cause pratique de l'incompréhension réciproque : 64. - Le P. Liégé ou le contraire du dialogue : 64. - Un univers sans personne : 66. - La civilisation dans la perspective de la piété : 67 (il existe un tiré à part hors commerce de cet article : écrire à Jean Madiran pour le demander). - Notre désaccord sur l'Algérie et la marche du monde : 67. - Lettre à Henri Fesquet sur la pensée dans l'histoire et le mensonge dans la société ecclésiastique : 67. - Le Syllabus et la civilisation moderne : 70 (voir aussi : suppléments et tirés à part). - Un livre : 72. - Lettre à un ami : 73. - Sur l'Encyclique Pacem in terris : 74. - Mort d'un activiste : 74. - Jean XXIII, le Pape de l'agonie : 75. - Structures et techniques des sociétés de pensée dans le catholicisme : 79 (voir aussi : suppléments et tirés à part). - Brasillach dit par Pierre Fresnay : 80 (notes critiques). - La société secrète des modernistes : 82. - Dialogue avec l'abbé Haubtmann autour de Mater et Magistra et du latin : 83. - Aux curés de Nantes : 85. - Les Chiens : 89 (voir aussi : suppléments et tirés à part). 161:100 - Jean Guitton et le dialogue : 91 (notes critiques). - L'appel aux évêques de France : 92 (voir aussi : suppléments et tirés à part). - Le Jésuite Robert Bosc contre Pie XII : 92. - Un schisme pour décembre : 95. - Perplexités sur le Monde enseignant et l'Église enseignée : 97. - Un plan universel : 98. MAINX (Félix) - Réponse à l'enquête sur Teilhard et la science : 96. MARCEL (Gabriel) - Lettre à Jean Madiran sur l'appel aux évêques : 94. MARTIN(Marie-Madeleine) - Le nationalisme et l'histoire de France : 8. MASSAULT(Henri) - Les origines du mercantilisme à Lourdes : 85, 87 et 90. - Anomalies et omissions dans l'histoire de Lourdes : 92, 93, 95 et 96. - Une lettre de l'abbé Laurentin : 98. MASSIS (Henri, de l'Académie française) - La question qui agite le monde est de l'homme à Dieu : 2. 162:100 - Lettre à Jean Madiran sur le nationalisme : 5. - Le crépuscule de Renan : 18. - Pascal, apôtre des temps modernes : 19. - Apologie pour Bossuet : 21 et 22. - Jeanne d'Arc et les Anglais : 33. - Du Pape : 49. - Du « canon rayé » à la bombe atomique : 60. - Maurras et la souffrance du monde : 61. - Barrès et le mal de la jeunesse : 63. - Lettre pour André Charlier : 89. - Gustave Thibon : 90. MAURRAS (Charles, de l'Académie française) - Lettre inédite : 5. McINERNY (Ralph) - Charles De Koninck, un philosophe de l'ordre : 66. MECK (Henri) - Nous resterons syndicalistes chrétiens : 85. MINIMUS (D.) - La liberté et la prière : 1. - Mémoire de la Croix : 2. - La Sainte Trinité : 3. - Le Sacré-Cœur : 4. - Au fil des jours : 5. - L'Encyclique sur le Sacré-Cœur : 6. - Rachetez le temps : 7 et 8. - Le Christ-Roi : 9. 163:100 - L'attente avec Marie : 10. - Entre Noël et la Passion : 11. - Saint Joseph artisan : 12 (reproduit dans le n° 32). - Qualis est hic : 13. - La Sainte Vierge et le Saint-Esprit : 14. - La Visitation : 15. - Avec Marie : 16. - Mourons avec lui : 17. - Et toi, m'obéis-tu : 18. - Le temps de Noël : 19. - Toute petite, j'ai plu au Très-Haut : 20. - Le Carême : 21. - « Ce grand jour » : 22. - Les vignerons homicides : 23. - « Demeure avec nous car la soirée s'avance » : 24. - Le P. Emmanuel et la paroisse du Mesnil-Saint-Loup : 26 et 27. - L'Apparition de la T. S. Vierge à Pontmain : 29 et 30. - Mystères : 31. - Spiritualité : 33 et 34. - La Transfiguration : 35. - Méditation sur le Curé d'Ars : 36. - Le Cœur Immaculé de Marie : 38. - A l'image de l'Enfant Jésus : 391 et 40. - L'Espérance : 41. - La Grande Semaine : 42. - Sainte Jeanne d'Arc : 43. - Après et avant : 44. - L'économe infidèle : 45. - Les saints anges : 46. - Ô Mort, où est ta victoire : 47. - L'Attente du monde : 48. - La Purification : 50. - Grâces de l'Incarnation : 51. - De la terre au ciel : 52. - Le Défenseur des chrétiens : 53. - Veni Sancte Spiritus : 54. - Avec Marie : 55. - Le Concile et la Semaine de l'Unité : 59. - A la suite de l'Enfant-Jésus : 60. - De l'Enfant-Jésus à la Sainte Face : 61. - Clair de lune : 62. - L'épreuve de la Foi : 64. - Marie à la fontaine : 65. 164:100 - Mémoire du curé d'Ars : 67. - Sur les traces de Marie et de Jésus : 68. - Épiphanie et vie cachée : 69. - La Paix du Christ aujourd'hui : 70. - Le Sang du Christ : 71. - La Résurrection : 72. - Le temps et l'éternité : 74. - En haut les cœurs : 75. - Ora et labora : 76. - L'ingratitude des chrétiens : 78, 79 et 80. - Ô femmes chrétiennes : 81. - L'Annonciation : 82. - L'Ascension : 83. - Le temps d'après la Pentecôte : 84. - L'Assomption : 85. - O Beata Trinitas : 87. - L'éternité est là : 89. - Marie : 90. - La voix de Marie : 91. - Le Carême : 92. - Au temps pascal : 93. - La Fête-Dieu : 94. - La Vierge Marie et saint Joseph : 95. - Marie Mère de l'Église : 97. - Notre Père : 98 et 99. MOLNAR (Thomas) - Le catholicisme aux USA. : 62. - Pas de civilisation désacralisée : 67. - La pensée utopique dans le catholicisme américain : 73. - Méthodes américaines d'enseignement : 78. - Les mouvements d'idées en Afrique : 84. - Impasses et avenir en Asie : 85. - Après l'échec des « conservateurs » américains : 89. - L'Europe vue par les Américains : 90. - Les intellectuels américains : 93. - La paix sur la terre : tour du monde dans un univers parvenu à l'âge du progrès : 94. - Intellectuels américains contre Johnson : 97. - Aspects du mouvement « conservateur » américain : 98. - Aggiornamento catholique aux USA. : 99. 165:100 MONESTIER (André) - Dialogue sur Teilhard : 77. MONLÉON (Jean de, O.S.B.) - Préface au livre de Jonas : 62. - Révélation, traditions et Tradition : 85. - Suite à Jonas : 90. MOREAU (Abel) - « Sermon de Noël » : 88. MORVAN (Jean-Baptiste) - La seule passion, toujours fidèle : 60. - La haie vive : 61. - Le relais de poste : 62. - Le vaisseau de saint Paul : 63. - La grande Truanderie : 64. - Objets inanimés : 65. - Quatrième dimension de la lecture : 67. - Le Fils de l'Homme : 68. - Le diapré : 69. - Tourisme chrétien : 70. - Celui qui n'a point : 71. - Histoire et générations : 72. - Église, intellectuels et hiérarchie : 74. - Autour du prétoire : 75. - Ce monde parfait : 77. - « Une religion pour le peuple » : 78. - Les chemins de Cocagne : 79. 166:100 - Pauvreté et fausses richesses du langage : 80. - La « force des choses » et la minute de vérité : 81. - L'art abstrait : 82. - En marge de Platon : 83. - Le fer à cheval : 84. - Trois pièces de Jacques Perret : 84 (notes critiques). - Géographies littéraires : 85. - Commentaires sur la guerre de quatorze : 86. - La pastorale du sommeil : 87. - La coutume et la loi : 88. - Pour le Jour de l'An : 89. - L'équivoque de Spartacus : 90. - Ombres et lumières de l'ennui : 92. - Les hommes de bonne volonté : 93. - La Fête des Tabernacles : 94. - Attiques et Arcadies : 95. - Pour la Toussaint : 97. - Le bon sauvage : 98. - Ces clubs très fermés : 99. NAU (Paul, O.S.B.) - Saint Pie X promoteur et guide de l'Action catholique : 87. NIAUSSAT (Pierre) - Réponse à l'enquête sur Teilhard et la science : 96. OTTAVIANI (A., cardinal) - La foi et la patrie : 73 (documents). - Méditation : 82. 167:100 OUSSET (Jean) - Réponse à l'enquête sur la corporation : 12. - Massis ou l'honneur de servir : 49. - Un certain silence : 67. - Voici pourquoi ils n'aiment pas saint Pie X : 87. - Lettre au rédacteur en chef du « Nouveau Candide » : 99 (documents). PALANTE (Alain) - Massis ou l'aventure de la fidélité : 49. PAULHAN (Jean) - Réponse à l'enquête sur le nationalisme : 6. PÉRAUD-CHAILLOT (Paul) - Deux messages de Paul VI sur saint Thomas et sur les études théologiques : 83. - Saint Pie X et les prêtres : 87. - Paul VI parle de la vie religieuse : 87. - L'Institut pontifical de haute latinité : 93. - Théologie et psychologie de la foi : 94. - Le thomisme vivant : 94 (notes critiques). - Chronique dominicaine : 97. - Comme s'il voyait l'invisible (livre du P. Loew) : 97 (notes critiques). - Trois lettres sur l'Eucharistie : 98. - Chronique dominicaine : le chapitre de Bogota : 99. - Jean de Saint-Thomas : 99 (notes critiques). 168:100 PEREGRINUS (pseudonyme collectif ; cf. n° 68, p. 28) - Correspondance romaine : 68, 69, 70, 72, 74 et 75. - A propos de l'Orthodoxie russe : 77. - Le point de convergence et le néo-vétéranisme : 78. - Le mouvement « Pax » en Pologne, en France et autour du Concile : 79. - Le scandale de Paris : 81, 82 et 83 (voir aussi : suppléments et tirés à part). - Le Concile et l'opinion (1962-1964) : 82. - L'imposture Nicodème : 84. - Anomalies « liturgiques » : 85. - Un livre du P. Dubarle : 87 (notes critiques). - La revendication dans l'Église : 89 (voir aussi : suppléments et tirés à part). - Collégialité : la lettre des Cardinaux : 90. - La mécanique en marche : 93. - Garaudy à Louvain : 95 (notes critiques). PERRET (Jacques) - Pas d'épée pour saint Michel : 2. POITEVIN (Raymond le) - Les deux formes de l'apprentissage : 30. POURRAT (Henri) - Le conte de saint Pierre mangeant le pain, faisant le blé : 1. 169:100 - A la source : 3. - Le conte de l'Annette : 5. - Le conte du fondeur de vieilles : 8. - L'inscription : 11. - Le conte du bel oncle : 13. - Les pouvoirs de l'homme : 15. - Réponse à l'enquête sur la corporation : 20. Henri Pourrai est mort dans la nuit du 16 au 17 juillet 1969. QUONIAM (Théodore) - Une réponse mystique à Renan : 88. RAMBAUD (Henri) - Nationalisme et « nationalisme intégral » : 8. - Massis en face d'André Gide : 49. - L'étrange foi du P. Teilhard : 91. - Correspondance avec Mgr X au sujet de Teilhard : 97. RAYMOND (André) - Réponse à l'enquête sur Teilhard et la science : 91. RICHARD (André, Abbé) - L'image merveilleuse du peuple : 38. ROSTAND (Jean, de l'Académie française) - Le secret de l'évolution : 96. 170:100 SAINT-JACQUES (Alphonse) - La primauté du bien commun et le personnalisme chez Charles De Koninck : 66. SAINT-PIERRE (François) - La co-gestion immobilière : 63. - La communauté des acquêts : 65. - Déifier ou diviniser l'amour : 74. - Grossir Paris ou aménager le territoire : 86. SAINT-PIERRE (Michel de) - Nouveaux prêtres : 88. - A nos évêques : 91. - Sainte Colère : 95. SALAZAR (Antonio de Oliveira) - Discours du 12 août 1963, texte intégral : 77 (documents). SALLERON (Louis) - En lisant Le Phénomène humain du P. Teilhard de Chardin : 1. - Post-scriptum sur le P. Teilhard de Chardin : 3. - Lettre à Jean Madiran : 4. - Lettre à Jean Madiran sur le P. Bigo : 8. - L'appel de nos frères de l'Est : 9. - Marxisme et humanisme : 10. - La pensée de Marx selon le P. Calvez : 12. - Le travail et l'argent : 16. 171:100 - Réponse à l'enquête sur la corporation : 19. - Parenthèse sur le P. Teilhard de Chardin : 26. - Faut-il ouvrir les lettres des pensionnaires : 29 et 31. - Église et société économique : 39. - Fidélité et vérité : 49. - Les Noces de Cana : 53. - L'Actualité historique du P. Fessard : 55. - Textes sur la réforme de la propriété capitaliste : 57. - La propriété et Mater et Magistra : 59. - La participation des salariés à la propriété du capital des entreprises : 60. - La diffusion de la propriété en Allemagne : 61. - Le latin, langue vivante de l'Église : 63. - Subsidiarité et propriété : 64. - La pensée religieuse du P. Teilhard de Chardin par Henri de Lubac : 64 (notes critiques). - Sur la civilisation chrétienne : 67. - L'Opinion publique, tentation moderne du christianisme : 68. - Encore Teilhard : le livre de J. Onimus : 73. - La « socialisation », pivot de l'ouverture à gauche : 73 (documents). - Sur un livre de M. Bloch-Lainé : 75. - Bossuet lecteur de Teilhard (conte) : 75. - La gratuité dans l'activité économique : 76. - Dialogue sur Teilhard : 77. - Léviathan banquier : 78. - Le P. Calvez et la propriété : 78 (notes critiques). - Problèmes de l'aggiornamento : 79. - Trois études sur les S.A.F.E.R. : 79 (documents). - De l'arianisme à Teilhard et à Robinson pour la seconde fois le monde va-t-il se réveiller arien : 80. - De la philosophie chrétienne à l'économie chrétienne : 81. - Jacques Ellul et la présence au monde : 82 (notes critiques). - Les deux œcuménismes : 83. - Un christianisme pour l'homme adulte : 85. - La lettre sur le Sillon a-t-elle encore un sens : 87. - La doctrine sociale du P. Bigo : 92 (notes critiques). 172:100 - La propriété, fondement du pouvoir dans l'entreprise : 93. - Le « socialisme » de Jean Fourastié : 94 (notes critiques). - Le livre et la personne de Dom Aubourg : 95 (documents). - Les idées d'Adolf A. Berle sur la propriété : 97 (notes critiques). - Voyage en Espagne : 98. - La participation dans l'entreprise : 99. - La fin du Concile : 99 (docu­ments). SAMBRÈS (Francis) - Lettre sur divers propos et le métier de menuisier : 24. - Seconde lettre géorgique : 29. - Troisième lettre géorgique : 32. - Plaidoyer pour la géographie : 39. - La dépopulation rurale : 43. - De l'homme à Dieu : 49. SAUGE (Georges) - Tactique et stratégie : 23. SÉNART (Philippe) - Pas sérieux s'abstenir : 49. SÉRANT (Paul) - Réponse à l'enquête sur le nationalisme : 6. 173:100 - Lettre à Jean Madiran : 8. - Christianisme et Islam : 69. SIRI (Giuseppe, cardinal) - Les responsabilités morales de la science : 78. TESTIS - Vie et mort de Dziêm : 79. THÉROL (Joseph) - Menacés de tout perdre, allons à sainte Jeanne d'Arc : 3. - Pour un rosaire de sainte Jeanne d'Arc : 13. - Le Rosaire, prière et pénitence : 38. - Un livre sur Mgr Ghika : 74 (notes critiques). - Un amour vivant : 82. - Merci, mon général : 93. - Le Père Planchat : 95. THIBON (Gustave) - Sens et non-sens de l'historicisme : 5. - Réponse à l'enquête sur le nationalisme : 8. - Propos sur les mœurs : 33. - Les idoles et l'idolâtrie : 86. TISSOT (Michel) - L'Inde, pays sous-développé : 43. - Problèmes posés par le sous-développement : 53. 174:100 - Le mensonge mondial de la limitation des naissances : 60. - La planification des naissances : 63. - L'Inde que j'ai vue : 65. - Qui était Gandhi : 69. - L'hindouisme et sa mystique : 75. - La prévention des naissances : 80. TROUBNIKOFF (Alexandre, archiprêtre orthodoxe) - L'Église orthodoxe russe hors frontières : 75. - Les chrétiens en URSS. : 81. - La foi en URSS. : 90. VACCARI (Vittorio) - Une nouvelle philosophie pour l'économie occidentale : 59. - L'entreprise et l'individu atypique : 79. VALLAT (Xavier) - Réponse à l'enquête sur la corporation : 12. VAUTHRIN (Jacques, abbé) - L'intellectualisme théologique contre saint Joseph : 72. VIER (Jacques) - Henri Massis et Marcel Proust : 49. 175:100 La philosophie du XVIII^e^ siècle et la réforme de l'Église : 95. VIVIER (Michel) - Harmonies chrétiennes du nationalisme : 5. - Le corporatisme dans la presse royaliste au XIX^e^ siècle : 14. WEYGAND (Maxime, général, de l'Académie française) - A notre époque de doute : 49. 176:100 ### Index chronologique des documents pontificaux La fonction de la revue « Itinéraires » n'est aucunement de publier les documents pontificaux. Cette publication est assurée en France, au fur et à mesure de leur parution, par des périodiques spécialisés tels que les « Nouvelles de Chrétienté » et la « Documentation catholique ». Leur édition en volume fut longtemps assurée par la. « Bonne Presse », qui publiait méthodiquement, année par année, les Actes pontificaux, texte latin et traduction française. Cette collection n'est complète que jusqu'à Pie XI (inclusivement) ; elle est très incomplète et ne semble pas devoir être complétée pour Pie XII, elle est à peine ébauchée et apparemment abandonnée pour Jean XXIII. Les volumes épuisés de Léon XIII de saint Pie X, de Benoît XV, de Pie XI ne sont pas réimprimés. Il existe une publication complète, en langue française, des « Documents pontificaux de S.S. Pie XII » : les vingt volumes des Éditions Saint-Augustin (à Saint-Maurice, Suisse). Un certain nombre de documente pontificaux anciens ou récents se trouvent au « Club du Livre civique » (49, rue des Renaudes, Paris XVII^e^) : c'est à notre connaissance le seul endroit où l'on puisse désormais se procurer une édition française de « Quanta cura. », de « Sapientiae christianae », de « Libertas », d' « Humanum genus », de « Pascendi », de « Quas primas », etc. Enfin l'on connaît la collection des « Enseignements pontificaux » groupés selon les matières par les Bénédictins de So­lesmes et publiés chez Desclée et Cie (en cours de publica­tion ; 15 volume parus). \*\*\* 177:100 Bien que, donc, la publication des documents pontificaux ne soit pas notre fonction, il nous est arrivé fréquemment de publier, soit partiellement, soit intégralement, certains documents pontificaux plus difficiles à trouver, ou concernant plus directement nos préoccupations et nos travaux. Comme il est de toutes façons malaisé -- et souvent coûteux -- de se procurer ces documents, le lecteur trouvera ici un répertoire de ceux qui figurent dans l'un des 100 numéros parus de la revue. La présence ou l'absence des divers textes pontificaux dans la collection de la revue est purement accidentelle et n'a aucune signification particulière, logique ou méthodique. Il ne s'agit pas ici d'un répertoire des « citations » plus ou moins longues faites au cours des diverses études publiées par la revue, mais seulement des documents pontificaux dont nous avons reproduit le texte intégral ou d'importants passages suivis (nous indiquons ci-dessous le cas où il s'agit du texte intégral). Cet index est « chronologique » non par rapport à la date de parution dans la revue, mais par rapport à la date des documents eux-mêmes, ce qui permet au lecteur de s'assurer du premier coup d'œil si un document qu'il recherche figure dans la collection de la revue. Léon XIII 8 septembre 1893 - Encyclique *Laetitiae sanctae*. Nouvelle traduction française intégrale du texte latin. Le Rosaire comme source des remèdes aux maux qui menacent la société moderne : 38. 178:100 8 septembre 1895 - Encyclique *Jucunda semper*. Sur les mystères du Rosaire : 38. Saint Pie X 11 juin 1905 - Encyclique *Il fermo proposito*. Passage sur la civilisation chrétienne : 67. 25 août 1910 - Lettre *Notre charge apostolique*. Extrait sur la civilisation chrétienne : 67. 1^er^ septembre 1910 - *Motu proprio*. Extrait sur la société secrète des modernistes : 62 (pages 73 et 74). 29 novembre 1911 - Allocution consistoriale. Extrait : prophétie sur le retour de la France à sa vocation chrétienne : 25. 27 mai 1914 - Allocution aux nouveaux Cardinaux. Dernier discours public de saint Pie X. Extrait : 62 (pages 75 et 76). Benoît XV 27 mai 1917 - Constitution apostolique *Providentissima Mater Ecclesiae *: 87 (pp. 196 sq.). 179:100 Pie XI 20 décembre 1928 - Constitution apostolique *Divini cultus*. Passage sur Pie X : 87 (p. 198). 10 juillet 1936 - Lettre du Cardinal Pacelli, secrétaire d'État, il la Semaine sociale de Versailles. Extrait sur la culture et la civilisation : 67. 19 mars 1937 - Encyclique *Divini Redemptoris* sur le communisme athée. Première traduction française intégrale du texte latin : 41. Cette traduction, réalisée par Jean Madiran (et revêtue de l'*imprimatur*) est éditée en volume aux Nouvelles Éditions Latines Pie XII 19 août 1939 - Discours pour le 25^e^ anniversaire de la mort de Pie X. Texte intégral : 87 (pp. 199 sq.). 16 octobre 1940 - Discours aux époux chrétiens sur le Rosaire dans la famille. Texte intégral : 38. 30 septembre 1943 - Encyclique *Divino afflante*. Passage sur Pie X et les études bibliques : 87 (p. 204). 1^er^ septembre 1944 - Message au monde entier sur la civilisation chrétienne : 67. 180:100 13 mai 1946 - Message sur la Royauté de Marie : 38. 16 mai 1947 - Discours pour la canonisation de Nicolas de Flüe. Passage sur le Moyen-Age et la civilisation catholique : 67. 27 septembre 1948 - Constitution apostolique *Bis saeculari* sur les Congrégations mariales et l'Action catholique : 38. 18 février 1950 - Discours sur l'opinion publique. Texte intégral : 71. 3 juin 1951 - Discours pour la béatification de Pie X. Texte intégral : 87. Noël 1951 - Message de Noël. Texte intégral : 41. 29 mai 1954 - Discours pour la canonisation de saint Pie X. Texte intégral : 87. 26 juillet 1954 - Message pour la consécration de la Bretagne au Cœur Imma­culé de Marie : 38. 5 septembre 1954 - Message au Congrès marial de Belgique : 38. Noël 1954 - Message de Noël. Texte intégral : 41. 181:100 31 janvier 1955 - Lettre au P. Garrigou-Lagrange. Texte intégral : 86. 10 novembre 1956 - Message aux peuples et aux hommes du monde entier : sur la liberté et la paix. Texte intégral : 9. 23 décembre 1956 - Message de Noël. Extrait sur le problème moderne de la civilisation : 67. 31 décembre 1956 - Allocution aux instituteurs catholiques : 11. 28 mars 1957 - Discours sur la politique chrétienne et l'Europe unie : 14. 25 avril 1957 - Discours sur les intellectuels catholiques dans la communauté mondiale en formation : 15. 13 juin 1957 - Discours sur l'Europe. Texte intégral : 16. 2 juillet 1957 - Encyclique *Le Pèlerinage à Lourdes*. Texte intégral : 20. 4 novembre 1957 - Discours aux parlementaires de la C.E.C.A. Texte intégral : 19. 3 décembre 1957 - Discours au Conseil des communes d'Europe. Texte intégral : 21. 182:100 14 janvier 1958 - Discours à l'Angelicum sur saint Thomas d'Aquin. Texte intégral : 22. 20 janvier 1958 - Discours aux familles nombreuses. Texte intégral : 23. 23 mars 1958 - Discours sur la région, la patrie et l'Église, et sur la *saine laïcité *: 24. 22 septembre 1958 - Discours aux philosophes. Texte intégral : 29. 23 septembre 1958 - Discours à des Recteurs de Grands Séminaires. Extrait : *le prêtre devant les problèmes sociaux *: 39. Jean XXIII Noël 1958 - Message de Noël. Texte intégral : 30. 25 janvier 1959 - Discours annonçant le Concile : 34. 21 avril 1959 - Exhortation au clergé à propos de saint Pie X. Texte intégral : 87 (pp. 209 sq.). 10 mai 1959 - Message sur saint Pie X. Texte intégral : 87 (pp. 215 sq.). 183:100 11 mai 1959 - Discours d'hommage à saint Pie X et à saint Jean Bosco : 87 (pp. 217 sq.). 21 septembre 1959 - Encyclique *Grata recordatio* sur l'importance du Rosaire. Texte intégral : 38. Noël 1959 - Message de Noël. Texte intégral : 41. 19 février 1960 - Message à la France. Texte intégral : 42. 15 mai 1961 - Discours-préface à la nouvelle Encyclique sociale. Texte intégral : 42. - Encyclique *Mater et M*agistra. Extraits sur le problème de la civilisation moderne : 67. 22 février 1962 - Constitution apostolique *Veterum sapientia* sur le latin. Texte intégral : 63. Paul VI 18 février 1964 - Message pour la mort du P. Garrigou-Lagrange. Texte intégral : 82 (p. 127). 22 février 1964 - *Motu proprio* sur les études latines. Texte intégral : 83. 184:100 7 mars 1964 - Message au Maître général des Dominicains au sujet de saint Thomas d'Aquin. Texte intégral : 83 (pp. 79 sq.). 13 mars 1964 - Discours à l'Université grégorienne. Texte intégral : 83 (pp. 82 sq.). 23 mai 1964 - Discours sur la vie religieuse. Texte intégral : 87 (pp, 310 sq.). 30 juin 1965 - Lettre au Chapitre dominicain de Bogota. Texte intégral : 99 (pp. 89 sq.). 185:100 ### Table des numéros spéciaux L'unité catholique\ 9‑01/57. La communauté catholique\ dans la nation française\ 25‑07/58. 186:100 Déclaration fondamentale\ de la revue « Itinéraires »\ 28‑12/58 La Royauté de Marie\ et la consécration à son Cœur Immaculé\ 38‑12/59. Voici le communisme\ 41‑03/60. Sous-développement\ et ordre temporel chrétien\ 43‑05/60. 187:100 Henri Massis \ 49‑01/61. 256 pages. 8 F franco. Une chronologie biographique sur Henri Massis de 60 pages. Un inédit d'Henri Massis : « Du Pape ». Documents : Fragments du Journal de Psichari. Correspondances avec le P. Janvier, le P. Clérissac, Psichari, Maritain. Bernanos, René Grousset, Max Jacob, Claudel, Gide, etc. Articles et études de Jean Madiran, Marcel Clément, Joseph Hours, Jacques Vier, Henri Rambaud, Jean de Fabrègues, Luc Baresta, Pierre Andreu, Philippe Sénart, Francis Sambrès, Alain Palante, Louis Salleron, Jean Ousset, Henri Clouard, Antoine Egret, Henry Bordeaux, général Maxime Weygand, maréchal Alphonse Juin. La « réforme Salleron » :\ la propriété à ceux\ qui doivent être propriétaires\ 57‑11/61 Tables et index 1956-1961\ 58‑12/61 188:100 Les tables 1956-1961 sont reprises dans le présent numéro, sauf le monumental « index alphabétique des noms de personnes et de publications », qui n'a été ni reproduit ici, ni continué. Le principe de subsidiarité \ 64‑06/62 Charles De Koninck \ 66‑09/62 La civilisation chrétienne \ 67‑11/62 50 pages de documents pontificaux. Articles et études de Jean Madiran, Jean Ousset, Thomas Molnar, Louis Salleron, Joseph Hours, Henri Charlier, Marcel Clément, R.-Th. Calmel O.P. 189:100 Primauté de la contemplation \ 76‑09/63 Le P. Garrigou-Lagrange \ 86‑09/64 Saint Pie X \ 87‑11/64 Numéro de 384 pages dont 220 pages sur saint Pie X : textes de Benoît XV, Pie XI, Pie XII, Jean XXIII. Articles et études de Mgr Marcel Lefebvre, André Charlier, Marcel De Corte, Alphonse Arnoult, Louis Salleron, Jean Ousset, François Gousseau, Louis Jugnet, Paul Péraud-Chaillot, Pierre Louan, Paul Nau O.S.B. Teilhard et la religion \ 91‑03/65 Numéro de 208 pages dont 74 pages sur Teilhard et la religion : études d'Henri Rambaud et de Marcel De Corte. 6 F franco. 190:100 Le général Weygand \ 93‑05/65 Teilhard et la science \ 96‑09/65 L'Eucharistie \ 98‑12/65 191:100 ### Table des tirés à part et suppléments 1\. -- La pratique de la dialectique. 1 bis. -- La technique de l'esclavage. La substance de ces deux opuscules est reprise, avec d'autres éléments, dans le livre de Jean Madiran : *La vieillesse du monde. Essai sur le communisme* (20^e^ volume de la « Collection Itinéraires », Nouvelles Éditions Latines ; voir la table des volumes de la « Collection Itinéraires »). 192:100 2\. -- Joseph Hours \ La conscience chrétienne devant l'Islam. « Mon but n'est point d'ajouter à nos connaissances, mais bien d'alerter mes concitoyens et mes frères en la Foi. » Articles des numéros 60 et 65. 3\. -- Anti-communisme négatif : Manifeste pour une résistance catholique. Les deux éditoriaux du numéro 43. 4\. -- Lettre à Jean Ousset. La lettre de Jean Madiran à Jean Ousset du 7 mars 1960. 5\. -- L'Église permet une collaboration avec le communisme ? Éditorial du numéro 52. 193:100 6\. -- Peregrinus \ La revendication dans l'Église. Par exception, n'est pas en vente à nos bureaux, mais seulement au « Club du Livre civique », 49, rue des Renaudes, Paris XVII^e^. 7\. -- Notre désaccord sur l'Algérie et la marche du monde. Éditorial du numéro 67. 8\. -- Note sémantique sur la socialisation et quelques autres vocables de «* *Mater et Magistra* *». 9\. -- La Cité catholique aujourd'hui. Tout le débat de 1962 autour de *La Cité catholique*, de l' « intégrisme », des documents pontificaux, du « sorassisme », etc. 194­:100 10\. -- Le Syllabus et la civilisation moderne. Étude de la 80^e^ proposition du Syllabus. Son accord avec les documents pontificaux postérieurs et notamment Mater et Magistra. 11\. -- Structures et techniques des sociétés de pensée dans le catholicisme. La clef sociologique des problèmes de structure et de méthode qui se posent à l'Action catholique du type français. 12\. -- L'Église de Jésus-Christ et l'ordre temporel. Une étude du P. Roger-Thomas Calmel, o.p. 13\. -- Réponse au teilhardisme. Les objections du P. Roger-Thomas Calmel au teilhar­disme. 195:100 14\. -- Le scandale de Paris. L'analyse par Peregrinus du processus de dialogue et de collaboration avec le communisme. 15\. -- L'affaire *Pax* en France. Les faits, les textes, les dates. Texte intégral du document du Saint-Siège. Reproduction et analyse des réactions de la presse catholique. Analyse des ressorts techniques. Sociologie des méthodes communistes et de l'espionnage soviétique dans l'Église. 16\. -- Les Chiens. L'article de Jean Madiran de janvier 1965. Les faits et leur signification. 17\. -- L'appel aux évêques de France. L'appel de février 1965 de Michel de Saint-Pierre et de Jean Madiran. Positions permanentes dans la crise actuelle. 18\. -- Déclaration fondamentale de la revue «* *Itinéraires* *». Voir la table des numéros spéciaux. 196:100 ### Table des volumes parus dans la Collection Itinéraires Publiée aux Nouvelles Éditions Latines (1, rue Palatine, Paris VI^e^), la « COLLECTION ITINÉRAIRES » est une collection de librairie -- à ne pas confondre avec la collection des 100 numéros de la revue elle-même -- qui édite des ouvrages se rattachant aux préoccupations, au travaux, aux inspirations essentielles de la revue ITINÉRAIRES et de sa « Déclaration fondamentale ». Inaugurée en juin 1959, la COLLECTION ITINÉRAIRES est distincte de la revue mensuelle ; elle se développe à un autre niveau et sur une autre dimension. La revue n'ayant pas de « service librairie », ne pas commander à la revue les ouvrages de la COLLECTION ITINÉRAIRES, mais chez tout libraire... qui acceptera de renseigner et de servir ses clients. Le difficile problème de la diffusion en librairie est examiné en détail, plus loin, dans la rubrique : « Avis pratiques » ; nous en recommandons la lecture attentive. Pour ceux de nos lecteurs qui s'intéressent vraiment à notre travail de réforme intellectuelle et morale, les volumes parus de la « Collection Itinéraires » sont un instrument de travail pensable qu'il faut étudier et faire connaître. 197:100 1\. -- Henri Charlier :\ Culture, École, Métier. I. -- Les principes de l'enseignement. II. -- L'enseignement et la vie. III. -- Les conditions du problème. IV. -- Les écoles techniques. V. -- L'enseignement secondaire. VI. -- Culture physique ; musique. VII. -- Résumé sur l'enseignement secondaire. VIII. -- Quelques vues sur l'enseignement supérieur. IX. -- L'enseignement de demain et l'apprentissage de l'art. Appendice : les quatre causes ; raisons de l'impuissance des intellectuels. 206 pages. 12 F. 2\. -- Henri Massis :\ De l'homme à Dieu. Dans un siècle où la notion de « sens de l'histoire » a pris la densité d'un dogme intangible, Massis oppose la voix de la raison et de la liberté aux incantations des sirènes qui nous attirent dans le gouffre de cette nouvelle fatalité. A ces slogans déjà éliminés, mais toujours impératifs : « Il faut être de son temps », « On n'arrête pas le progrès », etc., qui, pris à la lettre, nous présenteraient comme modèle de conduite la passivité du noyé qui s'abandonne au fil de l'eau, il répond qu'un progrès se juge non par son mouvement, ni par sa rapidité, mais par son but -- et que là où le courant mène à l'abîme, il faut savoir ramer contre le courant. (Extrait de la préface de Gustave THIBON.) 476 pages. 198:100 3\. -- R.-Th. Calmel O.P. :\ Sur nos routes d'exil\ Les Béatitudes I. -- L'esprit d'enfance évangélique. II. -- Bienheureux les pauvres. III. -- La croix dans la vie apostolique. IV. -- La joie que nous donne Jésus-Christ. V. -- La paix que nous demandons à l'Agneau de Dieu. VI. -- La pratique du commandement nouveau. VII. -- Charité surnaturelle et noblesse humaine. VIII. -- Notre Sauveur est un Dieu caché. IX. -- La vertu évangélique. X. -- Prudence de la chair et prudence de l'esprit. XI. -- La chasteté consacrée. XII. -- La sainteté du mariage. XIII. -- L'Église sainte composée de pécheurs. XIV. -- Charge du temporel et primauté du Royaume de Dieu. XV. -- Vrai et faux messianisme. XVI. -- Héroïsme et gentillesse. XVII. -- Sens politique et pureté. XVIII. -- Infirmité de la cité politique, même chrétienne. XIX. -- L'Église et les sociétés. XX. -- Les institutions et les personnes. XXI. -- Réponse intégrale aux iniquités politiques. XXII. -- La reconnaissance publique de la religion chré­tienne. 170 pages. 4\. -- Pierre Andreu :\ Histoire des prêtres-ouvriers I. -- La France pays de mission. II. -- De la conquête à la présence. III. -- La grande crise. IV. -- La Mission ouvrière. V. -- Conclusion. 199:100 Annexes : Juliette à l'usine. -- Henri Perrin. -- Michel Favreau. -- La doctrine sociale de l'Église. -- La lettre du Cardinal Pizzardo sur l'apostolat en milieu ouvrier. -- La déclaration de l'Épiscopat sur l'évangélisation des milieux déchristianisés. 5\. -- Jean Madiran :\ De la justice sociale I. -- La doctrine traditionnelle de la justice. II. -- La difficulté. III. -- Principe d'une solution. IV. -- Originalité de la justice distributive. V. -- Nature du bien commun. VI. -- La justice est une vertu et non une idéologie. VII. -- Justice et prudence. VIII. -- Compléments sur le bien commun. IX. -- Participation au bien commun. X. -- Au niveau de l'économie nationale. XI. -- Le principe de subsidiarité. XII. -- Dimension de la justice sociale. 87 pages. 6\. -- Amédée d'Andigné :\ Un apôtre de la charité\ Armand de Melun Préface du R.P. Riquet S. J. ; avant-propos d'Henri Rouet. I. -- L'homme de foi et ses amis. II. -- L'homme charitable et ses œuvres. III. -- Les idées sociales et politiques. 494 pages. 200:100 7\. -- Charles De Koninck :\ Le scandale de la médiation. I. -- Pour nos frères éloignés. II. -- La perfection de l'Incarnation et l'autorité du Souverain Pontife. III. -- Le sacrement du mystère de la foi. IV. -- Le scandale de la médiation. V. -- La part de la personne humaine dans l'œuvre de rédemption. VI. -- La « plenissima glorificatio » de la personne de Marie. VII. -- Dieu parmi nous en ses saints. Appendice : Note sur la mort glorieuse de la Vierge Marie. 219 pages. 8\. -- D.-P. Auvray O.P. :\ Le Cœur Immaculé de Marie I. -- La beauté du Cœur de la Vierge. II. -- La beauté de l'amour de la Vierge pour la Tri­nité. III. -- L'Annonciation. IV. -- La Visitation. V. -- Marie et Élisabeth. VI. -- Marie et Joseph. VII. -- Vers Bethléem. VIII. -- La Nativité. IX. -- L'adoration des Bergers. X. -- La Présentation de Jésus au Temple. XI. -- L'adoration des Mages. XII. -- La fuite en Égypte. XIII. -- La vie cachée à Nazareth. XIV. -- Jésus perdu et retrouvé. XV. -- La mort de Joseph. XVI. -- Le départ de Jésus. XVII. -- Cana. XX. -- Le chemin du Calvaire. 201:100 XXI. -- La Crucifixion. XXII. -- « Femme, voilà ton Fils ». XXIII. -- La mort de Jésus. XXIV. -- La mise au tombeau. XXV. -- Pâques. XXVI. -- L'Ascension. XXVII. -- La Pentecôte. XXVIII. -- Les dernières années. XXIX. -- L'Assomption. XXX. -- Le règne du Cœur Immaculé de Marie. 181 pages. 9\. -- Marcel De Corte :\ L'homme contre lui-même I. -- Les transformations de l'homme moderne. II. -- Pathologie de la liberté. III. -- La crise du bon sens. IV. -- La crise des élites. V. -- Le déclin du bonheur. VI. -- Ce vieux diable de Machiavel. VII. -- Le mythe du Progrès. VIII. -- L'accélération de l'histoire et son influence sur les structures sociales. 315 pages. 10\. -- Jean Madiran :\ Le principe de totalité I. -- Énoncé du principe. II. -- Application erronée du principe. III. -- Quatre distinctions. IV. -- En quoi consiste le bien commun. V. -- La cité est pour l'homme. VI. -- Le despotisme totalitaire. 91 pages. 202:100 11\. -- François Saint-Pierre :\ La co-gestion de l'économie. I. -- Le capital-socialisme. II. -- Co-gestion de l'entreprise ou de la profession ? III. -- Données d'un syndicalisme majeur. IV. -- La prévoyance sociale. V. -- Part familiale des rémunérations. VI. -- Le cas particulier de la co-gestion immobilière. VII. -- La communauté des acquêts. VIII. -- L'aménagement du territoire. Post-face ; Pour les hommes réels. Annexes : Mode de versement de la part familiale des rémunérations. -- Feuilles de paye. -- Allocations-logement. Redistribution du revenu national. -- La co-gestion de l'agriculture. 122 pages. 12\. -- Joseph Thérol :\ L'appel du roi temporel Première partie : Vers la perfection. I. -- Principe et fondement. II. -- Les examens. III. -- La fin, les obstacles, les moyens. IV. -- L'appel et l'étendard. V. -- La route et le sommet. Seconde partie : La Visitation et le Magnificat. I. -- Le cantique de l'humilité. II. -- Dieu est ma joie. III. -- Dieu est ma force. IV. -- Dieu est mon espérance. Troisième partie : Les Mystères de la vie du Christ. 250 pages. 203:100 13\. -- C.-J. Gignoux :\ Joseph de Maistre\ prophète du passé\ historien de l'avenir I. -- L'énorme poids du rien. II. -- Josephus a Floribus. III. -- Une époque du monde. IV. -- La cuisine de Lausanne. V. -- Le philosophe errant. VI. -- L'ère de Tamerlan. VII. -- Le fauteuil tournant. VIII. -- Les feux du soir. IX. -- Je meurs avec l'Europe. 219 pages. 14\. -- John A.-T. Robinson :\ Dieu sans Dieu (Honest to God)\ traduction et avertissement par Louis Salleron. La publication, dans cette collection, d'un livre dont l'auteur est un évêque anglican et dont les thèses sont aussi éloignées que possible du catholicisme, demande une explication. Publié en mars 1963, à Londres, *Dieu sans Dieu* (Honest to God) a connu aussitôt un succès prodigieux. En quelques mois, la vente dépassait 350.000 exemplaires. Il ne s'agit pourtant point d'un livre à scandale -- quoiqu'il ait fait scandale. Son auteur, John A.T. Robinson, est l'évêque anglican de Woolwich. Par ses travaux d'exégèse biblique, il était déjà connu des milieux spécialisés dans l'étude de l'Écriture Sainte. Il n'était pas ignoré du grand public britannique depuis sa déposition au procès de L'amant de Lady Chatterley, en 1960 : il y avait fait l'éloge du roman de Lawrence, déclarant que, « ni en intention ni en fait », ce livre ne lui paraissait « dépravant ». Dieu sans Dieu est en somme l'AGGIORNAMENTO d'un évêque anglican. Pour présenter l'Évangile à l'homme « adulte » du XX^e^ siècle, l'AGGIORNAMENTO de John A. T. Robinson conçoit un christianisme qui serait, en quelque sorte, Dieu sans Dieu et la religion sans religion. 204:100 C'est le « modernisme » actuel, le « modernisme » commun au catholicisme et au protestantisme, le « modernisme » sous sa forme probablement la plus honnête, la plus intelligente, la plus loyale. Le lecteur catholique français de Dieu sans Dieu reconnaîtra dans ce livre quantité d'idées qui lui sont déjà familières, qu'il trouve dans son journal (catholique), dans ses congrès (catholiques), voire dans les sermons (catholiques) qu'il entend ; des idées familières qu'un peu tout le monde accepte plus ou moins, sans réflexion critique. La seule différence est que John A. T. Robinson conduit ces idées jusqu'à leurs conséquences inévitables, et qu'il ne craint pas de mettre en lumière leur contenu, -- contenu qui, en France, reste le plus souvent implicite ou caché. Avec ce livre, on se trouve en présence, en toute netteté, des conclusions logiques et pratiques que comporte nécessairement une conception intégralement moderniste de l'AGGIORNAMENTO. Le lecteur catholique français, reconnaissant dans Dieu sans Dieu beaucoup d'idées familières, y verra en même temps, pour la première fois, à quoi ces idées conduisent, à quoi elles sont en train de le conduire sans qu'il le sache. Entre d'une part ces idées familières, installées dans plusieurs secteurs du catholicisme français, et d'autre part la foi au Christ de la Révélation, annoncé par la Tradition de l'Église, le compromis est impossible, le choix est inéluctable. 188 pages. 15\. -- Jean Madiran :\ L'intégrisme\ Histoire d'une histoire Pour la première fois, une histoire méthodique de ce que l'on appelle l' « intégrisme », avec publication et analyse des documents que l'on invoque ordinairement sans les citer et sans avoir procédé à aucun examen critique. Introduction : l'histoire d'une histoire. Première partie Chap. I. -- Le livre de Nicolas Fontaine et le Mémoire anonyme. Chap. II. -- Le Mémoire de Mgr Mignot. Chap. III. -- L'Encyclique *Ad Beatissimi*. 205:100 Chap. IV. -- État de la question avant 1950. Chap. V. -- La valeur des documents de Gand. Chap. VI. -- L'Action française et l'intégrisme. Seconde partie Chap. VII. -- L'état de la question renouvelé après 1950. Chap. VIII. -- Les trois lettres de saint Pie X. Chap. IX. -- Le Rapport Antonelli. Chap. X. -- Survivance ou reconstitution du SP. Chap. XI. -- Intégrisme de droite ou de gauche. Chap. XII. -- La fonction que l'intégrisme voulait assu­mer. Chap. XIII. -- L'alibi intégriste contre la Hiérarchie apos­tolique. Troisième partie Chap. XIV. -- Les indications du Rapport doctrinal de 1957. Chap. XV. -- Le malentendu tragique. Chap. XVI. -- Analyse de la définition. Chap. XVII. -- Un exemple : la polémique contre le Sillon. Chap. XVIII. -- Intégrisme et traditionalisme. Quatrième partie Chap. XIX. -- La diversion anti-intégriste. Chap. XX. -- La guerre dans l'Église. Chap. XXI. -- L'intégrisme selon le P. Suavet. Chap. XXII. -- Daniel-Rops et l'intégrisme. Cinquième partie Chap. XXIII. -- Les procédés modernistes. Chap. XXIV. -- La société secrète des modernistes. Chap. XXV. -- Le modernisme hier et aujourd'hui. 16\. -- André Charlier :\ Que faut-il dire aux hommes I. -- Sources et racines 1. -- L'âme moderne en face de l'être. 206:100 2. -- L'Occident et la pensée abstraite. 3. -- Le chant de la liberté de l'âme. 4. -- Le goût de l'informe. 5. -- Que faut-il réformer ? 6. -- Le sens du sacré. II. -- Vocation de la France 7. -- Fidem servavi. 8. -- Les propos de Sélénius. 9. -- Les propos de Sélénius (suite). 10. -- La France parle. 11. -- Jeanne d'Arc et la restauration du sacré. 12. -- Invention à deux voix. III. -- Rencontres 13. -- Péguy et la détresse du monde moderne. 14. -- Brangues. 15. -- Lettre à Paul Claudel sur Péguy et la Sainte Vierge. 16. -- Ramuz poète de l'être. 17. -- Jacques Copeau restaurateur de l'art dra­matique. 18. -- Le cas Gide. IV. -- L'illuminisme et l'espérance 19. -- L'illuminisme du XX^e^ siècle. 20. -- De populo barbaro. 21. -- Ut abundetis in spe. V. -- Lettres et méditations 22. -- Lettre aux Cahiers. 23. -- Lettres aux Capitaines. 24. -- Adieu à Maslacq. 25. -- Batailles perdues. 26. -- La gratuité de l'amour. 27. -- Fidélité à l'essentiel. 28. -- Lettre à Jean Madiran sur la civilisation chrétienne. 29. -- Confession vespérale. 380 pages. 207:100 17\. -- Louis Salleron.\ Diffuser la propriété. 1. -- Diffuser la propriété. 2. -- La propriété dans l'Encyclique « Mater et Magistra ». 3. -- La participation des salariés à la propriété du capital des entreprises. 4. -- Autofinancement et intéressement des travailleurs au capital. 5. -- Le P. Calvez et la propriété. 6. -- La diffusion de la propriété aux États-Unis. 7. -- La diffusion de la propriété en Allemagne. 8. -- Les sociétés d'investissement à capital variable à l'étranger. 9. -- Les caisses d'épargne. 10. -- Les sociétés d'investissement foncier. 11. -- Pouvoir et propriété dans l'entreprise. 12. -- Huit propositions sur la propriété. 13. -- L'association du capital et du travail. 14. -- Proudhon et la propriété. 220 pages. 18\. -- Dom G. Aubourg O.S.B. :\ Entretiens sur les choses de Dieu. Première partie : dans la Foi. -- Sang et gloire. -- Pentecôte. -- Recherche de Dieu et demeure de Dieu. -- Le dessein de Dieu. -- Sur la transcendance du christianisme. -- A travers la « grande Tribulation ». -- Du Concile de Chalcédoine au XX^e^ siècle. Deuxième partie : dans les signes de la Foi. -- Les sacrements dans la vie chrétienne. -- Le Tabernacle et le monde sacramentel. -- Le royaume de Dieu et le sacrement. 208:100 Troisième partie : dans les fruits de la Foi. -- Saint Joseph. -- Panégyrique de saint Etienne. -- Saint Anselme : les sources vivantes de sa théologie. -- Le vrai mystère de Jeanne d'Arc. -- La Petite Reine chez les incroyants. -- L'ordre de l'amour. -- La gratuité de l'amour. -- La vocation de fondatrice. -- Année jubilaire. Quatrième partie : hors-pages. -- Lettre à Henri Bremond. -- Deux poèmes. -- L'Église et le monastère de Couvrechef. -- Le monastère Saint-Pierre-Saint-André de Si Shan. 378 pages. 19\. -- Pierre Carreau :\ Le monde et l'unité.\ Préface de Jean de Fabrègues. I. -- L'être et l'unité. II. -- La mission de Rome. III. -- Le Moyen Age. IV. -- Rupture de l'unité en politique internationale. V. -- Rupture de l'unité religieuse. VI. -- Le siècle des lumières. VII. -- Analyse du concept d'unité. VIII. -- L'unité et les nations. IX. -- La loi de la vie. 20\. -- Jean Madiran :\ La vieillesse du monde\ Essai sur le communisme I. -- La technique de l'esclavage. II. -- Le cadavre communiste. III. -- La pratique de la dialectique. Conclusion : Un univers sans personne. 209:100 ## AVIS PRATIQUES ### Ce que la revue demande à ses lecteurs Premièrement :\ un effort intellectuel La première chose que la revue *Itinéraires* demande à ses lecteurs, c'est l'effort méthodique d'une lecture véritable, attentive et réfléchie. Nous savons bien que le lecteur est souvent assailli, dans son travail, dans son repos, dans sa maison, par un tumulte de propagandes, de radios, de journaux, de passions idéologiques. Nous ne nous dissimulons pas que c'est un très réel effort intellectuel que nous lui demandons. Nous ne nous dissimulons pas non plus qu'au milieu de tant de vacarmes journalistiques, politiques, publicitaires, passionnels, au milieu de tant de préoccu­pations légitimes et d'angoisses fondées, de fatigues, de dispersions, au milieu aussi de tant de déchaînements cruels et souvent meurtriers, il n'est pas facile de trou­ver le temps, le silence extérieur, le silence intérieur nécessaires pour une lecture et une réflexion comme celles que nous proposons. Mais c'est bien cela que nous proposons. 210:100 Il existe beaucoup de journaux qui font beaucoup de bruit, qui attirent spectaculairement l'attention et qui font croire que leur lecture est « *nécessaire à qui veut se faire facilement une opinion sûre et complète* ». Nous nous adressons au contraire à ceux qui savent que, dans l'ordre de la conscience, dans celui de la pen­sée, dans celui de l'action, rien d'estimable et de solide ne peut jamais se faire *facilement*, mais que tout s'ob­tient à force d'expérience, de travail, de documentation, de peine, de méditation ; de courage. \*\*\* C'est seulement lorsqu'ils parlent à leurs lecteurs que les journaux montent cette mise en scène publicitaire selon laquelle ils prétendent les mettre en mesure de « se faire facilement une opinion sûre et complète ». Mais loin du public, hors de l'oreille des lecteurs, les directeurs de journaux donnent volontiers à leurs ré­dacteurs cette consigne classique : « Un journal est fait pour être imprimé, lu et oublié en une seule journée. » Et cette autre consigne non moins classique : « Une seule idée par article, et encore c'est beaucoup trop. » Ce qui revient à dire, et ce que plusieurs directeurs de journaux rappellent fréquemment à leurs collabora­teurs : « N'oubliez pas que vous écrivez avant tout pour des imbéciles. » Nous ne faisons pas un journal « pour des imbéci­les ». Nous faisons une revue de travail et de documen­tation. Nous nous adressons à la réflexion, à la dignité du lecteur. « Un journal se regarde et se lit ; la revue ITINÉRAIRES se relit et se garde. » 211:100 Secondement :\ une aide spirituelle Nous demandons aux lecteurs, de nous apporter leur *aide spirituelle.* Le dernier vendredi de chaque mois, les rédacteurs, les lecteurs, les amis d'*Itinéraires* vont à la messe dans leur paroisse, ou là où ils se trouvent, priant les uns pour les autres et aux intentions de l'œuvre de réforme intellectuelle et morale entreprise par la revue. En cette période du dixième anniversaire de la re­vue, nous demandons à tous nos amis à travers le mon­de d'être plus particulièrement fidèles à notre rendez-vous de la messe du dernier vendredi du mois, en fé­vrier et en mars. Et en outre, à un supplémentaire rendez-vous de prière : *le 7 mars, fête de saint Thomas d'Aquin.* Troisièmement :\ une aide matérielle Nous demandons ensuite à nos lecteurs de nous ap­porter leur *aide matérielle* d'une part en souscrivant s'ils le peuvent un « abonnement de soutien », d'autre part en « abonnant le prochain ». *Abonner le prochain :* cela concerne la diffusion, qui doit se faire de proche en roche, selon la voie des relations naturelles dans la famille, dans la profession, dans la paroisse, dans les corps intermédiaires ; dans l'amitié et par l'abonnement. Offrir à son prochain un abonnement à la revue ITINÉRAIRES est un acte d'amitié. 212:100 *L'abonnement de soutien* est l'abonnement à 200 F. au lieu de 50 ou 55 F. Il est nécessaire que ceux qui en ont les moyens souscrivent un tel abonnement. Cette nécessité résulte des conditions fondamentalement anor­males dans lesquelles les publications périodiques sont vendues au public. Le public ignore en général que l'ensemble des pu­blications imprimées, du journal à la revue, est mis en vente à un prix *inférieur* au prix normal, inférieur au *prix de revient.* Le lecteur, l'abonné ne payent pas le juste prix ; ils ne paient pas le prix de fabrication de la marchandise imprimée qu'ils achètent. L'ensemble de la presse ne peut pas vivre avec les seules ressources normales provenant du prix de vente. Journaux et pu­blications périodiques vivent grâce aux ressources de la *publicité payante* qui viennent s'ajouter aux ressources de la vente au numéro et de l'abonnement. Cette situation est générale, bien établie, et entraîne deux conséquences : 1. -- Le public étant accoutumé à pratiquer certains prix dans l'achat des publications, ou dans l'abonne­ment, il est très difficile aux publications qui veulent refuser ce truquage et ce « dumping » de fixer leur vente au numéro et leur abonnement à des tarifs qui seraient « *trop* » supérieurs aux tarifs ordinairement pratiqués. Ces tarifs « *trop* » élevés se heurteraient à l'incompréhension de la plus grande partie du public. 213:100 2. -- Équilibrant leur budget grâce aux ressources publicitaires, les publications mettent alors leur exis­tence *dans la dépendance* de ceux qui leur assurent des contrats de publicité. Situation qui peut-être, en fait, dans tel ou tel cas particulier, ne présente pas habituel­lement de grands inconvénients... Mais situation qui est anormale et dangereuse au moins dans son principe, et qui comporte souvent de graves inconvénients pratiques. Afin d'assurer son entière liberté et indépendance temporelle, la revue ITINÉRAIRES n'a jamais accepté au­cune publicité payante et elle maintient sa décision de n'en accepter aucune. C'est une décision tout à fait ex­ceptionnelle parmi les publications imprimées en Fran­ce : mais nous ne modifierons pas cette décision. La situation anormale qui commande tout le marché des publications imprimées n'est pas particulière à no­tre pays. Elle est la situation créée partout dans le « monde libre » par le capitalisme de presse, ses mœurs et ses pratiques. L'Angleterre en a donné un exemple spectaculaire en octobre 1960 : le *News Chronicle,* journal ayant PLUS D'UN MILLION DE LECTEURS RÉGULIERS, a dû cesser du jour au lendemain sa parution et n'a pu éviter d'être racheté par un concurrent. Et voici le com­mentaire publié à ce sujet par un autre journal britan­nique, le *Guardian :* « Il est amer de constater qu'en pleine prospé­rité un journal qui a plus d'un million de lec­teurs ne parvient pas à joindre les deux bouts. *Mais tel est le résultat de la place de plus en plus* PRÉPONDÉRANTE *qu'occupe la publicité dans les revenus d'un journal*. A une époque où les prix de revient augmentent, la seule vente au numéro est insuffisante pour faire vivre un journal. » 214:100 Le public doit comprendre qu'il est maintenu dans l'ignorance d'une réalité que connaissent bien -- habituellement sans l'avouer -- toutes les personnes infor­mées du fonctionnement véritable de la presse impri­mée. En voici une autre preuve. Elle est extraite de *L'Écho de* la *Presse,* journal professionnel, numéro du 10 février 1962, donnant en ces termes le compte rendu d'une conférence prononcée par M. Roger Priouret, chef du service économique et financier de *France-soir* : « M. Priouret a dû constater avec regret que la presse d'aujourd'hui ne joue plus son rôle d'information *libre* et qu'elle ne guide plus l'o­pinion, mais qu'elle *la suit en la flattant*. « Le défaut de la presse moderne, poursuit M. Priou­ret, est dû en grande partie à *la place terrible­ment importante qu'a prise la publicité dans le domaine de la presse*. » Dès le premier jour et définitivement, la revue ITI­NÉRAIRES a refusé d'être réduite à « suivre l'opinion en la flattant », elle a refusé d'entrer dans ce jeu truqué du capitalisme de presse, qui place l'existence des pu­blications imprimées dans la dépendance des puissan­ces d'argent (privées ou d'État) et des intérêts économi­ques et commerciaux. Que ces intérêts soient des inté­rêts honnêtes et légitimes, *il n'est pas toujours facile de le savoir avec certitude*, au moment où l'on accepte un contrat de publicité ; mais de toutes façons c'est une autre question. Nous avons estimé que la dignité de no­tre travail et la dignité de nos lecteurs exigent que l'exis­tence de la revue ITINÉRAIRES ne soit pas placée *dans la dépendance d'intérêts* financiers, économiques, com­merciaux, même honnêtes et légitimes. \*\*\* 215:100 Un capitaliste de presse tel que M. Cino del Duca, propriétaire de *Nous Deux*, d'*Intimité*, de *Paris-jour*, déclarait en juin 1965 à la revue *Le Dépositaire de France :* « Le prix (de vente actuel des journaux) porte en soi la condamnation des journaux. D'abord parce qu'ils sont tributaires de la publicité et qu'il n'y a de publicité que pour les gros tirages donc il ne peut plus y avoir de presse démocra­tique ; ensuite parce qu'il est impossible de faire de nouveaux efforts pour des améliorations qui s'imposeraient et qu'il faut éluder... » En rapportant cette déclaration, *La Croix* du 11 juin 1965 ajoutait ce commentaire : « Depuis des années, les professionnels de la presse savaient le prix de vente du journal infé­rieur à son prix de revient, et le concours financier de la publicité nécessaire. Chacun constatait ce fait. Et s'en accommodait. Or voici que ce principe de gestion, inauguré en 1836 par Émile de Girardin, et toujours en vigueur, est remis en cause. A l'issue d'une réunion d'information organi­sée le 3 juin dernier par leurs quatre syndicats, les journalistes parisiens ont adopté une résolu­tion qui affirme notamment que « la publicité, en ce qui concerne la presse, ne saurait consti­tuer la source principale des revenus », et qui évoque « la possibilité pour le journal de ne pas être la seule marchandise vendue au-dessous de son prix de revient. » Ce ne sont là que paroles en l'air ; nous les citons seulement dans la mesure où elles témoignent que nous ne rêvons pas quand nous parlons de la vente des jour­naux et publications au-dessous de leur prix de revient. Mais aucun remède n'y sera apporté. La seule solution est de commencer soi-même par sortir de ce système du capitalisme de presse, en disant pourquoi. 216:100 En le disant clairement au public. Le public doit savoir qu'il y a *deux catégories principales* de journaux et publications : ceux qui acceptent de la publicité payante, et ceux qui n'en acceptent point. Les autres distinctions ou subdivisions ne viennent qu'après celle-là, qu'après cette division capitale, pri­mordiale, décisive. \*\*\* Aussi le prix de vente au numéro de la revue ITINÉ­RAIRES et les tarifs d'abonnement sont-ils assez *élevés* par rapport aux prix ordinairement pratiqués. Et nous faisons appel en outre aux *abonnements de soutien.* Nos raisons sont graves et, à nos yeux, impératives. Elles ne sont pas toujours pleinement comprises, le public étant tellement habitué à voir de la publicité pa­yante dans tous les journaux et publications qu'il en vient à considérer cette pratique comme parfaitement normale, et à tenir au contraire pour une originalité anormale ou un scrupule excessif, l'attitude de la revue ITINÉRAIRES. Nous demandons à nos lecteurs de comprendre les vérités inhabituelles, mais bien réelles, que nous leur exposons. D'une manière générale, c'est une grave er­reur économique et sociale de faire payer les choses au-dessous de leur prix. On l'a fait pour les loyers ; en l'espace d'une génération, on a eu le résultat : plus de maisons et, quand il a fallu malgré tout en reconstruire, des casernes, qui tiendront debout vingt ans. 217:100 Pour la presse, cette erreur économique et sociale a d'aussi gra­ves conséquences. On vend au public les journaux et publications au-dessous de leur prix (grâce à la publicité payante) : ce procédé aberrant et antinaturel en­traîne la disparition progressive de la presse libre. En économie comme en morale, il faut mettre leur vrai prix aux choses, sinon on détraque tout. \*\*\* Une aide spirituelle par la messe du dernier ven­dredi du mois ; une aide financière par l' « abonnement de soutien » une aide dans la diffusion en « abon­nant le prochain » ; une aide intellectuelle, par leurs avis, critiques, suggestions et informations. Voilà ce que la revue demande à ses lecteurs. De nombreux témoignages manifestent à la revue *Itinéraires* qu'elle est utile au lecteur qui l'étudie per­sonnellement. Et tel est, bien sûr, le premier usage de la revue, sa première signification. Mais elle ne saurait se satisfaire d'être en quelque sorte un objet de délec­tation individuelle. Elle veut développer dans l'ensem­ble de son public, un dynamisme intellectuel, un dyna­misme actif. C'est à ce dynamisme qu'elle fait appel chez le lecteur. 218:100 ### Où et à qui s'adresser ? Selon que l'on désire acheter la revue au numéro, s'y abon­ner, commander un ouvrage de la « Collection Itinéraires » ou entrer en contact avec d'autres lecteurs de la revue, il convient de *s'adresser à des services différents.* \*\*\* I. -- La revue *Itinéraires* (4, rue Garancière, Paris V^e^) ne peut que recevoir les abonnements et fournir les numéros ou suppléments qu'elle édite elle-même. Elle n'édite pas elle-même les ouvrages de la « Collection Itinéraires » : ce n'est donc pas auprès d'elle que l'on peut se les procurer. \*\*\* II. -- Pour commander les ouvrages de la « Collection Iti­néraires », voir plus loin l'article : « La question des librai­res ». \*\*\* III. -- Pour acheter la revue au numéro : s'adresser à un dépositaire des N.M.P.P. (Nouvelles Messageries de presse pa­risienne). \*\*\* 219:100 IV. -- La revue *Itinéraires* ne communique pas à des tiers les noms de ses abonnés. Ceux qui s'abonnent donnent leur nom et leur adresse pour recevoir la revue, à l'exclusion de tout autre usage. Aussi, ceux de nos lecteurs et abonnés qui désirent se ren­contrer entre eux ne peuvent le faire par l'intermédiaire de la revue. Ils peuvent le faire seulement par l'intermédiaire des *Com­pagnons d'Itinéraires,* en y donnant dans cette intention, même sans adhérer, leur nom et leur adresse. \*\*\* Donc : -- si vous voulez vous abonner, ou commander un supplé­ment édité par la revue : adressez-vous à *Itinéraires*, 4, rue Garancière, Paris-VI^e^ ; -- si vous voulez rencontrer d'autres lecteurs d'*Itinéraires*, adressez-vous aux *Compagnons d'Itinéraires*, 49, rue des Re­naudes, Paris XVII^e^ (soit en écrivant, soit en venant à la per­manence qui est ouverte chaque samedi de 15 h. à 17 h.) ; -- si vous voulez participer avec les lecteurs de la même région ou de la même localité à la messe du dernier vendredi du mois, adressez-vous aux *Compagnons d'Itinéraires*, 49*,* rue des Renaudes, Paris XVII^e^. \*\*\* Si vous désirez acheter la revue au numéro, *commandez-la* chez n'importe quel dépositaire des N.M.P.P. (Nouvelles Mes­sageries de presse parisienne). Il ne s'agit pas de parcourir des kilomètres à la recherche d'un dépositaire qui aurait déjà la revue en magasin. Il s'agit de la commander chez le dépositaire des N.M.P.P. de votre choix. Tout dépositaire des N.M.P.P. est tenu d'exécuter votre com­mande. 220:100 Abonnements à la revue :\ le délai de 15 jours Les abonnements nouveaux entrent en vigueur quinze jours après leur réception effective. Ils ne peuvent en aucun cas porter sur les numéros parus avant ou pendant ce délai. En conséquence, les abonnements nouveaux qui nous par­viendront avant le 15 février entreront en vigueur avec l'envoi du numéro 101 qui paraîtra le 1^er^ mars. Les abonnements nouveaux qui nous parviendront après le 15 février entreront en vigueur seulement avec l'envoi du nu­méro 102 qui paraîtra le 1^er^ avril. \*\*\* Changements d'adresse Les demandes de changement d'adresse doivent nous parvenir *plus d'un mois à l'avance*. Pour toute demande de changement d'adresse, joindre une bande d'envoi de la revue, ou à défaut le numéro figurant sur cette bande avant l'adresse. Pour les abonnés *de France :* joindre trois timbres à 0,30 F. Pour les abonnés *de l'étranger :* les changements d'adresse sont gratuits, Sont considérés comme abonnés « de France » ceux qui, au lieu où ils reçoivent la revue, affranchissent leurs lettres ordinaires avec un timbre français à 0,30 F. Sont considérés comme abonnés « de l'étranger » tous les autres cas. 221:100 ### La question des libraires La revue *Itinéraires* n'est pas elle-même habituellement en vente chez les libraires : elle est en vente au numéro par l'intermédiaire des N.M.P.P. et de leurs dépositaires locaux ; les libraires peuvent d'ailleurs, s'ils le désirent, mettre eux aussi en vente la revue *Itinéraires* en se la procurant auprès des N.M.P.P. Mais les ouvrages de la « Collection Itinéraires » édités par les Nouvelles Éditions Latines, sont, eux, ou devraient normalement être en vente par l'intermédiaire des libraires. En fait, le plus souvent, ils ne sont ni en vitrine, ni en magasin, et beaucoup de libraires, beaucoup trop vraiment, répondent qu'ils « ne connaissent pas » quand on vient leur demander l'un ou l'autre de ces ouvrages. \*\*\* C'est là une grave anomalie, qui n'a pas toujours pour cause simplement la négligence. Et ne parlons pas de l'ignorance, qui n'est pas une excuse : le libraire est précisément celui qui a -- mieux que le public -- les moyens de se renseigner au sujet des ouvrages qu'on lui demande. Quoi qu'il en soit de cette situation, et de ses causes sur lesquelles nous poursuivons notre enquête, *voici la liste des librairies qui ont accepté d'avoir en permanence le dépôt de tous les ouvrages parus dans la* « *Collection Itinéraires *»*.* (Ce recensement n'est pas achevé. Les libraires que nous n'aurions pas touché peuvent prendre eux-mêmes l'initia­tive de nous écrire à ce sujet.) 222:100 Barcelone (Espagne) : -- Amigos del Catécismo. Condal 31. Bruxelles (Belgique) : -- Librairie de France, 31, rue du Luxembourg. Liège (Belgique) : -- Librairie Henry, 20, Pont d'Ile. Martigny (Suisse) : -- Librairie Marcel Gaillard. Québec (Canada) : -- Compagnie Paquet, 545 est rue Saint-Joseph. Paris : -- Bibliothèque, contemporaine, 64, rue de Rome, VIII^e^. -- Procure du Clergé, rue de Mézières, VI^e^. Aix-en-Provence : -- Librairie de Provence, 31 cours Mirabeau. Angers : -- Librairie Saint-Joseph, 7, rue Bressigny. Biarritz : -- Librairie Tujague, 16, rue Gambetta. Caen : -- Librairie Publica, 44, rue Saint-Jean. Dijon : -- Librairie Bannier, 10 bis Berbisey. Lille : -- Le Furet du Nord, 18 place du Général de Gaulle. Lyon : -- Librairie René Charras, 30, rue Servient. -- Librairie Vitte, 3, place Bellecour. Marseille : -- Librairie du Quartier Latin. 68 bld. de la Libération. Nantes : -- Librairie Coiffard, rue de la Fosse. Nice : -- Librairie Damarix, 42, rue Gioffrado. 223:100 Orléans : -- Librairie Jeanne d'Arc, 11, rue Jeanne d'Arc. Rennes : -- Librairie Béon, 6, rue Nationale. Rouen : -- Librairie universitaire, 83, rue Jeanne d'Arc. Toulouse : -- La Bible d'or, 22, rue du Taur. -- Librairie Labadie, 22, rue de Metz. Tours : -- Librairie du Sacré-Cœur, 83, rue de la Scellerie. Villeneuve-sur-Yonne : -- Maison de la presse, 33, rue Carnot. Toutes les librairies qui acceptent en permanence le dépôt de la totalité des ouvrages parus dans la « Collection Itinéraires » sont en permanence signalées et recommandées au public dans la revue *Itinéraires* ([^57])*,* nous invitons nos amis à les soutenir en les faisant connaître et en leur réservant toutes leurs commandes de librairie. ============== fin du numéro 100. [^1]:  -- (1). Lettre de Jean de Fabrègues parue dans *Itinéraires*, numéro 3 de mai 1956, (page 17). [^2]:  -- (1). NOTE BIBLIOGRAPHIQUE. -- Sous le titre de *Gaspard des Mon­tagnes*, on trouve parfois seulement le premier livre de cette œuvre qui en comporte quatre : 1. -- *Le château des sept portes*, ou les enfances de Gaspard ; 2. -- *L'auberge de la Belle Bergère*, ou quand Gaspard de guerre revint ; 3. -- *Le pavillon des amourettes*, ou Gaspard et les bourgeois d'Ambert ; 4. -- *La tour du Levant*, ou quand Gaspard mit fin à l'histoire. Les quatre livres ont été publiés en un seul volume chez Albin Michel, édition définitive : *Les vail­lances, farces et aventures de Gaspard des Montagnes.* [^3]:  -- (1). Voir le texte de ces deux derniers articles dans *Itinéraires*, numéro 73 de mai 1963. [^4]:  -- (1). Luc Beauregard, exposant l'enseignement reçu du P. Liégé, dans *La Presse* de Montréal, 12 avril 1962. [^5]:  -- (1). A l'exception de *La France catholique.* [^6]:  -- (2). *Itinéraires*, numéro 37. [^7]:  -- (1). Force ouvrière (organe de la C.G.T.-F.O.) du 23 janvier 1958, à la suite les premiers articles de Georges Dumoulin dans *Itinéraires*. [^8]:  -- (1). *Itinéraires*, numéro 37. [^9]:  -- (2). *Ibidem.* [^10]:  -- (3). *Itinéraires*, numéro 10. [^11]:  -- (4). *Itinéraires*, numéro 34. [^12]:  -- (5). *Vie catholique illustrée* du 29 mai 1963. [^13]:  -- (6). *Itinéraires*, numéro 37. [^14]:  -- (7). R.P. Liégé dans *La Presse* de Montréal du 30 mars 1963, cité par *Nouvelles de Chrétienté* du 23 mai 1963 (page 8). [^15]:  -- (1). Voir notamment celui du 31 janvier 1962. [^16]:  -- (2). Dans *Le Monde* du 1^er^ février 1962. [^17]:  -- (3). Léon XIII, *Au milieu des sollicitudes*. [^18]:  -- (4). Pie XI, *Divini illius Magistri*. [^19]:  -- (5). Lettre pontificale aux Semaines sociales de France, 12 juillet 1933. [^20]:  -- (6). Pie XII, *Summi Pontificatus*. [^21]:  -- (7). Pie XII, Allocution à l'Action catholique, 29 avril 1945. [^22]:  -- (8). Pie XII, Allocution du 8 janvier 1947. [^23]:  -- (9). *Ibidem.* [^24]:  -- (10). Pie XII, Discours aux pères de famille français, 18 septembre 1951. [^25]:  -- (11). Pie XII, 25 septembre 1949. [^26]:  -- (12). *Note d'information* n° 12, datée du 11 janvier 1962 de la C.F.T.C. « Union régionale parisienne ». [^27]:  -- (13). Confédération Générale des Travailleurs Chrétiens : *chrétiens* jusqu'à nouvel ordre ; c'est, jusqu'à nouvel ordre, la Centrale syndicale à laquelle tous les catholiques sont invités à s'affilier, en termes pressants, et quelquefois à titre d'obligation de conscience, par leurs aumôniers, confesseurs, etc. [^28]:  -- (14). Section Française de l'Internationale Ouvrière : parti socialiste de M. Guy Mollet. [^29]:  -- (15). C.G.T.-F.O. : « Force ouvrière ». Centrale syndicale de tendance socialiste, issue d'une scission avec la C.G.T. lorsque les organes dirigeants de cette dernière eurent été, en 1944-1945, entièrement colonisés par les communistes. [^30]:  -- (16). Fédération (syndicale) de l'Éducation Nationale, dont le « laïcisme » et le « gauchisme » sont bien connus. En outre, c'est la F.E.N. qui a lancé et patronné la journée de manifestation « contre le fascisme » du 6 février 1962. Mais ça ne fait rien : elle est, aux yeux des chrétiens mis en condition, suspecte de fascisme. [^31]:  -- (17). Paru notamment dans *Le Monde* des 4 et 5 février 1962. [^32]:  -- (1). Parti socialiste unifié. [^33]:  -- (1). Article de M. Jean de Beer, secrétaire du P.E.N. Club français, dans la tribune du *Monde*, 4 avril 1962. [^34]:  -- (1). Déclaration reproduite notamment dans La Croix et dans Le *Monde du 31* mars 1962. [^35]:  -- (1). Qu'ils ne disent pas que l'on omet de considérer leur contexte. Voici comment « l'idéal respectable et bon » se situe dans le contexte de l'article cité de *Signes du temps *: « Quand le communisme dénonce les malfaisances du capitalisme -- et n'oubliez pas que le Manifeste communiste a précédé de près d'un demi-siècle *Rerum novarum -- *nous ne pouvons que reconnaître le bien-fondé de ses accusations. Quand les communistes s'en prennent, par exemple, aux brigandages de l'*United Fruit*, en Amérique centrale, comment ne leur donnerions-nous pas raison ? Quoi que vous pensiez du communisme, n'oubliez pas qu'il n'est, après tout, qu'un produit engendré par la perversité du capitalisme. Quand les communistes se fixent pour objectif la réconciliation de l'homme avec l'homme et avec la nature par l'abolition de toutes les contradictions, pourquoi ne pas admettre que cet idéal est respectable et bon ? Quand le communisme suscite chez ses militants assez d'enthousiasme et de renoncement pour qu'ils admettent librement de perdre la sécurité de leur travail, de hauts salaires ou de risquer la prison et la mort, dira-t-on que cette philosophie ne mérite que mépris ? « Et pourtant, tout ce bien n'arrive pas à provoquer notre adhésion, corrompu qu'il est par un vice fondamental. C'est, en deux mots, le refus de toute métaphysique qui entraîne, évidemment, la pire des métaphysiques : celle qui, prenant acte de ce que dans le domaine de l'analyse naturelle la matière paraît antérieure à l'esprit en conclut, sans prendre garde qu'elle escamote plusieurs degrés du savoir, à un matérialisme qui pour être dialectique n'en est pas moins total et sans nuance. De là, par voie de conséquence, la fâcheuse propension à juger les choses non pour ce qu'elles sont, quitte sous leur pression à modifier des théories préconçues, mais à contraindre la réalité à cadrer avec des schémas préétablis. » Comme on le voit, ce qui est énoncé soi-disant « contre » le communisme est encore plus lamentable que ce qui est énoncé « pour ». [^36]:  -- (2). Douglas Hyde : *J'ai été communiste*, préface du P. Jean-Yves Calvez, Éditions du Centurion (Bonne Presse), 1962. Traduction de son livre : *I believed*. [^37]:  -- (1). Page 68. [^38]:  -- (2). Page 84. [^39]:  -- (3). Page 102. [^40]:  -- (4). *Ibid.* [^41]:  -- (5). *Divini Redemptoris* § 57*.* [^42]:  -- (6). *Divini Redemptoris* § 58. [^43]:  -- (1). Nous avons participé nous-même à l'une de ces réunions : voir *Itinéraires*, numéro 62, page 205. [^44]:  -- (1). Discours du 18 février 1950. Texte intégral reproduit dans *Itinéraires*, numéro 71, pages 151 et suiv. [^45]:  -- (1). Voir *Le Monde* du 26 septembre et plus généralement, passim, toute la remarquable collection des articles de M. Henri Fesquet. [^46]:  -- (1). Études de juillet-août 1963, page 4. [^47]:  -- (1). Voir ci-dessus : « *Le Concile et l'opinion publique *». [^48]:  -- (1). Discours du 21 septembre 1963. Traduction française intégrale de ce discours dans la *Documentation catholique* du 6 octobre et dans les *Nouvelles de Chrétienté* du 10 octobre. [^49]:  -- (1). Article de Georges Suffert dans *L'Express* du 6 juin 1963, cité et commenté dans *Itinéraires,* numéro 77, pages 133-136. [^50]:  -- (1). Poirot-Delpech, *Le Monde* du 18 décembre 1963. [^51]:  -- (2). *Nouveau Candide* des 19-26 décembre 1963. [^52]:  -- (3). Déclaration de Rolf Hochhuth au *Monde* du 19 décembre 1963. [^53]:  -- (1). Figaro du 17 décembre 1963. [^54]:  -- (1). *Le Monde*, 18 décembre 1963. [^55]:  -- (1). Notamment le 27 décembre 1963. [^56]:  -- (1). Le texte -- capital -- du P. Schillebeeckx a été reproduit dans *Itinéraires*, numéro 94 de juin 1965, pages 177 à 179. [^57]:  -- (1). Insertion gratuite. Comme on le sait, la revue ITINÉRAIRES n'accepte aucune publicité payante.